J.
L. Austin
Quand dire, c'est faire HOV/ TO DO THINGS WITH }VORDS INTRODUCTION, TRADUCTION ET COMMENTAIRE PAR GILLES LANE PosrFAcE DE FRANçors RÉcRNRrl
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Editions du
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La première édition dc cct ouvrage a paru dans la collection <
L'ordrc philosophique > en 1970
Le titre original I How to do Things with Words, qui signific littéralemcnt : < Comment fairc des choscs avec dcs mots >, n'est pas dépourvu d'humour. Il se réfère ironiquement à la tradition anglo-américaine dcs livrei dc conseils pratiques (du gcnrc : How to make Friends, < Comment se faire des amis >).
EN COUVERTIJRE:
D'après une illustrarion de Clive Collins, tirée dc l'édition anglaise
Titre original i How to do Things wilh Words @ Oxford University Press, pour
l'édirion originale, 1962
rsnN 2-02-012569-2 (lsnN 2-02-002738-0, lre publicarion)
O Éditions du Seuil, pour la version française, 1970
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loi du ll mus 1957 intqdit ls opies ou repoducims destinées à une urilisarion ælleaive, Touæ rrprércnration ou reproduction intégrrlc ou pùticlle, faiæ par quclque p.æêdê que cc $ottr ss le @nsnlmmt de I'auteu ou de æs aymls suse, st illicite et ænsùue ue contrefaçon sanctionnée par lcs aniclæ 425 et suivmrs du Code p&ral.
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Introduction
Présenter l'ceuwe d'un philosophe anglais contemporain n'est pas une tâche très difficile, surtout lorsqu'il s'agit d'un penseur comme J.L. Austin I, Il suffit en effet de laisser le lecteur devant les textes. Ceux-ci, la plupart du temps, sont clairs, et écrits en un langage courant. Lorsqu'un terme ésotérique ou plus ou moins rébarbatif apparaît, il est à peu près toujours inséré dans un contexte immédiat facile à comprendre, ou défini aui moyen de nomb-1e91 glggpler quotidienne. La présentation d'un seul ouvrage l_tt$L{f_gtregg. u ne pose pas, non plus, de problèmes particuliers. Point n'est besoin, par exemple, de synthétiser pour le lecteur la démarche antérieure ou l'évolution du philosophe, ni de le prévenir qu'il ne faut pas trop insister sur la compréhension de telle expression ambiguë, I'auteur devant lui donner un autre sens ou une précision importante,.dgns ure Guvre ultérieure. (Le cas serait différent s'il s'agissait d'un Heidegger, par exemple, ou d'un Merleau-Ponty.,.) Mais c'est justement la netteté (parfois banale) du texte et de la
. JoIu ltngsluw À6trn fut professeùr de Philosophic Moralc à Oxford. Il était une figure bien connue ûon sculemcnt dans les milicux oroniens, _mais aussi à Cambridæ ct dam lcs sociétés savantes d'Angleære, aimi qu'au Êtats-Utris or) il donna de nombrcux cours et confér€nces dans les grandes ""iversités. Il ne publia aucun livrc, mais un certain nombre d'articles. Apràs sa mort, survenue ea féwicr 1960 (âlors qu'il était âgÉ de quarante-huit ans), on réunit tous s€s écrits, c'est-àdirc lcs articles qu'il avait déjà publiés dans des rcvues, ainsi que les notæ de ses coùs et conférences, exc€ption faite de sa traduction des Fondercnts de f uithnétique deFrt;gp, ct dc ses rccensions. Son cuvr€ €st contenue dans ttois volumcs : Philosophlcd Papers (1961), Sne md Sensibilia (1962), ôt notre tcxte, .ÉIoy to Do Things with Words (1962). Selon le témoiSnage du professcur G. J. Wamock, la pensée d'Austin a contribué à stimuler sês contqnporains : (( Parmi les philo, sophes dont les priDcipaux travaur ont été cffcctués dans la demière déoemic, nul n'a cxerpê une plus grandc influcncc, ni plus originalc, quc le professcur J. L. Austin > (Englbh Phllosophy Since lfrO,Iondon, Oxford University Prcss, 1963, p. 147). Pou une bioeraphic courtc ct intér€ssætê d'Austin, voir I'article dc G. J, Warnoch ( L L. Austin ), dans Archives & phllosophra, janvier-mars I 967, p. 5-19. 7
INTRODUCTION
INTRODUCTION
pensée qui pcut donner I'impression d'un manquc tlc profondcur et irriter le lecteur < continental >. Le Français, surtout, éprouvera quclque difliculté à retenir son impatience, et dcmandera bien vite : < Où donc veut-il en venir? S'agit-il d'un texte philosophique t ? I Les Anglais semblent piétiner, s'am avec le langage, par exemple, sans abordcr en fin de cômpte
. Il se peut pourtant quc cette sttitude ûpp0remment tatillonne et réticente provienne en réalité d'unc véritable préoccupation philosophiquc, lqu'eUe intliquc un domrine de rcchcrcltes intportant, €t surtout unc Tnréthode que la philosophie aurlit avxntagË à pratiquer cn certaines i,circonstances (et assez souvcnt, à notre avis). Aussi voudrions-nous consacrer cette introduction à exposer lcs motivatilns immédiates d'Âustin dans son ouvre philosophique (l), les raisons qui I'out poussé à choisir le langage ordinairc comme où7et immédiat de ses rechcrches (tr), et la mëthode qu'il a employée et précoiiiCée(ei qu'on pourra voir à I'auvrc dans le toxte ici présentô) ftr). Nous âjouterons quelques remârques sur le but principal qu'il visait en étudinnt le thèmc dc notre textc (tv), et sur sa cûnception de I'entreprise philosophiquc, en généril.l (v), Nous cÊ$ttyertns, en dernier lieu, de faire rcssortir les points saillants des rnalyses qu'Austin n présentées clans puanrl dire, c'est falre (vt).
'
que nôus verrons. Il avait le sentiment qu'ou élaborait des systèmes ou qu'on essayait de résoudre certains problèmes, sans même savoir de quoi il s'agissait au juste. Il reprochrit âux philosophes, en géné- 'ral, de ne pas avoir examin{puÏir lu richesse tles faits concernant un'' problème avant de lui chercher une solution. Un de ses collègues d'Oxford, le professeur Rylc, a exprimé de façon assez brutale, mais précise, cette insatisfâction earactéristique des penseurs anglais : < Par mcs lecturcs, et par les réunions auxquellcs il nr'a été donné dc participer récemment, je gardc I'intpression que [.,.] bcaucoup pensent qu'il est de leur dcvoir d'élaborcr le plus tôt possible quelque chose qu'on puisse considôrer conme leur systèmc; ct si leur cffort ne va pas uu-delà du torne I, qu'il est pertnis de laisscr de côté tout æ qu'ils pourraient dire dc concrct sur l'ûpplication do leur système dans le détail. [.,.] Si vous voulez un autre exemple, quand quelqu'un vient nous dire qu'il sait tirer la nourriture du sol, ct que nous décou' vrons à I'usage qu'il confond toutes les grlines, êt qu'il nc sâit pes bêcher son carré de jardin, nous le soupçonnons de vouloir tirer au llônc, et dc chercher à se faire une réputation à bou compte, Quoi qu'il sn rûit, et je ne voudrais pô$ etrc trop brutâl, eette tendânee existe et së mmifestË aussi dc notrË côté de la Manche, Nous ffioyons
en etro guéris, même si parfois lo maladc s'habitue à son trsitement... | > Austiu a d'nilleurs reproché ù ses propres collègues (à Ayer et à Warnock, pour nc mentionner que ccs deux.là) cette hâte excessive,
I. LB POINT DE DÉPAR '1. Ies exigences d'Austln
interpréter tr. Il aimait à répétcr quo cettc attitude est unc délormation professionnelle des philosophes et qu'elle est tellement répandue qu'on pourrait se f rr.,, il demander s'il ne s'agit pas plutôt de leur profession même
€t côtte simplification outrde
C'est par une ra.rott's/actfun prisfondc vis-l\-vis dcs élucubrations philosophiques du é, et des écrits des philosophes contemporains du
des
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. la Philosophie aaalytique, Cahien de Royaumont, p, 368' Dorénavant nous .r Cf. ,Senre and Sensibilia, Oxford Paperbacks, Oxford, Ât the Clarendon
nous référerons à cet ouwage on omployant le sigle.R,
r On n'a qu'à lire les exposés ct la substonc€ dcs intetventions qui se déroulèrent à Royaumont sur le thème < la Philosophie analytique rr (publiés durts le volumc /s Philosophle analytlque, Cohicrs cle Royaunront no lV, lditious tle si jamais Minuit, Paris, l96X), pour rcconnaitre combien I'ententÈ y fut diflie ile cntrc lcs chercheurs d'Oxford €t les penseurs franpi:r, Ccux*i elle eut lieu cssayèrent en vlirt, semble-t.il, d'obtpnir do leurs invités d'Oxforil un exposé convaincant de la valeur philowphique dc leurs recherches. Et bien que les chcr"
*
-
cheurs anglais aient éprouvé le sentirnent très net ds n0 pûs satisfaire aux exigcnccs do leurs collèguæ < continenlaux >, ils ne donnèrcnt ccrtcs pas I'impression, de lcur côté, d'avoir été ébranlés dans leurs propres convictions..,
Press, 1964, p. 3. Austin y parlo aussi de quelquet < faits n À demi étudiés, du petit nombrc d'< excmples ll, d'ailleurt peu signlficatifs, A la pago 134, il rroche au
Drofcsseur Wamock de < conclure à partir d'un scul (!) exemple >, Voir au$i ?hllosophteal P4per.r, Oxford, At the Clarendon Press, 1962, p. t26, où Austin næure'lcs philosophe,s de vuæ simplistes et d'analyses faites à la légèro. Nous nous référorons désormais à Sewe and Sanslbilla et à Phtlosoplrlcal Poperu sous les sigles S et P. Cf. P,p.239, et le présênt ouvrâgÉ p. 38. A partir d'ici nous désignerons cct ouwaga sour le siglc If et renvcnotr toujouts commo nous venong dc le faire, indiqu& otrtrc I l, dms la margt' â la pagination origilalo
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ITITRCIDUç'NON
INTNOPUCRON
jucqu'à dirc, avcc Ayer, que I'hittoirc a sufnaamment montré :llait la vanité ct lc danger de toutes les tentatives accompriesjusqu'i.i pour atteindre lm faits (nutremcrt que par la mérhode oônt iisera
les plus a profondcs > nc sauraiçnt comporter de lormulation ou dc solution *laires, il rdpondait qu'il conscntirait à discutcr ccs aflirnrations-là plw lard, lorsqu'on serait tout près d'attcindre Ia clartô sur un quelconque pojnt*, (P, p. 137),
qurition plus loin) (rf, p.34g). En un-mot, Austin Ctait fort agacd iu, qu'on lnncé bçeucoup îrop vite danc Pdchafauaage ac tneuri*i ''est jt, p. 3i0); il (f, p., 126;
;;i
rôtait ionvaincu, poui
sa
Fref, Austin reprochail,à la philosophic un ccrtain .ohrc.urantistnç , p.gpffgtlx, dç9 pqéjugfu*"dus à ce qu'on n'a pas rcchcrclré rous /cs{j aspcets des faits problCmatiques, ct la tcndancc à préscntcr dcs solu- ' tions ou théories qui sirnplifent lutrûgeusemailr lc réel (sann d'ailleurs contribuer, dc façon significativc, ù lc laire comprcndrc)" It fallait donc rcmédier à cctte situation déplorable ct r< rcdécouvrir l nujourd'hui la philosophic, tclle qu'elle avait dtô invcntde < partiellencnt * à Atbèncs,,, (,f, p, 349).
partl que le remps
n'dtait pas encore venu d'aborder dirçcte:mcnt les probrèmes dontia pbilosophie se préomuBe (fi, p, 3?I, lJ0),
ont nourri cette dernièrc conviction, c,cst Hulp*l**5:la qui philosophie
soumisc à un nombrc considérabrc olu.usl0nl.g.u prëjugés (S, p. 4, 5) r. Non sculemcnt ccs préjugés -!e uuisent à la découverto de sorutions adéquatcs, mais ils ruùr*iru position mêmc des problèmes (f, p. l?Si, Il consacré routç uns conlérence (P, p. 2343) à montrcr que si lcs solutions proposdes à problème ne peuvent nous satisfaire, e'est quÇ tls queations 11 Sertlin clles-mêmes provicnncnt d'une çonnaissancc décidémcnt limitcc des faits problémariques. Il estimait que bon nombr' a* quertinni pei" draiontleur.careetère parndoxal sr on rccherchait a'rdoid u;; grandc familiarité avec les.situations où elles m posent, ou pouffaient se poser, Le prdjugé fondamental vient de cc quÊ l;on croit avoir
111.fytiù-ririiimaif
i
2, L'aecordsur
d'll
compris lo sens d'une question, alors qu'elle ne traduit en réarité qu'uno part dtriquée ou simplifiée du problème (,S, p. j), 3, n que rien ne réjouissait Austin davanrage que df ,i"til.
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Éiirio in",
pieds le terrnin fernre. des. prdjugds tenaæs (p, p, j3 ; r{ p, B, Og. Il croyait aussi que la rrrrluction.du nombre dci pieiugeo no'o* qu*J" tions inducc permertrair aux.philosophçs d'entrovoir
iurù
p;;ùil;,
sontdc véritable imporrance (R, p. 350). Aultil\ était rec!9rchg iiunq plus srandc clqrlf. ,t .d0ry3 .la S_s!-la descrip-tion-et la définition dçs faits pçqbrématiqucs, ru, rriq*rs-iu
philosoph!ç-.pglrrait ensuitc sc penitrei ianr cruiodr. dc fairc faussc routo. q[1ldfinitio-n) a.t-il dit, dcvrair occupcr unc p-taçe pr.épqgdé_ q+$9 pqlm; no.s visées : il ne suffit pas dc montrer combien nous sommes malins en faisant rcssortir combien tout est obscur > (p, p. 137). A ceux qui auraient insinué qu'il était naifcle prétendre toui exprimer clairement, à ceux qui auraient soutenu que br questions
t Il s'agit surtout dc I'illusiôn < descriptive
iexte, p. 3.
l0
> dont
il rcra questiorr
..ns notxo
painl de départ
Commç tant d'$utrçs pçn,seur$ (comme Dçsçartes ou I'Iussçrl, prr exemple), Austin fut hantd par I'exigence pgl$-dg"-{ôjgf!,y,ilir!C.. Mais il reconnaissait la fdcondité du point ele rlépart non pils, surtout, dans le fait qu'il psrmettrait de pnrvenir à une certitude apodictiquc : plutôt dans son pouvoir de çusciter ct de milintenir un o,r,renlûncnf ananime parmi les cherchçurs (lt, p, 334). ll avait pour ainsi dirc plus d'égards pour un a cogitamus D quc pour le < cogito e lassique, (Nous vcrron; plus loin qu'il s'agissait môme d'un accord avcc lcs génÉrations du pals6,,.) Austin se méûait, cxpéricnce faite, dee rt rôvcries > uoli.
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tnireç où l'on < ossaye ses forcer, seul, à résdudre ler dnigmcs dc I'univcrs > (/{, p, 335), il fallait dcnc trouvcr tn donné, un << datum > prénlable, eur lequcl lç consçntcment puisse $'établir. On obticndrait cnsuito une confrtnalizn de I'assçntimsnt donné lorsquc d'aaffer chercheurl, ayant répété les expdriences, $craicnt arrivés à des résultats iclentiques ou analogucs (1t, p. 348-349). Austin faisait rcmarquer à ce propos : ( c'est à cela qu'on a toujours reconnu la démarchc de la pensée scientifique, même appliquée à un domaine limité > (À, p. 3a9). Il est intéressant de noter aussi qulAlstil, en accordant une si grande importance à I'entente entre les-ôheicheurs, _*iOÉgaiLè trouver des domaines de recherche qui, bien quc reliés à-quelque grand pro- . blème classique, n'aient pas été explicitement fouillés par les pcnscu.rs du é. C'est ainii qu'il se réjouissait de pouvoir étudier les excuses,
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i, rili .:.;:!
INTRODUCTTON INTRODUCTION
(que fon présente à propos d,un comportement regrettable), sans avoir à se rappeler Kant, Aristote, ou pliton. car Auitin étaif d'avis que seuls de tels sujets permettent aux chercheurs de faire eux-mêmes des découvertes, ensemble, que parvenir. ainsi à. un accord est plus facile, et qu'on reconnaît à partir de là comment on peut réussir à s'entendre (P, p. l3l). Nous all ons voir m ain tenun{pgf gg,gl*lieir_fl â"ffi_gevoi r attaquer les problèmes philosop\iques pôur rènole Ë"$iuËË'Tre.i.u* tement unanime. "oii"o-
linguistique > la plus grande révolution de I'histoire de la philos,phie (P, p. 222; fI, p. 3). Mais il avait des raisons particulières de s'intéresser surtout au langage ordinaire, et une façon spéciale de I'aborder. Pour Austin,
le
,!!q?!sssjfffiJ lgggagg"grf,j$ire o o _.llmggt_r_fffi*l'
,lrécisÉm_e_na- parç=ç.@"elle,l-.-a-4[-_et$BgJrg.s*Êt c-ourantsù*q.uç-lçr.çxBj"qs-
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II.
.o rff.i,
qu'on ploles Jl .'on serait porté oorté à le croire. mots courants emolovés crorre. Même les nts sont sont emplo{é_d em gl#g{*go]!*ants de façon plus nb1ile,, et pour effectuer: des distinctrors beaucoup pfti! nombreuses]ffiG-philosophes ne I'ont pensé (S, p. 3, 63). Et ô'est
LE LANGÂGE ORDINAIRE
Austin était convaincu que la meilleure façon d'ab,order les faits, réel, étair de se laisser euiaelplilg_ _le -Ë-iilivièivemenr,bienstf Wgr_2iqj@àffiî#'d :ï.îçrrTatfi_pËtôt_quslç*réçi.ùs" laisse pas arteindre dlrec_lemenÇ *âir [rt.*ent par t,intermean|iià du.langage (R' p.3a9). Bien qu'il âit exprimé t"r réti".n..s au sujet
sions du langage I o-r_-d_!.ggjf.ç.,>f"9"qn*t p;.écizuses _: elles incarnent toutes les distinctions que les hommes ont 1ugé bon de faire, au cours des siècles, ainsi que les différents liens qu'ils ont été amenés à établir, par une expérience vécue, de génération en génération. Ces distinctions et rapports, d'après Austin, sont certes susceptibles de déer en nombre, en délicatesse et en valeur (puisqu'ils ont subi l'épreuve
la << survivance des plus forts > fthe survival of the que nous pourrions concevoir, par un bel après-midi, tout ce fittestl), bien assis dans nos fauteuils... (P, p. 130; R, p. 351, 335). prolongée de
Il s'agit donc de nous rappeler, en étudiant une question, ( ce que nous dirions en de telles circonstances >> fwhat we should say whenl; et pourquoi, et en quel sens (P, p. 129).
des dëiiï"mouvements angio-saxons qui s;intéressaient déjà au langage
(celui qui met l'accent sur la << vérification >>, et Çelui qui etudiJ les emplois du langage )t *, il reconnaissait dans cette
<<
--_
|
Pour donner une idée assez cxacte de ces deux mouvements, il faudrait refaire
l'histoire. de_la.philolophie- anglaise ae notre iiecle, en euvres de Bradley, Russell, Wittgenstein, Ayer, Ryle
,h;il;;;;;;;';"_ -ô_up,
f"t a ".iiei O"
Goodman, Quine).
t:l gu.e la théorie de la vérification en général, essaye L^Yl:-.f:\l"li I de re.tormuter les propositiglq d,ug lqnsaee soit narurel, ,oit u.tïnCËif..i""ti >>,
11
nque)l en- tennqs non plus d'objets (qui seraient des < comprex.s ir qu" n*rèir a appelés des < constructions logiquei >>),.mais aé I'on est phénoménisie, posiiiuist", ou emp'rste, on considère toures res proposltlons qul ne peuvent être ainsi réduites et véiifiees'comme négligeables,
a"iiaiï'iïi*r*i[rï"i"rort
:!:t!!::.li
ou comme I'expression de simples non-sens. si I'on demiurà,-;;;;r;i'i;;""la réduction devdaud;ettrù" Ëoi,i.tî"âiirJpJ, a peu la nature/ondamentare de la réarité (qùi serait,four;ididir";;-ii"ô;riiô* ment et eDtitativement atomique >). . Qgqot au mouvement.qui interrôge les < emprois du langage )), mouvement *.pité. pr le wiusenstetur des rnveslisations iiitoiopniqu"";îË; l'imprecision du langage conme un caiactère ;"s.;it;ÉËi;;hii"i'l "à"-rioËià'ïiu, i.",^iriiii"l*edier par la formalisation et r'émondige d'expràsiÀns qui aeioèùeniàËiàË,ii"rt et apparaisseot gg dJptus éti ploî ootob."uto rj, o,al-rïiii"'..o fes. .ngn-sens trait important, qui lui est essentiel. Ii s'agit à" ,o^priiâiil;'"Ë;;iffi'O"" lvste. < métaph-vsique >,
12
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qui constituent notre expérience, et que nous aurions trop tendance, {.-.
sans lui, à ne pas
(
voir
>>
(R, p. 333)*. En une autre occasion,
il note i
nous n'examinons pas seulement les mots [...] mais aussi les I réalités dont nous parlons : grâce à une conscience aiguisée des mots, / nous rendons plus perspicace notre perception [...] des phénomènes >f que
(P, p. 130). importent les méthodes, au fqnd), c'est-à-dire d'en appréhender la fonction. Toute l'attention doit porter sv l'emploi ou la fonction des concepts problématiques. Une langue artificielle ou idéale n'est plus nécessaire; car si nous parvenons à comprendre la fonction d'une expression, elle cesse par Ie fait mênne d'être probl6, matique. 11 semble qu'Austin se rapproche de ce dernier mouvement; et s'il s'en distingue, c'est surtout en ce qui conc€rne sa visée principale et ses méthodes. C'€6t nous qui soulignons uo ûexte d'ailleurs parlé.
r
t3
INTRODUCTION
Austin part, en tout
casr$J;@rt"u,on
peut se ter au lancafg= qu;ù a affiËËâ Ipnterroger : _<< On découvre rapidement, sitôt qu,on applique son esprit à ces choses, ou du moins on arrive très vite à fo.rrr-uleri,hypothèse, que rien u'arrive sans raison; que si deux tournures exiiient dans la langue, on découvrira querque chose dans la situation où nous sommes appelés à employer I'une ou I'autre, qui explique notre choix. Il peut arriver que le choix paraisse arbitraire lmais tres souvent, nous marquons une nette préférence pour une tournure, plutôt que I'autre. Et nous nous fondons sur l'hypothèse que, si cette préferùce existe, il doit y avoir quelque chose dans la situation $obàe environnante, qui expliquerait, si on la découvrait, pourquoi dans tel cas nous préférons I'une, et dans tel autre cas nous préférons la seconde. [...] C_est-à1![e_gglq-l.epcase na[q ftJa_irg là. comrplexité de Ia vià > (.R, p. 333). Nous verrons plus loin, lorsqu'il ,'ugiru ae la methàde
idt
l?Ilgsire,twist*rgdffiditxt
d'Austin, qu'il ne se ûe pas aveuglément au langagcordinaire : celui-ci,s
n'est pas le dernier mot il peut toujours, en principe, être amélioré,$ ou'remplacé par un langage plus formel et savant mais il Jemeure bienle premier mot... (P, p. 133). Iæ langage constitue ainsi l'objet immédiat des recherches d'Austin eJ, à vrai dire, à peu près le seul. En cela, sa démarche se rapproche de celle de bon nombre de chercheurs français d'aujourd'hui. U y u pourtant cette différence notable : le philosopbc-+-nglêis s' tirer de sa lapgue_ !qqt*.Cf.9llçUg*_l_trpn[-d ; que les recherches frânËseJ les ptuilG"t;s o;'iè"i vouloir dégager que le contenu inconscient du langage. On peut penser qu'Austin .-, aurait manifesté bien peu d'intérêt pour les structures > et /,7 < modèles >> inconscients, qu'il se serait même méûé des résultats des { recherches structuralistes, par exemple, ne voyant pas comment nous, les chercheurs d'aujourd'hui, pourrions reconnaîtrè zas rencontres du réel dans un langage qui, au fond, n'est pas Ie nôtre (ælut du nous conscient). Nous I'avons vu, en effet, c'est le langage ordinaire qui permettait à Austin d'enrichir soz expérience du réel de celles des générations précédentes, et d'arriver uo" ,nturte avec ses propres collègues (sans qu'ils aient à se ûer à ses recherches).
-
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III.
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r-a uÉrnoon D'ÀusrIN
Nous venons de noter qu'Austin êyglt-UnggÉlbgge (ou plutôt un ggJ&n) pour attein-dre les faits, les$fi-énomènes, ou notre expérience lil'e*la réalité : il attaquait le réel par le biais du langage ordinaire. Aussi préférait-il appeler cette façon de philosopher non pas une analyse du langage, tout simplement, mais une < phéq_ornj*Mg4$ggit: tiqup , (P, p. 130), c'est-à-dire une philosofhie quitrâiiC ôt làïgage %Ïilile d'étudier les phénomènes. Austin n'aime pas non plus le mot méthode > pour désigner la façon dont il s'y prend quand il interroge le langage ordinaire : il préfère de beaucoup le termè de technique, ou aIuS piécisément de techniques, au pluriel (R, p. 348). Nous qui, pratiessaierons maintenant de voir quelles sont ces techniques - << apprend quées longuement, fi.nissent par.<Sogslltggr*gn"eg >> qu'on peu à peu, de proche en prochg à appliquer non seulement aux problèmes traditionnels de la philosophie, mais au domaine jusqu'à présent inexploré qui se situe aux frontières de la philosophie... r> <<
(.R,
p. 332).
de cetg{__qqflL$g.t-.-9st qu'il doit être
lffies
pratiqué avié prudence, Iènteur, et très minutieusement. Austin insiste constamment sur ce souci du détail, et met en garde contre les généralisations hâtives qui ont fait un < gâchis > de I'objet de la philosophie (P,p.42,123, l2g).Il faut savoir aitendre, et commeno. pàr *.u.ilUil toutes les données d'un problème, même les-plus apparôiiifrènt insi-'
gnitantes
(I/, p.
122).
l*s W6@g)
dans lesquelles nous
employons le langage méritent surtout une attention particulière (P, p.129; "F/, p. 138, 100). Austin a eu ceci à dire, à propos d'Ayer, par exemple (à qui il reprochait d'avoir laissé de côté de nombreux emplois du terme < réel >) : << Je voudrais absolument faire remarquer quelle erreur funeste I'on commet toujours lorsqu'on aborde l'explication de I'emploi d'un mot en n'ayant considéré sérieusement qu'une partie minime des contextes où on I'emploie de fait > (S, p. 83). Ailleurs, il incitera les autres ù rompre avec la tradition pou"r,çplsj toute la situation où urr ce,rtaiq acte de discours,
*ôâuif ûr, p.52).
'
Jusqu'ici, I'art pratiqué par Austin semble se ramener
T4
,
15
à, observer,
INTRODUCTION
INTRODUCTION
tout simplement, les distinctions du rangage, le détail des circons-
reste à noter que le philosophe anglais avait une confiance inébranlable
ne s'agit pourtant pas d'une simple observation de ce qui se présenterait tout seul. Il faut même se méfier du langage ordinaire, Jt des conceptions qu,il nous impose des diverses situations où il entre en jeu : iin'a pu, t*lorr* échappé, en effet, auxpréjugés séculaires, et il véhicule pu.fol, I,eireu., la superstition ou la pure fantaisie (p, p. 133, 150). -C'est dire qu,il faudra souvent de brutarité vis-à-vis de ce rangage, re torturer, le déjouer au besoin (p,p.134). L'un des moyens que préconise- âuqli_n pour éviter les embtches
en saB5.o'-e#<Æé,#Ée >.
tances, la totalité de chacune des situations.
Il
du langage ordinaire consiste à.yVElç)^les situati_ons nouvelles, j_"!41qt_a4freûc!_es tour cas àe îËlË ;rl;îàîons-fiffi" moment donné. Qu'on ne craigne pas ra variété : situations très étranges fidiosyncraticf, ou d'une uanaute exûême. L'essentiel est de
il;
Il
allait jusqu'à affirmer, avec véhémence,
qu'elle ^{tat-la iiniiè-: <<... toute la question est de savoir si nous adnetje pense peut-être à une tons qu\ne autre méthode philosophique
- en ce moment sur le plus particulièrement, qui est fort en vogue pourrait s'attaquer aux continent - pourrait être la bonne. Qu'elle problèmes que nous estimons insolubles et les pourfendre d'un seul coup. Ma réponse est non, deux fois non. D'abord, je ne pense pas je n'ai pas dit qu'il ne viendra jamais que le temps soit venu d'aborder des problèmes du genre que vous évoquiez. Et ensuite, je crois encore moins qu'aucune des méthodes philosophiques actuellcmeut en faveur, ait la moindre chance de succès en s'y frottant )) (R, p. 375).
Un dernier point mérite peut-être d'être mentionné : il explique
nous,demander <<.ce que nous dirions dans ce,s c_as >>. Austin est persuadé que si I'on ôïËË;;i;acôorder uu"" t.rluir., sur les expériences suscitées par une telè démarche. Sinon, même le désaccord pourra devenir éclairant (p, p. r32). Mais tu conartion pà,rr que cette technique soit vraiment eftcace, c'est que I'on possèdJune
au moins en partie - pourquoi la tâche s'est assignée Austin -n'aboutit pas forcément à un interminable bricolage. Austin est d'avis
(P, p. l3a).
exigence impossible
i]ffiilsr,
imagination vile, un esprit aventureux, et certains schèmes d,action
L'imporrance donnée à cette imagination créatrice de nouvelles . situations rappelle sans doute les
d'un Husserl. Dans les deux cas, il s'agit de forcer re réel à aiparaître, de susciter les phénomènes qui permettraient de bien por"i (ou *é-. de résoudre) les problèmes qui nous préoccupent lè plus.'peut-être Austin n'est-il pas allé très loin dans cette direction, mais on peut se
demander. si son << art ), parce qu'il n'exige pas de mettre quoi^que ce soit << entre parenthèses > (si ce n'est les solutions prématurees), n'est
pas plus apte que celui de bon nombre de phénoàénologues à fuir" émerger les expériences les plus significativès pour la soùtion éventuelle des < grands problèmes philosophiques n, c'est-à-dire humains.
La question << Que dirions-nous quand... r>, posée sans restrictions et dans les domaines les plus problématiques, a peut-être une chance de nous faire prendre conscience, un jouç de ce que nozs cherchons dans le réel, c'est-à-dire dans notre ( situation totale > ... Quoi qu'il en soit de cette comparaison entre la < phénoménologie >> d'Austin et celle (ou celles) des penseurs << contiientaux >>, il ious l6
que
I
lsmplir? Austin, pourtant, ne voit rien de cette condition : même s'il existait dix mille emplois dans décourageant du langage en un certain cas, avec le temps la tâche ne serait pas iréalisable. A I'encontre de Wittgenstein * (mais comme M. Lévi-
**, au sujet
des structures de I'inconscient), il est persuadé en effet que les divers emplois du langage ne sont pas infinis.Il a déjà remarqué, un peu malicieusement, que les philosophes sont trop enclins à parler d'infini dès qu'ils ont découvert, par exemple, jusqu'à dtx-sept expressions... (P, p. 221). De toute façon, même si le temps n'était pas encore venu d'aborder les < grands problèmes >>, faute d'avoir toutes les données en main, Austin est au moins heureux des avantages < négatifs > des recherches < compilatrices >r : elles aident à récupérer de nombreux aspects du réel que la philosophie a négligés, Strauss
' Cf. Investigations philosophrqres, Gallimard, Paris, 1961, p. 125. (I-e tiue complet de cette édition est Traclatus logico-philosoplrrcrs suivi de Investigations philosophiques,) Cï. Anthropologie structurale, Plon, Paris, 1963, p. 30.
tt
t7
INTRODUCTION
INTRODUCTION
et préviennent beaucoup d,erreurs, ,en rendant les philosophes plus conscients de la < complexité de la vie, de la vérité, et a"r'"norË, ,,
(P, p.239).
tv. te vlsÉr pRlNcrpALE DE
<(
euAND DIRE, c,Esr FAIRE
))
rr
texte que nous avons traduit diffère de façon assez notable des aulres écrits, cours,,ou conférences d'Austin. Le langage y *-"o effet étudié plus spécialement pour lui_même,et non pas d;abord pour qu'il manifeste certains aspects d'une autre réalité, ou certâines données obscures d'un problème classique. sans douie gustin a-i-rt ,voulu rechercher Ia nature du langage, de l, << acte du discàurs > [the << speech act >>l et découvrir tout à-que nous pouvons accomprir par la parole; et cela,.en vue de pouvoii appliquàr ,.r rerutiutr-,'uo jour, aux problèmes phflosophiquès. Il restË què te moyen immgaiat (le langage) est devenu icir';bjei immédiat de-ses rechJr.tr.r; ,i-J r" langage nous apprend ici quelque chose sur une autre réalité que luimême,. celle-ci ne peut être que nous_mêmeJ, €n tant que personnes qui parlent. Austin s'est convaincu que Ia philosophie s'égarait en décidant de ne. considérer que les afirmations [statements] dont on p".rtl ài." qu'elles sont vraies ou fausses. Il jugeait que res critères'ae vgrite nouvellement adoptés réduisaient dgiiagment trop re nornbre des afrrmations pertinentes, et reléguaient trop facileÀent u' dornaio"
du. non-sens ou des pseudo-affi rmations, dei énonciat ions t t e ran cesl. qui,'bien qu'elles ne soient pas destinées à être des << lu affirmatio",, v1{es o1 fausses, peuvent néanmoins faire l,objet a"
,"lfr.r"t",
philosophiques, dont les résultats contribueraient sairs a"rt" a âi-rG, certaines difficultés traditionnelles (Il, p. 3). Comm"
i", q)i*
t*jorr.r,
chercheurs n'avaient pas examiné urt"r-utt"otivement ,o"r'i" par,re lorsqu'on produit une énoribiat ion {utterancel quelconqu", Jun, telles citconstances. ræs propres analyses d'Austin iont ,.r.o.tii u,,
: dès qu'on veut distinguer avec soin les affrmations authentiques > (celles qu'on juge vraies ou fausses) de ces uurr", énonciatiôns qui ne sont pas.ieipression d'un non-senr, *ui, l.ri > quelque chose sans être vraies ou fausses L moins ceci <<
lrili iliir rilii lli:lr. ir,l
1-font
d'être
là
demain )),
par
exemple),
C,.
i. pro*îi, à la
alors on se heurte
difficulté de ne pouvoir formuler de critères qui permettent de réduire toutes les énonciations en deux classes bien distinctes. En d'autres termes, c'est la notion de vérité qui est soumise à l'épreuve. Sans doute y a-t-il des énonciations qui sont vraies ou fausses au sens traditionnel de ces termes. Mais Austin estime que la philosophie a eu tort d'accorder une situation privilégiée à ces énon< démythologiser r> l4 uçurJllruluË,rùçr 2, la uuLluu notion en ùuururç somme 1\ ciations (P, ulallulls 237). I ). lI Il veut vçuL çtl \r, p. P. L)
traditionnelle de I'affirm ation fstatementf, en faisant ressortir tout ce qu'il y aurait à considérer ençore avant de parler de sa vérité ou de sa fausseté. Il reconnaît bien une place spéciale à I'affirmation classique, conçue dans toute sa complexité; mais sans s'arrêter à déterminer très précisément ce qui lui confère cette situation unique : le temps n'est pas encore venu; il reste encore trop de défrichage à
I
I
i
i t
I
faire...
Ë
I
C'est en çg4p-q{4+Ll'énonciation ,constative (c'est-à-dire l] lfgffi"t.: , .i la plupart du temps comme une < des- I L >> -pêtiqlr classique, conçue cription >> vraie ou fausse des faits) avec l'énonciation pedor-mative .t ..'f , / I [cldi'angl. : performative] (c'est-à-dire celle qui nous permet défaire t è" i quelque chosg per l?-pa.{gle elle-même), qu'Austin a été conduit à consiT i àeiei toitie énonriuiiôo digne de ce noin (c'est-à-dire destinée à. commtti 'lniquer par exemple, les jurons-réflexes) comme : - ce qui exclurait, étant d'abord et avant toutun acle-.dg,.8i..sççurs produit dans la situation totale où se trouvent les interlocuteul-s(I/- p. l47). S'il est bien vrai que les énonciations sont des acles, a.prs elles doivent, en tant que tels, visèiâ âccômplir queiiiue êhose. Âustin, donc, décide de considérer certâini â;Ëéaidë'l'âiïe lùi-même,'en espérant y reconnaître l'élément (sans doute abstrait) qui lui appartiendrait spécifiquement, c'est-à-dire en tant qu'aclg le dpcoyrs. Une fois cet-flégg4liiole--æ' (Austin I'appellera la.ta|liùi à;tliocitïon fillocutionary ffrô:e:! de la t, parole), il-slaeit -d,q_d,isççn1çt-,t-o-u-t",c-ç..qu:il pert acc*ompljr, 9!-.tanlqu'il I duateur 4,ç,ÆS-,,I9" ç e st j!gn._q sle. Cog1lç -pg4i9 '1cb:p*9 _ç_e! ".IS (dont
il se défend de TP, b. 134), êqStis_ç"lrqi9iÇHg":k$ff)enérales revendiquer le caractère étanche) lui per4etta4! d'o-r{onner provi,.Foirement tous les verbes contenirs dans le dictionnaire, selon la '{valeur d'illocution qu'ils posséderaient. Cette étude, encore inachevée '(et dont Austin ne présente que certains résultats dans les conférenceS
que nous aurons sous les yeux), lui aura cependant permis de considérer les affirmations classiques (vraies ou fausses) comme des < actes
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18
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INTRODUCTION
du discours
parmi d'aulres, c,est-à-dire des actes qui possèdent >> et qui << font >> par conséquent quelque chose (,F/, p. laQ. Austin voulait donc d'abord montrer qu'il importe de considérer les affirmations (ainsi que leur < vérité , ou n fausseté >) dans un contexte plus général, dans une problématique où I'on tiendrait compte _ ___-r,_du fait qu'elles ,vur sont ùurrvul surtout seJ des uctvè_, actes, çL et uçs des AUIeS actes AU du OfSCOUrS di ayant forcément une < valeur d'illocution >>. Aussi a_t-il ou remârr€marcr.r.rsi
une
<<
>>
valeur d'illocution
Le philosophe anglais n'a pas voulu étudier explicitement la nature même de cette ( valeur d.'illo*cution >>; il s,est contenté de noter à
qud,i'aôt.ti o slt.gulsl t ;,; il;td;; "*;;;nn= Tliïq:ïlises tandrs que lès autres éléments < abstrâits > de I'acte oe ois-
' !EÆ!,
cours ne le sont pas (il s'agit, comme nous le verrons, des actes de locution et de perlocution). ll n'a pas entrepris, non plus, une discussion sérieuse de I'agir personner qui s'exprime dans ie < faire > de la parole, mais a noté simplement qu'il ne pouvait être réduit à un << acte physiqae minimum > (H, p. 106, I I l, I l2), ni à une entité < intérieure, spirituelle et fictive >> que la parole ne ferait que manifester (H, p.9, 10, 13). Fidèle à sa méthode, il considérait que la problé_ matique n'était pas encore assez mûre pour qu'on puisse tenter de résoudre les questions qu'elle suggère déjà. Il a même insisté sur le fait que sa distinction entre trois élémenis abstraits de I'acte de discours n'était peut-être pas fondée (H, p. l4g), que sa classification des << valeurs d'illocurion >> était provisoire (H, f. fSfy, qu'il avait pré_ seq!é-rnr.prograry-me plutô.!. que le_ 1ésultat agnnitif àe .echerËhes
exhaustives
(I/, p.
163).
Aussi les conférences d'Austin risquent-elles de laisser le lecteur français sur sa faim, pçut-être même àe provoquer un certain senti_ ment d'agacement vis-à-vis d'analyses sans doute pénétrantes, mais qui n'aboutissent encore à rien de particulièremenf concluant. tout dépend, au fond, de ce qu'on attend de la philosophie...
20
v.
LA PHILOSOPI{E, SELON ÀUSTIN
Nous avons déjà vu pourquoi Austin procédait si lentement et si méticuleusement dans ses recherches : on ne saurait, dès lors, être étonné de ce qu'un ouvrage comme Quand dire, c'est fafre, n'apporte pas de solutions satisfaisantes aux problèmes qu'il a soulevés. Mais si Austin a renoncé à la joie de penser qu'il parviendrait sous peu à des solutions aux grands problèmes philosophiques >, il n'a pas pour autant consacré sa vie au déploiement d'une ascèse à peu près constante. Pour lui, le travail d'analyse minutieuse était un plaisir : ll s'amttsait (il parle souvent de fun H, p. 24, 163; P, p. 123; R, p. 372). On a même l'impression, parfois, que la valeur la plus importante qu'il reconnaît à la philosophie est de procurer souvent ce fun... Mais, au fait, s'agit-il de philosophie? Nous n'avons pâs f intention de présenter ici une quelconque théorie sur la nature de la philosophie, à laquelle nous comparerions
(
-
ensuite la notion qu'en avait Austin. Nous nous contenterons de mettre le lecteur au courant de ce qu'a dit le chercheur anglais sur ce sujet, en différentes occasions, laissant chacun décider s'il parlait effectivement de philosophie, ou de ce qu'on est convenu d'appeler une < science positive >, distincte de la philosophie. < La philosophie sans cesse déborde ses frontières et va chez les voisins. Je crois que la seule façon de définir l'objet dc-la"pÀi]g;gphie, c'est de dire qu]g_l]9.-s-]_o*c"çgpç- 4g tous les rés!{uq, de tpp.s lgs- p{-9blèmes qui restent encore iqqglgbte-s, après que
l'on a'essayé toute-s
lèi méth-odes èprouvées ailleurs, [...] Dès que I'on trouve une méthode respectable et sûre pour traiter une partie de ces problèmes résiduels, aussitôt une science nouvelle se forme, qui tend à se détacher de la philosophie au fur et à mesure qu'elle définit mieux son objet et qu'elle affirme son autorité. Alors on la baptise : mathématiques la séparation est plus le divorce date de longtemps; ou physique la coupure est récente; ou psychologie, ou logique mathématique grammaire qui peut-être demain ou sait encore fraîche; ou même plus philosophie en qu'ainsi, débordera de la linguistique? Je crois plus loin de son lit initial ) (R, p. 292-293; cf. aussi P, p. 180). Pour ce qui est de savoir si I'entreprise d'Austin est une démarche
2t
INTRODU TION
INTRODUCTION
philosophique ou une linguistique scientifique, Austin affirmait à Jean
wahl qu' jluAg-!9iqpc.e,
pas
fgtre par -s9_d-_eg?g9-t -gl-gki eneJobgy r-rn grynd nombre de chôsei dont la phitosophi! J'o""up" _aujoiid'hui. [...] Où est la fronrière? Y en à-t-il-unè-îuelqùê partt [.-f Il n'y a pas de frontière. k champ est libre pour qui 'reut y aller. La place est au premier occupant. Bonne chance au premier qui du -l,4qgagg
<
ment pa;ler philosophique, ils répondent que si le travail en vaut la peine, cette question a très peu d'importance > (R, p. 20). ( Quant à Austin, nous avons vu que, pour lui, ce travail en vaut que par-le promouvoir à qu'il réussit la peine ), tant par I'unanimité problédes au sein qu'il introduit plaisir qu'il procure et la clarté
trouvera quelque chose >> (R, p. 293). Il semble bien que, pour Austin, I'on fasse de la phitosophle lorsqu'on se débat avec des problèmes apparemment insolubles; mais quand on tombe sur des techniques qui permettent d'introduire dans une problématique une certaine clarté et un peu plus d.'ordre, et surtout lorsqu'on réussit à faire eclore un assentiment unanime, alors on fait dela science. Les citations suivantes corroborent I'impression qui se dégage des textes déjà cités : ( ...pggl.!t_o:lS-ph-ilq$_opbie..a. lgyj_ours 9!é lg ,nom qu'on donne au fourre-tou! $gns lequel on range provisoirement tous les problèmes qui traînent, et pour lesquels personne n'a encore trouvé une utilisation respectable, une méthode de traitement qui rencontre un assentiment unanime > (R, p. 355); et,surtout : << N'est-il pas possible que le siècle prochain voie naître, par les efforts conjugués des philosophes, des grammairiens, et de nombreux autres chercheurs intéressés au langage, une véritable du langage qui en recouvre tous les problèmes? Si cela arri^l_g1!nce_ vait, nous nous serions débarrassés encore une fois d'une autre partie de.la philosophie (mais il en restera encore bien d'autres), de la seule façon dont nous pouvons nous débarrasser de la philosophie, à savoir : en la,repoussant vers le haut [by kicking it upstairsf > (p, p. 1g0).
matiques obscures qu'on appelle philosophiques. Mais on peut se demander si le chercheur anglais fut toujours animé par I'intention sérieuse d'en venir plus tard à aborder les << grands problèmes >, ou s'il n,a pas décidé en cours dc route de s'établir définitivement dans la scienie linguistique. On a souvent I'impression qu'il éprouva telle'Tmî â" ifàiiit i lnstituer une scie-Lce*dql4ggage, que cette seule préoccupation suffit, en fin de oôiiipte, pour.épuiser toutes les motivations de ses recherches... C'est peut-être parce qu'il était ainsi à l'encontre d'un grand nombre comblé par ses analyses qu'il a pu résister à la tentation de se lancer de penséurs < continenfaux ) < trop vite ou trop tôt >> dans une tentative pour résoudre les < grands probièmes >. Mais la question serait sans doute de savoir si certains
doivent, ou même peuvent,attendre qu'untravail long et exhaustif ait été accompli, avant qu'ils ne soient abordés de plein front, avoc toutes nos ressources, évidemment, mais toutes nos ressources actuelles. Peut-être y a-t-il des limites au temps que nous devrions consacrer à nous préparer à vivre.
Quoi qu'il en soit de cette dernière question, on ne sera pas surpriJ de n" pas trouver dans Quand dire, c'est faire :une profusion àe résultats ou de considérations qu'un penseur < continental
i---Èn' d'autres termes, les richerches d'Austin ctnstituJnt
i
une démarche scientifque(tant par leur objet immédiatque par la méthode
>>
de prime abord, philosophiques. appellerait, Èst-ce dire que le texte n'offre que peu d'intérêt philosophique? Non. Nous serions tenté de répondre : au contraire! A notre avis, en effet, ces conférences offrqnt à la réfle,xion pbrl-qjggblSue (qu'Austin a peut-être eu tort de remettre e ptus iâia, indéfiniment) dSgglgg-rcs:*
employée); mais elles peuvent être considérées comme une entre-
, prise philosophique dans la mesure où elles demeurent animées par . I'intention de voir leurs résultats servir un jour à mieux poser (et peut-
I
être ,à résoudre) certains problèmes strictement philoiophiques-. En un sens, il y aurait seulement un objet philosophique, sans qu'il existe
de métbode ni de résultats philosophiques, alors qu'une
4pgl-i9-: -qq3yg9up ptul- c-t9.!119q .:!" petliryeryt-e: què Cû!èi ôù,'ôii trdii"è, dôore ti"qp- lettié+t dàni certàines élucubra(Nous p€nsons' par lioqs abstrailes dés chercheurs << continentaux >. << le langage lui: C'est celles-ci à'xèmple, à des expressions comme (.Serz) >; ( prêter à l'Être I'oreille faut mêmô q.ui nous parle >; Il >r; Non etc' a nous < langage >; Le << Le discours de I'inconscient
.tjons
science
possède en elle-même son objet propre, sa méthode, et ses résultats. j"tâ science est ce sur quoi I'ons'entend, la philosophie ce sur quoi I'on
parvient pas à s'entendre... Comme le faisait remarquer le proi'_ne --fesseur J. O. Urmson, l'école oxonienne d'aujourd'hui o" s'urrêt.,
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ses recherches analytiques : ta question si souvent posée, de savoirsi ce travail est à propre-
à déterminer la nature propre de
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p1!9i-1,."-l g-!--4s": "
-
23
-
INTRODUCTION
INTRODUCTION
que ces expressions n'aient aucun sens; mais leurs
l'énonciation performative, si I'on veut éviter de multiplier les diffi-
auteurs,
emportés sans doute par cet élan impatienr qui exaspéruit ,,l.rriii, né€ligent trop souvent de les insérer dans un contexte où il serait fait appel, par de nombreux exemples, clairement exposés _ ce qui ne veut pas dire < mathématiquement > exposés des expérienËes - àpuisse vécues par I'auteur et Ie lecteur, de maniére qu,on iu moins s'entendre, et peut-etre même comprendre un peu mieux en quoi consiste parler...) Nous nous permettrons d'indiquer, dans nos notes, certaines ques_ tions soulevées par Austin (sans qu'il leur attache une grande iô;;dans son entreprise actuelle) et qui, grâce au ,irh" ?o*l où elles sont iwérées, pourraient renouverer avantageusement "ori"*t" ra -à pr-oblématique du langage, et suggérer des investigatïons aptes éclairer les problèmes philosophiques humains.
cultés inutiles, en philosophie, comme ont
QUAND DIRB, C'EST FAIRB >
pRrNclpAtrx nÉsur,urs DEs A:.iÂrysns
r î, .,i '.'! t,. p ll ''r''" Première conférence " l i; z; or,
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tant, plus loin, dans l'élaboration d'une nouvelle conception de la vérité.)
r
Austin part du fait que I'afirmation f,statementl crassique, c'est-àdire la proposition fsentencef'considéree comme devant toujours êJre vr1i9 ou fausse, pose alD( philosophes, depuis quelque t"tpr, des problèmes nouveaux et irritants. certains penseurs en sont venus à croire que beaucoup d'affirmations n'en sont pas de véritables, nais seraient plutôt I'expression de quelque non_sens. Austin se réjouit de cette découverte, due à des analyies sérieuses; mais il est frappé par le fait que beaucoup de ces < pseudo-affirmations >> ne sont peut-être par des pseudo-afrrmations, pour la simple raison qu'elles n'auraient jamais été destinées à êtie des ffiràttonr, au sens traditionnel du terme (c'est-à-dire des énonciitions dont la seule caraotéristique serait d'être vraies ou fausses). c'est ce qu'il veut établir solidement dans sa première conférence, en donnant des exemples de ces énonciations qu'il appelle performatives qui ne sont ni waies ou fausses (au contraire des énonciations qu'il a nommées constatives), ni des expressions de non-sens. Il fàut absolument s'apercevoir de I'existence d".ce ttgi.s&!*q"- g-" , d" 24
é.
d'autre chose que les paroles elles-mêmes : le contexte de l'énonciation (ou les circonstances), par exemple, joui un rôle très important. Lorsque I'une ou I'autre de ces circonstances est absente (ou se présente de façon inadéquate), l'énonciation performative ne devient pas fausse pour autant : il faudrait plutôt dire comme nous le que l'acte visé ne s'est pas produit, ou qu'il a été disons, de fait accompli mais de mauvaise foi, ou qu'il n'est pas apparu dans toute sa plénitude, etc. (Cette dernière considération jouera un rôle impor-
-
\rI. (
fait les penseurs du
Les énonciations performatives (ou les << performatifs >, Çomme , I ll ail *i Austin propose aussi de les appeler) ne sont donc pas des affirmations, I n' ; t r!:', waies ou fausses (des descriptions ou des reportages concernant les[ //, 3rJ' 1l;' " rti faits), ni des non-sens; mais des énonciations visant à/arre quelqueft .i,i!r' r, i:: ',9 chosg (à parier, par exemple, ou à se marier, ou à baptiser un bateau," l" 1{' etc.)Yll faut remarquer, cependant, que ce qu'on vise à << faire D en O-r{ lr{ employant l'énonciation performative, exige souvent le concours \u- ,,' .,
Deuxième confrlrence
Austin veut donc étudier davantage cette énonciation spéciale (trop longtemps négligée par les philosophes) que constitue le performatif. Lorsqu'une telle énonciation ne parvient pas à faire ce qu'elle était destinée à faire, nous disons non pas @"*S!jU*U", mais qu'elle est malheureuse. L.e << malheur >> est dû, la plupart du témpi;t cè qùé leJ-liË-àiàïiances qui devraient accompagner le performatif ne se présentent pas (( comme il faut >. Austin examine avec soin un nombre assez imposant de circonstances qui, par leur absence
,
ou leur caractère inadéquàt, rendent I'acte malheureux : une conventionll
a été méprisée, une intention requise était absente, une désignation i! fficielle faisait défaut, etc._Les différentes sortes de malhe"gg$iii peuvent affecter un perforrnâii-f ont ièçu d;Austin le nom 41Ë"îâF'
llnfelicitiesl.Il a présenté les plus importants de ces < échecs-ffi-ans
un tableau schématique, les classant selon les diverses façons dont ils pouvaient affecter le < bon fonctionnement > des performatifs, en général. 25
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INTRODUCTION
Troisième et quatrième
INTRODUCTION
c:onférences
I,tj
Austin reprend ici sa classification générale des Échecs, pour les t'. examiner avec soin à partir de nombreux exemples. Bien que ses j analyses soient très précises, il n'arrive pas à réduire chacun â", ,È, étudiés à I'un ou I'autre genre d'lichei figurant dans son taureau "u, ,ii initial. Il y a presque. toujours recoupement des crasses entre etteq ii parfois même iréductibilité de certpins exemples à toute classe parti- -ii culière. Austin ne se décourage pai pour autaut, mais note siàpleI ment que la situation globale, dont il faut toujours tenir compte, est 'ti fort complexe, et qu'il faut absolument résister à la tentation de . simplifier à I'excès. ,..i i ...-_-*î*__*\, Ii y a lgute{gis yr_réJ;{ui ressort des analyses présentées, juseu'ici, éf sui-iequèi Âîsitn âtt h.ur"o* d'attirer l'attention 6 ,-r; " livériÉ .oIffite d.es afirmatrons classiques (des énonciations coùstatives)'dé.pend.Èlle-même 4e nomgls.,tgs.g cilc-o.gg!3nç--e,s-.21, et celes-ci .. :f ressembrent très souvent à celles qui afectent les performalflr. c'est -dê éè résùliâi-qui fèiàet à Austin iémettre en question te statut privilégié de I'affirmation classique, et surtout d'inviter ses auditeurs à une étude plus judicieuse, plus éclairée, de la notion de vérité, :
:
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Cinquième conférence
*!*-Ig$g$Saegùqu'il*ya,-entrqlgsf ng-nçiatiq4s,-c9_p.,Eeliye"qç-t.(due au fait que toutes les àeux sont atrectéa fài ru
gg+*n
situation où eiles sont produites) ne suffit pas, apparemment, à faire disparaître leur distinction. Aursiin_se lance donc à la recherche d,uu
..
#?ry=
B."rmetta nr
dl qirgr:F
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r t'énonciàti on p.*Àuii uè.
L€ Cfltefe SefA'Érammalicat';-'trI Tl cnnsidèrp r^ r^ considère â'al,n..l d'abord I'o*^I^i ploi de I'emploi la
exprimés étant trop nombreux. pour la même raison, le moâe et le temps'ne sauraient servir de critères absolus. certains,mots semblent < expliciter > l'énonciation et en garantir, par le fait même, le carac-
tère performatif; mais là encore,
l.r ,*.-p1",
déroutants abondent...
Sixième et septième conférences
Les résultats négatifs de la dernière conférence invitent Austin à demander s'il ne faudrait pas essayer €i9Égltg*Âgggiqg+9419"" dont o-n soupçonne qu'elle serait un pprfo-rinatif, à sa lorme exp-lipi,k : il apparaîtrait alors qu'elle est un pe_rformatil,?*SeUtiUue' De nombreuses analyses montrenîcffiôâffi*{"ùëïètte tâche-est à son tour inutile, que les tests imaginés (à partir de quelques performatifs explicites < évidents >) pour repérer tousles performatifs sont extrêmement se
difficiles à manier, et que beaucoup d'énonciations demeurent problématiques (présentânt à la fois un caractère performatif et constatif). Austin a toutefois proûté de ces dernières analyses pour faire ressortir un second résultat dont I'importance apparaîtra plus loin : put utt procédéft ry-eaplicitqtion > dlyn-pg{ormatif < primaire > n est fausse, selon lall (de vraie ou façon quii'ôniiiie a deuirë ou à. àfirmer que ferait le performatif ce Cônception traditionnelle de I'affirmation) j'accomplis que I'acte comment plutôt à manifester <primaire >>, mais performatifs explicites les Et si reçu ou compris. être en ce moment doit primaires, constiils ne les après l'histoire au cours de sont apparus tuent pas seulement des descriptions plus raffinées d'actes déjà existants, mais davantage la création de uouvelles formes d'actes. (Nous verrons plus loin comment I'explication, dans ce sens - I'explication n'est pas la même chose que I'explidela valeur d'une énonciation -, citation d'une signification imprécise.) Après s'être attardé sur I'explicitation des performatifs (et avoir considéré les nombreux moyens dont le langage dispose pour effectuer cette explicitation), Austin est obligé d'ettre qu'il ne semble pas y avoir de critères gtammaticaux, ni de tests infaillibles, qui permettraient de distinguer tous les performatifs des constatifs. Un nouveau point de départ s'impose. Or, nous savons que nous
faisons D souvent quelque chose en disant quelque chose, ou par le fait de dire quelque chose. Mais l'expression << faire quelque chose >> est elle-même assez vague... Peutêtre y aurait-il avantage à aborder cette exptession, maintenant' ou plus précisément, I'expression << produire une énonciation >>. C'est ce
26
<<
qu'Austin décide de faire. 27
l;
'it.l, i
i.1.,j.
.
INTRODUCTION INTRODUCTION
Huitième conférence
Il
ble
que
commencg*pef 4j$:lgser Jrois quelque chose par la
de I'acte consistant à
parôlâll y a I'acte de locution (la pro-
et auxquels sont rattachés un
(
sens
) et une << référence
>,
i'est-à-dire
la distinction
sera souvent difficile
à
reconnaître, car
il
faut
ettre qu'il n'est pas toujours facile de savoir où les cônventions commencent, et où elles se terminent, au juste.
Dixième conférence
Austin va maintenant considérer plus attentivement les deux for>> et << par le fai-tSlg*djf"e.-> (quelque chose), formules qui les ffir?îîîËilr î''zià.utiàn > et < perlocution >. ll avoue dès le départ que leur emploi ne saurait nous fournir un test pour distinguer très nettement les actes d'illocution des actes de perlocution. Mais il estime que l'étude de telles folmules est ilnp__oj:1 tante : elle nous permet d'àpercevôirffit I Ëlifiê-ettes les différentes façons dont nous << agissons > par la parole. En conclusion de ces dernières analyses, Austin établit que les deux certaines précautions formules nous aident souvent - moyennant à distinguer les actes d'illocution et de perlocution, tout en constituant un test extrêmement difficile à appliquer. Reste que de telles analyses enrichissent considérablement notre connaissance du langage et de tout ce que la parole nous permet de < faire >.
mules < en disant
lufoffiffire
comme un commandement, etc.); et I'acte de perlocution (produit par le fait de dire quelque chose, c'est-à-dire que I'acte donnê fieu à des effets - ou conséquences chez les autres ou chez soi). Le but d'Austin est d'étudier-d,abord et qvant toutyaSjç_E.it@tii"; car il croit reconnaître en lui I'acte ou le << faire >.rr.ntièi àËlîpuôr.. L'unedesescaractéristiqug_s_eqr_g_{!l_d9.l!"gt-rç-plgg-gi1.q.o-5{o1mé,gr9ir1
àuÀéionventiort -' - D-tns ËTiit"ïonférence, Austin se contente de mentionner brièvement certains emplois du langage qui n'entrent pas dans Ia constitution intrinsèque de I'acte lui-même, certains maux dont I'acte peut souffrir, et certains problèmes qui peuvent surgir du fait que l,actle en question estun acte.
Neuvième conférence
Austin consacre cette conférence à l'étude détaillée des trois aspects qu'il a repérés dans I'acte de discours, cherchant surtout à distinguer I'acte d'illocution de l'acte de perlocution. Il examine d'abord- les conséquences de ces deux actes, en fais_a.nt*ob*Slygr qqe l'a-c!g_q'lllg-cgtt:gdes!-næ,uae--c*osÂé$uerse*_d--el_'q919"4.Ë.cu_îrur,"tq*Tn produit lui-même des << conséquences ) en vertu de su n iorce , (ou de sa valeur) elles ne sont pas du -tout semblables à celles qui -, caractérisent I'acte de perlocution. sans prendre la peine de justifier ou de situer cettg-qffirmation (comme il le fait si consciencieusement
.;-'", d'ordinaire)fÂGD n"it-pqlàire .-suJe _Effférence essentielle cgs deux actes réside en qge t'a;Ë*d-îlûrcuttû;jmdô.fl-reffi en'6 ce qqe I'acte .d'illocution estïczll 49tes résidç r r, ces .n,,
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alors que I'acte de perlocution ne i'est pôËi:Âussi
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conférence
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Le retour aux éléments plus fondamentaux des réalisations de la parole (c'est-à-dire à la production d'actes de locution, d'illocution, et de perlocution) a permis d'établir une nouvelle problématique, ou un nouveau contexte, dans lequel Austin veut maintenant situer sa distinction première entre énonciations constatives et performatives.tr Le performatif, on s'en souvient, devrait faire quelque chose (par{ i opposition à simplement dire quelque chose), et ôtre heureux oujlj malheureux (plutôt que vrai ou faux). Mais les dernières analysesii semblent montrer que chaque fors que nous << disons >> quelque chose,\ nous produisons €t des actes de locution (actes de drie quelquel chose), et des actes d'illocution (actes d" &j:g quelque chose). Comment la distinction initiale entre èônStâiiËîîôifôffi àiffi Èeuç elle subsister devant de tels résultats? Austin montre d'abord que:#gp.!+.9{$:'affi rmati on, par exemple)
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INTRODUCTION
INTRODUCTION
quelque chose en plus de simplement drre quelque chose, et-ggnS9g"3r19et "que."!les perlio-rmalifs.,Il fait
êîiuite remaiffii îËË1ffrrnîtîdnr' sont exposées, elles "r"tiiu.r aussi, à subir toutes ces sortes d'échecs que peuvent rencontrer les performatifs. (Austin apporte ici des et des exemples "oor-idéràtioos très convaincants, et qui pourraient offrir à la réflexion philosophique
pour ..ne conception à la fois plus j riche de l'affirmation de la vérité.) Il note, .n purruni, qupo. tr9 pour accorder accorder une une position 4ire silign spégiaJe s .à I'afirmatiùlë'âst qûèUe constitiie ùn' actâ d'illoclrtioo 7d^
1, cômme les pirfor€ei:*ee$.j.qteJjj ;ggo(donCun iiâiiïi)"mâËï 4f (comme l'acte de perlocution d-es données
en a un).
Austin ensuite aux performatifs, pour montrer qu'eux aussi - entrere font en scène la quesiion de la < vérité > conçue'comme une certaine i( correspondance aux faits >. Mais justemeni, cette ,"rr"*blance entre constatifs et performatifs suggère aussi une de la vérité qu'il ne r.ru piu, très facile àie'laborer en toute "on".ptioo clartéï simplicité. La
, ciaprès Austin, serait une < dimension géné: rale > dans laquelle, compte tenu des circonstances, des interlo"uËurr, des intentions et buts acluels, nous dirions < ce qu'il estiuste fr:ightl " de dire )) ou ( ce qu'il convient fwhatis proper] de àire >. Le conférencier finit par remarquà. qu. la distinction initiare Ss1g-çgsglgi1$. el .p,e{{o-r.ryq!!f_q..était re iesultarî*ffiË*âï,tilic,îiîî S"-lil gq sep it p-a s pyaryage us_ !_e*aiin1.q,1., I-;!;"r"i"iË ;; ne tlent compte, en effet, que de I'aspeci
> de la "iiâii parole, eu négligeant son élément d'illocution, alors que l'énonciation per-
*'
formative est une notion qui néglige la dimension de < correspondance >>, pour_s'attacher à peu près uniquement à la < valéur d,illo_ cution r> de l'énonciation. ce sont des cai extrêmes (où ces abstractions sont presque réalisées) qui ont donné naissance aux notions de constatifs et de performatifs. Or, la réalité est plus complexe; elle exige ique l'on distingue plutôt entre les actes dè locution et d'iilocution, et que I'onétudie de façon très critique en qzel sens les diverses sortes d'illocutions seraient destinées à être justes ou non, permises ou'rnon, et le sens précis des.expressions que nous employons pour porter des jugements de valeur sur les illocutions. Austin termine en attirant I'attention sur le fait que la tâche qu'il vient de proposer aux faits
est immense.
30
Douzième conférence
La dernière conférence constitue une première approche de la classitcation des < valeurs > que possèdent toutes les illocutions rencontrées dans le dictionnaire. Après avoir remarqué que la doctrine des constatifs et performatifs représentait une ( théorie spécialisée )), par rapport à la < théorie générale >> des actes de locution et d'illocution, et que cette théorie générale a été formulée en vue de tenir compte de tout ce que la notion abstraite de l'affirmation << traditionnelle >r laissait de côté (ne donnant ainsi qu'une conception abstraite de la vérit), Austin insiste pour qu'on retienne les points suivants : :- seul I'acte de discours intégral, considéré dans la situation totale du discours, devrait constituer, au début, l'objet de nos études; - I'affirmation, la description, etc., n'occupent aucune position privilégiée, ce ne sont que des actes d'illocution parmi d'autres; elles ne jouissent d'aucun privilège en ce qui concerne, en particulier, les rapports << spéciaux >> qu'elles entretiendraient avec les faits; la théorie de la <<'signification > exige une reformulation plus -, adéquate, compte tenu de la distinction qui existe entre les actes de locution et d'illocution. (Le conférencier et toutefois qu'il n'est pas absolument
sa distinction,
et qu'il n'a pas voulu considérer en
str
de
elle-même la
(,valeur >> d'illocution que posséderaient les affirmations. Mais il a strement attiré notre attention sur I'importance de cette ( valeur > qui, à notre avis, est le point qu'il faudrait étudier davantage, si nous voulions parvenir à une compréhension plus profonde de la parole humaine et, surtout, de Ia visée essentielle de l' << affirmation >> de vérité...) Austi n propo s e e o tqglg4gqË géq{qales (e t pro vi s oi rqs) gg_o$.çialions, classes qu'il à îéflnËs sél
qu'e]les posséderaient. Il rappelle, en termifrâiiî, qîê'ôtèîiâ dessein qu'il n'a pas voulu << embrouiller )) sa théorie générale en I'appliquant tout de suite aux problèmes philosophiques. II ne faudrait pas penser, cepend4nt, qu'il < ne fait aucun cas de ces problèmes >... I exprime enfin le regret d'avoir dit, dans ses conférences, ce qu'il y surait à faire, plutôt qu'il ne l'afait lui-même; mais il se console à
3l
INÎRODUCTION
fidée qu'il.a mis un peu plus d'ordre dans rrn mouvement qui existe déjà, et qui semble devoir prendre de plus en plus d'imporànce, en philosophie.
Nous avons essayé de conserver au texte d;Austin son anure à la fois désinvolte et sérieuse. Le lecteur dewa se rappeler, devant certaines tournures, que le philosophe anglais n'uvuif pas préparé son texte pour la publication, mais pour des conférences qu'il voulait d'ailleurs exemptes de toute prétention (oratoire ou thématique), si ce n'est celle de la vérité (H, p. l). L'éditeur anglais a lui-même respecté le style familier, nwtter of gawoche, des notes austiniennes.
fact, parfois même un
peu
Le vocabulaire, d'autre part, pourra surprendre, distraire, et même choquer. Austin a en effet forgé les termes qui désigneni ses concepts fondamentaux, et n,a pas hésité à présenter des mots décidément rëbarbatifs, comme
il le dit e"presiémeot (H, p.
150). Le
terme anglais constative (pour n'en nommer qu,un) -non seule_ ment n'existe pas en anglais, mais ne contient même pas de racine figurant dans une quelconque expression anglaise. euànt au terme behabitive, par exemple, il évoque sans doute le mot behaviourmais sa construction ne respecte, pas du tout le < génie de la langue >i Austin s'est d'ailleurs expliquéiau sujet des libertés qu'il a soirvent prises avec sa langue : il voulait éviter qu'on retienne dàns des expressions trop familières, les sigaiûcations préconçues qu'il croyait devoir combattre (}1, p. 7). On reconnaîtra cependant qu,il a compensé le caractère insolite de ses expressions en offrant, la plupart du temps, des définitions claires de ce qu'il voulait leur faiie àontenir. Sans doute ne doit-on pas ab dans cette direction, mais peut-être un penseur n'est-il pas trop exigeant lorsqu'il demande à son auditeur ou lecteur qu'il vienne aussi à sa rencontre... Nous espérons seulement que notre traduction n'a pas glissé dans un texte assez original des possibilités d'évocations que son auteur n'aurait pas voulues.
G[rss
il
Préface de l'éditeur anglais
,tvl
i ii
Les confërences publiées ici ont été prononcées par Austin à,\'université : ii de Harvard en 1955, dans Ie cadre des Conférences William James. Des "i. idru qui sont à la base de ces exposés, Austin dit dans une note brève : Elles ';, ont pris forme en 1939. Je les ai utilisées dans un article sur << Other Minds , publië dans les Proceedings of the Aristotelian Society, Supplementary ', Volume XX (1946), pages 173 s,, et j'ai fait encore émerger un bon pan de ., cet iceberg, peu après, devant plusieurs sociétés... >> Chaque annëe, de 1952 à , 1954, Austin fit des çonférences à Oxford sous le //re Words and Deeds, . et chaque année il remaniait ses notes. La malière traitée en ces séries de , confërences ëquivaut à peu près à celle des Conférences William James. ': Austîn rëdigea, én efet, un nouvel ensemble de notes pour ces derniers exposés, '" tout en y insérant parfois des pages plus anciennes. Le texte ici prësenté peut ': donc être considéré comme le plus récent, même si, continuant, à partir de ces '. mêmes notes, de donner des cours à Oxford sar Words and Deeds, lasrrt yintroduisit des corrections lëgères et uncertainnombre d'additifs marginaux, ", ': Notre édition reproduit Ie conlenu de ces conférences le plus fdèlement ', possible et avec un minimum d'annotations. Si Austin avait lui-mêrne publié . son texte, il aurail sans nul doute procédé à une nouvelle rëdaction, mieux i faite pour l'édition : il aurait sûrement condensé les résumés des exposés lvnl antérieurs qui fgurent au dëbut de la deuxième conférence et des sui:: vantes. Il est certain aussi qu'Austin, au cours de ses conférences, était tout , naturellement amené à déielopper le texte succinct de ses notes. Mais la : plupart des lecteurs préféreront sans doute un texte très proche des écrits ::, mêmes d'Austin à une version hypothétique de ce qu'il aurait publié, ou aurait <<
>>,
dit dans
; '. ':
ses conférences,
Ils consentironl par conséquent à payer le prix de et de style, ainsi que
cette rtdéhtë : de légères imperfections de présentation quelques fottements daw le vocabulaire.
Enfait,
les confërences ici publiées ne sont pas la reproduction exacte des d'Austin. La raison en est la suivante : bien qu'entièrement rédigëes la plupart du temps, et plus spécialement au début de chaque confërence (saw autres omissions que celles des particules et des articles), ces notes notes
LINE
;
deviennent souvent beaucoup plus fragmentaires enfn d'exposé et les additifs marginaux y sont très abrëgés. C'est tà qu'il nous afallu interpréter et com33
PRÉFACE
pléter avec ce qu'il subsistait des notes de 1952-1954, mentionnées plw haut. Nous avons procédé à une nouvelle vërification en comparant notre texte cux notes de ceux qui avaient suivi ces confërences en Amérique et en Àngleterre, à l'exposéfait au micro de Ia B.B.c. snr /es performative utterances,
et enfin au texte enregistré d'une conJërence donnée à Gothenberg en octobre 1959 et intitulée.Performatives. Nous donnons en appendice des indications plus précises sur Ia façon dont nous avow tiré parti de ces sources. Si au cours de ce travail d'interprétation a pu se glisser dans le texte ane phrase qu'Austin aurait dësavouée, il nous paraît toutefois peu probable que les lignes essentielles de sa pensée aient été en aucun point déformées, L'éditeur remercie tous ceux qui l'ont aidé en lui prêtant leurs noles, ainsi que ceux qui lui ont fait cadeau de Ia bande enregistrée. Il reconnaît une dette particulière envers
M. G.J. warnock, qui a revisë Ie texte avec minutie et airci prévenu nombre d'erreurs. Grôce à ses sor'ræ, Ie lecteur dispose d'un texte grandement amélioré.
J.O.UnusoN
Quand dire, c'est faire
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Première conférence
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ni difficile à comprendre, ni sujet à ,$. ' C" que j'aurai à dire ici n'estj'aimerais jX, controverses ; le seul mérite que voir reconnaître à ces consi-
ll dérations est celui d'être vraies, au moins en partie. Le phénomène ii àldiscuter est en effet très répandu, évident, et I'on ne peut manquer I'avoir remarqué, à tout Ie moins ici ou là. Il me semble toutefois ù, ar qu'on ne lui a pas encore accordé spécifiquement attention. ; philosophes ont trop longtemps supposé qug$gk=$,:,#Lq Les ,1 j n tngtign fstatemenll ne pouvait être que de < décrire > un état .i de choses, ou d' < affirmer un fait quelconque >, ce qu'elle ne saurait . faire sans être vraie ou fausse. Il y eut constamment des grammairiens, # bien sûr, pour signaler à notre attention que toutes les < phrases > f;; lsentencesl ne sont pas nécessairement des affirmations, ou ne servent $. put nécessairement à J4 produire * : en plus des affirmations (au sens i aes grammairiensV*ç a aussi, très traditionnellement, les questions_ $ .et les_exclamations, ainsi que les phrases qui expriment des comman,: ldements, des souhaits ou des concessions. Sans doute les philosophes ï n'ont-ils pas eu I'intention de le nier, même s'il leur est arrivé f d'employer un peu abusivement le mot < phrase D pour le mot affirf. mation >. Sans doute aussi grammairiens et philosophes ont-ils été i|.: conscients, les uns comme les autres, de la difficulté qu'il y a à bien les commandements, etc., f distinguer les questions elles-mêmes, quelques pauvres indices grammades affirmations, au moyen des ë g[2] ticaux dont nous (l'ordre >>
<<
i i,]
Dans la traduction qui suit, les notes en bas de page, appelées
d'un astérisque, sont de I'auteur ou de l'éditeur anglais. Les notes appelées d'un chiffre supérieur sont du traducteur français, et reportées à la fin de I'ouvrage, p. 169.
Ài
tirii
j
i:
disposons des mots, le mode, etc.). Mais il ,. pas qu'on semble se soit beaucoup attardé, dans l'ensemble, sur .ne '
* Il n'est pas vraiment correct, bien str, de dire qu'une phrasc puisse
érre jamais
plutôt de produire une afirmation,' ct I'affirmation est elle-même une < construction logique > élaborée à partir de la production une
alirmation : son emploi
est
d'affirmations. 37
QUAND DIRE, C'EST FÀIRE
les difficultés que ce
PRElfirÈRB cor-rrÉnsNcs
fait soulève manifestement. Car enfin, comment
fie ne dis pas à rapporter) les circonstances dans lesquelles I'affir' mation est faite, ou les réserves auxquelles elle est sujette, ou la façon.dont il faut la prendre, et autres choses de ce genre. Négliger le plus souvent dans le é ces possibilités -, - comme il est arrivé c'est céder à ce que I'on appelle I'illusion < deserigçjgç21. (Mais peutêtre ce motp'est-il pas adéquat, < descriptif >> ayant lui-même un sens particulierl'Toutes les*q$lpelio-ns" vraies ou fausses, ne sont pas pour autant""dê!Téiéiiptions; voilà pourquoi je préfère employer le 'iÀôt < constatif 3 >.) Les remarques que nous avons faites jusqu'ici ou du moin-s à rendre diiTrôdns'doutô'Téussi à montrer par bribes problèmes qui embarrassèrent que nombre de vraisemblable partir d'une erreur : philosophes ont surgi à les traditionnellement celle de considérer comme des affirmations pures et simples de faits, " des:énonciations qui sont (en un ou plusieurs sens non gramma- i ticaux et qui ont leur intérêt) ou bien des non-sens, ou bien des'i expressions dont I'intention est tout à fait différente. -''r'Quoi que nous pensions de I'une ou I'autre de ces conceptions et suggestions, et si fortement que nous puissions déplorer la confusion où doctrine et méthode philosophiques en ont d'abord été plon' gées, nous ne pouvons douter qu'elles soient en train de produire une révolution en philosophie. Si quelqu'un veut I'appeler la plus grande et la plus salutaire de son histoire, ce n'est pas, à y bien réfléchir,
les distinguons-nous les uns des autres? Quelles sont leurs limites et leurs définitiond respectives? Depuis quelques années, plusieurs expressions qui, autrefois, auraient été acceptées sans problème comme des << affirmations >, tant par les philosophes que par les grammairiens, ont été examinées avec un soin tout nouveau. C'est plutôt indirectement moins - du L'opien philosophie qu'on en est venu à poursuivre cet examen. nion s'exprima -d'abord sans un assez regrettable dogmatisme - non que I'aftrmation (d'un fait) devait être < vérifiable 1 >> : ce oui
-amena à penser que de nombreuses ( affirmatiJnî> nè seraient pour
ainsi dire que des gg,eu4o:affirmations. On commença pil montrer quîæâîËoùi;'d' < affirmatiàns > (Kant fur - et sans,nullelepeiii-probablement premier à l'établir systématiquement) étaient à
proprement parler des_gon-sens, en dépit d'une structure grammaticale très courante. Et la-décôûverte continuelle de nouveiux types,de non-sens a été somme toute une bonne chose leur classi- quoique fication soit restée trop souvent non systématique, et leur explication, mystérieuse. Cela dit, même no.us autres, philosophes, nous fixons des limites à la quantité de non-sens. que nous semmes prêts à ettre dans notre discours. Il était donc.naturel de se demander, dans un secgnd temps, si bon nombre de ce qulgn prenait pour des pseudoaffirmations tendaient, en fait, à être des << affirmations >, à quelque titre que ce soit. KO" in est venu à pe, communément qu'un grand nombre
une prétention extravagante. Il n'est pas étonnant que les premières découvertes aient été faites sans grande continuité, avec parti pris a et à partir de motivations étrangères : c'est le cas pour la plupart des révolutions...
d'énonciations futterances 2] qui ressemblent à des afrrmations, ne sont.pas du tout destinées à rapporter ou à communiquer quelque lnformation pure et simple sur les faity; ou encore ne- le sont que
partiellement. Les << propositions éthiqr/es >, par exemple, pourrailnt bien avoir pouq but 3 unique ou non de manifester une émotion, [3] -ou,de prescrire un mode de conduite,- ou d'influencer le comportement de quelque façon. Ici encore, Kant fut un pionnier. Il arrive aussi que dals l'usage que nous faisons des énonciations, nous outreions le champ de la grammaire, du moins de la grammaire tra-
TsoLEMENT
38
PERFoRMATTF
lperformativei
r
Il va de soi que le type d'énonciation à considérer ici n'est pas, en général, le non-sens, bien que més du type en question puisse des variétés assez extraordinaires nous le verrons engendrer de << non-sens Plus exactement, il fait partie de notre seconde
-
ditionnelle.|on en est venu à voir que bon nombrJ de mots. fort
embarrassants, insérés dans des affirmations apparemment descrip.tives, ne servent pas à indiquer un caractère supplémentaire et parti',r culièrement étrange de la réalité qui est rappottée, mais à indiquer
pnÉrnnNunr DU
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. rTout cc qui €st dit daos oes séctioDs est provisoire et demeure sr$et à révisioo, à la lumière dcs sectons ultérieures. 39
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PREMûRB CONTÉRENCE
classe celle des imposteurs fmasqueraders,l : non qu'il se déguise nécessairement en une affirmation de fait, descriptive ou constative; mais il lui arrive très souvent de le faire, et cela assez étrangement au moment même où il revêt sa forme la plus -explicite. Les grammai-
+:1
Exemples :
.
i;,
riens, je crois,'n'ont pas su percer ce << déguisement D; quant aux philosophes, ils ne l'ont fait au mieux qu'occasionnellement *. Il conviendra donc d'étudier ce type d'énonciation d'abord sous sa forme trompeuse, pour en faire ressortir si possible les caractéristiques en.les comparant avec celles de I'affirmation de fait qu'il singe. Nous ,prendrons donc comme premiers exemples quelques énonciations qui ne peuvent tomber sous aucune catégorie grammaticale reconnue' jusqu'ici, hors celle de l' << affirmation >; des énonciations qui ne sont pas, non plus, des non-serrs, et qui ne contiennent aucun de ces avertisseurs verbaux que les philosophes ont enfin
'.,
.iqJ
rien, ne sont pas << vraies ou fausses >>; et sont telles que B) l'énonciation de la phrase est l'exécution d'une action (ou une partie de cette exécution) qu'on ne saurait, répétons-le, décire tout bonnement comme étant I'acte de dire quelque chose. Ceci est loin d'être aussi paradoxal qu'il semble, ou que j'ai essayé peu trop sommairement le faire paraître : on sera déçu, -en un - deallons effet, par les exemples que nous maintenant donneç. .
il
<<
oui
>>
prends cette femme cornme étant prononcé au cours de la cérémonie
comme on dit
<<
Je vous parie six pence
qu'il pleuwa
>>
demain.
>>
se
o'y a à prouver que < Damnation! > n'est ni vrai ni faux
peut que l'énonciation
<<
serve à mettre au courant >
-
:
mais
cfest là tout autre chose. Baptiser un bateau, c'est dire (dans les circonstances appropriées) les mots < Je baptise... etc. Quand je dis, à la mairie ou à I'autel, etc., < Oui fie le veux] >>, je ne fais pas le reportage d'un mariage : je me marie. ,Quel nom donner à une phrase ou à une énonciation de ce type *** ? 5 ou une énonciation Je propose de I'appeler une phrase performative
.
)
;ii
til :li iî:
fil 4
.i
( par souci de brièveté performative ou - un performatif >. te terme << performatif > sera utilisé dans une grande variété de cas et de constructions (tous apparentés), à peu près comme I'est le
*:ï fi:, r .tq
terme < impératif 'r'ix* >. Ce nom dérive, bien sûr, du verbe [anglais]
.l€ r?q
.ii
I
iâ ,v;
iii 1,ê
j$
Entre tous, ce sont bien les hommes de loi qui dewaient être informés de ce .{x qu'il en est réellement. Peut4tre quelques-uns le sont-ils. Il leur arrive pourtant à d'être victimes de la trop prudente << tction légale >> : de penser, par exemple, '* iÈi qu'un énoné de < la loi > est l'énonce d'un fait. lr Non sans raison : elles sont toutes des performatifs < explicites >, et de la #;:J{ '!]. classe prépondérante, qu'on appellera plus taf,d celle des < exercitifs >. ;1 ,l
'{
,,i lll
lAustin se rendit compte, mais trop tard pour corriger son ellerr, q 'e l'exOui fie prends cette femme...) >> n'est pas employée dans la cérémonie âu mariage. Nous n'avons rien changé au texte, car, du point de vue philosoohioue. il importe peu que ce soit une erreur. J.O.U.] ^ *ioÉncore-moinice que j'ai déjà fait, ou ce qu'il me faudra faire plus tard. "Ilt Ï-es < ohrases )) constituent une classe d' << énonciations >>, classe à définir efaàmaticâtement, à mon avis; et je doute qu'une définition satisfaisante en ait Oeie ete donnee. Aux énonciations performatives s'opposent essentiellement, par exËmole. les énonciations"-<'constativès >> : formuler une énonciation constative (cGtla-âire la produire avec une référence historique), c'est émettre une affiràation. Formuler une énonciation performative, c'est, par exemple, faire un pari. Voir plus loin, à propos des < illocutions >. - r'rt J'employais d'abord le terme < performatoire >>' mais < performatif > est à péférer pârce que plus court, moins laid, plus maniable, et de formation plus traditionnelle. pression <
rdii!
*il.
40
-
ce
à) < Je baptise ce bateau le Queen Elizabeth
(E.d)
îltit
;1
,.
du mariage *.
>>
Pour ces exemples, il semble clair qu'énoncer la phrase (dans les circonstances appropriées, évidemment), ce n'est ni décrire ce qu'il ** en parlant ainsi, Tâui Uien reconnaître que je suis en train de faire ti"Ciffiràer que i9 lç- fals : c'est le faire. -Aucune des énonciations citées î'est vraie ôu fausse : j'affirme la chose comme allant de soi et ne 'lldiscute"pas.'On n'a"pas plus besoin de démontrer cette assertion ij.
<<
Oui [e le veux] (c'est-à-dire jç
.r " lorsqu'on brise une bouteille contre la coque. :r: (E.c) << Je donne et lègue ma montre à mon frère >> - comme on . r,' peut lire dans un testament.
,1,7
i Uindicatif pré,ggSLva|1-+gtfv_e-f. Car on peut trouver des énoncia,i tioni-quf sâtisfont ces conditions et qui, pourtant, ' A) ne décrivent >, ne ( rapportent'>>, ne constatent absolument
<<
épouse légitime) (E'.
15l
,r énonciations que nous allons voir présenteront, comme par hasard, fi des verbes bien qr{!n-4!Le-sr_ Lla première perq,olng- gg_lisguliçr de
:(E. c)
"
4t
tt"
pneMÈRE coNrÉnnNce
aUAND DIRE, C'EST BAIRB
petfom, verbe qu'on emploie d'ordinaire avec le substantif < action >> : [7] il indique que produirg l'énonciation est exécuter une action (on ne i considère pu., Èâhi""uem.nf iËtiô-pôituëtion-là-ërtmfr6îe faisant , que dire quelque chose). Un certain nombre d'autres termes peuvent se présenter à I'esprit, chacun étant susceptible de recouvrir convenablement telle ou telle classe plus ou moins étendue de performatifs : de nombreux performatifs, par exemple, sont des énonciations contfa;cfue:llës (glg pari-è >) "9y-dëSlo:gtpr.rqr.(11je""déclare tâ guerre >). Mais au",ro t.i.é à;uiugt courant, que je sache, ne saurait âvoir assez d'extension pour les recouvrir toutes. parmi les termes techniques, il y en a un qui, peutêtre, se rapprocherait le plus.de ce qu" oour therchons.'Il s'agit du mot [anglais] operative, tel qu'il est employé (au sens stric$ pàr les hommes de loi, lorsqu'ils veulent se référer à la partie (i. e. aux clauses) d'un acte juridique qui sert à effectuer la transaction ellemême (: son but principal) un transfert de biens, ou que sais-je?
- que < débiter > les circonstances dans le reste du document ne faisant
lesquelles la transaction devra s'effectuer *. Mais operative a d'autres signiûcations; de nos jours, il est même rouuent employé pour signifier à peine plus qu' << important >>. J'ai donc préféré un mot nouveau, auquel nous serons peut-être moins portés (bien que son étymologie ne soit pas à négliger complètement) à rattacher une
signiûcation préconçue.
tout à fait identique, non pss en énonçant des mots
-
qu'ils soient
mais d'une autre manière. Je puis, par exemple, écrits ou prononeés ,,en certains lieux, contracter mariage par simple cohabitationi ou
-,
tr
''parier av€c un totalisateur, en glissant une pièce dans une fente. J 'Peut-être devrions-nous alors convertir les propositions citées plus ,haut et les exprimer comme suit : << Dire quelques mots bien déterminés, c'est se marier >, ou
(
Se marier, c'est, en certains cas, simple-
"ment dire quelques mots >, ou
<< Dire simplement telle chose, c'est parier >. ' :r. Mais la vraie raison pour laquelle ce genre de remarques semble .dangereux, tient probablement à un autre fait, évident, sur lequel nous aurons à revenir en détail, et que voici. Prononcer des mots, en efet, est d'ordinaire un événement capital, ou même l'événement ôâpitat, dans l'exécution ltrterformancel de I'acte (de parier, ou de ,frôftnCore?), exécution qui constitue pour une part la visée de jamais I"énonciation; mais elle est loin de constituer d'ordinaire - si .-e[elg'fâit élément nécessaire pour qu'on puisse considérer -l'uniqte ,FàCte:comme exécuté. Disons, d'une manière générale, qu'il est
,iôûiôurs nécessaire que les circonstances dans lesquelles les mots ..,iônt prononcés soient d'une certaine façon (ou de plusieurs façons) :liblrôpriées, et qu'il est d'habitude nécessaire que celui-là même qui Sâile, ou d'autres personnes, exécutent arersi certaines autres actions î,actions < physiques D ou ( mentales >>, ou même actes consistant âl prononceç ultérieurement d'autres paroles. C'est ainsi que pour 'Saptiser
PELn-rL ARRMR QUe DrRE UNE CHOSE, CE SOII
re rene?
Allons-nous donc affirmer, par exemple, que
,
marier, c'est dire quelques mots >), ou que Parier, c'est simplement dire quelque chose >>?
<< Se <<
Une telle doctrine semble d'abord étrange, sinon désinvolte; mais pourvue de garanties sufûsantes, elle peut en venir à perdre toute étrangeté. On"peut opposer aux formules qui précèdent une premièreobjection, valable, et qui.n'est pas sans une certaine importance. Dans de très nombreux cas, en effet, il est possible d'exécuter un acte d,un genre
18]
t
Jc dois cette remarque au professeur H, L. A. Hart.
42
uni-bateau, il est e,psentiel que je sois la personne désignée p"our,lÊ faire; que pour mê marier (chrétiennement), il est essentiel I que je ne sois pas déjà marié avec une femme vivante, saine d'esprit et"Fon divorcée, etc. Pour qu'un pari ait été engagé, il est nécessaire ''e3 généra{ que la proposition du pari ait été acceptée par un partegairp (lequel a dt faire quelque chose, dire << D'accord! >, par exem-
p!e)' Et l'on peut difficilement parler d'un don si je dis
<<
Je te
le
' -{onne >, mais ne tends point I'objet en question. 1,..Jusqu'ici tout vâ bien. L'action pourrait être exécutée autrement que par une énonciation performative, et de toute façon les circonsT parmi lesquelles d'autres actions être appropriées. - doivent qu'en objectant, nous ayons à I'esprit quelque chose r pe bien différent, et cette,fois de tout à fait erroné - surtout lorsque nous pensons à quelques-uns des performatifs les plus impressiontances
Mais
il- se peut
43
,
l
I
PREMÈRB CONFÉRENCE
QUAND DIRE, C'EST FAIRB
Une fois exclu ce genre d'actes intérieurs, fictifs, pouvons-nous supposer que tout autre élément dont on exige' d'ordinaire, qu'il ( promets que... ) ou < Oui eccompagne une énonciation telle que Je 'fie fait décrit par cette énonciation, prends cette femme...] >, est en présence, ou fausse par son par sa de sorte qu'il la rendrait vraie cas, nous allons par le dernier en commençant absence? Eh bien, de fait, de l'énonciation que disons, nous ce considérer suite tout de
r nants, tels que << Je promets de... >> Personne ne niera, je pense, que ces mots doivent être prononcés << sérieusement ), et de façon à être ] pris < au sérieux >. Ceite remarque, quoique vague, est assez waie en
général; il s'agit d'ailleurs là d'un solide lieu commun dans les discussions sur la portée d'une énonciation, quelle qu'elle soit. Je ne dois pas être en train de plaisanter, par exemple, ou d'écrire un poème. Mais il nous arrive souvent d'avoir I'impression que le sérieux des mots leur vient de ce qu'ils ont été prononcés seulement comme le
I
'
lorsque
{ c'est-à-dire
<<
yÀôoo' ôy,ôg,oX',
|
apte à être ce que décrit ou enregistre effectivement le < Je promets
>>
(ou
sera sans doute considéré comme un moraliste dont le sérieux contraste
avec'l'esprit superficiel d'une génération de théoriciens : nous le voyons ainsi comme il se voit lui-même, mesurant. les profondeurs invisibles de I'espace éthique, avec toute la distinction d'un spécialiste du sui generis !Pourtant, il fournit à Hippolyte une échappâtoire, au bigame une excuse pour son < Oui [je prends cette femme...] >, et au bookmaker marron une défense pour son < Je parie >>. Non : la précision et la moralité sont toutes deux du côté de celui qui dit tout simplement : notre parole, c'est notre'engagement.
mations. ;r.â:
Je n'ai pas I'intention pour autant d'éliminer tous ceux qui travaillent dans lri les coulisses : les éclairagistes, le régisseur, voire le soufreur; j'en veux seulement .d| à certaines doublures inutiles. iii
44
)'
De fait, ne parlons-nous pas d'une << fausse >> promesse lorsqu'une telle intention est absente? Parler ainsi ne signifie pourtant pqs que l'énonciation << Je promets que... >> soit fausse, dans le sens où la personne, affirmant faire, ne ferait pas, ou décrivant, décrirait mal, rapporterait mal. Car elle promet, effectivement .' la promesse, ici, n'ést même pas nulle et non avenue, bien que donnée de mauvaise foi' Son énonciation est peut-être trompeuse; elle induira probablement ,en erreur, et elle est sans nul doute incorrecte. Mais elle n'est pas un mensonge ou une affirmation manquée. Tout au plus pourraitlon trouver une raison de dire qu'elle implique ou introduit un mensonge ou une affirmation manquée (dans la mesure où le déclarant a I'intention de faire quelque chose); mais c'est 1à une tout autre question 6. De plus, nous ne parlons pas d'un faux pari ou d'un faux baptême; et que nous parlions, de fait, d'une fausse promesse' ne pas plus que de parler d'un faux mouvement' ': nous compromet pas un terme nécessairement réservé aux seules affir) <,Faux n'est
spirituelle de chaînes non moins spirituelles. Il est réconfortant de remarquer, dans ce dernier exemple, comment I'excès de profondeur ou plutôt de solennité tout de suite - fraye la voie à I'immoralité.- Car celui qui dit < Promettre ne consiste pas simplement à prononcer des mots : c'est un acte intérieur et spirituel! >
t
foi, ou -non
exécutée, ou quelque chose de semblable. Dans Iij?as particulier de la promesse,.comme dans celui de beaucoup 'qud la personne qui promet ait d'autrei performatifs, il convient 'une certaine ittention (ici, par exemple, celle de tenir parole). Il semble même que dô tous les éléments concomitants, celui-là soit le plus vâise
[10] mon esprit ou quelque autre artiste dans les coulisses *). C'est ainsi que << Je promets de... >> m'oblige : enregistre mon acceptation
,
est
absent
8è gpilv dvorpr,oc6ç,
ma langue prêta serment, mais non pas mon cæur
I'un ou I'autre de ses éléments concomitants habituels
: en aucun cas nous ne disons que l?énonciation était fausse, :mais plutôt que l'énonciation ôu mieux, l'acte* (la promesse, - avenue non et était nulle exemple) fvoid), ou donnée de maufâr
signe extérieur et visible d'un açte intérieur et spirituel signe commode dont le rôle serait de conserver les traces de I'acte-ou d'en informer les autres. Dès lors le pas est vite franchi qui mène à croire ou à supposer, sans s'en rendre compte, que dans bien des cas l'énonciation extérieure est la description, vraie ou fausse, d'un événement intérieur. On trouvera I'expression classique de cette idée dans Hippolyte (v. 612) où Hippolyte dit :
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* Nous en viendrons à éviter cette distinction, justement s'impose pas.
parce qu'elle ne
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Deuxième conférence
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': Nous devions, souvenez-vous, considérer quelques cas (et seulement quelques-uns, Dieu merci!) où dire une chose, c'estlafaire, et noter quel sens cela pourrait avoir. Ou encore, des cas où par le fait de dire lby saying!, ou en disant lin sayingl quelque chose 7, nous faisons
$ quelque chose. Ce thème appartient, parmi beaucoup d'autres, au k& récent mouvement de remise en question d'une présupposition gF
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# Ê. .1Â
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i# :ffi dql{.
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sétulaire : que dire quelque chose (du moins dans tous les cas dignes i. e. dans tous les cas considérés), c'est toujours de considération et tout simplement ffirmer quelque chose' Présupposition sans nul doute inconsciente, sans nul doute erronée, mais à ce qu'il semble, tout à fait naturelle en philosophie. Nous devons apprendre à courir avant que de pouvoir marcher. Si nous ne faisions jamais d'erreurs, comment pourrions-nous les corriger? ,,Jlai commencé par attirer votre attention, au moyen d'exemples, sur quelques énonciations bien simples, de I'espèce connue sous le nom de performatoires ou performatifs. Ces énonciations ont I'air, à première vue, d' < affirmîiiOn3î"'-a-ou du moins en portent-elles
le,maquillage grammatical. On remarque toutefois, lorsqu'on les examine de plus près, qu'elles ne sont manifestement pas des énonfti: {.i ciations susceptiblet d'être << vraies > ou << fausses >. Être << vraie > ou 3H << fausse >, c'est pourtant bien la caractéristique traditionnelle d'une lru #, L'un de nos exemples était, on s'en souvient, l'énonciaafrrmation. w tion < Oui [je prends cette femme comme épouse légitime] >>, telle qu'elle est formulée au cours d'une cérénionie de mariage. Ici nous gÀ &tioot qu'en prononçant ces paroles, nous /arsonr une chose (nous # (qae fiË
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nous marions), plutôt que nous ne rendons compte d'une chose nous nous marions). Et I'acte de se marier, comme celui de parier, par exemlle, serait décrit rrieux (sinon encore avec précision) comme
I'acte de prononcer cerlains nots, plutôt que comme I'exécution 47
i
'
*, {r
i:d, i,i i:j'
ii QUAND DIRE, C'EST FAIFJ
d'une action différente, intérieure et spirituelle, dont les mots en
question ne seraient que le signe extérieur et audible. Il est peut-être difficile de prouver qu'il en est ainsi; mais c'est je voudrais I'affir-
- undefait. Il vaut noter que dans la loi américaine sur le témoignage _ à ce qu'on m'a signalé rapporter ce qu'un autre a-dit est -, le faitàde accepté comme témoignage charge ou à décharge, pour peu que mer
les paroles en question constituent une énonciation du type âe notre performatif- car on considère ces paroles comme rapportant non pas
prtrxrÈur coNrÉRENce ilË ir Essayons d'abord de noter en un tableau schématique - et je ne fr lrétends nullement que ce schéma soit déf,nitif - au moins quelquesnécessaires au*IqqçJlq"F-p.9g"g_qj"(,h-çu{çux">et I L, unes des conditions perfgrgr*_if (du moins d'un performatif explicite et { [.r $qt_hggft! _d'un i très développé, èoinme tous ceux dont nous nous sommes occupés d'échecs et de it jusqu'ici). Nous donnerons ensuite des exemples ili leurs effets. Je le crains fort - mais bien sûr, je I'espère en même i temps - : ces conditions auxquelles il faut nécessairement satisfaire à,.
vont apparaître tout à fait évidentes. tellement ce qu'un tel a dit il s'agirait alors {,un oui_dire, non 1, ., (A.l) Il doit exister une procédure, reconnue par convention, dotée - mais plutôt ce qu'il a recevable comme témoignage foit, une t par convention d'un certain effet, et comprenant l'énoncé de certains -, action sienne. cela ret parfaitement nos impressions initiales *i mots par de certaines personnes dans de certaines circonstances.' sur les performatifs. 1. De plus, Jusqu'ici, donc, nous avons senti glisser sous nos pieds le ferme $St ,(A.2) il faut que, dans chaque cas, les personnes et circonstances terrain des préjugés; mais rien de plus encore. comment allons-nous particulières soient celles qui conviennent pour qu'on puisse invomaintenant poursuivre, en philosophes? Un parti que nous pourrions Ë. quer la procédure en question. ii adopter, évidemment, serait de reprendre notre chemin"m"nt à zéro. (8.1) La procédure doit être exécutée par tous les participants, il Une autre voie ser'jt de nous enfoncer, par étapes logiques, dans ,i!, à la fois correctement et le bourbier. Mais cela demande du temps. commençons au moins ii . tg.zl intégralement. par concentrer notre attention sur cette petite question déjà indiquée ii (l.l) Lorsque la procédure - comme il arrive souvent - suppose I au age - la question des < circonttuoc.r àppropriées >. parier chez ceux qui recourent à elle certaines pensées ou certains ientii n'est pas, comme je I'ai fait re-màlquer en ant, simplement '-ql lii toantt, lorsqu'elle doit provoquer par ta suite un certain comporteprononcer les mots < je parie )) etc. : quelq{r'un pourrait les prononfi ment de la part de I'un ou I'autre des participants, il faut que la cer sans que nous accordions qu'il a effectivement, ou au moins |ï personne qui prend part à là procédure (et par là I'invoque) ait, en [14] complètement, accompli un pari. Pour nous en convaincre, supposons, ! fait, ces pensées ou sentiments, et que les participants aient I'intention par exemple, que nous déclarons notre pari aprèslacourse... En plus ii d'adopter le comportement impliqué *. De pltrs, de la formulation des mots, qui constituent ce que nous avons appelé (1,2) ils doivent se comporter ainsi, en fait, par la suite. .. .. le performatif, il faut généralement que nombre de choses se pré_ contre unc (ou plusieurs) de ccs six règles, riotre f Si nous péchons sentent et se déroulent correctement, pour que I'on considère que performative sera (d'une manière ou-"d'une'autre) ; .énonciation l'acte a été conduit avec bonheur. Nous pourrons espérer découvrir ;. 'inalheureuse./Mais il y a, bien str, pour une énonciation, de considé* ce que sont ces conditions par I'examen et le classement des types de ,' rables différences entre les << manières > d'être malheureuse ,cas où quelque chose fonctionue mal, où I'acte (se. marier, parier, .i:i rences que nous avons voulu souiigner par - ditrénotrc choix de lettres et de f léguer,_, baptiser, ou ce qu'on voudra) constitue par conséquent, chiffres pour chaque rubrique. " au moins jusqutà un certain point, un échec. L'énonciation est alors La première grande distinction est celle qui oppose les quatre -rî,pourrions:nous dire non pas fausse, en îtiiitg,îais malheureuse. Et voilà pourquoi nous- appelons la doctrin e d.es choses qii pèuvent il' se mal présenter et fonctionner mal, lors de telles éuonciations, la t:, ' On expliquera plus tard pourquoi le fait d'avoir ces pensécs, sentiments, :', pas
i,.
doctrine
des Échecs
[nfelicities
81.
48
,,
et intentions, n'est inclus, en constauces mentionnées en (A).
tant que < circonstance >, parmi Iés autres cir49
.
!:
i; i:
QUAND DTRE, c,EsT -.-
FAIRts
il t.
I
(d'où I'emploi I règles de A et de B prises ensemble,,,tt les deux règles dèileltres romaines ici, et grecques'là). Si nous manquons à n'importe # laquelle des premières règles (de A ou de B) si nous prononçons, i:
- nous ne sommes pas li par exemple, la formule incorrectement, ou si en mesure d'accomplir I'acte parce que nous sommes déjà mariés, i parce que c'est le commissaire qui dirige la cérémonie au lieu du ' en question (le irariage, par exemple) n'est ; èapitaine - alors l'acte pas, absolpmÈntbaô, exéiuté4vec succès; {{qpgs-liqu. il o1ç:1-p+l.-. ..
[6]
accompli/Danslesdêuxcasl,enrevanêhÇ1'àctee!t.3cc9*4p!i-
- mem*èii i'aèè-omplir en ces ciiconstances (par exemliéîant ËJui où ' nous ne serions pas sincères), c'est 4busqr*dj_tgp"l,gg{9}re. Ainsi, l" quand je dis < Je promets >,'saffâf,ôil'1T"ffëntÏidïË, iéîiima pro- i: messe, je promets, mais... Nous avons besoin de noms pour désigner i:-i cette première distinction. Nous appellerons, d'une manière générale, iî les-.pc["*s pour manquement aux quatre premières règles (de A.1 3
fD*5-
à
'ceux
qui adviennent lorsque n'a pas été accompli I'acte li (dont la formule verbale. a été énoncée pour l'accomplir lperforml l nous appellerons ces échecs, dis-je, des et en I'accomplissant) INSUCCÈS IMISruÀ,ES]. Nous pouvons, par contre, baptiser du il i"nom d'ABUS les échecs qui ont lieu lorsque .l'acte esl accompli. I (N'allez pàÇ cependant, mettre l'accent sur les connotations habituelles de ces deux motsl) Lorsque l'énonciation est un insuccès, la procédure que nous avions I'intention d'invoquer à partir d'elle, \ se trouve interdite ou bien sabotée; et notre acte (se marier, etc.) i 'r est nul et non avenu, oir sans effet, etc. Nous parlons de notre acte ii comme d'un acte prétendu fpurportefl, ou peut-être comme d'une il tentative ou encore nous employons uire expression telle que f "
,:.
'
nous aurons commis de la façon la plus auront été accomplies mais nous n'aurons pcs accompli intéressante l'acte de bigamie! I'acte prétendu : nous marier. Car malgré le mot, on ne se marie pas deux fois quand on est bigame. (Bref, I'algèbre du mariage suit celle de Boole.) De plus, ( sans effet > ne signite pas, ici, ( sans conséquences, résultats, ou effets >.
Nous devons maintenant essayer de rendre manifeste, parmi les insuccès, la distinction générale entre les cas A et les cas B. Dans les deux cas A, nous trouvons un appel indu [zurnvocationl à une
certaine procédure -- soit parce'que semblable procédure (pour parler sans précision) n'existe pas de fait, soit parce qu'elle ne peut être appliquée comme on tente de le faire. C'est pourquoi on pourrait appeler les échecs de I'espèce A, des Appels rrdr.rs. Nous pouvons
où la procédure raisonnablement baptiser la seconde espèce A peut être appliquée comme on le voudrait existe bel et bien, mais ne du nom d'Emplois indus lMisapplicationsl. Quant à I'autre classe A, la première irommée, je n'ai pas réussi à lui trouver une bonne appellation. Si I'on compare les cas de B à ceux de A, on s'aperçoit que dans les premiers la procedure est irréprochable et qu'elle s'applique en effet; mais nous ratons I'exécution du rituel, ce qui entraîne des
conséquences plus ou moins graves. Nous appellerons donc les cas de B, face à ceux de A, des Exécutions ratées fMisexecutionsl,
: I'acte prétendu est ricid parce qu'une dé&gLll_o,si!é ffawl ou un accroc lhitchi se produit dans la conduite de la cérémonie. La classe B.l est celle des Défectuosités; la classe B.2, celle des Accrocs.
par opposition aux Appels indus'
-
>>, par opposition à << s'est marié >>. Dans les cas l, en revanche, nous parlons de notre acte malheureux t18l comme d'un acte ( purement verbal > [professedf ou (( creux >> fholIowls plutôt que < prétendu )) ou (( vide >; et nous le tenons pour non exécuté, ou non consommé, plutôt que pour nul et non avenu, ou i <<
oEtrxrÈl,rs coNFÉRENcE
fi
a rempli les formalités du mariage
sanseffet.Maispermettez.moid'ajouterauplusvitequecesdistincitions ne sont ni tranchées ni fermes, et plus spécialement, que des [?] expressions comme << prétendu >> et ( purement verbal >> ne résisteront
i pas à une critique très poussée. Deux remarques, enfin, sur les actes i nuls et non avenus, ou sans effet. S'ils sont tels, cela ne signite pas bien str, que nous n'avons rien fait du tout : beaucoup de choses
.''.L/
t
/^t
{lsol
Nous obtenons donc le schéma suivant
*
:
I
[De temps en temps, Austin a employé d'autres noms pour les différents Il serait p€ut-être intéressant d'en mentionner quelques-uns ici : A.1, Jeux refuses; A.2, Jeux indus; B, Coups manques; B.l, Executions ratées;8.2, Non-executions; 1', Manques d'égards; I.1, Dissimulations; 1.2, Inachèvements, Manques de loyauté, Infractions, Indisciplines, Ruptues. J.O.U.]. échecs.
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@ c'D.t.p, =,\
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onuxÈIvre coNrÉ,nrNce
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€ HÈ?, ËT
rNsuccÈs
ASUS
?&
Acte prétendu, mais vide
Acte purement verbal, mais creux
sæ.
t-_-l AB
indus Exécutions
Appels Acte interdit
r---t A.l
t.l Insincérités
ratées
r.2 'I
Acte vicié
:
A-2
8.2
Emplois Défec- Accrocs
indus
tuosités
Je m'attends à ce qu'on ait des doutes au sujet de A.l et de 1.2; mais nous y reviendrons bientôt pour les considérer de plus près. Avant d'entrer dans les détails, qu'on me permette ici quelques remarques générales sur ces échecs. On peut demander : 1. Quelle sorte d' (( aÇte D la notion d'échec concerne-t-elle? 2. Jusqu'à ,quel point cette classitcation des échecs est-elle com-
[9]
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il vaut la peine de noter en guise de rappcl - que parmi >> qui concernent le juriste, il en existe un grand nombre qui sont des performatifs ou comprennent l'énonciation de performatifs, ou à tout le moins qui sont ou comprennent I'effectuation futerformance] de certaines procédures conventionnelles. Et, bien str, vous pourrez apprécier le fait d'autant mieux que les juristes, dans leurs écrits, ont constamment montré qu'ils étaient conscients de I'existence d'un grand nombre de variétés d'échecs, et même, parfois, des particularités de l'énonciation performative. Seule la convicjusqu'à I'obsession tion encore très répandue - et qui va - quê les énoncés de la loi et les énonciations employées, disons, dans les actes légaux, doivent être, de quelque façon, des affirmations vraies ou fausses, a empêché nombre d'hommes de loi de mettre en ce domaine bien plus d'ordre que nous ne pouvons quant à nous espérer je le faire - et n'oserais même affirmer que quelques-uns d'entre eux ne I'ont pas déjà fait. Ce qui en tout cas nous intéresse plus directement, c'est de nous rendre compte qu'un très grand nombre d'actes qui relèvent de I'Ethique ne sont pas philosophes sont - commeenlesdernier tout simplement ressort des trop enclins à le supposer
De plus, les << actes
-
mouvemenls physiques .' beaucoup d'entre eux ont le caractère général
qui
plète?
d'actes
3. Ces classes d'échecs s'excluent-elles mutuellement? Considérons ces questions dans I'ordre (dans cet ordre). 1) Jusqu'où le domaine de l'échec peut-il s'étendre? qu'il ait Eh bien, il semble d'abord évident que l'échec - bien commencé à nous intéresser vivement (ou n'ait pas réussi à le faire!) à propos de certains actes qui consistent (totalement ou en partie) à prononcer des mots soit un mal auquel sont exposés /ous les actes qui ont le caractère -général d'un rite ou d'une cérémonie : donc tous les actes conventionnels. Nort pas, bien sûr, que tout rituel soit exposé à toutes les formes d'échec (d'ailleurs toutes les énonciations per-
rituels, et donc, exposés, entre autres choses, à l'échec. , Nous pouvons nous demander entn et ici il me faut abattre une partie de mon jeu si la notion d'échec concerne les énonciations
formatives ne [e sont pas non plus). Cela est clair, ne serait-ce que du seul fait que beaucoup d'actes conventionnels, tels le p-ari ou le de biens, peuvent s'effectuer de façon non verbale. Et le transfert -genr" de règles doit être observé dans toutes les procédures àêmè conventionnelles de cette espèce : nous n'avons qu'à omettre, dans A, le renvoi spécial au caractère verbal de l'énonciation. Voilà, au
moins, qui est éùident.
seraient (totalement ou en partie) conventionnels ou
qui sont des afirmatlons. Jusqu'à
présent, nous avons introduit comme une caractéristique de l'énonciation performative, principalement < définie r> - si I'on peut parler ainsi - par opposition à l' << affirmation r>, supposée, elle, bien connue. Je vais pourtant mettre (sans plus) ici I'accent sur une tendance apparue depuis peu en philosophie : la très grande attention accordée à ces < affirmations ) qui, pour n'être pas exactement fausses ni proprelhent < contradictoires >, n'en sont pas moins irritantes. Je pense en ce moment aux affirmations qui renvoient à quelque chose qui n'existe pas, par exemple celle-ci : << L'actuel roi de est chauve. r>
'l'échec
On pourrait être tenté de ramener pareil propos au cas où il y a intention de léguer un objet qu'on ne possède pas. Des deux côtés, n'y
a-t-il pas présupposition d'existence? Une affirmation qui renvoie à quelque chose d'inexistant n'est-elle pas plutôt vide que fausse? Et
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;lt,i :1
QUAND DIRE, C'EST FÀIRE
d'ailleurs plus nous considérons une affirmation non comme llne phrase (ou proposition) mais comme un acte de discours (les autres actes étant des constructions logiques éIâborées à partir de l'ecte de discours), plus nous étudions notre objet, dans toutes ses particularités, comme un acte. Notons encore qu'il y a des ressemblances frappantes entre un mensonge et une fausse promesse. Nous aurons à revenir plus tard sur ce sujet *. 2) Notre deuxième question était : jusqu'à quel point cette classification des échecs est-elle complète? l2ll t) Eh bien, il faut d'abord nous rappeler ceci : puisqu'il n'y a pas de doute qu'en formulant nos énonciations performatives, nous < effectuons fuerforml des actions > (en donnant au mot un sens assez juste), alors celles-ci, en tant qu'actions, seront sujettes à un certain nombre de types d'insuffisances auxquels toutes les actions sont sujettes, mais qui sont distincts ou que I'on pourrait distinguer de ce que nous avons choisi de- discuter sous le nom d'échecs. Je veux dire qu'il peut arriver que les actions en général (non toutes les actions) soient effectuées sous la contrainte, par exemple, ou par accident, ou du fait de telle ou telle méprise, ou encore sans qu'on ait eu I'intention de les accomplir. Et il est certain que dans plusieurs de ces cas nous ne sommes pas disposés à dire tout bonnement que l'acte a été accompli, ou que c'est un tel qui I'a accompli. Je ne veux pas entrer ici dans la théorie générale; dans bien des cas de ce genre, nous pouvons même dire que I'acte était < vide > (ou qu'on pourrait le considérer comme < vide > du fait de la contrainte ou d'une influence indue), etc.; etje suppose qu'une théorie générale très savante pourrait couvrir à la fois ce que nous avons appelé des échecs, et ces autres accidents < malheureux > qui surviennent lors de la production d'actions (dans notre cas, celles qui contiennent une énonciation performative). Mais nous laisserons de côté ce genre de malheurs; nous devons seulement nous rappeler que de tels événements peuvent toujours se produire, et se produisent toujours, de fait, dans quelque cas que nous discutions. Ils pourraient figurer normalement sous la I rubrique des < circonstances atténuantes D ou des << facteurs dimiI nuant ou annulant la responsabilité de I'agent D, etc. I
*
[Cf. p. t47l r. J.O.U.].
DEtrxrÈl{B courÉnrNcn
n) Deuxièmement : en tant qu'énoncialiottr, nos performatifs sont exposés égaleme'nt à certaines espèces de maux qui atteignent toute __ encore qu'on puisse les situer dans [22] énonciation. Ces maux-là aussi nous voutons expressément les exclure une théorie plus générale de notre présent propos. Je pense à celui-ci, par exemple : une énonciation performative sera creuse ou vide d'une façon porticulière si, par exemple, elle est formulée par un acteur sur Ia scène, ou introduite dans un poème, ou émise dans un soliloque. Mais cela s'applique de façon analogue à quelque énonciation que ce soit : il s'agit d'un revirement lsea-changel, dû à des circonstances spéciales. II est clair qu'en de telles circonstances, le langage n'est pas employé sérieuse"
meût, et ce de manière particulière, mais qu'il s'agit d'un usage parasitisme dont l'étude parasitairc par rapport à I'usage normal relève du domaine des étiolenenr.ç du- langage. Tout cela nous I'excluons donc de Dotre étude. Nos énonciations performatives, heureuses ou non, doivent être entendues comme prononcées dans des circonstances ordinaires.
ln) C'est en partie pour exclure ce genre de considérations, au moins pour I'instant, que je n'ai pas introduit ici une certaine sorte d'échec ou quelque chose qu'on pourrait fort bien appeler ainsi : celui qui provient d'un << malentendu >. Il est évident, en effet, que pour avoir promis, il faut normalement . A) que j'aie été entendu par quelqu'un, peut-être par celui à qui s'adressait la promesse; B) que celui-ci ait compris que je promettais. Si I'une ou l'autre de ces conditions n'est pas remplie, des doutes surgiront sur le point de savoir si j'ai vraiment promis; et I'on pourrait soutenir que mon acte ne fut qu'une tentative, ou qu'il fut nul et non avenu. On use de precautions spéciales, en matière de loi, pour éviter cet échec ou d'autres, lorsqu'on veut, par exemple, signifier des [23] assignations ou des sommations. Nous aurons à revenir plus tard, dans un autre contexte, sur cette très importante considération. 3) Ces cas d'échecs s'excluent-ils mutuellement? La réponse est évidente : a) Non, en ce sens que nous pouvons agir incorrectement de deux façons à la fois (nous pouvons promettre, et sans être sincères, à un âne de lui donner une carotte). ô) Non et ceci est plus important etr ce sens que les mauvais
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)
QUÀND DIRE, C'EST TAIRE
fonctionnements ( se fondent les uns dans les autres D et << se recoupent D, ce qui rend leur distinction < arbitraire > de toutes sortes de façons.
Troisième conférence
l25l
Supposons, par exemple, que j'aperçoive un bateau dans une cale de construction, que je m'en approche et brise la bouteille suspendue à la coque, que je proclame < Je baptise ce bateau le Joseph Staline >>,
et que, pour être bien sûr de mon affaire, d'un coup de pied je fasse sauter les cales. L'ennui, c'est que je n'étais pas la personne désignée pour procéder au baptême (peu importe que Joseph Slaline ait été plus; ou non Ie nom prévu - ce ne serait qu'une complication de I'affaire serait peut-être même plus regrettable, en un sens, s'il s'agis' sait du nom prévu). Nous ettrons sans peine : 1) que le bateau n'a pas, de ce fait, reçu de nom *; 2) qu'il s'agit d'un incident extrêmement regrettable. On pourrait dire que j'ai < rempli certaines des formalités > de la procédure destinée à baptiser le bateau, mais que mon ( action > fut < nulle et non avenue ) ou ( sans effet ), parce que je n'étais pas Ia personne adéquate, que je n'avais pas les << pouvoirs D pour I'acçom[2a] plir. Mais on pourrait dire aussi - pour résoudre le problème autrement - que lorsqu'il n'y a ni prétention ni même I'ombre d'un droit aux pouvoirs, alors il n'existe aucune procedure conventionnelle reconnue : c'est une imitation bouffonne, comme un mariage avec un singe. Ou encore pourrait-on dire que la procedure, pour une part, consiste à se faire dési-ener. Lorsque le saint baptisa lès pingouins, était-ce nul et non avenu parce que la procédure du baptême ne saurait être appliquée aux pingouins, ou parce qu'il n'y a aucune procédure reconnue pour baptiser quoi que ee soit, si ce n'est des humains? Je ne crois pas que ces incertitudes importent au niveau théorique qui est le nôtre, bien qu'il soit amusant de les examiner et qu'il soit avantageux, en pratique, d'avoir à notre disposition, comme les juristes, une terrninologie qui puisse en venir à bout.
t Baptiser des bébés est tâche encore plus délicate : on pourrait avoir le mauvais nom et le mauvais ecclésiastique, c'est-à-dire quclqu'un qui a droit de donner nom à des bébés, mais qui ne serait pas désigné pour donncr un nom à
ce bebe-ci.
Dans notre première conférence, nous avons établi comme une dis-
tinction préliminaire que l'énonciation performatiye ne dit pas, ou ' ne se limite pas à dire, queïqîe-îfrôG, ,, qu'elle n'est pas un compte rendu, vrai ou f'Jux, d'un phénomèhe. ,,' Dans la deuxième, nous avons fait remarquer que si elle n'est jamais vraie ou fausse, elle est néanmoins sujette à la critique * qu'elle peut être malheureuse; et nous avons dressé une liste comprenant
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six de.ceg types d'Échecs. Quatre d'entrc eux empêchent le succès de,, ltdnonciation et rendent nul et nc'n avenu I'acte prétendu, de sorte i qu'il n'a pas eu lieu effectivemenf{es deux autres, en revanche, ne font d'un acte purement verbal lltrofessedl qu'un simple abus de procédure.pSi bien que nous voilà apparemment armés de deux beaux côncepts tout neufs et prôts à nous emparer de la Réalité ou (selon le cas) de la Confusion. Deux nouvelles clés en main donc, el en même temps, bien sûr, deux nouvelles entraves aux pieds. En philosophie, un homme prévenu n'en vaut pas deux. Ce serait même plutôt le contraire... J'ai ensuite piétiné quelque temps, discutant certaines questions générales relatives au concept d'Échec, et j'ai situé ce concept à peu près à sa place, dans un nouveau secteur de notre channp
d'investigation. J'ai affirmé
l) qu'il s'applique
à tous les actes rituels
ftras seulement aux actes verbaux), et que ces actes rituels sont plus courants qu'on ne croit. J'ai is 2) que notre liste n'était pas complète et qu'il existe, en effet, bien d'autres domaines où se mani[26] festent disons des << malheurs > susceptibles d'affecter soit les actes rituels en général soit les énonciations en général; ces domaines étant, sans nul doute, l'affaire des philosophes. J'ai enfin is 3) que divers échecs peuvent, comme il va de soi, se combiner ou se recouper, et qu'on peut, au choix, faire entrer tel exemple dans une classe ou une autre.
Nous devions considérer ensuite quelques exemples d'échecs, à nos six règles. Permettez-moi de vous
c'est-à-dire d'infractions
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./ QUAND DIRE, C'EST FAIRB rappele r d'abord la règle A. I : il doit existe r une prqcédure, reconnue par convention, dotée par convention d'un certain effet, et comprenant
l'énoncé de certains mots par de certaines personnes dans de certaines circonstances. Puis la règle 4.2, bien str, qui complète la précédente : il faut que, dans chaque cas, Ies personnes et circonstances parti-
culières soient celles qui conviennent pour qu'on puisse invoquer
la procédure en question.
.
A.l, Il doit exister une procédure, reconilue par convenlion, dotée par conventîon d'un certain efet, et comprenant l'énoncé de certains mots par de certaînes petsonnes dons de certaines circonstances.
La dernière partie, évidemment, tend simplement à limiter la règle aux cas d'énonciations; elle n'est pas, en principe, importante. Notre formulation contient le: Ci,ax mots ( exister > et ( recotrnu D; nous pouvons cependant, non sans raison, nous demander si < exister n peut avoir ici un autre sens qu' < ètre reconnu > et s'il ne conyiendrait pas de leur préférer < être (généralement) employé >. Nous ne saurions l27l donc nous servir des termes < l) exister, 2) être reconnu > comme si de rien n'était. Eh bien, pour tenir compte de cette légitime question, considérons, d'abord et séparément, ( reconou D.
Si quelqu'un formule une énonciatiou performative, et si elle est classée comme un insuccès parc€ que la procldure invoquée n'est pas
un objet auquel la procédure du choix soit applicable. Ou encor.,
sur une île déserte, vous pouvez me dire : << Allez ramassçr du bois >; et je puis vous répondre : < Je n'ai pas d'ordres à recevoir de vous >r, ou << Vous n'avez pas qualité pour me donner des ordres >. Je n'accepte
I'un et I'autre étant chrétiens plutôt que mahométans. Ici, quelqu'un pourrait dire : << Reste qu'il n'a pas divorcé (avec succès), car c'est une autre procedure, verbale ou non verbale, que nous reconnaissons, à I'exclusion de toute autre D; ou peut-être même : < Nous (nous) n'ettons absolument aucune procédure de divorce -_ le mariage est indissoluble, >> Il peut même arriver qu'on rejette c€ qui mérite d'être appelé un code de procédures en son entier par exemple le code de I'honneur comportant le duel. C'est ainsi qu'un dét peut nous être laacé par << Je vous enverrai mes témoins r> ce qui équivaut à < Je vous provoque en duel )) * sans que nous nous en soucioss le moins du monde. C'est là la situation exploitée tout au long de la tristc histoirc dc Don Quichotte. 58
59
chrétien,
,
Il est évident que le problème devient relativement simple si nous n'ettons jamais une procédure ( comme cellelà > - c'est-à-dire quelque procedure que ce soit pour faire ce genre de chose, ou cette procédure-là eo tout cas pour faire cette chose particulière-là. Mais il peut aussi arriver que nous reconnaissions de fait une procédure dans certaines circonstances ou compte tenu de certaines personnes, mais non s'il s'agit d'autres circonstances ou d'autres personnes. Nous pouvons alors être amenés à nous demander (comme dans [28] I'exemple du baptême du bateau, considéré plus haut) si l'échec doit bien entrer dans la classe A.l (que nous étudions en ce moment), ou plutôt dans A.2 (ou même dans B.l ou 8.2). Dans une réunion, par exemple, lorsqu'il s'agit de former les camps pour lancer un jeu, vous dites : < Je choisis Georges. > A quoi Georges répond en grognant : < Je ne joue pas. > Georges a-t-il été choisi? Sans aucun doute, il y a là une situation rnalheureuse. Mais on peut dirc que vous n"âvez pas choisi Georges, soit parce qu'il n'exis{e aucuûe convention permettaut de choisir des personnes qui ne jouent pas, soit parce que Georges, dans les circonstances présentes, n'est pas
pas d'ordres de vous quand vous essayez d'imposer votre autorité sur une île déserte (une autorité que je peux reconnaître, certes, mais seulement si je le veux bien); et cela contrairement au cas où vous êtes le capitaine du bateau et possédez de ce fait une autorité authentique. Nous pourrions dire, en revanche, ramenant ces cas-là à la classe A,2 (Emploi indu), que la procédure prononcer certains mots, etc. était bien correcte et reconnue,- mais que les circonstances dans lesquelles elle a été invoquée, ou les personnes qui l,invoquèrent, n'étaient pas adéquates. < Je choisis > est dans I'ordre, mais seulement quand I'objet du verbe est un <( joueur >; de même, pour un commandement : le sujet du verbe doit être un << commandant ) ou une << autorité >>. Nous pourrions dire aussi, ramenant cette fois nos cas à la règle 8.2 (et peut-être dewions-nous réduire la suggestion précédente à celle-ci) : la procédurc'n'a pas été complètemcnt exécutéc; on pcut,
reconnue, on a des raisons de croire que ce sont d'autres personnes qu€ celle qui parle qui ne la reconnaissent pas (si du moins celui qui parle le lait sérieusement). Quel exemple donner? Considérons la phrase : < Nous voilà divorcés! >, adressée par un mari à son épouse, en pays
,
rRolsrÈr,æ coNrÉn_encs
QUAND DIRE, C'HTT FAIRE
effet, tenir pow pailie nécessaire dc la procfiure que la personne [29] qui est I'objet du verbc < Je vous ordonnè de... > aii deje constitue en autorité, par quelque procédure tacite ou verbale, i" p".rooo. qui donne I'ordre (en disant, par exemple, < Je prométs de faire ce que yous mè commanderez >). Vous reconnaissèz h, bien sûr, uze des incertitudes en vérité, une incertitude toutil"it ggre*r. - et, qui sous-tendent les.débats rorsqu'on discute, en théorie piritiqu", -sur le point de savoir s'il y a ou oon, ou s'il devrait v uuoir, ,io .onlr"t social.
Il me semble que ra manière dont nous tranchons des cas particuliers est en. principe importance _ bien que nous -sans puissions nous entendre, soit a partir des faits, soit Ën infroduisant d'autres définitions, pour préférer telle solution à telle
autre. Mais suit :
il
importe en principe de voir clairement ce qui
l. Contrairem*j. 1-* qu'implique 8.2, ce serait en vain que nous inclurions le plus d'éréments pô*iure dans Ia procédure : iliesterait toujours que quelqu,un pourrait rejeter le tout. 2. Pour qu'une procédure soit recoruue, ne suffit pas qu'e'e soit
ea fait d'usage couranr' même pour Iés' personnes actuenement concernées. Il doit encore-demeurer en principe possible à quiconque de rejeter la procédure (ou le code de procédure, * _ê*" qu'on aurait reconru jusqu'ici * comme il peut arriver,""ioi par exemple, pour le code de I'honneur). Celui qui IJ rejette ,,""pÀ., bien str, à des sanctions : les autres refuseiont de jou* uu.i tu; ou diront qu'il n'est pas homme d'honneur. par-dessus tout, ir faut se garder de tout définir en fonction tle circonstan.", ioooé", [lfactuall, et de cas stéréotypés [1flatl : ce serait s,exposer I la vieille objection qu'un << ça doit être > ne peut pas se tiier d,un << c,est
ainsi >. (Être reconnu n'est par une iirconstance, au sens propre.) Dans les procédures des jeux, par exempre (et de nombreusesiuiresy, et si appropriées que soient par ailleuis làs circonstan""r, ;" cependant fort bien ne pas jouer en fait. Nous voudrions f"* même [30] avancer qu'il est en fin de compte problématique de définir < reconnu > par < employé d'habitude D. Mais c'est là un point plus difficile à éclaircir...
Deuxième point : que. veut-on signifier quand on suggère qu,uae procédure pourrait parfois de pas même exister qo.*ti'io aitrLrentc
6
-
rRorsrÈMe coxrÉnrxce
savoir si Ia procédure est ou non reconnue par ce groupe-ci ou celui-là * ? l. Nous avons le cas des procédures qui << n'existent plus D, en ce seûs, tout simplement, que s'il fut un temps où elles étaient généralement reconnues, elles ne Ie sont plus aujourd'hui, ni généralement, ni même par quiconque : la provocation en duel, par exemple. Ir. Nous avons les procédures inaugurées par quelqu'un. Il arrive parfois qu'une personne trouve à << s'en tirer > de cette façon ; comme celui qui, au rugby, attrapa le premier le ballon et se mit à courir. S'en tirer est chose essentielle, en dépit d'une terminologie suspecte. Considérons telle éventualité : si je vous dis < Vous avezétê,lâche >, ce peut être un reproche ou une insulte; et je puis expliciter ma déclaration en disant < Je vous reproche de.., >; mais non en disant **. [31] < Je vous insulte >. Les raisons n'importeni pas ici Çp qui importe, c'est de remarguer qu'un genre special d'insuccès lnoi-play ***l ss produira si quelqu'un d,it, de fait, < Je vous insulte >. Car si I'insulte de celle de
est, une procédure conventionnelle- _çt, en effet, au premier chef, velbale-- de sorte qu'en un sens nous ne pouvons pas ne pas com-
'
prendre la procédure que I'autre a I'intention d'invoquer il reste qu'à peu près infailliblement rous r'entre-rons pas dans-,son-jeu : non pas simplement parce qu'une é'ônvention, là, n'est pas reconnue, mais parce que nous sentons confusément la présence d'un obstacle dont la.nature ne nous apparaît pas immédiatément, et qui s'oppose à ce que, reconnue, elle le soit jamais.
.
Nols nous gardons bien de nous demarder si la procédure
<<
existe > ou non
qui est fort compréhensible : il est courant et dè mode, aujourd'hui, que ce -motcenous donne la chair de poule (et pour de bonnes raisons, èn eénéral); mais nous pouvoos_dire.que le doute porte plutôt sur la nature précise, ou la définition, ou la compréhension de la procédure, laquelle, sans auèun doute, existe et ert
teconnue.
..
Plusieurs procédures et formules de ce genre se révéleraient inutilisables si nous les reconnaissious; peut€tre faudrait-il, par exemple, nous interdire I'emploi de la formule << Je vous promets de vous rosser ), Mais on me dit qu'à l'époque où le duel entre étudiants était florissânt en Allemagne, les membres d'un cfub avaient coutume de déûler devant les membres du club rival, puis, lorsque læ deux clubs se faisaient face, chacua des membres du premier disàit très poliment à son adversaire désigné dans le second : < Beleidigung >; ce qui signifie i Je vous insulte >. [1, J9u refusé > fut le nom qu'Austin donna, pendant un certain temls, aux échecs de la catégorie A.l, PIus tard il rejeta ce mot, mais il demeure ici dàns ses
t.t
noter. J.O,U.I
6l
rnorsrÈun coxrÉnrncr
QUAND DINT, C'EST FAIRE
Toutefois il arrivera beaucoup plus fréquemment qu'on ne sache pas'avec c€rtitude jusqu'où une procédure peut s'étendre .- quels cas elle couvre ou à quelles variétés de cas on pourrait I'appliquer. Il est dans la nature même de toute procédure que les limites de son applicabilité et aussi, bien str, sa dÈûnition < précise r>, demeurent vagues. Il se présentera toujours des cas difficiles et marginaux, où rien dans I'histoire antérieure d'une procédure conventionnelle ne décidera d'une manière déûnitive si cette procédure est ou non correctement appliquée à tel cas. Puis-je baptiser un chien, si de I'aveu de tous il est doué de raison? ou y aura-t-il insucces? La loi abonde en décisions difficiles de ce genre 10 - pour lesquelles, évidemment, il devient assez indifférent que nous soyons amenés à décider (A.l) qu'une convention n'existe pas, ou (A.2) que les cir[32] constances ne sotrt pas celles qui permettent d'invoquer une convention'qui, sans aucun doute, existe. De toute façon, nous tendrons à nous considérer liés par Ie < précédent )) que nous avons établi. Habituellement les hommes de loi préfèrent cette dernière voie qui applique, plutôt qu'elle ne crée, la loi.
Un autre type de cas peuvent être qui méritent une mention spéciale.
.
, I fi
:i
classés de très diverses manières,
Les énonciations performatives que j'ai prises comme exemples représentent toutes des cas très élaborés de performatifs : nous les appellerons plus tard des qe$or_mati.*lÆrfdr opposition aux innticites.le veux dire qu'elfe-s"comfrËiËiffffite$ par ou contiennênt ugg.etpre,::19,r_ lL.r significative et_ très claire,-telle que < Je parie >r, << Je promets >, < Je lègue > employée aussi - expression très communément porir irommer I'acte même que j'accomplis en form-.rlant l'énonciation (par exemple, parier, promettre, léguei, etc.).
explicite que le simple impératif < Partez > - si celui qui parle m'ordonne (ou tend à m'ordonner)
o1il;pur.ffii
il;;;;
il se peut que rien dans 1"s:+'7rr.,'! ; ne nous permette de décider même si oui ou non I
distincts des explicites; et
.pge|Ies, -iirconstances
l'énonciation est performative. De toute façon, une situation donnée peut me laisser libre de choisir entre deux interprétations. Peul-être s'agissait-il d'une formule performative, mais la procédure en question n'était pas invoquée assez explicitement. Peut-être ne I'ai-je pas interprétée comme un ordre ou n'étais-je, etr tout cas, pas tenu de I'interpréter ainsi. I"a personne n'a pas interprëté les mots comme une promesse : c'est-à-djre. qu'en ces circonstances particulières, êlle n'a pas reconnu la procédure, parce que son interlocuteur n'avait pas complètement exécuté le rituel. Nous pourrions assimiler tout cela à une action défectueuse ou incomplète (B.l ou B.2) : en réalité elle est complète, mais non dépourvue d'ambiguité. (En matière de droit, évidemment, cette sàrie ôe peiformalif peu explicite sera normalement ramené à B.l ou à B.2 : on a statué légalement que léguer sans formule expresse, par exemple, est utr acte ou incorrect ou incomplet; mais une telle rigidité n'existe pas dans la vie courante.) Nous pourrions également considérer ce cas comme un Malentendu (sujet dont nous reportons l'étude à plus tard), mais ce serait une espece spéciale de malentendu, ayant trait à Ia valeur fiforcel de l'énonciation, et non à sa signification u. L'essentiel, ici, n'est pas seulement que I'auditoire n'a pas
èômpris, mais qu'il n'avait pas à comprendre (à interpréter tel propos, par exemple, comme un ordre). t34l En fait, nous pourrions même ramener ce cas à A.2 en disant que Mais il est bicn str évjdent que hs , la procddure tr'est pas faite pour être utilisée là où il n'est pas clair et c'est là un fait important {!{ qu'on I'utilise présentement. (Pareil usage rend la procédure tout à nous pouvôns à I'occasion*ugçr dg f*é1oggftjon_< P,artez pf!6ili*'fait nulle et non avenue.) Il faudrait exiger qu'on ne puisse accomplir à peu près la même chôiJqù'ëà'dîiant :-.ilêïôus ordonne d'une procédure que dans des circonstances qui montrent sans de partir >. Et pour dc.crire ensuite ce qui a été fait, nous dirions tout ambiguité qu'on est en train de le faire. Mais c'est là un idéal difficile bonnement, dans les deux cas, q!l'gq-I!'a ordonnf d-e pa4i-r, pr.qn à atteindre,.. peut se demander, de fait et à sien tenir à la seule énonciation, on pouriâ toujours se le demander dans le cas d'une formule aussi peu 62
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QUAND DIRE, C'EST FAIRE
rnonÈræ coNrÉneNcs
4.2. il faut que daw chaque cas, Ies persannes et circonsrances parliculières soient cerres qui conviennent-pour qu'on puisse invoguer Ia procédure en question.
Nous allons mainteuant envisager les infractions à A.2. ce type
d.'échecs que nous avons appelé Emplois
inaur.
r"r1i"r;ù,
,âi,,
légion. << Je vous nomme >>, prononcé alors que vous avez déià été nommé, ou qu'un autre I'a jté, ou qr. pu, o,ui le droit de'faire l" cette nomination, ou si vous êtes ur chèval. < bui [e prends cette femme] >, prononcé alors que votre degré de parenté vous 9u.g.-u."ot Ie capitaine d'un bateau qui-n,est pas en mer.
l,interdit,
<<
Je donne >,
si I'objet ne m'appartient pas, ou s,il s,agit de ma chair vivante et dont je ne puis disposer rz. Nous uuon, p"n ri.u* ._pï.rrl""rl JirÈrentes selon ces cas : << ultra vires >>, < incapacité >, < objet qou
,tl
personne, etc.) inadéquat ou impropre >, < non habilité D, etc. Il est dans la nature des choses que ra limite entre < personnes inadéquates > et < circonstances indues > ne soit pas très ,igou..ur.. Les < circonstances )), en effet, peuvent allerjusqu'à r."ourril entièrement les < caractères > de tous les participants. Mais il nous faut distinguer entre les cas où I'inadéquation d., p..ronn.s, objets, noms, l'
, et tË, c", ptus riÀple.s danstesqu.ls l,obiet :T ;l:lè"ede ou r-( exécutant > n'est pas du genre ou du type qu,il faut. Encore
une fois il s'agit rà d'une distinction assez giossièie et qui tend à disparaître, mais q,ri n'e_st pourtant pas sans importance (Ën matière d. j:L par exemple). Nous devons donc distinguer les cas où un ecclésiastique se trompe de bébé mais prononce Ie prénom fixé, et ceux oir il baptise un bébé < Albert o uu ji.u d, < Alfred >, des cas où I'o.n dirait < Je baptise cet enfant 27A4 >> ou < Je vous promets que je vais vous enfoncer la mâchoire ), ou encore des cas où r'on aoon.iuii officiellement à un cheval le titre de Consul. Ici, c,est L g.n., ou i" type rnême qui est en.question, alors que précédemment ir ti. s'agissail que d'une question d'incapacité. Nous avons déjà mentionné des cas où A.2 et A.l (ou A.2 et B.l) se recouvraient. peut-être dirons_nous plus volontie* qu;if ,tgli d'un appel indu A.l lo.r-1lg c'est la prironn* elte_mêmi qui n,Jst pas adéquate, que lorsque I'échec vient seurement de c. que la personoe n'a pas été désignée en bonne et due forme; en dùutrei termes, lorsque rien ni procédure ni nominations antérieures, etc. * ne
-
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pouvait, dès le départ, mettre la situation en ordre. En revanche, si Dous nous en prenons à la question de la nomination au sens littéral (ciest-à-dire la position, et non le statut), nous pourrions ranger l'échec parmi les procédures mal exécutées (par exemple, voter pour un candidat avant qu'il ait été officiellement présenté). La question est ici de savoir où nous arrêter dans cette analyse régressive de la < procédure ll... Nous en arrivons maintenant aux exemples de B (sur lesquels nous avons déjà empiété, bien entendu), appelés Exécutions ratées.
B.l. I^q procédure doit être exécutée par tous les participants,
et
correclement.
Il s'agit de défectuosités. Elles se produisent lorsqu'on emploie, par exémple, de-_mauvaises formules : la procédure convient aux [36] perso,nnes
et circonstances, mais ne se déroule pas correctement. On
tùùuè plus facilement des exemples en matière de droit; la
vie
courante, où règne plus d'indulgerrce, n'offre pas de cas aussi nettement définis. L'emploi de formules implicites tomberait sous cette rubrique. Sous la même-rubrique se range également I'emploi de formules vagues et de références incertaines : quand je dis, par exemple, << ma maison >>, alors que j'en possède deux, ou < Je vous parie que la course n'aura pas lieu aujourd'hui >, alors que plusieurs çourses ont été prévues. L'auditoire peut s'y méprendre, ou ne saisir le sens que peu à peu, mais c'est là une autre question; une défectuosité s'est glissée dans le rituel, quel que soit le sens reçu par l'auditoire. Une des questions les plus difficiles à trancher est celle de savoir si le < consensus ad idern>> est nécessaire quand deux parties sont en jeu. Dois-je absolument m'assurer de I'interprétation correcte, au même titre que de tout le reste? Quoi qu'il en soit, il s'agit évidemment d'une matière soumise aux règles B et non pas aux règles
l.
8.2. La procédure doit être exécutëe intégralement par tous
les par-
ticipants.
Il
s'agit d'accrocs
:
nous tentons d'exécuter Ia procédure, mais
Itacte échoue. Ma tentative de faire un pari en disant < Je vous parie bix pence > échoue, par exemple, à moins que vous na diri., < D'accord! > (ou des paroles à peu près équivalentes); ma tentative de me marier en disant << Oui > échoue, si la femme dit < Non >; ma 65
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
TRorsrhfi cor{rfu,sNcB
tentative de vous provoquer en duel échoue si je dis < Je vous provoque ), mais néglige d'envoyer mes témoins; ma tentative d'inau-
Il pcut sembler, après toutes ces remarques, que Dous ayons tout sinplement renoncé à nos règles. Il n'en est rien. Il est clair que six €speces d'échecs peuvent toujours se produire même s'il est parfois malaisé de dire lequel d'entre eux a lieu dans tel câs concret. Et il demeure possible de les définir, du moins en certains cas, si nous le désirons. Mais nous devons à tout prix éviter de simplifier à I'exces : on serait tenté de dire que c'est là déformation professionnelle des
37] en duel
gurer une bibliothèque échoue si je dis < Cette bibliothèque
est
ouverte > mais la clef se casse dans la serrure, comme (et inversement) le baptême d'un bateau échoue si je fais sauter les cales avant d'avoir dit << Je lance ce bateau >>. Dans la vie courante, encore une fois, un certain laisser-aller est autorisé; sinon, imaginez quand les affaires universitaires aboutiraient ! Il est naturel de se demander parfois si aucuû supplément n'est requis. Faut-il que vous ayez accepté, pour que je vous aie fait un cadeau? Sans doute une acceptation est-elle nécessaire dans le domaine des affaires; mais est-ce le cas dans la vie courante? Semblable incertitude surgit quand une nomination est faite sans le consentement de la personne en question. Le problème se pose alors de savoir jusqu'à quel point les actes peuvent être unilatéraux r3. On peut aussi se demander quand I'acte se termine, et ce qui peut être tenu pour son
philosophes, si ce n'était leur profession.
achèvement *. Je vous prie de remarquer qu'en tout cela, nous n'avons pas voulu évoquer d'autres situations où un malheurpeut surgir : ainsi lorsque
celui qui agîtlthe performerl se trompe tout simplement sur les faits; ou lorsqu'il y a désaccord sur ces faits ne rien dire des diver- pouraucune gences d'opinion. Il n'existe, par exemple, convention me permettant de vous promettre de faire quelque chose à votre détriment et, par conséquent, m'obiigeant envers vous à tenir ma promesse. Mais supposons que je dise < Je promets de t'envoyer au couvent > : je puis penser, mais pas toi, que ce sera pour toû bien; ou encore tu peux le 38] penser, mais pas moi; ou même nous pouvons le penser tous deux, alors que la suite montrera qu'en fait il u'en est rien. Ai-je invoqué une convention inexistante dans des circonstances indues? Inutile de dire - et il s'agit d'un principe général - qu'on ne saurait choisir de façon satisfaisante entre ces alternatives trop grossières pour pÈrmettre la solution de cas subtils. Il n'y a pas de raccourci qui permette d'exposer simplement mais dans toute sa complexité une situa-
tion qui ne saurait -trouver sa place exacte dans-aucune
des
classifi cations courantes.
.
Ainsi peut-on se demander si échouer à fairc accepter un don cst unc incapacité d'achever le gesæ lui-même, ou bien un &hec du typo F. 66
:'-'
:il
Quatrième conférence
lsel
Dans notre dernier exposé, nous avons considéré divers cas d'Ifuhecs : ceux où il n'existe aucune procédure, ou du moins aucune procedure reconnue, ou bien encore où la procedure a été invoquée dans des circonstances indues; ceux aussi où I'on a mal employé la procedure; ceux, enfin, où on I'a employée, mais de façon incomplète. Et nous faisions remarquer que ces situations peuvent parfois se recouper, les interférences se produisant généralement avec les type d'échec auquel toutes les énonciations sont sans Malentendus
-
les doute exposées - et avec Erreurs. Un dernier cas relève de l.l et 1.2 : les insincérités et les infractions (ou ruptures +). Ici, dirons-nous, I'acte z'est pas nul et non avenu, bien qu'il demeure malheureux. Permettez-moi de répéter les définitions : l.l. Lorsque la procédure - comme il arrive souvent - suppose chez ceux qui recourent à elle certains sentiments, pensées ou intentions, lorsqu'elle doit provoquer par la suitô ùn certain èôiirpôrtenient -de la part de I'un ou I'autre des participants, il faut que la personne
qui prend part à la procédure (et par là l'invoque) ait, en fait,
ces
pensées, sentiments ou intentions, et que les participants aient l'intention d'adopter le comportement impliqué; 1.2. de plus, les participants doiveat se comporter ainsi par la suite.
l4Al
l.
Sentirnents
Voici
des exemples où les sentiments requis font défaut : Je vous félicite r>, paroles prononcées alors que je ne me réjouis nullement, alors que je suis peut-être même agacé. <<
<<
Je vous exprime mes condoleances D, alors que je n'éprouve
aucune sympathie.
t
[Cf. p.
[8],
ct oote au bas dc ccttc mêmc page.l 69
QUÂND DTFJ, C'EST FÆRE
euÀTRrÈMB colrrÉpsNcs
Les circonstances sont appropriées et I'acte a bien lieu, il n'est pas nul et non avenu ; mais il est, en fait, insincère. Je n 'ai pas à vous féliciter ou à vous exprii.ner mes condoléances, étant donné ce que je ressens.
vraiment ainsi : pensée alors juste par opposition à erronée. (Même distinction entre un sentiment éprouvé, de fait, et la question de savoir si ce sentiment est justifié; entr€ une intention et la question de savoir si cette intention est réalisable.) Mais les pensées constituent un cas très intéressant, c'est-à-dire très déroutant : intervient ici I'insincérité, élément essentiel du mensonge, lequel n'est pas simple-
2. Pensées Voici maintenant des exemples où les pensées requises font défaut : < Je vous conseille de... >, alors que je ne pense pas qu'il s'agisse pour vous de la meilleure voie à suivre. je je < Je le juge innocent - I'acquitte >, alors que le crois, en fait, coupable. Ces actes ne sont pas nuls et non avenus. De fait, je donne un conseil, je reods un verdict, même si je ne suis pas sincère. ll y a parallélisme évident, ici, avec un des éléments du mensonge : avec Ia production d'un acte de discours qui relève del'assertionr4.
3. Intentians Voici enfin des exemples où les intentions requises sont absentes < Je promets >, alors que
:
je ue me propose aucunement de tenir ma
promesse. < Je
parie
>>,
alors que je n'ai pas l'intention de payer.
je n'ai pas l'intention de me battre. Bien que je n'emploie pas ces termes < sentiments >, << pensées >, et < intentions )r dans un sens technique (mais plutôt au sens large), il me faut apporter quelques precisions : l) I-es distinctions proposées sont si imprécises qu'on ne peut s'attendre à parfaitement distinguer les cas les uns des autres. Les €s peuvent d'ailleurs se combiner entre eux, et c'est ce qui se produit habituellement. Si je dis, par exemple, < Je vous féficite >, dois-je waiment avoir le sentiment (ou plutôt la pensée) que vous avez bien agi ou bien mérité? Ai-je la pensée (ou plutôt le sentiment) que ce fut un acte tout à fait digne d'éloges? Reprenons la promesse : je dois, bien sûr, avoir une certaine intention, mais je dois aussi tenir la chose pour faisable et peut-être penser que celui à qui je promets pense y trouver < Je déclare la guerre >r, alors que
U
un avantage; ou encore le penser moi-même pour lui.
2) Nous devons distinguer entre peoser vraiment qu'il en est ainsi est coupable, il est I'auteur du méfait, par exemple, ou I'hommage -lui ilrevient, et le penser alors qu'il en est c'cst bicn lui qui a agt
-
70
ment I'affirmation d'une chose qui est en fait fausse. Quelques exemples :je pense, en disant < Innocent! >, qu'il est I'auteur du méfait; ou, en disaut < Je vous félicite >, qu'il n'est pas I'auteur de I'exploit : mais, en pensant cela, je puis me tromp€r en fait. erronées (bien que sincères), il en l42l Si certaines de nos pensées sont résultera évidemment un échec d'un genre différent : a) Je puis donner une chose qu'il ne m'appartient pas, en fait, de donner (bien que je le pense). On est tenté de dire qu'il s'agit alors d'un < Emploi indu >, que les circonstances, objets, personnes, etc., De sont pas ceux que la procédure de la donation exige. Il faut cepense rappeler ce que nous disions : que nous exclurions tout ce ' dant qui peut sans doute s'inscrire sous le nom d'tfuhec, mais relève de I'erreur ou du malentendu. Il est à noter que I'erreur ne rend pas, en général, l' acte nul et non avenu ; elle peut, du moins, Ie rendre e xcusable. à) < Je vous conseille de faire X> est une énonciation performative. Considérez le cas où je vous conseille de faire une chose qui, en réalité, ne vous est pas du tout avantageuse, bien que je le pense. Ce cas est très différent de (l) * : on n'est nullement porté, ici, à penser que I'acte peut être nul et non avenu, ou le devenir; ou qu'il n'est
pas sincere. Nous introduirions plutôt une autre notion critique, entièrement neuve : nous dirions qu'il s'agit d'un mauvais conseil. Qu'un acte soit heureux à tous les points de vue dont il a été question jusqu'à présent ne le soustrait pas pour autant à toute critique. Nous reviendrons sur ce point.
3) Nous reviendrons également sur le cas suivant, encore plus difficile : il exirte une classe d'énonciations performatives que j'appelle desiGrdiilt-'j et dont voici des exemples : ( Je juge I'accusé [43] coupaTlë-i, ou simplement < Coupable! >>, ou encore, I'arbitre dit < Éliminé! >. Quand nous disons < Coupable! >, I'acte est heureux en un sens si nous pemons sincÈrement, d'après les témoignages,
I
[Ce chitrrc renvoic probablemcnt aux exemplcs en haut dc la paæ [4Ol ct
non à ccux dc la paæ [411. Lc manuscrit ne pcFmet pas dc tranchÊr. J.O,U.I
7L
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QUAND DIRX, C'EST FAIRE
QUAI"RrÈIæ CONrÉneNCB
que l'accusé a commis le délit. I{ais, bien sûr, tout ce que vise la procédure, d'une certaine manière, c'est d'être correcte contrairement ; à ce qui se ait dans les cas examinés plus haut, la question de savoir ce qu'on pense ne se pose pas ici. Âinsi, Iorsque iarU;tre Oit < Changezlô! >, la manche est de ce fait ierminée. Il peut arriver toutefois que Ie verdict soit < mauvais >> : indu lunjusfijedl (cas du jury), ou même incoruecl (cas de I'arbitre). Nous sommes donc en présence d'une situation très malheur.ur". Elle ne l,est pourtant en aucun des sens envisagés : l'acte n'est pas nur et non uuanu 1.i l'arbitre dit ( Éliminé! >, le batreur est élinriné, la décision de l,arbitre est irrévocable); il n'est pas non plus insincère. Ces difficultés (toujours à redouter) n'ont cependant pas à nous préoccuper pour le moment; nous cherchons uniquement à bjen définir I'insincérité. 4) L'intention, elle aussi, peut susciter des embarras bien particuliers : a) On hésite, nous I'avons lorsqu'il s'agit de .distinguer entre 'u, n'est que I'achèvement,--!i_consomune action subséquente et ce qui mation de I'action unique et intégrale. Il est malaisé, par'exenrple, de déterminer le rapport entre
celui des formules légales, par exemple ce but des domaines jour mieux atteint. Mais il n'en va pas toujours- ainsi. Je chaque est puis, par exemple, exprimer mon intention en disant simplement : < Je ferai telle chose. > Il faut toutefois qu'au moment où je parle, j'aie bien cette intention, si je veux éviter I'insincérité. Mais quel sera au juste le degré ou le genre de l'échec, si ensuite je ne e pas à l'acte? Autre exemple : lorsque quelqu'un dit : < Je vous souhaite que disant, il vous accueille de fait la bienvenue > -, on peut croire intentions s'imposent, au moins confusément. Mais que certaines -ce que penser s'il se comporte ensuite grossièrement? Ou encore, je vous donne un conseil, vous l'acceptez, et là.dessus je m'en prends à vous : jusqu'à quel point ce revirement m'est-il interdit? Peut-être < s'attendon >>, seulement, à ce que je n'agisse pas ainsi? Ou faut-il penser que la demande et I'acceptatioq d'un conseil rendent expressément inissible un tel comportemett? De même, je vous prie instamment de faire quelque chose, vous accédez à ma demande, et voilà que je
Je donne >, et Ia cession elle_mêmeprends cetrefemme, etc.), et la consommation du mariage, << Je vends ), et la conclusion du mârché, <<
< Oui > (je
alors que Ie cas de la promesse n'offre à peu près pas de difficulté. Ainsi, il est possible de distinguer, de plusieurs façons entre I,inten_ tion nécessaire à I'exécution d'une action nùséquente,'et i'intention 441 qui est requise pour accomplir I'action prisente. En principe, cette situation ne soulève cependant aucun problème pour ce qui est du concept d'insincérité. D) Nous avons distingué sommairement les cas où certaines intentions sont requises, de ceux, plus particuliers, où I,on doit s,engager à adopter un comportement ultérieur; etdans ces derniers.as, r'ir"g" de Ia procédure a été conçu précisément pour provoquer ce compor-
proteste. Mon comportemeût est-il incohérent? Il est probable que [45] oui. Toutefois nous nous efforçons généralement d'éclaircir une situation de ce genre en y remplaçant, par exemple, < Je pardonne > par < J'excuse ); ou < Je ferai telle chose )) par ( J'ai I'intention de le faire >, ou encore < Je le promets >. En voilà assez pour I'instant sur les façons dont les énonciations performatives peuvent être maiheureuses et aboutir à ceci que l' < acte >> est seulement prétendu, ou purement verbal, etc, Dans jargon I'ensemble, cela revient à dire - si vous préférez ce - que certaines conditioos doivent être remplies pour que l'énonciation soit heureuse, que certaines données doivent se présenter de façon bien déterminée. Et nous sommes ainsi amenés à affirmer ceci : pour qu'une énonciation performative soit heureuse, certaines affirmations doivent être vraies. Tel quel, ce résultat de nos recherches est fort banal. Eh bien, faisant abstraction des échecs déjà considérés, demandons-nous
l)
temcnt (soit en le rendant obligatoire, soit .n 1e perÀettant). Exemples : lorsqu'on entreprend d'exécuter une action, bien str, .t proUublement aussi pour le baptême. La raison d'être de teiles procedures est précisément d'assurer |apparition de certains comiortements subséquents, et d'en prévenir d'autres; et il est évident qu'.o bi.o
quelles sont ces affirmations qui doivent être vraies? chose d'un peu excitant à dire quant au rapport que l'énonciation performative entretient avec elles? Rappelez-vous çe que nous déclarions dans la première conférence : nous pouvoûs, en un sens, /cl's,rer enlendre que beaucoup de choses sont teiles ou telles, lorsque nous disons i< Je promets >; mais cela
72
73
2) y a-t-rl quelque
eUATRù{E coNFÉRENcB
QUAND DIRE, C'EST FÀIR! ne signifie nullement que
I'énonciation < Je promets >> soitl,afirmation (vraie ou fausse) qu'il en est ainsi. Je vais mentionner certaines de ces choses importantes qui doivent être vraies pour que I'acte soit heureux. (Pas toutes! Mais même celles que je vais relever paraîtront assez ennuyeuses et anodines; je I'espère d'ailleurs car cela voudra dire qu'elles sont enfn < éj-ideqles >.) Je dis, par exemple,r < Je m'eicusÇ>), et ce faisant pense vraiment tr61 m'exc; on peur al
.
-
de m'exc (ou me suis déjà excusé); 2) il est vrai et non pas faux que certaines conditions sont remplies entre autres celles qui relèvent des règles A.l et A.2;
-
3)
il
est vrai et non pas faux que certaines conditions (celles qui l) sont remplies; en particulier, que je pense
appartiennent au genre quelque chose;
4)
il
est vrai et non pas faux que je suis tenu à une action sub-
séquente.
de le noter déjà - et jle-rt-iaporrq:t - nousdeavons expliqué pourquoifo"Je m'excuse.ù implique que chacun ces points *d,1vlli: C'est mêniëjféeisérfléit ce qui nous chËichônI {'niôiËë'idepuis Ie début. Mais il serait ençore plus éclairant de comparer ces < implications > des énonciations performatives avec des découvertes plus récentes sur les < implications > d'un type d'énonciation étudié avec un intérêt tout particulier : à savoir l,afirmation ou énonciation
En vérité
constative laquelle, contrairement à l'énonciation performative, est vraie ou fausse.
Premier point : l) Quel rapport y a-t-il entre l,énonciation < Je >r, et le fait de m'exc? il est important de noter que ce rapport est différent de celui qui existe entre : < Je suis en train de courir > lI am running r?] et le fait queje sois en train de courir (ou s'il ne s'agit pas d'une < simple > description _ entre : < Il est en train de courir > [He is runninglet le fait qu,il soit en train r7l de courir). Cette différence est soulignée en anglais par I'emploi du présent non continu dans les formules performatives. Toutefois elle ne I'est pas nécessairement dans toutes les langues (qui peuvent ne pas disposer d'uq présent continu), ni même toujours en ànghis. m'excuse
74
'
Nous pourrions dire : en général (pour la course, par excmple), c'est Ie lait qu'il coure qui rend vraie I'affirnration < Il court >; ou encore : la vérité de i'énonciation constative < Il court > dépend du fait qu'il coure. En revanche, dans le cas que nous étudions, c'est le bonheur de l'énonciation performative < Je m'excuse > qui fait que je m'excuse; et il dépend du bonheur de l'énonciation performative n Jr -'.*.ute )) que je réussisse à m"exc. Voilà un moyen de entre justifier la distinction << perforrnatif-constatif > - la distinction faire et dire 18. Nous allons maintenant considérer trois des oombreuses manières dont une affirmation implique que d'autres aflirmations sont vraies. L'une d'elles est connue depuis longtemps, alors que les autres ont été découvertes tout récemment. Nous ne formulerons pas nos remarques dans un vocabulaire très techniqrre, bien que la chose soit possible. Il s'agit de la découverte suivante : nous contredire nous-mêmes n'est pas la seule façon de mal agir ou de parler d'une manière choquante quand nous prononçons des affirmations < factuelles > reliées les unes aux autres; it y a bien d'autres façons de
mal faire. (La contradiction est d'ailleurs une relation compliquée qui exige elle-même définition et explication.)
l,
Entraîner
< Tous les hommes rougissent > entraîne < certains hommes rou>. Nous ne Pouvons pas dire < Tous les hommes rougissent, gissent [48] mais pas n'importe lesquels )), ou ( Le chat est sous le paillasson et le chat est sur le paillasson D, ou ( Le chat est sur le paillasson et le chat n'est pas sur le paillasson >' Dans chacun de ces casn en effet, le premier membre de la phrase entraîne la contradictoire du second'
2. Inisser entendre
Dire < Le chat est sur le paiilasson > laisse entendre que je crois qu'il I'est, eo un sens de < laisser entendre > que G. E. Moore signalait récemment. Nous ne saurions dire < Le chat est sur le paillasson, mais je ne crois pas qu'il le soit >. (D'ordinaire, il est vrai, nous n'employons pas << laisser entendre > de cette façon : < laisser enten' : < Il laissa dre >> est moins fort, en réalité, - témoin ces exemples entendre que je ne le savais pas D, ou << Vous avez laissé entendre que vous le saviez [et pas seulement que vous le croyiez] >.) 75
QUATPJÈME CONFÉRENCE
QUÀND DIRE, C'EST FAIRE
J, FrésuPPoser
3. Présupposer < Tous les enfants de Jean sont chauves > présuppose que Jean a des enfants. Nous ne pouvons pas dire << Tous les enfants de Jean sont chauves, mais Jean n'a pas d'enfants )), ou ( Jean n'a pas d'enfants et tous ses enfants sont chauves >r. Ces cas ont en commun de poser quelque chose de choquant. Nous devons cependant nous garder d'employer un terme qui les recouvrirait tous - comme < laisser entendre D ou ( contrâdiction > car les différences sont très grandes. Noyer un chat dans Ie beurre -n'est pas la seule façon de le tuer, voilà ce que nous oublions (ainsi que I'indique le proverbe) : il y a bien d'autres manières d,offenser le langage que la simple contradiction. Les questions majeures sont : combien y a{-il de manières d'offenser le langage? pourquoi y a-t-il offense? et en quoi consiste-t-elle? 4el Comparons maintenant nos trois ças, en usant de procédés bien connus.
l.
Présupposer cliffère, lui aussi, d'entraîner' Si < Iæs enfants de Jean pas vrai sont chauves > présuppose que Jean ait des enfants, il n'est que enfants les présuppose pas
neet < Les enfants de Jean ne sont pas chauves > présupposent "huuu., pas vrai que tous deux que Jean a des enfants; en revanche, il n'est paillasson > pas le sur n'est < chat paillasson > Le et < Le chat est sur le paillasson' le que sous soit le chat et I'autre entraînent I'un Reprenons encore une fois < laisser entendre )), avant de revenir sur ( présupposer )). Laisser entendre
), alors qu'en Il s'agit sans aucun doute d'une-.-insincérité. En d'autres termes, le malheur ici - quoiqu'il est exactement le même que celui qui touche une affirmation Supposons que je dise < Le chat est sur le paillasson
réafitèle ne le crois pas. De quoi s'agit-il?
Enlraîner
Si p entraîne q, alors N q entraîne l,p ,. si < Le chat est sur le paillasson > entraîne < Le paillasson est sous le chat >, alors << Le paillasson n'est pas sous le chat > entraîne < Le chat n,est pas sur le paillasson >. La vérité d'une proposition entraîne ici la vérité d'une
autre; ou la vérité d'une proposition est incompatible avec la vérité d'une autre.
-
atteint ( Je promets.'. > lorsque je n'ai pas I'intention' ne crois pas, etc. L'insincérité d'une assertion est la mêne que celle d'une pro-
messe. (( Je promets, mais ne me propose pas de... >, est parallèle à ( Je promets ), sans << Il en est ainsi, mais je ne ie crois pas D. Dire < Il en est ainsi >, dire parallèle à est intention d'agir en conséquence,
sats le croire.
2, Iaisser entendre Ce cas est différent : si le fait de dire que le chat est sur le paillasson laisse entendre que je crois qu'il en est ainsi, il n'est pas vrai que si je ne crois pas que le chat est sur le paillasson, cela laisse entendre que
le chat n'est pas sur le paillasson (en langage courant). Encore une fois, il ne s'agit pas ici d'une incompatibilité : les propositions sont tout à fait compatibles. Il se peut à la fois que le chat soit sur le paillasson et que je ne le croie pas. Nous ne pouvons dire, en revanche, < Il se peut à la fois que le chat soit sur le paillasson et que le paillasson ne soit pas sous le chat>>. En d'autres termes, ici dire
est impossible si I'on dit en même temps ( Je ne crois pas qu'il le soit >>; I'assertion laisse entendre une croyance. 76
Présuppasitian
Considérons maintenant la présupposition. Que dire de I'affir<< Les enfants de Jean sont tous chauves >>, alors que Jean r'a pas d'enfants? On dit aujourd'hui couraminent qu'elle n'est pas fausie, étant donné qu'elle est dépourvue de référence. La référence est nécessaire à la vérité comme à la fausseté. (cette affumation est-elle alors dépourvue de sens? Pas à tous points de vue : elle n'e$ pas, telle une ( phrase dépourvue de sens D' non grammaticale, ou
mation
[51] iacomplète, g€trs
ou simple babillage incohérent, etc') La plupart des ne se pose pas. ) Et moi : ( L'énonciation
diront : < La question
est nulle et non avenue. > 77
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
Comparez cela avec l'échec que nous rencontrions lorsque nous disions << Je donne le nom de... >, alors que n'étaient pas remplies certaines conditions de (A.l) et de (A.2). (Peut-être les conditions de A.2 plus spécialement? unes et les autres, semblable- Non, illesexiste ment; dans le cas'des affirmations, aussi des présuppositions exigées par A.l .) Nous aurions pu employer ici la formule < présupposer )) : on peut dire, en effet, que < Oui [je prends cette femme...] > présuppose bien des choses, lui aussi. Si celles-ci ne se réalisent pas, l'énonciation est malheureuse, nulle et non avenue; elle ne réussit pas à devenir un contrat lorsque la référence fait défaut (ou même lorsqu'elle n'est qu'ambiguë), pas plus qu'une autre énonciation ne parvient en ce cas à être une affirmation. D'une manière analogue, la question de savoir si un conseil est bon ou mauvais ne se pose pas si vous n'êtes pas en mesure de me conseiller sur I'affaire. Il se pourrait enfin que la façon dont une proposition en entraîne une autre, ne soit pas sans ressemblance avec celle dont < Je promets > entraîne < Je suis tenu... D Il n'y a pas identité mais parallélisme. < Je promets, mais ne suis pas tenu.., D est parallèle à < C'est et ce n'est pas >. Dire << Je promets >>, mais De pas poser l'acte, est parallèle au fait de dire à la fois << C'est > et < Ce n'est pas >. Tout comme la visée de I'assertion se trouve déjouée par une contradiction interne (où nous assimilons et différencions à lafois infirme la procédure - ceestquidéjouée tout entière), de même la visée d'un contrat si nous disons < Je promets, et ne suis pas tenu... )). Par ces mots, ot se soumet à une obligation et on s'y refuse. C'est une procedure qui se dément elle-même. Une assertion nous engage à une autre assertion, une action à une autre action. Et de même que si p entraîne Ç, - Q entraîne æ p, dE même << Je ne suis pas tenu > entraîne << Je ne promets pas D.
En conclusion, nous voyons que pour expliquer ce qui peut mal fonctionner dans les affirmations, il ne suffit pas, comme on I'a fait depuis toujours, de concentrer notre attention sur Ia seule proposition en cause (s'il est vrai qu'il existe pareille chose). Si nous voulons saisir ie parallélisme qui existe entre les affirmations et les énonciations performatives, voir aussi comment les unes et ies autres se révèlent défectueuses, il nous faut envisager la situation complète I'acte de discours tout entier. Et il se pourrait bien alors que la différence ne soit pas considérable entrè affirmations et énonciations performatives le.
Cinquième conférence
t53l
A la fin de la précédente conférence, nous avons reconsidéré le problème des rapports entre l'énonciation performative et différentes sortes d'affirmations qui, elles, sont cerlainement vraies ou fausses. Quatre de ces rapports nous ont paru mériter une attention particulière : l) Lorsque l'énonciation performative < Je m'excuse >r est heureuse, I'affirmation selon laquelle je m'excuse est yraie.
2) Pour que l'énonciation performative
.
heureuse,
il faut que soit vraie I'affirmation
< Je
m'excuse
> soit
selon laquelle certaines conditions sont remplies (notamment celles de A.l et A.2).
3) Pour que l'énonciation performative << Je m'excuse > soit il faut que soit vraie I'affirmation selon laquelle sont rcm-
heureuse,
plies d'autres conditions (notamment celles de 1.1).
.
4) Lorsque certaines au moins des énonciations performatives sont heureuses (celles des contrats, par exemple), les affirmations du document
aux termes desquelles je suis tenu ou non d'exécuter
tel ou tel acte- déterminé vraies. - sont J'ai dit qu'il paraît y avoir ressemblance, peut-être môme identité, entre le deuxième des rapports ci-dessus et ce que nous avions appelé la < présupposition >, lorsque nous opposions les affirmations aux performatifs. Même ressemblance ou identité entre le troisième
[54] rapport et ce qui, pour les affirmations, est le << laisser entendre >r (comme on I'appelle parfois; mais, selon moi, à tort...) * présupposer et laisser entendre étant deux façons de lier de manière significative la vérité d'une affirmation à celle d'une autre, sans pour autant que I'une entraîne I'autre (au seul sens is par nos logiciens fanatiques). je Seul le quatrième et dernier rapport pourrait être rapproché - ne préjuge pas avec quel succès de ce qu'est l'implication proprement
dite entre des affirmations. -<< Je promets de faire X, mais rien ne m'oblige à le réaliser > ressemble certainement plus à utre contra79
crnqtnÈxe cot'TÉ,RBNcE
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
diction (quoi qu'il faille entendre par là) que ( Je promets de faire X, mais n'en ai pas I'intention >>. De même < Rien ne m'oblige à faire p > entraîne, on peut le dire, < Je n'ai pas promis de faire P >>i etla manière dont un certain P m'engage à un certain q ressemble fort à la manière dont promettre de faire X m'engage à faire X' Mais je n'ai pas I'intention d'insister sur ce qu'il y a (ou non) de parallélisme ici, mais seulement sur ce qu'un parallélisme apparaît, à tout le moins, dans les deux autres cas. Et voilà suggéré qu'il existe des cas où il y a danger de voir s'effondrer la distinction initiale et provisoire entre constatifs et performatifs' Nous pouvons, bien str, nous fortifier dans I'assurance que la distinction èst définitive, en faisant retour à la vieille conception selon laquelle l'énonciation constative est vraie ou fausse, l'énonciation performative, heureuse ou malheureuse. Voyez I'opposition entre ' m'exc (qui dépend du bonheur du performatif < Je m'excuse >) et affi.rmer <-Jean est en train de courir > (qui dépend, pour sa vérité, 55] du fait que Jean soit en train de courir). L'opposition toutefois pourpour commencer par les rait n'être pas absolument fondée. Car (constative) < Jean est à l'énonciation liée , affirmations - on trouve >, I'affirmation << J'affirme que Jean est en train ' en train de courir '
'
de courir >; et la vérité de ce dernier énoncé peut dépendre du b,oqleur de << Jean est en train de courir D, tout comme Ia vérité de < Je suis
tën irâin'dè'ni'exc > dépend du bonheur de < Je m'excuse >. De on trouve lié au permême et pour er aux performatifs
formatif (ie suppose que c'en est uo)
<<
-
Je vous avertis que le taureau
va foncer >, le fait (si c'est vraiment un fait) que le taureau va foncer. Si le taureau n'est pas sur le point de foncer, l'énonciation < Je vous
avertis que le taureau va foncer > peut être mise en question - et non pas pour I'un des motifs qui ont défini plus haut telle ou telle variété du malheur. Nous ne saurions dire en ce cas-ci que I'avertissement est nul et non avenu (c'est-à-dire que la personne n'a pas averti mais a seulement rempli les formalités d'un avertissement)' ni qu'il n'est pas sincère. Nous dirons bien plutôt que I'avertissement était faux, ou mieux, erroné (comme une affirmation peut l'être). Voici peuvent I I donc que des considérations du type bonheur et malheur i I atteindre les atîrmations (ou certaines d'entre elles), et que des considérations du type vérité et fausseté peuvent toucher les performatifs , (ou certains d'entre eux). 80
Avançons donc encore un peu dans ce désert où nous mène une pré-
cision qui se veut comparative et posons la question : y a-t-il un moyen précis de distinguer rigoureusement l'énonciation performa- l tive de l'énonciation constative? Et tout d'abord, naturellement, \ demandons-nous s'il exiJte qq çritërç gramrnarical (ou lexicographi--- ' } que) qui permette de reconnaître l'énonciatiôn përfôrËativë: [56] Nous n'avons considéré jusqu'ici qu'un petit nombre de performatifs classiques, offrant tous des verbes à la première personne du singulier de I'indicatif présent, voix active. On yerra bientôt que nous avions de bonnes raisons pour d'une telle astuçe. Rappelons quelques-uns de ces exemples : < Je nomme >, < Oui fie prends cette femme...l >>, << Je parie >, < Je donne >. On voit bien (mais nous y reviendrons dans quelques instants) pourquoi il s'agit là du type le plus commun de performatifs explicites. Notez que < présent r> et < indicatif > sont évidemment des termes mal choisis parler - sans des connotations trompeuses d' << active >. Aussi emploierai-je ces . termes seulement dans leur sens grammatical courant. Le < présent >, par exemple, en tant que distinct du < présent continu >r, ne s'emploie pas d'ordinaire pour décrire (voire indiquer) ce que je fais en ce moment même. < Je bois de la bière > II drink beerl dis- comme tinct de < Je suis en train de boire de la bière >> fI am drinking beerln'est pas plus une espèce de futur ou de é, qui décrirait ce que je ferai ou ce que j'ai fait. Le plus souvent, ce présent est en réalité un indicatif d'habitude lhabituall -- s'il est vrai qu'il soit jamais un véritable < indicatif >. Et lorsqu'il n'est pas un indicatif < d'habitude >, mais pour ainsi dire un < présent > authentique comme c'est le cas, d'une certaine manière, dans les énonciations performatives (pensez à << Je nomme ))) n'est certainement -, alors ilI'entendent, pas uû < indicatif )> au sens où les grammairiens c'est-à-
dire au sens où
il
rapporterait, décrirait, ou donnerait une infor-
mation sur une situation ou un événement actuels. Ce présent, nous .l'avons vu, ne décrit ni n'informe; on I'emploie pour effectuer une action, ou dans Ie cours de cette action. Donc, en fait, nous ne nous sommes servi de I'expression < indicatif présent > que pour désigner la forme grammaticale anglaise << Je nomme )), (( Je cours r>, etc.
(Cette erreur de terminologie est due à ce qu'on assimile < Je cours D lI runl, par exemple, au latin cuto, qu'on devrait [57] normalement traduire par ( Je suis en train de courir >> fI am
8l
I
QUÂND DIR-8, C'EST FÂIRE
cnqquùlæ coxrÉnsNcB
læ latin ne possède pas ces deux temps, comme nous.) Or donc, faut-il absolument employer la première personne du singulier, et de l'indicatif présent à la voix uCtiu., pou. obtenir une
Le mode n'est pas pertinent puisque je puis vous ordonner de tourner à droite en disant non pas < Je vous ordonne de tourner à droite >, mais simplement ( Tq]ryZ3_{1S4g2; je puis vous donner congé en disant simplement-<< Vous pouvez partir )); et au lieu de << Je vous 'conseille [ou < recommande >] de tourner à droite >, je puis dire < A votre place, je tournerais à droite >çtreT@ non plus De sert de rien : pour vous déclarer hors-jeu, je pùsdiiJsiniplemenl < Vous Eièffiors-1eu r>, au lieu de < Je vous déclare hors-jeu->; de même, je puis dire simplement < Vous l'avez fait >, au lieu de < Je vous juge
runnïngl.
éaonciation performative? Ne perdons pas notre temps à considérer I'exception évidente que constitue la première p.rrooo" du pluriel << nous promettons,.. )), ( nous consentons >, etc. Il existe un,peu -partout des exceptions plus significatives et frappantes (dont quel{ues_ unes d'ailleurs ont déjà été mentionnées, en ant). Un ty'pe de performatif, très important et répandu_ et qu,on peut sans doute tenir pour authentique se présente ù ta tteuxiè.i ou i - pluriel;, tli1s.iuneaSno41e. (du.singutier ou du .TT ta voÈ: pr*li;, ' nl la lærsonne ni la voix ne sont donc des éléments absorument essen-
coupable
tiels.
Voici quelques exemples
pour un joueur.
:
êres autorisé par les présentes à payer... _ (I z. t. Vous Les voyageurs sont avisés que la traversée de la voie ferrée s'effectue \t' par le age supérieur. .i -
:.
A la voix ive, le verbe peut même être impersonnel. Ainsi
\
3.
II
:
est formellement interdit de pénétrer, sous peine d'amende.
I
i on rencontre d'ordinaire ce type de performatif dans les documents officiels ou légaux; il est caractéristique qu'y figure souvent _ au moins dans les écrits I'expression i, pai les piésentes > et qu,elle - y ûgurer. cettc expresiion p-uisse sans doute toujours indique bià que l'éuoncé (écrit) de la phrase est l,instrumeoi 1ro**" on âity par quoi s'effectue I'acte d'ave{içe!0ç{lt, d'ggJgrlgqtion, etc. < par-les pré_ sentes )) constitue un critèré utile poùi iéôonnaître Ie caractère peril formatif de l'énonciation. Lorsque èette formule manque, < Les vËyageurs sont avisés que la traversée de la voie ferrée s-'effectue pai le age supérieur > pourrait ne faire que décrire ce qui se e habituellement : comme dans < à I'approche du tunnel, t", sont avisés de baisser la tête, > etc. "oy"i.u., qu'il en soit, laissons de côté ces énonciations performatives Quoi hauiement formalisées et explicites; nous all'ns reconnaître que le [g:-g-"-tr-tempg-(jusqu'ici és'sous silence, contrairement à la et à la voix) n'ont aucune valeur de critère absolu. I lpersonne
'
>. Sans parler des cas où nous n'avons qu'une phrase
tronquée, comme lorsque je relève un pari en prononçant simplement < Conclu! >; et des cas où il n'y a pas le moindre verbe explicite, comme lorsque je dis < Coupable! > quand je juge, ou < Éliminé! >
gia
Avec certaines expressions qui ont tous les traits performatifs
il semble que nous soyons mieux en mesure de réfuter la règle donnée d'abord sur I'usage de la voix ' active ou ive. Je puis dire < Vous êtes hors-jeu >>, au lieu de << Je vous déclare hors-jeu D; et ( Je suis (par les présentes devenu) responsable >, au lieu de < Je prends en charge >. t59l Nous pourrions, à partir de là, penser que certains rnols suffisent pour repérer l'énonciation performative et que celle
, < ible >, etc.),
s'agirait de mots comme <<
dangereux >, etc. Mais
L
<<
hors-jeu >, < autorisé >, est rien, car :
(
promettre >,
il n'en
On peut construire le performatif sans recourir aux mots efficients.
Ainsi
:
l) A la place de < Virage dangereux
>r, on mettra < Virage >; au lieu de < Taureau dangereux D, on pourra écrire < Taureau >. 2) Pour < On vous ordonne de... >, on aura < Vous ferez... D; pour < Je promets de... >; on dira < Je ferai... >> fI shallf.
-
IIi
On peut rencontrer le mot efficient sans que l'énonciation soit
-pdrformative. Ainsi
:
l) Au cricket, un spectateur peut dire : < Il fallait
changer, vous savez. étiez coupable )), ou
(vraiment) De même, il peut arriver que je dise < Vous <,< Vous étiez hors-jeu r>, ou même < Vous êtes >>
83
QUAND DIRS, C'EST FAIRE
coupable ftors-jeu)
),
CINQUIÈME COI.{FÉRENCE
sans avoir aucun droit à me prononcer là-
dessus.
2) Dans des tournures telles que < Vous avez promis >, << Vous autorisez D, etc., le mot apparaît dans un emploi no4 performatif. Chaque fois que nous cherchons un critère simple et unique d'ordre grammatical ou lexicologique, nous aboutissons donc à une ime. Il n'est peut-être pas impossible, cependant, de trouver un critère complexe - ou du moins un ensemble de critères, simples ou complexes s'appuyant à la fois sur la grammaire et sur le vocabulaire. Par exemple, que tout ce qui inclut ua verbe à I'impératif est perfor(ce matif serait toutefois aller au-devant de nombreuses difficultés "601 que je n'ai pas I'intention d'affronter : celle, entre autres, de déterminer quand un verbe est ou n'est pas à I'impératif).
J'aimerais mieux revenir en arrière un instant et me demander s'il n'y a pas quelque bonne raison cachée à notre préférence initiale pour les verbes à l' < indicatif présent, voix active D, comme on dir.
Pour qu'il y ait énonciation performative, avons-nous noté, il faut que cette énonciation effectue une action (ou fasse partie de cette effectuation). Or seules les personnes peuvent effectuer des actions 20; et dans les cas étudiés, il apparaît clairement que celui qui formule l'énoncé est celui qui effectue I'action. Notre tendance à accorder une valeur spéciale à la << première personne > tendance que nous avions tort de chercher à justifier dans les seules -formes grammaticales
(
était donc fondée : cette première personne )) ne peut manquer -d'entrer en jeu du seul fait qu'on la mentionne ou qu'on l'évoque. En
outre, puisque celui qui parle agit, il est forcément en train de faire quelque chose : de là notre préférence peut-être mal exprimée - grammaticalement pour le présent grammatical et Ia voix active. Quelque chose, au moment même de l'énonciation, est effectué par la personne qui énonce. Lorsque dans l'énonciation, il n'y a pas référence à celui qui parle (donc à celui qui agit; par le pronom < je > (ou son nom personnel), la personne est malgré tout < impliquée >, et cela par I'un ou I'autre des moyens que voici
:
a) dans les énonciations verbales, I'auteur est Ia personne qui énonce (c'est-à-dire \a source de l'énonciation
--
terme généralement
employé dans les systèmes de coordonnées orales); 84
ô) dans les énonciations écrites (ou sa signature. l61J appose
<
inscriptions >), I'auteur
(La signature est évidemment
nécessaire, les
énonciations écrites n'étant pas rattachées à leur source comme Ie sont les énonciations verbales.) Le < je > qui effectue I'action entre donc nécessairement en scène. La forme originaire de la première personne du singulier de I'indicatif présent, voix active ou encore, celle des deuxième et troisième per-
-
sonnes, voix ive, avec signature apposée
a I'avantage de rendre - disôoijrs. explicily,-9e Lrail lmplicite de la situation de Ën outie, Ies verbes qui paraissent plus spécialement performatifs quand on les
considère du point de vue du vocabulaire, visent d'abord à rendre explicite ce qui ne signifie pas qu'ils I'affirment ou la décrivent
I'action précise effectuée par l'énonciation. Quant aux autres mots qui semblent posséder une fonction performative particulière (et qui la possèden / effectivement) < Coupable ! >, << Hors-jeu >, - comme ils assument cette fonction dans la mesure justement où ils sont liés, à la < source )), avec des performatifs spéciaux et explicites ( promettre >, < déclarer >, < juger >, etc, que tels La formule < par les présentes > fournit une autre solution assez
etc.
commode. Elle est cependant un peu trop protocolaire pour nos besoins courants; et, de plus, on peut dire < J'affirme par les présentes... )), ou
(
Je
remets en question par les présentes...
D
alors que
- affirmanous cherchons précisément un critère pour distinguer entre tions et énonciations performatives. (Oui, je sais, nous nous embourbons à nouveau. Si sentir glisser sous ses pieds Ie ferme terrain des préjugés est exaltant, il faut bien s'attendre à quelque revanche...) Nous pourrions maintenant être tentés de dire que toute énonciation effectivement performative devrait par réduction, analyse ou pouvoir se ramener à -la forme suivante : un verbe [62] développement à la première personne du singulier de I'indicatif présent, voix active (grammaticale). C'est en fait le genre de test que nous avons utilisé plus haut. Ainsi : < Éliminél > équivaut à < Je vous déclare éliminé, ou je prononce votre élimination > (quand il s'agit d'un véritable performatif : ce n'est pas le cas, par exemple, si vous êtes déclaré éliminé par quelqu'un d'autre que l'arbitre, ou par celui qui marque les points). < Coupable! > équivaut à < Je vous déclare, vous prononce, ou vousjuge coupable. >> 85
,
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
crNe{nÈME coNFÉRENcE
( Vous êtes avisé que le taureau est dangereux )) équivaut à < Moi, John Jones, je vous avertis que le taureau est dangereux D, ou à
à son enlant de faire quelque chose, peut dire < Il promet -- n'est-ce pas, Willy? >. Mais le petit Willy doit encore dire lui-même < Je promets D, pour qu'il y ait vraimcnt promesse. Notons que ce genre d'asymétric ne se rencontre nullernent, à I'ordinaire, avec les verbes
Ce taureau est dangereux, (Signé) John Jones.
Ce genre de développement rend explicite à la fois le fait quc l'énonciation est performative et la nature de I'acte effectué. Sauf à ramener l'énonciation à cette forme explicite, il sera toujours possible de I'interpréter en un sens non performatif, < C'est à vous )), par cxemple,
Je vous le donne > ou comme < Cela vous appartient (déjà) )). En fait, on joue en quelque sorte sur les emplois performatifs et non performatifs dans le cas du panneau routier : ( Vous voilà avertis que 21... D Bien qu'on puisse avancer dans cette direction avec un cerlain succès (il y a des embtches *), il faut toutefois remarquer que cet 531 emploi-ci de la première personne du singulier dite à I'indicatif présent et à la voix active, est étrange et spécial. Il faut y noter en particulier I'asymétrie constante qui apparaît entre cette première personne et ce temps, et les autres personnes et temps du même verôe. L'existence
peut être entendu indifféremment comme
<<
d'une telle asymétrie est précisément la marque du verbe performatif (et ce qui ressemble le plus à un critère grammatical du performatif). Prenons comme exemple I'emploi de < Je parie >, en tant qu'il s'oppose aux emplois de ce verbe à un autre temps ou à une autre personne. < J'ai parié > et < il parie > ne sont pas des performatifs; ils ne font que décrire des actions - la mienne et la sienne, respectivedont chacune consiste à prononcer le performatif < Je parie >. ment Si je dis < Je parie >>, je n'affirme pas que je prononce les mots << Je parie >, ou d'autres mots, mais j'effectue I'acte de parier. De même s'il dit les mots < Je parie > s'it dit qu'il parie - c'est-à-dire -, il parie. Mais si je dis < Il parie >, j'affirme seulement qu'il prononce (ou plutôt a prononce) < Je parie > : je n'effectue pas I'acte de parier
ce que lui seul peut faire. Je décris ce qu'il fait lorsqu'il effectue I'acte de parier; tandis que je fais mes propres paris, comme il doit faire les siens. C'est ainsi qu'un parent inquiet, quand on demande .
Quels sont, par exemple, les verbes que I'on peut ainsi manier? Si le perfor-
matif est développé, quel est le test qui permettra d'affirmer que la première
personne du singulier de I'indicatifprésent voie activo est, en la circonstance, per-
formative, étant donné qu'on doit pouvoir ranrener toutes les autres fonnes (ez-moi ccs mots) à cette forme formelle? 86
qui ne sont pas employés comme performatifs explicites. Aucune asymétrie dé cet ordre, par exemple, eûtre ( Je cours > et < Il court D. Reste qu'on peut encore douter d'avoir là, à proprement parler, qu'est-ce exactement?) un < critère grammatical >; et que, de (mais [64]
toute façon, il manque de précision. En effet : l) La première personne du singulier de I'indicatif présent, voix active, peut être employée pour décrire mon comportement habituel : << Je lui parie (tous les matins) six pence qu'il pleuvra ), ou (( Je
promets seulement quand j'ai I'intention de tenir parole )). 2) La première personne du singulier de l'indicatif présent, voix active, peut être employée dans le sens d'un présent << historique >; je puis I'utiliser pour décrire mon propre comportement en d'autres lieux et temps : < A la page 49, je proteste contre le verdict. > Il est possible cependant de donner plus de poids à nos considérations
en disant qu'on r'emploie pas les performatifs au présent continu (à la première personne du singulier, voie active) : on ne dit pas < Je suis en train de promettre >> II am promising), ni < je suis en train de protester >>. Mais même cela n'est pas tout à fait juste : je puis dire < Iaissez-moi tranquille en ce moment ; je vous verrai plus tard : je suis en train de me marier )), et cela à n'importe quel moment de la cerémonie, sauf celui où je dois dire le mot ( Oui [je prends cette femme...] n : c'est que l'énonciation performative ici n'est pas toute I'action qui, en fait, se déroule dans le temps et comporte divers éléments. Il m'est également possible de dire
... 3) On peut employer certains verbes à la première personne du singulier de I'indicatif présent, voix activc, de deux façons à la fois. Ainsi pour < J'appelle > dans la phrase < J'appelle inflation la situation où il y a trop d'argent à la poursuite de trop peu de marchandises > : [65] l'énonciation comprend à la fois un élément performatif et la description d'un processus selon son déroulement uaturel. 87
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
4) Nous risquons, semble-t-il, de faire entrer en ligne de compte bon nombre de formules que nous ne classerions sans doute pas volontiers parmi les performatifs : par exemple < J'afirme que > (car prononcer cette formule, c'est af;Armer) aussi bien que ,
que
(
Je parie
D.
5) Il y a des cas où I'on e à I'action après I'avoir annoncée ou en I'annonçant. Ainsi puis-je dire << Je crache dessus >; ou < j'adoube 23 >, en mettant en échec; ou < je cite )), avant de citer. Si je dis < Je définis x comme suit : x, c'est y >, nous sommes en présence d'un cas où I'on e à I'action (ici : définir) après I'avoir annoncée. Mais si nous employons la formule < Je définis x comme étant y >, il n'en va plus de même : nous sommes és à une énonciation performative. Nous pourrions ajouter qu'il y a un age semblable entre I'usage des mots, disons : en manière de signal, et leur usage performatif. Ainsi, par exemple, lorsque nous ons du mot FIN (au terme d'un roman)
à I'expression < Fin de
message
> (au terme d'une communication
par signaux); ou encore à la phrase < Sur ce, je termine ma plaidoirie >, prononcée par un avocat devant le tribunal. Dans tous ces cas, il s'agit plutôt, dirons-nous, de signaler I'action paq la parole : I'emploi du mot peut constituer alors I'acte même de < mettre fin > acte qu'il
est difficile de poser, puisqu'il est I'arrêt même de -I'action,
et
difficile bien entendu de rendre de quelque autre façon explicite. 6) Un performatil est-il toujours nécessaire pour rendre explicite ce que nous sommes indubitablenlent en train de faire par çe que nous disons? Je puis vous insulter, par exempie, en prononçant certains mots;mais la formule < Je vous insuite > n'a pas cours. 56] 7) Est-il bien vrai que nous puissions toujours donner au performatif une forme normale, sans y perdre quelque chose? < Je ferai... > peut s'entendre de diverses façons, et sans doute tirons-nous profit de cette ambiguïté... Et quand nous disons < Je suis désolé >, cela équivaut-il, très exactement, à la formule explicite << Je m'excuse >?
Il
Sixième conférence
161l
nous faudra revenir sur
la notion de performatif explicite et
essayer de comprendre, d'un point de vue historique, comment se posent quelques-uns de ces problèmes qui ne sont peut-être pas,
en fin de compte, d'une extrême gravité.
Après avoir fait apparaître que le performatif ne se distingue pas en toute clarté du constatif - si I'on s'en tient au double critère : heureux ou malheureux pour le premier, vrai ou faux pour le second -, nous avons tenté, dans un deuxième temps, de définir le performatif avec plus de précision. Notre première idée fut de trouver un ou plusieurs critères, grammaticaux ou lexicologiques, ou les deux à la fois. Nous avons signalé qu'un critère unique et absolu ne saurait exister, et qu'il serait même impossible, sans doute, de dresser une liste exhaustive de tous les critères. De surcroît, ces critères ne permettraient pas de distinguer perfàrmatifs et constatifs, puisque, très souvent, la même phrase est employée, selon les circonstances, des deux fiaçons : performative et constative. Notre entreprise semble donc désespérée dès le départ, si nous nous en tenons aux énonciations telles qu'elles se présenlent et partons de là pour la recherche d'un crilère. Il reste que le type de performatif dont nous avons tiré nos premiers première personne du singulier de I'indicatif exemples - verbe à la présent, voix active *- paraît mériter notre intérêt : à tout Ie moins, dès lors que 1'énonciation effectue vraiment quelque chose, le < je >, la voix < active > et le < présent > semblent adéquats. Mais il faut ajouter qu'en réalité les performatils ne sont pas du tout iclentiques aux autres verbes de ce ( temps > : ils présentent une asyméftie essen-
tielle. Et cette asymétrie est précisément la caractéristique d'une [68] longue liste de verbes qui ont bien I'air de performatifs. Il s'ensuit
que nous pourrions peut-être 1) dresser une liste de tous les verbes qui offrent cette particularité; 2) supposer que toutes les énonciations performatives qui, en fait, ne présentent pas la forme privilégiée < Je x que D, ou ( Je x de >, ou ( Je .r r>, pourraient être << ramenées >> à cette forme, et devenir ainsi ce qu'on appellera des performaûfs explicites. 89
QUAND DIRE, C,EST FAIRE
srxrÈuB coxrÉnrxce
Nous posons maintenant.la question jusqu,à : quel point, vrai. ment, ce travail sera-t_il aisé? Est-il seulemént possible? On tiendra certes compte, sans difficulté, de certains emplois, sans doutl .;;r;: tifs ou descriptifs, des verbes à h ;;;;;;;i'!.rrono, du singurier de^l'indicatif présent, voix a.ctive e*pto;, uri., .ouruots mais très - ,i-ài-fruiir"o. différents. Je veux parler du présent >, [habitual], du (quasi-) présent < historique. ,i e1 au p;;;;; continu. Mais, ainsi que je me hâtais de l'ajourer à ra fin a. Âu o.r"it.. .o"r...nË iiîî encore d'autres difficultés. Trois d'entre elles etaient à mon avis typiques : l) < Je crasse > (ou peut-être << Je soutiens >) semblent être des constatifs en un sens, des performatifs cn un autre,
eu,en est_il? 2) < J'affirme que >> paraît remprir nos exigences grammaticales ou quasi grammaticares. Mais pour autant retenir ceile énonciationlà? A partir de notre "-lronr-nou, critère, nous risquons, Seraient-ils les deux à la fois?
t-il, d'accueillir comme sont pas.
performatives des
semble_
énonciat;;;;;-;;.;"
Dire quelque chose paraît parfois consister très précisément à ^ .3) quelque faire chose _ à insulter qu.lq",";, par exemple, Iorsqu,on pourrant le blâme. il n'exisre ;;i;;ratif tel qu, n J. uoul insurte >' Notre critère ne permet "r.;;donc pas 9l où l'énonciarion est une exjcurion d";;.1;;"d'engrober rous les cas chose : il n,est, appa_ remment, pas toujours possible de < réduire > une énonciutlon iï performatif explicite. Arrêtons-nous un instant sur ce ( performatif explicite D, que .i,oppor", nous avoûs introduit subrepticement. Je voud."is
performatif primaire r> (plutôt que non explicite, ^ avons donné comme exemple :-
î
<
l)
énoaciation primaire :
Je serai là performatif explicite : < Je promets <<
""ir;di'"Ë"*
>>,
qu.ie et.2)nous avons dit que cette deinière roimute serai là >; ..nauit expricite Ia nature de qui se trouve effectuée par l,énonciati"; =];;;;;: _l'action ciation < Je serai tn ,,,,1:, exemple. Si quelqu,un ai, .i nous pouvons demander : << E^st1e un" pio*.r.e? J" ,..;iil;; >r, et recevoir comme réponse < Oui >., ou << Oui, je le piomets > (ou je promets que... ,,, < je promets.,l-l:.. u); .o.ô." pourrait-on seulement :
"
90
annonce une intention), ou < Non, mais je peux prévoir, connaissant ma faiblesse, que (probablement) je serai là >.
Nous devons là-dessus écarter deux erreurs. En premier lieu, > n'est pas décrire ce que je fais ni alfirmer que je Ie fais expliciter < du moins au sens que les philosophes donnent de préférence à ces mots. Ou si expliciter évoque cela, pro tanto c'est un terme mal choisi. Voyons quelle est la situation pour des actions non linguis-
tiques mais ressemblant à des énonciations performatives, en ce qu'elles effectuent un acte conventionnel (ici un rite, ou une cérémonie), Supposons donc que je m'incline profondément devant vous; il se peut qu'on ne sache pas très bien si je vous salue ou si je me penche pour examiner la flore, ou encore pour soulager un malaise... générale, pour spécifier clairement qrr'il s'agit d'un [70] D'une manière acte conventionnel et en I'occurrence de tel acte, le
dit acte
saluer,
- partidevra presque toujours inclure un autre trait par exemple je devrai soulever mon chapeau, toucher du front la culier : ainsi terre, poser ma seconde main sur ma poitrine, ou même, très probapar exemple, << Salaam >. blement, faire entendre un son ou un mot Or prononcer << Salaam >r n'est pas plus décrire mon action, ou affirmer que j'exécute un salut, que ne I'est le fait de soulever mon chapeau. * De même - et lous reviendrons d'ailleurs sur ce point dire < Je vous salue >> n'est pas plus décrire mo acte que ne I'est de dire < Salaam >. Faire ou dire ces choses, c'est ind-iquer clairement comment il faut interpréter ou comprendre I'action;.'et de quelle action il s'agit zl. Or I'emploi de la formule < Je promets que D ne vise rien d'autre, lui non plus. Cette formule n'est pas une descriptioo : car 10 elle ne saurait être vraie ou fausse; 20 dire < Je promets que > (si la formule est heureuse, évidemment) constitue une promesse, et une promesse sans ambiguité. Nous pouvons maintenant poser qu'une formule performative comme < Je promets > indique clairement comment il faut entendre ce qui a été dit; on peut même avancer que cette formule << affirme qu' > une promesse a été faite; mais nous ne pouvons dire pour autant que de telles énonciations sont vraies ou fausses ni qu'elles constituent des descriptioûs ou des comptes rendus,
En second lieu, un avertissement de moindre importaoce. Bien que notre type d'énonciation présente une proposition introduitc ( promettre >, < juger )), (( propar ( que > et qui suit le verbe
-
91
QUAND DIRE, C'FJT FAIRE
noncer )) (peut-être certains verbes comme ( estimer ))) il faut remarquer que nous ne pouvons à ce propos parler de <- discours indirect >. Les propositions introduites par ( que )) dans le discours indirect (ou oratio obliqua) constituent bien évidemment des cas 7l] où je rapporte ce qu'un autre a dit, ou ce que j'ai dit moi-même en un autre temps ou lieu. Exemples types : < Il a dit que,.. >, mais peut-être aussi << Il a promis que... D (ou bien s'agit-il ici d'un double emploi du < que >?) ou encore < A la page 456, je déclarai que... D. Si c'est là une notion claire *, le < que >> del,oratio obliqua n'est pas absolument semblable au ( que r> de nos performatifs explicites : ici, je ne rapporte pas mon propre discours à la première personne du singulier de I'indicatif présent, voix active. Notons cn ânt qu'il n'est pas du tout nécessaire, bien entendu, qu'un performatif explicite soit suivi de << que > : dans bon nombre de cas importants, il est seul, ou suivi d'un ( de >, * comme dans < Je m'excuse (de...) >, << Je vous salue >. Il semble que nous pouvons maintenant hasarder une hypothèse raisonnable tant à partir de l'élaboration de la construction linguistique que du rôle qu'elle joue dans le performatif explicite : historiquement, du point de vue de l'évolution du langage, le performatif ne serait apparu qu'après certaines énonciations plus primaires; énonciations dont plusieurs, au moins, sont déjà des performatifs implicites, inclus (comme parties d'un tout) dans la plupart des perlormatifs explicites (ou dans bon nombre d'entre eux). < Je ferai >, par exemple, serait apparu avant ( Je promets que je ferai... >. L'interprétation la plus plausible je ne sais trop comment on pourrait la justifier adéquarement - serait la suivante : dans les langages - pas encore clairement (on ne pouvait primitifs, on ne distinguait même pas encore distinguer) les diverses actions que nous étions 72] susceptibles d'accomplir de celles que nous accomplissions effectivement ftrour employer des distinctions qui ne sont apparues que plus tard...). << Taureau >> ou << Tonnerre >, par exemple, dans un langage primitif constitué d'énonciations d'un seul mot **, pouvait être ou un
i. N{on cxplication est très obscure, comme ceiles de tous les manuers de gramnraire sur les propositions commençant par ( que >>. voyez I'explication Jniore plus désastreuse qu'ils donnent des propositions introduites pai n ce qui > ou par (< c€ que >... rf Comme l'étaient sans doute, de fait, les langages primitifs. Cf. Jespersen. 92
sIxIÈME C0NFÉRENCË
avertissement. ou une information, ou une prédiction, etc. On peut supposer aussi que la distinction explicite des diverses valeurs possibles d'une énonciation fut une réalisation tardive du langage, et une réalisation considérable. Les formes primitives ou primaires de I'énonciation gardent ainsi l' < ambiguité >, 1'< équivoque D, ou le < vague > du langage primitif; elles ne rendent pas explicite la valeur précise de l'énonciation. Cette ambiguité auta sans doute ses avantages, mais le raffinement et l'évolution des règles et des modes d'agir de la société
exigera plus de clarté. Notez toutefois que cette clarification est ur acte de création, autant qu'une découverte ou une description, Il s'agit d'introduire des distinctions autant que d'éclairer des distinctions déjà existantes.
Il est une attitude, cependant, qu'il serait très dangereux de prendre et à quoi nous sommes très enclins : c'est de prétendre savoir, de quelque façon, que I'usage primaire ou primitif des phrases est nécessairement (parce qu'il devrait l'être) affirmatif ou constatif, ces termes étant pris au sens que les philosophes leur accordent le plus volontiers (à savoir que l'énonciation en question ne peut prétendre qu'à être vraie ou fausse, et n'est pas sujette à ia critique de quelque autre point de vue que ce soit). Nous ne pouvons être sûrs qu'il en est ainsi, pour prendre un autre exemple pas plus que nous ne pouvoûs
-
-
être sûrs que toutes les énonciations ont d'abord été des jurons. Il semble que I'afRrmation < pure )) soit plutôt un but, un idéal, vers [?3] quoi tend l'évolution de la science, comme elle tend vers un idéal de précision. Le iangage comme tel, et dans ses étapes primitives, n'est pas précis; il n'est pas explicite non plus, au sens que nous donnons à ce mot. La précision du langage rend plus clair ce qui est dit - le et le caractère explicite (dans s,èas fmeaning] de ce qui est dit -; notre acception de ce mot) rend pius claire la valeur de l'énonciation : c'eSt-à-dire i( comment (en un sens; voir plus loin) il faut Ia prendre >. I-a formule performative explicii.e n'est d'aiileurs que le dernier et ( le plus heureux > des nombreux dispositifs du discours qu'on avait employés, depuis toujours et avec plus ou moins de succès, pour remplir cette même fonction. (Tout comme la mesure ou la standardisation fut le meilleur moyen qu'on ait inventé pour améliorer 7a précision du discours.) Considérons un instant quelques-uns de ces dispositifs plus primitifs du discours, et quelques-uns des rôles qui peuvent être assumés 93
QUAND DIRB, C'BST FAIRB
sxrh,rn
de façon plus expédiente par le performatif explicite (non pas, bien str, sans qu'il y ait changement ou même qu'il ," perde quelque chose, comme nous le verrons).
l.
et I'insistance contenus dans uûe protestation, en employant un point d'exclamation suivi d'un point d'interrogation (bien pauvre expédient!). La ponctuation, les italiques, et I'ordre des mots peuvent être de quelque secours, mais de rendre le ton de la voix, le rythme
Î,e mode
ce sont des moyens plutôt sommaires.
Nous avons déjà mentionné I'expédient extrêmement répandu que ce mode fait de l'énonciation un < commandement D (ou une exbortation, une permission, une concession, que sais-je encore?). Ainsi puis-je dire : < FermezJa >, dans des représente I'emploi de I'impératif.
contextes différents : << FermezJa, j'insiste > ressemble au performatif : < Je vous ordonne de la fermer. > < Fermezla ce que je ferais > ressemble au performatif : - s'ssf < Je vous conseille de la fermer. >
< Fermez-la, si vous le voulez > ressemble au performatif
'4]
vous permets de la fermer. >
>r
2. Le ton de Ia voix, le rythme, I'insistance (Dans. cette même perspective, nous disposons aussi du moyen subtil . des. indications scéniques, comme : ( meDaçant >, etc.). Voici
quelques exemples :
Il Il
va foncer ! (avertissement); va foncer? (question);
Il
va foncer!? (protestation). la langue.parlée ne se laissent pas facilement repro. duire dans la langue écrite. A titre d'exemple, nous avons essayé Ces traits de
94
3. Izs adverbes et loculiow adverbislet et même pour une part dans la Dans la langue écrite cependant nous langue parlée, encore que la nécessité s'en fasse là moins sentir recours touraux adverbes, locutions ou à des aux adverbiales avons {751
-
: < Je
<< Bon, ça va, fermez-la > ressembre au performatif : < Je consens que vous la fermiez. >> < Fermez-la, si vous osez )) ressemble au performatif : < Je vous défie de la fermer. >> On peut aussi employer les auxiliaires : < Vous pouvez la fermer > ressemble au performatif : < Je vous permets de la fermer, je consens que vous la fermiez. > < Vous devez la fermer >r ressemble au performatif : < Je vous ordonne, vous conseille de la fermer. ) < vous devriez la fermer > ressembre à : < Je vous conseile de la
fermer.
coNFÉRENcE
.
-
nures particulières de phrase. Ainsi pouvons-nous nuancer la valeur un sens ds ( Je ferai >, en y ajoutant < probablement D ou - dans(pour ( sans faute >. Il nous est possible d'insister un contraire rappel ou toute autre chose de ce genre) en écrivant : << Vous feriez bien de ne jamais oublier que... D Il y aurait beaucoup à dire sur les rapports que tout, en ceci, entretient avec les actes de manifester, donner à entendre, suggérer, insinuer, laisser entendre, permettre, de supposer, transmettre, << exprimer > (mot odieux!); actes qui sont sans aucun doute essentiellement différents entre eux, bien qu'on y fasse appel, très souvent, aux mêmes expédients de la parole et à des circonlocutions à peu près semblables. Nous reviendrons, dans la seconde moitié de nos conférences, sur ces importantes différences.
4. Izs particules de relation
A un niveau plus subtil peut-être, apparaît I'usage de cet expédient verbal qu'est la particule de relation. C'est ainsi que nous pouvons employer << néanmoins > en lui donnant la valeur de < J'insiste pour que D; <( donc >r avec la valeur de < Je conclus que ); et < bien que > avec la valeur de < Je concède que >. Rappelez-vous aussi les emplois de << alors que ), ( par les présentes D, et ( en outre * >>. On vise uq but semblable lorsqu'on emploie des titres comme < Manifeste >, << Acte >, < Proclamation >, ou le sous-titre < Roman >. Mais laissons de côté et ce que nous disons et la manière dont nous [76] le disons; il est d'autres expédients spécifiques grâce auxquels faire er, au moins dans une certaine mesure, la valeur de l'énonciation.
'
Quelques-uns de ces exemples soulÈvent toutefois le vieux problème de savoir si < Je concède que > et << Je conclus que ) sont ou noo des performatifs.
95
QUAND DIR,E, C'EST TAIRE
sDaÈMs cor.[FÉ-RsNcB
ou pour une promesse, I'expression adverbiale < sans faute
5. Phénamènes qui accompagnenl l'énonciation Nous pouvons accompagner les mots par des gestes (clins d'æil, indications de la main, haussements d'épaules, lronciments de sourcils, etc.) ou des actes rituels non verbaux. Ces gestes, parfois, sont exécutés sans un mot; ils ont une importance évidente.
6. Les circonstances de l'énonciation Les circonstances de l'énonciation sont d'un secours extrêmement précicux. C'est ainsi que nous pouvons dire << Venant de lui, jel.ai pris
comme un ordre, non comme un souhait >. De même dans < Je mourrai un jour >, < Je vous laisserai ma montre >, le contexte des paroles (notamment l'état de santé de I'interlocuteur) modifie la
façon dont nous les comprenons. En un sens, toutefois, ces ressources sont trop riches : elles prêtent
à confusion, à mauvaise interprétation; de pius,
il
nous ariive de
les utiliser dans un autre dessein (pour une insinuation, par exemple).
Le performatil explicite élimine l'équivoque et définit plus solidement I'exécution fu e rfo r mancef.
Ce qu'il y a de gênant avec ces expédients, c'est d'abord leur signification vague et I'incertitude quant à leurjuste compréhension par le destinataire; il y a sans doute aussi en eux quelque inadéquation intrinsèque qui leur interdit un domaine .o*pi"*.-.o-*" r.lui où nous exécutons des actions avec des mots. Un < impératif )) peut être un ordre, une permission, une demande, un désir, un. ,uppii"a[77] tion, une suggestion, une recommandation, un avertissement (< Allez-y, vous verrez bien! >); ou encore il peut exprimer une condition, une
concession, une définition (< Soit... >), etc. Remettre un objet à quelqu'un en disant << Prenezle )), ce peut être le lui donner, prêter, Iouer, ou confier. Dire < Je ferai > peut consister à promettre, exprimer une intention, prévoir mon avenir. Et ainsi de suite. Assurément, la combinaison de quelques-uns (ou de la totalité) des éléments mentionnés plus haut (et sans doute en existe-t-il d'autres), est la plupart du temps, susceptible de nous suffire. Ainsi lorsque nous disons < Je ferai >>, nous pouvons manifester clairement qu'il s,agit d'uneprévision, en ajoutant les adverbes << assurément ,, oo n probablement D; ou pour une intention, << certainement > ou (( décidément >>; 96
>r,
ou le
complément < Je ferai de mon mieux pour... > Il faut noter que lorsque nous disposons de verbes performatifs, ûous pouvons les employer non seulement avec ( que.,. )) ou < de.,, >, mais aussi sous la forme d'indications scéniques (< il I'accueille >), d'avis (< Attention! >), et entre parenthèses (c'est, pour les performatifs, un test presque aussi valable que les formes que oous avons dites < normales >); n'oublions pas non plus I'usage de mots comme < Éllminé > etc., qui, eux, n'ont pas du tout de forme normale. L'existence et même I'emploi de performatifs explicites ne dissipent cependant pas tous nos ennuis. l) En philosophie, les performatifs courent toujours le risque d'être confondus avec des énonciations descriptives ou constatives. l.c) Il est clair que ce n'est pas tout simplement que ie performatif ne conserve rien du caractère équivoque, souvent heureux, primaires; il nous faut aussi considérer, en ant, [?8] des énonciations les cas où on peut se demander s'il s'agit ou non d'un performatif explicite, et c€ux qui ressemblent énormément à des performatifs sans en être. 2) Il existe apparemment des cas très clairs où la même formule semble tantôt un performatif explicite, tantôt une énonciation descriptive, et où I'on peut même exploiter cette ambivalence, Exemples : < J'approuve )), et (( Je suis d'accord >. < J'approuve )) peut evoir ainsi la valeur performative d'une approbation, ou le sens d'une description (< Je préfère cela >). Nous all_ogscEsidérer deux sortes de cas, classiques, où apparaît cett{a1r1-6jy3!gn!9, Ih feront voir quelques-uns des phénomènes qui t accompagnènt Ie développement des formules performatives expli- I
cites. tttf;n,
i
=-\ humaines,-ep.ouu.rî)lipd Dans un grand nombre de situations humaine.,;pl-o3lq._.q1. ii ? çâmsûon > (ez-moi le morl), un < désir ), adoptelTffimIlA. I \_ Ù ilo=iï*ur, par convention, pour la réponse, la réaction app.opriée | 'f' ou convenable à un état de choses donné. Et cette réponse, qui inclut I l; ft I'exécution d'un acte, est, dans ces situations, considérée comme I naturelle (du moins aimons-nous à le penser). En ces occurrences, I ,r' et c'est même ce qui arrive le plus souvent,'.t il est possible en fait i ,,r '\ l'émotion qu, oout ressentions ou le désir en question; .o*me | nos sentiments ne peuveût être facilement perçus par les autres, nous 97
J
ti).
at
QUÀND DIRE, C'EST FAIRE
sxrÈMs coNrÉnrxcs
souhaitons habituellement les en informer. on comprend alors quoique ce soit pour des raisons un peu différentes et parfois -moins louables qu'il devienne de rigueur25 d' ( .*p.i*., u -, [79] ces sentiments si nous les éprouvons; plus:de res exprimer rorsque nous les croyons appropriés, et peu importe qu. nàu, les éprouvions ou non. voici querques exempres d'expiessions ainsi utilisées
:
Je remercie
Je suis reconnaissant
J'éprouve
de la
re-
connaissance Je m'excuse
\ i
Je suis désolé
Je
critique
Je
m'oppose
I
Je me repens Je suis choqué par
Je blâme
Je suis révolté par
I
J'approuve
Je lrouve bon que
Je vous souhaite la bienvenue
Je suis heureux de vous
recevoir
Je félicite
Je me réjouis que
Je me sens d'accord
La première colonne est constituée d'é'onciations performatives; le s é n o n c i a t i o
ns
d
e Ia
d e u x i è m e. n
e s _o_11|gç_gg gu 19!
de_rripfjons {m
ai
s
-!ison5 dsliç..n.t-dçt i,rptiqq!) ;'ceilêililalioiiieÂ" soni àe siÀples constats. Il y a donc de nombreuses locutions dont plusieurs sont importantes et qui souffrent, ou au contraire profitent, d'une ambivalence pour ainsi dire délibérée
ambivalence sans cesse combattue
par I'introduction de tournures- performatives dont la pureté
!
'*
est
elle aussi dé-l$frée. -- -Certairf"ltësts p,brmettraient-ils de décider si < Je trouve bon que.,. > ou < Je sù'È"rféfolé >, est employé en ce moment ou même tou_ jours dans un sens ou dans I'autre? Premier test : se demander s'il y a un lgnq à.dire : << l_e fait_il, en rëalité? >. Lorsque quelqu'un dit, par eremplc, < Je suis heureux de vous recevoir D, ou <( Je vous souhaite la bienvenue ), nous pouvons ldire : < Je me demande s'il était heureux de le recevoir, "n iéulité o, j.mars nous ne pouvons dire, de la même façon, << .Ie me demande s,il i'lui souhaite la bienvcnue, en réalité >. Deuxièmar!î;t _.;. se demander si quelqu'un pourrait accomplir cet acte, en réalité, sans dire effectivement quoi que ce soit * "o**a dans le cas' par exemple, où l'on est désolé (à distinguer de celui où 98
.q1l
'
I'on s'excuse); ou dans le cas où I'on est reconnaissant (à distinguer
'de celui où I'on remercie); ou quand on blâme (cas à distinguer *). ælui où I'on s'oPPose Troisième tert .' se demander
- au moins dans certains cas - s'il est le verbe supposé performatif, un adverbe .om-. (âen6&gmeiT>, ou une locution comme < Je veux bien >; en effet (du riioins le semble-t-il), si l'énonciation--est'"fexëi:ution d'une action, on doit pouvoir éventuellement l'effectuer délibérément, ou être disposé à I'effectuer. Ainsi pouvons-nous dire : < Je lui ai délibérément souhaité la bienvenue D, ( J'd délibérément approuvé son action >, < Je me suis délibérément excusé >r, tout comme < Je veux bien m'excuseldVait nous ne pouvons dire : < J'ai dé[bérément trouvé son action bonne > ou ( Je veux bien être désolé > (à disting_ugr..d-e .1-J-e veux bien lui dire que je sriiS désolé >). tcsl .']t demander si ce que quelqu'un dit est littéralelne_nt -.Quairième faui,îôuime cjest le cas parfois Iorsque je dis <-Jè stFâésoié >iôu , serait accompagné, seulement, d'in9j1_c{rité (: un malheur), comme c'est le cas parfois lorsque je dis < Je mtexcuse >r. Ces tournures brouillent la distinction entre I'insincérité et le mensonge ù*. Il y a ici une distinction à noter, en ant, mais je ne saurais la définir exactement : nous venons de comparer << Je m'excuse > et < Je suis désolé >; or, il existe un grand nombre de formules conveûtionnelles de sentiments, fort semblables, d'une certaine façon, à ces '3il dernières, mais qui n'ont assurément rien à voir avec les performatifs. Par exemple : possible
<<
d1n!{Itr*evant
J'ai le plaisir d'annoncer le prochain orateur,
Je suis désolé d'avoir à dire ... >> << Je suis heureux de pouvoir annoncer.., <1
*1r.
>>
>>
Nous pouvons appeler ces locutions des formules de (comme < J'ai I'honneur de... >).
politesse
It suffit pôur satisfaire à la conven-
* Il existe un doute classique sur la possibilité du consentement tacite; ici une action non verbale devient une formg p-ossible d'acle pcrformatif : ce qui rcmet en question notre deuxième test. tr Des phénomènes sembiables apparaissent dans d'autres cas. Citons celui, particulièrement ambigu, qui se produit avec les performatifs que I'on peut appeler narratifs ou expositifs. .tt lNote marginale dans le manuscrit : < Une clasification plus poussée s'im. pose ici : le noter seulernent en ant. ))l 99
-i.1)u,t
de .-r:
,:' :
''
:
i
,
!.t,,r',tt14.,-,!
QUAND DIRE, C'EST FAIRB
tion de les formuler de la façon indiquée; mais il n'est pas vrai que dire qu'on a le plaisir de... c'est prendre plaisir à le faire' Malheu' reuseàent. Pour être performative 491t9-È-n-f-!Ë-g!-SÈ-inrer= I viennent sgntimenls et -attitudes, et que j'appelle des < comporta- .f wfit pas que l'énonciation soit I'expressiôn conven- | tifs t0 > :-6i-nelle-=[ne de ces sentiments ou attitudes 27. Il faut également distinguer les cas où I'on ptls9 à -l:!:!Wli:s qui peuvent l'avoir annoncéq ou 311*!94491çsn, - cas particuliers engéniireiîes p.tf"t-"tift *"i. qui ne conitituent pas eux-mêmes des énonciations performatives. Un exemple typique : < Je claque
la porte comme ça D (il claque la porte). Mais ceci nous amène à < Je vous salue > (il salue); ici < Je vous salue > peut en venir à remplacer le salut lui-même, et se transformer en énonciation perfor-
mative pure. Dire << Je vous salue >>, c'eJ/, alors, vous saluer. Comparez avec ( Je salue la mémoire de... >>. Il existe toutefois de nombreuses étapes depuis le cas où l'on e à I'action après I'avoir asnoncée ou en I'annonçaot, jusqu'à celui du performatif pur : < Clac! > Dire cela, c'est en fait claquer (dans des circonstances appropriées). Mais il n'y a pas claquement si on ne proûonce pas < clac >. t82l < Éhecl > Dire cela, c'est faire échec, dans des circonstances appropriées. Mais n'y aurait-il pas échec, même si on ne disait pas
<
Septième conférence
l83l
Dans notre dernière conférence, nous avons opposé performatif explicite et performatif primaire, et avancé que Ie premier s'était naturellement développé à partir du second, dans l'évolution du langage et de la société. Nous avons reconnu qu'au reste ce postulat ne supprimait pas toutes nos difficultés à établir la liste des performatifs explicites. Par quelques exemples, nous avons montré, en ant, comment le performatif explicite s'était développé à partir du performatif primaire. exepples dans un groupe de verbes qu'on peut ce sont des performatifs qui louchent, disons nris réactions devant les comportements et à nos comportements envers les autres, et qui sont destinés à manifester des attitudes et des sentiments. Nous a
Comparez les listes que voici
: est'ce un cas où I'on e à l'action en I'annonfait-elle partie de I'acte de replacer une pièce, I'expression Ou çant? acte différent de celui de la jouer? Peut-être ces distinctions ne sont-elles pas importantes, mais il existe des transformations analogues au sein des performatifs. Je cite >> : il cite. Je définis > : il définit (par exemple : x, c'est << Je définis x Par Y. )) <<
v)'
Dans ces derniers cas, l'énonciatioa joue le rôle d'une annonce : est-elle une variété de performatif? Elle est nécessairement active quand I'action aanoncée par le mot est elle-môme une action verbale.
DESCRIPTIS
EXPLICITE
(semi-descriptif)
Je m'excuse
Je suis désolé lI am sorryf
Je me repens lI repent)
Je reproche
Je suis dégotté par lI am disgusted by)
< J'adoube >
Par exemple :
:
MIXTE
PERFORMATIF
Éæhec! >?
<<
is4e-s
lI
apologizel Je blâme
lI uiticizeT
lI
Je m'oppose lI censurel
J'approuve lI approvej Je vous souhaite Ia bienvenue lI bid you welcomel
blamel
que ofl
Je trouve bon lI approve
Jeme sensd'accordavec
lI feel approval ofl
Je suis heureux de vous
recevoir
lI
welcome youl
Nous avons suggéré ensuite plusieurs tests pour le repérage porformatif cxplicite pur
:
101
du
,.*trhh'h
SEPTIÈME COXTÉRENCE
QUAND DIRE, C'ËST FAIRE
{] l) Y a-t-il un sens à demander < Mais, en réalité,I'a-t-il
fait? >? (Ou bien cela équivaut-il à demander < L'a-t-il fait?> tout simplement?) Nous ne pouvons demander < En réalité, lui a-t-il souhaité la bienvenue? > au sens où nous demandons << En réalité était-il heureux de I'accueillir? l>. Et nous ne pouvons dire non plus < En réalité a-t-il blâmé sa conduite? D, au sens où nous demandons < En réalité lui a-t-il fait des reproches? >. Mais ce test n'est pas très co[vainçant : des échecs, par exemple, sont toujours possibles. Nous pouvons demander < En réalité s'est-il marié? >, même après
qu'il a dit < Oui [je prends cette femme...] >, car I'un ou I'autre échec a pu rendre le mariage douteux. 2) Peut-on effectuer la même aclion sans formuler l'énonciation
performative? 3) Cette action, peut-elle être effectuée délibérément ou volontiers? 4) Peut-il être faux, au sens littéral, que je blâme (à distinguer de : je reproche) lorsque je dis < je blâme >? (Il reste toujours possible bien str, que je ne sois pdr sincère.) Un mot différent parfois, ou une construction nouvelle de la formule, peut constituer un test : ainsi, dans un performatif explicite,
nous disons < J'approuve >, plutôt que < Je trouve bon que... >. Remarquez la différence entre ( Je souhaiterais que vous fussiez au fond des mers )), et < Je voudrais vous voir au fond des mers >; ou la différence entre
(
Je
souhaiterais que vous vous amusiez >, et < J'espère
que Yous vous amez ,>, etc. En conclusioû, nous avons fait
matifs d'une part et, d'autre part
la distinction entre les
perfor-
:
l) Iæs tournures de politesse, puremeût conventionnelles
et rituelles
- comme < J'ai le plaisir de... >. Il s'agit là de formules bien différentes : car, quoique rituelles et non obligatoirement sincères, elles
;l
motrtrent, à l'épreuve de chacun des quatre tests, qu'elles ne sont pas des performatifs. Elles semblent constituer uû groupe spécial, limité peut-être aux déclarations de sentiments et même, plus particulièrement, de sentiments qu'on éprouvc à- dire ou entendre quelque chose. 2) Le age à un acte d'abord annoncé verbalement. Exemple typique : I'avocat qui, à la fin de sa plaidoirie, déclare < Je termine ma plaidoirie >. Ces tournures sont particulièrement susceptibles de devenir de purs performatifs lorsque I'action annoncéæ est elle-même
t02
purement rituelle : ainsi I'acte non verbal de s'incliner (< Je vous salue >), ou le rite verbal du < Bravo! > (< J'applaudis >). Ce;l s se rrre n t pa rt c u l i r:^llc l)! lr p b g u rlg $,9;!f tp,lLl _gU _pçIIaJ: natif,iirc nôu5 atbns noté dans les cogp[rt*àii1ï,-nous le retrouvons i
i
t"'
i
âânilaCiàssè, tièî imporiantë.aesiffiirrls_-51"îèii*rsetih-4]g-lp--o_*, Ici, Ia str uctu re fo n da nre n ta te Tè t6ndnciit i o n p'.Ès. ni--;; - j*é"ri6Ët ou etr tout cas le plus souvent - la forme d'unel'"<< a{firmaiio_o) pure et simple; mais elle commence par un performatif eip-lrcité qui indiquç comment I'affirmation doit être insérée dans le contexte de la conver-
sation, de I'interlocution, du dialogue, ou de l'exposé en général.
Voici quelques exemples <<
:
Jc soutiens, arguments à I'appui, (ou j'insiste pour dire) que la lune n'a pas de face postérieurc. Je conclus (ou infère) que la lune
>>
n'a
pas de face postérieure. >> J'atteste quc la lune n'a pas de face postérieure. )) < J'ets (ou concède) que la lune n'a pas de face postérieure. )> < Je prophétise (ou prédis) que la lune n'a pas de face postérieure. <<
(
>>
t86]
Parler ainsi, c'est soutenir (arguments à I'appui), conclure, attesæ ter, répondre, prédire, etc. --PluÇ6urïïe Cèîîilles paraissent être des periormatils purs, tout à -fait satislaisants. (Encore qu'il soit agaçant de les voir ainsi unis à des propositions qui ont I'air d'< affirmations >>, vraies ou fausses : nous avons déjà lait allusion à cela, et nous y reviendrons.) Quand je
dis, par exemple, < Je prophétise que... >, < Je concède que... ), (( Je pose comme postulat que.,. D, la proposition qui suit a normalement I'apparence d'une affirmation, mais les verbes, eux, semblent bien être des performatils purs. Reprenons les quatre tests que nous avons appliqués aux comportatifs. Si quelqu'un dit < Je pose comme postulat que... )) : l) nous ne pouvons demander << En rëalité, postule-t-il? > 2) on ne peut pas postuler sans le dire; 3) on peut dire < J'ai délibérément postulé que... ) ou < Je postule volontiers que... )) 4) il ne saurait être littéralement faux de dire < Je pose comme postulat que... ) (excepté dans le sens déjà noté : ( à la page 265, je postule... >) A tous ces points de vue, < Je pose comme postulat > est semblable à << Je m'excuse... )) ou < Je le blâme de.,. >. (Et, bien str, ces énonr03
;3: '.r-
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QUAND DIR!, C'EST FArRE
ciations peuvent aussi être malheureuses : quelqu'un peut prédire alors qu'il n'en a pas le droit : ou dire << J'avoue que tu I'as fait >; ou ne pas être sincère en disant << J'avoue que je l,ai fait >, alors qu'il ne I'a pas fait.) Il existe_cepend-agt !e nombreiax véibê"sgui sont en apparence tgQs proches des précédents, qui entrenfàppâremment dans la même classe, -,,mais qui re pourraient pas subir les tesls avec succès. Par exemple, :*.:.tf f. tiens pour établi que... > par opposition à < Je pose comme pos7l tulat quë... >r. Cai jé"îiouirais dire tout bonnement < Je tenais pour établi que... > alors que je n'ai pas eu consçience de rien tenir pour établi et sans que j'aie rien dit à cet effet. Et je puis tenir quelque chose pour établi sans m'en rendre compte et sans le dire, comme dans le cas _.- important description. Je puis assurément af;ftrmer ou - d'une nier quelque chose sans mot dire, àcet effet; < J'affirme >, << Je nie > sont alors, eux, des performatifs explicites purs, mais en des sens qui ne nous intéressent pas ici. Je puis approuver ou désapprouver d'un signe de tête; affinner ou nier par implication, à travers d'autres mots. Mais en ce qui concerne < Je tenais pour établi que... >, j'ai pu tenir effectivement pour établi sans rien dire non pas par implication, à travers d'autres mots, mais en restant bien tranquillement assis dans mon coin - attitude impossibie à soutenir quand je veux nier. i ( En d'autres termes, < Je tiens pour établi que... ) et peut-être aussi r Je suppose que... )), fonctionnent d'une façon aussi ambiguë que ' < Je suis désolé de... > : cette dernière formule tantôt signifie < Je n1'exq_119e >> et tantôt décrit mes sentiments, et parfois les deux ensemble;de même, < Je tiens pour établi > peut signifier < Je pose comme postulat.., > mais peut, en d'autres cjrconstances, prendre un sens différent: Et encore < Je suis d'accord avec... )) parfois équivaut à < J'approuve sa conduite >, parfois plutôt à < Je trouve sa conduite bonne >, cette
dernière formule décrivant (au moins pour une part) mon attitude,
ou ma disposition d'esprit, ou mes convictions. Ici encore,
une
nrodification légère a de I'importance : qu'on remarque la différence, par exemple. entre ( Je suis d'accord pour.,. > et < Je suis d'accord avec... )) : test qui ne saurait d'ailleurs être irréfutable. La même distinction générale que nous remarquions déjà pour les 8l comportatifs se manifeste ici. Et si, tandis que < Je pose comme prémisses que... > (< je pose comme postulat que,..), est un performatif 104
explicite pur, ( Je tiens pour établi que... >r o'en est pas un; de même : < Je prédis que... D est un performatif explicite pur, < Je prévois fie m'attends que)... )) n'en est pas un; < Je souscris (je donne mon assentiment) à cette opinion D est un performatif explicite pur, ( Je suis d'accord avec çette opinion > n'en est pas un; << Je mets en doute qu'il en soit ainsi )) est un performatif explicite pur, ( Je me demande si (ie doute que) > n'en est pas un. Le1 yqrb_es
1 pgsgr conme
p_SltUlA! D,
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plédire >,
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souscrire
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ffiais-ôn ië Ëncontié âùisi
ro=bléffr
dans déclare que... )), < Je décide que...
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exemple.Ainsi:<Je
tiens que.,. >, << Je date... >r. Si vous êtes juge et que vous disiez : < Je décide que... D, prononcer ces mots, c'est décider, Ce n'est pas aussi sûr dans le cas de personnes moins officielles : il pourrait s'agir de la simple description d'un état
d'esprit. On peut lever cette difficulté en créant, comme on le fait d'habitude, une expression spéciale, telle que < verdict >, << Je me prononce en sa faveur... D, ( Je déclare ici... >; faute de quoi le [89] caractère performatif de l'énoncé dépendra toujours, pour une part, du contexte : par exemple, du fait que le juge soit en robe et qu'il siège, etc.
Le cas est à peu près semblable pour ( J'assimile les x aux y >, où I'on rencontre, nous I'avons vu, un double emploi : performatif
explicite pur d'une part et, d'autre part, description d'un acte que j'effectue habituellement. Nous pouvons dire < En réalité, il ne les assimile pas...> ou < Il les assimile >; et il peut les assimiler encore sans dire un mot.. Il faut distinguer cc cas de ceux où la seule exécution de I'acte ftterformancejnous soumet à obligation. (< Je définis x comme 105
QUAND DIRE, C,EST FAIRE
sepnÈw coxçÉ.nrNce
étant y >, par exemple, rt'affirme pas qu'il s'agisse là d,un acte régulier,
mais contraint à employer régulièrement x comme équivalent à Il est instructif, dans ce contexte, de comparer < J'ai l'intention de,,.1,. > avec << Je promets de,.. >. En voilà assez sur ce probrème de savoir si un verbe perrormatir explicite (qu'il apparaisse ou soit sculement suggéré être explicite) ou bien fonctionne en tant que ter, ou bien fonctiànne (fùt-ce parfois, ou pour une part) en tant que description _ vraie ou faussè _.de sentiments, d'états d'esprit, de façons de voir, etc. Mais cela nous renvoie à un problèrne plus général, sur lequel nous avons déjà attiré I'attention : Ie cas où l'énonciation dans son ensemble est essentiellement tenue pour vraie ou fausse, en dépit de ses caractéristiques performatives. Même si nous considéronJ .o-r. marginares ies tournures ( Je décide que... )) prononcée par une personne n,appartenant pas à un jury ou < Je m'attends que... >, il seràit absurde de^supposer 9ue tout ce que ces locutions décrivent ou affirment dans la mesure où elles le font et lorsqu'elres le font ne renvoie -qu'aux croyances - serait faire preuve de Ilexcesou aux espérances de celui qui parre. ce sive rigueur pratiquée [90] dans Alice a, pays des merveille.r quand : < Je pense que p ) est pris pour une affirmation à propos de qui pense, à laquelle on peut répondre < Voilà un lait qui n..onr.rn" qu. *u, ,. (< Je ne pense pas... D commença Aljce : < Alors uou, n. devriez pas parler )) dit la Chenille, ou je ne sais plus qui.) Lorsque nous avons des performatifs explicites purs, tels que < affirmer > ou < maintenir >, toute la proposition est certainement vraie ou fausse, bien que l'énonciation soit I'exécution fperforming] de i,acte d'affirr.. ou de maintenir. Et nous avons fait ,.rnu.qua. à plusieurs reprises que des énonciations qui sont manifestemeni des performatifs classiques 28! >), restent très proches < d'une description des lc9mme Changez faits (même si ce n'est pas le cas pour d'âutres, comme < Au jeu 2el >). Tout cela, cependant, n'est pas tellement grave : nous pouvons, en effet, distinguer dans la proposition le détut, qui est perlormatif (i'affirme que) et qui indique clairement comment il faut entendre l'énonciation - c'est une affirmation, par exemple, et non une prédiction et la suite, introduite pa. ., qr.-r,, suite qui, elle, doit être vraie -, ou fausse. Reste qu'en l'état actuel de ra langue, il existe de nombreux cas où il serait impossible d'opérer pareille division, même si l,énonciation semble comporter uoe ,orie de performatif expiicite. par 106
;' p. Ici, nous effectuons I'assimilation et dans le même temps nous I'affirmons - au moyen d'une seule proposition succincte, quasi performative. Juste pour nous stimuler, mentionnons aussi < Je sais que >, < Je crois que )), etc. Ces exemples sont-ils compliqués? Jusqu'à quel point? Nous ne saurions tenir pour acquis, en tout cas, qu'ils constituent de pures exemple : < J'assimile -x à y >r, < Je réduis -t à
descriPtions'
Faisons le point. Nous avons d'abord examiné la distinction avancée entre énonciations perlormatives et constatives. Un certain "i9l] nornbre d'indices nous ont toutefois amenés à penser que des malheurs perpouvaient atteindre les unes et les autres - et pas seulement les formatives; de plus, il nous est apparu que I'exigence d'une conformité ou d'un rapport aux faits (imperatif variable selon les cas) s'applique aussi bien aux performatifs (en plus de la nécessité pour eux d'être heureux) qu'aux réputés constatifs.
Nous avons échoué à trouver ua critère grammatical pour les performatifs, mais nous avons voulu continuer de croire que tout performatif pouvait, eî principe, être ramené à la forme d'un performatif explicite, et qu'il nous serait ainsi possible d'établir une liste. Nous avons cependant découvert, par la suite, qu'en bien des cas il n'est pas facile de décider qu'une énonciation est ou non performative, même lorsqu'elle présente apparemment une forme performative explicite; et de toute façon - comme il fallait s'y attendre -, restent les énonciations commençant par < J'affirme qq,ç.,lL.qui.qç.mblent satisfaire aux conditions du perfi , mars qul sans aucun doute posent une affirmation et sont donc saas aucun doute essentiellement vraies ou faussçq. Il'esl temps, après cela, de reprendre le problème à neuf. Il nous faut reconsidérer d'un point de vue plus général les questions :... -?-::S_U-ç"I
sens faisons-nous
Ii i
f
ffiquelquechose?(Etpeut.êtreaussi,cequiest1.]
un autre cas : en quel sens faisons-nous qpefque chose par le fait de ..i drle qq.lq+g c!o9_e?) Un peu plus de clarté et de précision nous permettra sans doute de sortir de cet embrouillamini. Après tout, << faire quelque chose
-
tlil-
loJtâ.-u-ne
>>
^
est une expression très vague : lo$Sggégg:Jqq!:_y'
énonciation, quelle qu'elle soit, neîTiisons
oîôËlîs
queique c-lrô'sevff -'dssuÊriréËîlêi ÏîveË'êîffiiiiËres -Aorif-îôuS pîil*oaî"dé"I-<î?tïTon )) peuvent prêter à confusion, ici comme ailleurs. <<
107
1
QUAND DIR8, C'EST FAIRE
Nous pouvons opposer, par exemple, les hommes de discours aux hommes d'action, dire que les premiers ne font rien, qu'ils se contentent de parler ou de dire des choses : et nous pouvons encore une fois distingue r entte seulement penser une chose, et la dire efectivement (tout haut); et là, ce dire esl un faire. læ moment est venu d'examiner de plus près les circonstances de la
< productioo d'une élonciation * >. Disons d'abord que selon un que je désignerai par A L:dire quelque + -, - 1.;-r-i----- chosQ nec@o se. Ces d vers se n s-}Tu ni s _ch /ec$-blenîr constituent Ie fait de < dire > dans la pleine acception du mot. Nous
. !
ensemble de sens
i
'J
pouvons convenir, sans nous attarder trop sur les mots ou les nuances,
i,' .. que dire quelque chose : A.a) c'est toujours effectuer cet acte lto perform the actl; produire ' ,-4,)' r'"J!
Huitième conférence
le4l
certains sons (acte < phonétique >); l'énonciation est une phonation lphonel; ... A.ô) c'est toujours effectuer cet acte : produire certains vocables ,/ ou mots (i. e. certains types de son$ appartenant à un certain vocabulaire, et en tant précisé,ment qu'ils lui appartiennent) selon une certaine construction (i.e. conformément à une certaine grammaire, el en tant précisément qu'on s'y conforme), avec une certaine intonation, etc. Nous appellerons cet acte un acte < phatique >> lphaticf, et l'énonciation, I'acte de produire un < phèrne >> lphemel (distinct du phémème 3c de la linguistique); 93] A.c) c'est généralement effectuer cet acte : employer un phème ou ses parties constituantes dans un sens plus ou moins déterminé, et avec une < référence >>'plus ou moins déterminée (< sens D et < référence D réunis constituant la < signification >> fmeaningl). Nous appellerons cet acte un açte < rhétique >> frhetic), et l,énonciation, I'acte de produire un << rhème >> frhemel.
'
Même si nous ne le.mentionnons pas sans c€sse, nous devons garder à I'esprit
la possibilité de l' < étiolement > du langage, tel qu'il se prodult lorsque nbus I'employons sur scène, dans le roman et la poésie,-dans les citations et lectwes
publiques.
En cherchant à établir la liste des performatifs explicites, nous avons découvert qu'il n'était pas toujours facile de distinguer entre én_onciations performatives et énonciations constatives. Il nous a donc semblé opportun de revenir un temps aux principes de base et d'examiner à fond les points suivants : combien y a-t-il de sens selon lesquels dire quelque chose, c'est faire quelque chose, ou selon lesquels nous faisons quelque chose en disant quelque chose, ou même par le fait de dire quelque chose? Nous avons d'abord distingué un ensemble de sens inclus dans I'expression < faire quelque chose >, dès lors qué nous affirmons va d'ailleurs de soi que dire - celaacception - quelque quelque chose, c'est, dans la pleine de < dire >, faire chose, A savoir la production : de sons, de mots entrant dans une construction, et douée d'une signification. Entendez signiûcation lmeaningf comme le souhaitent les philosophes, c'est-à-dire : sens et référence.
J' j'appelle
chose l'é!_qde__4cg-{p,"gg.ç-ia-tions ;,-Q[.rtdg.{es
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y'.o
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locutions ou des élémenrs
*ç9npl9!:*g_g**,J9srâ"SinousnousiniéiËd!"ôiri'''â-iïôïË'iôËiffi lr, c'est suitout, évidemment, afin de le détnir clairement et de le distin-
[95] guer d'autres actes qui seront I'objet essentiel de notre étude. J,ajoute qu'il serait possible (et nécessaire) d'apporter nombre de nuances, si nous avions à discuter de cet acte pour lui-même, et que ces nuances seraient d'une grande imporlance non seulement pour les philosophes mais aussi pour les grammairiens et les phonéticiens. Nous avons distingué assez schématiquement trorig.-plg_s_jphqAq*-" L'acte phonétique, c'est la simple pro.tique, phatique -9t +9!igue. -dè' "litratique, "âuatidn ôôns.'t'âèïê c'est la prôduction de vocables ou mots, c'est-à-dire de sons d'un ceftain type appartenant à uo uo"u-bulaire (et en tant précisément qu'ils lui appartiennent), et se confor109
a-tLr
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Hurrù'{E
QUAND DIRE, C'EST FAIR! _,,,
mant à une grammaire (et en tant précisément qu'on s'y conforme), rhétique, enfin, consiste à employer ccs vocables dans un sens et avec une référence plus ou ntoins déterminés. Ainsi, < Il a dit : Le chat est sur Ie paillasson ), rapporte un acte phatiquç, lue < Il a dit que le chat était sur le paillasson ri rapporte ,n u,11. "lors rhétique. N{ême distinction drans les couples suivants : ., . .,.." .".,,;
1. L'acte
i
< Il a dit < Il a dit
r' 'l
: Jè
"'
slrai là ),
: Sortezl >,
adit : Est{e
< Jl
<<
( Il a dit /qu.il serair là >;
Il m'a dit
de sortir
>;
à Oxford ou à Cambridge? >,
c'était à Oxford ou à Cambridge.
I
( il a dcmendé si
>
Bien que nous n'ayons pas à nous attarder sur ra question en tant que telle, quelques points paraissènt cependant devoiiêtre signalés et
..r'' \
retenus
:
II est ér'ident que pour produire un acte phatique, je dois pro_ ,fr' , l) . durre un acte phonétique; ou, si vous voulez, il est pt évident qu'en pro,v,;, dyislnt I'un, je produis I'autre. (Ce qui ne signifie p., qu. les a"t"s ,i 5J phatrques soient une sous-classe des actes phonétiques et qu,ils appartiennent à cette classe.) Mais I'inverse n'est pas vrai , .i un singe produit un son identique à < va >, il ne s'agit pas pour autant d'un acte phatique.
2) Il va de soi que dans la définition de l,acte phatique, nous avons amalgamé deux éléments ; le vocabu,lairq.e-t lA gpmmaire. Aussi n'avons-nous assigné aucun nô-mîii p.rioon. q"i airil; p;; exemple : < chat complètement le si > ou < res borombes glivantes ont de fait gyré 3r ). Encore faut-il tenir compte de |intonation aussi bien que du vocabulaire et de la grammaire. 3) L'acte phatique, cependant, tout comme le phonétique, peut par essence être mimé et reproduit (y compris intonations, clins d;æil, gestes, etc.). on peut mimer non seulement I'affirmation entre guiilemets < Elle a des cheveux irables > mais encore plus subtilement .la laçon dont Ia phrase a été dite : < Elle a des cheveux irables (en haussant les épaules). Nous d'évoquer la mise entre guilremets du < ir dit )), telle qu'on la'enons trou'e dans les romans. Toute énonciation peut être reproduite simplement entre guillemets, ou entre des guil[emets suivii de ( dit-il ), ou -.- encore plus fréqucmment _ de ( dit-elle ), etc. Mais c.'est I'acte rhétique que, dans les assertions, nous rapportons : >>
il0
,'\
a dit que le chat était sur le paillasson >, < Il a dit qu'il partirait Il a dit que je devais partir > (ses paroles étaient < Tu dois partir >).. C'est ce qu'on appelle le < discours indirect >. Si le sens ou la référence risquent de ne pas être clairement saisis, il faut mettre la phrase ou le mot entre guillemets. C'est ainsi que je puis énoncer ; < Il a dit que je devais me rendre auprès du'ministre', mais il n'a pas dit quel ministre D, ou ( Je lui ai dit qu'il se conduisait mal, et il a répondu que on va loin, moins on est' >r' Or, n'est pas toujours facile tgil'plus d'employer < dit que D : on utilisera plutôt < dit de >, < conseillé de >, etc., si quelqu'un a usé de I'imperatif ou de tournures équivalentes (< dit que je devais D, dit que je devrais >, etc.). Ccrrsidérez dans < <
Il
' h-
il
'
(
i,i
Ï,È
coNFÉRENcB
cette perspective < me souhaita la bienvenue D et (( présenta e.\cuses >.
Une remarque encore sur
I'acte;!!igÆ-: il
sens et la référence (nommer
et
ses
est évident qu'ici le
rapporter) sqnt eux-mêmes
des
actes auxiliaires effectuèsdê pârl'ètreciuation lperformed in performingl de I'acte rhétique. C'est ainsi que nous pouvons dire < J'entendais signifier par'banc',., >> et, disons, < par'il', je faisais référence à,.. >. Est-il possible de produire un acte rhétique sans rapporter ou sans
nommer?
Il
semble qu'en général la réponse soit négative.
Il y a
toutelois des cas embarrassants. Quelle est la référence dans < tous Ies triangles ont trois côtés >? De même, il*e_st clair que nouq po.uvon-q..,.,.. produire un g9!9_phgtigue--qui.'qq sSl!"p-es gn 4cte: rhétique-, b-ien .
-quâTTnverse-soit_imp-o::tbb-nlnsi pouvons-nous répéter 1a remarque ftrpa;a ut autre, ou marmonûcr une phrase, ou lire une phrase latine sans connaître la signification des mots. La question de savoir à quel moment un phème ou un rhème est le au serrs être de même << type )) ou de même même qu'un autre guère ici, pas plus que la question de savoir > n'importe < indice ce qu'est un phèmè ou un rhème isolé' Mais il importe évidemmentf -,\ I dg.q-q rappeler qu'un même.p-hèmç (un indice du iiêmê"tri;e)péïîêtre[ unel*" ou avec ,j eàployé, selon les énonciations, dans un sens différent ' référence différente, et constituer ainsi un rhème différent. Lorsque des phèmes différents sont employés avec les mêmes sens et référence,
on peut parler d'actes rhétiquement équivalents (< la même affirma-
tion i>, en quelque sorte) mais non pas d'un même rhème ou d'actes [98] rhétiques semblables (la même affirmation impliquant, là, I'usage des mêmes mots)'
lll
.
IIUTTùdB coNFÉFJNcts
QUÀND DIRB, C'EST FÀIRE
Le phème est un éiément de langage : son défaut spécifique serait d'être un non-sens sans signification. Mais le rhème est - d'être un élément de discours : son défaut spécifique serait d'être vague, ou vide, ou obscur, etc. Bien que ces considérations soient d'un grand intérêt, elles n'éclairent pas pour autant la distribution entre énonciation constative et énonciation performative. Dans l'énonciation < Ii va foncer >>, sans
doute peut-on rendre parfaitement clair < ce que nous disons > en prononçant ces mots et cela dans tous les sens distingués jusqu'ici
- autaût avec clarté que j'effectue (ou non) par mais sans indiquer pour là I'acte d'avertir. Dans < Il va foncer >i ou < Ferme la porte >>, ce que je dis peut être très clair, sans qu'il apparaisse clairement s'il s'agit d'une alTrmation ou d'un avertissement, etc. On pourrait dire qu'effectuer un acte locutoire en général, c'est produire aussi et eo ipso uû acte illocutoire que je propose - ainsi de l'appeler. Pour définir ce dernier type d'acte, il importe de définir comment nous employons la locution : ûous posons une question ou répondons; - nous - ment, donnons un renseignement, une assurance ou un avertissenous annonçons un verdict ou une intention,
)l ---
nous prononçons une sentence, nous faisons une nomination, un appel, ou une critique, nous identifions ou fournissons une description, etc. (Je ne veux nullement laisser entendre qu'il s'agit d'une classe parfaitement définie.) Notre eo ip.so n'a rien de mystérieux ici. La difficulté tient plutôt aux nombreux et différents sens de ces mots très vagues : ( comment nous I'employons )). Ces mots peuvent renvoyer à I'acte locutoire même et, de plus, aux actes perlocutoires, dont nous allons parler sous peu. Dans I'acte locutoire, nous utilisons le discours. Mais comment, précisément, I'y utilisons-nous? Car Ie discours a de nombreuses fonctions, et très nombreuses sont les manières dont nous I'employons; en un sens sens (B *) très différent - I'acteensera suivant la manière et selon-le sens dans lesquels, chaque occasion, nous 1' < utilisons >. La différence est considérable entre le conseil, la
I
simple suggestion,.-9,1llo.f.{fç_"çSççtif; entre la promesse au sens strict
ef I'intèntiôii.vague. Ces questions pénètrent quelque peu - mais dans la grammaire (voyez plus haut); nous non sans imprécision n'en discutons pas moins chaque fois que nous ûous interrogeons sur le point de savoir si tels mots (telle locution) ont valeurst de i question, ou s'il fad ks prendre comme uoe opinion, etc. a r". /J{ C'est I'acte effectué en ce deuxième et nouveau sens que j'ai appelé : {_1 '''','lt,,.u!
( illocutoire > : il s'agi! d Ug acte effectué en disant quelque chose, , / opposition à I'acte-Ë-
. tt00l On peut affirmer que les philosophes ont trop longtemps négligé cette étude, réduisant tous les problèmes à des problèmes d' < usage acte
( illusion descriptive D, mentionnée dans notre première conférence, tient à ce que les problèmes de la première catégorie ont été considérés, à tort, comme des problèmes de la seconde. Il est vrai que nous nous dégageons maintenant de cette confusion : depuis quelques années, en effet, nous voyons de plus en plus clairement que les circonstances d'une énonciation jouent un rôle très important et que les mots doivent être << expliqués >, pour une bonne part, par le ( contexte > où ils sont destinés à entrer, ou dans lequel ils sont prononcés, de fait, au cours de l'échange linguistique. Cependant, nous sommes peut-être encore trop enclins à donner ces explications en termes de < signification des mots )). Il est entendu que nous pouvons aussi employer < signitcation > avec < Il signifiait cela comme un ordre >> etc. *; une valeur illocutoire je valeur et signification (signification équivadistinguer veux mais lant à sens et référence), tout comme il est devenu essentiel de distinguer sens et référence à I'intérieur même de la signification s. De plus, nous avons ici une illustratiou des différents usages de I'expression < emplois du langage >>, ou ( emploi d'une phrase >, etc. < Emploi > est un mot désespérément ambigu, tout comme << signilocutoire >. On peut même dire que l'
fication >>, qu'on a maintenant coutume de tourner en dérision. Au vrai, le mot < emploi D, qui a supplanté < signitcation D, n'a pas une position beaucoup plus confortable. Peut-être tirerons-nous au clair le sens d' < emploi d'une phrase > en des circonstances données, si nous nous en tenons à I'acte locutoire, sans envisager encore L'acle illocutoire.
[Cf. plus bas, p. [101].1
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i |Â.l,':''t!' 1 .-êl;" "" ..t;"'
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QUAND DIRq C'EST FAIRS
)l]
Avant de préciser davantage cette dernière notion, comparons et illocutoire à un troisième type d'acte. Selon un sens différent (C), produire un acte locutoire par - etacte. là un acte illocutoire c'est produire encore un troisième
ensemble actes locutoire
-, Dire quelque chose provoquera souvent
le plus souvent - actes - certains effets sur les sentiments, les pensées, les de I'auditoire, ou de celui qui parle, ou d'autres persoûnes encore. Et I'oa peut parler dans le dessein, I'intention, ou le propos de susciter ces effets. Compte tenu de cela, nous pouvons dire que celui qui a parlé a produit un acte qui ou bien ne renvoie qu'indirectement à l'acte locutoire ou illocutoire (C.a), ou bien n'y renvoie pas du tout (C.ô). Nous appellerons un tel acte un acte perlocutoire, au une perloeutîon. Ne déûnissons
pas encore avec minutie cette idée necessaire
(E.
ù
l)
-;
bien
str, la définition
bornons-nous à donner- quelques exemples
Acte (A) Il m'a dit
-
<<
locutoire Tire sur elle!
r>,
référant par < elle > à elle.
voulant dire par
<(
tire
sera
:
)
tire, et
se
Acte (B) illocutoire - (ou Il megSSr me conseilla, ou m'ordonna, etc.) de tirer sw elle. pedocutoire - de tirer sur elle. Il me persuada
)21
parvint à me faire (ou me
@. 2) Acte (A)
Il
me
dit
-
:
<<
tt,
l) Notre intérêt, dans ces conférences, va cssentiellement à I'illocutoire, dont nous voudrions faire ressortir I'originalité. On a'cons"tàmmeot tendance en philosophie à I'escamoter au proût des deux Il en est pourtant distinct. Nous avons déjà vu comment les ( signiûcation > et < emploi d'une phrase )) peuvent brouiller
t,,
a dit
t [On trouve ici, dans Je manuscrit, une note de 195g qui dit : < l) Tout ceci rnanque de clarté; 2) qt dans tous les sens qui importent ((A) et (B) par opposi_ tion à (€)) les énonciations ne sont-elles pas toutes performatives? ril ' '
etc.) tirer sur elle.
locutoire
;t
i!
!
* / iJi r' Acte (C.a) perlocutoire , - me retint. II me dissuada,
j 1,'-t ,"! -t )i r t: i t."l '
t'."
Acte (C.ô) II m'arrêta, me rameoa au bon sens, etc. Il m'importuna.
De façon analogue, ôn peut distinguer I'acte locutoire
ll4
gage )}.
distinction entre les actes locutoires et illocutoires. Nous remarquons maintenant que parler de l' < emploi > du langage peut aussi jeter la confusion entre les actes illocutoires et perlocutoires. ll nous faudra donc les distinguer avec le plus grand soin, dans un instant. parler de l' ( emploi du langage pour soutenir, arguments à l,appui, ou pour avertir >, semble être du même ordre que parler de l' << emploi du langage pour persuader, exciter, alarmer >. On peut dire cependant que dans le premier cas (pour opposer schématiquement) il s'agit d'un usage conventîonne\ en ce sens qu'on pourrait I'expliciter par la formule performative. Cetteexplicitation,,en revanche, ne saurait avoir lieu dans Ie second cas. Ainsi pouvons-nous dire < Je soutiens, arguments à I'appui, que... D ou ( Je vous avertis que,.. >; mais
Tu ne peux faire cela. >
Acte (B) illocutoire II protesta- contre mon acte.
'
la
Acte (C.ô) I1
que... >, de I'acte illocutoire < Il a soutenu que... )), et de I'acte perlocutoire < Il m'a convaincu que... D. ) On remarquera que les g@-!s*p_111c1t_fo-,par les perlocutions sont V de vraies cor$g1_gngg_q,.-!énuees aé lout- èlément nventisnnel i en v.ituïuquèfîéttl qiii pfomet,-par Ëiemple, esr engagé p^. -,*J promesse (et cela fait partie de I'acte illocutoire). Certaines distinctions devront peut-être être apportées, puisqu'il y a évidemment une différence entre ce que nous tenons pour la production réelle d'effets réels et ce que nous considérons comme de simples conséqueoces coaventionnelles, De toute façon, nous revjendrons sur ce Point' Nous avons donc distingué, assez sommairement, trois sortes : Ie locutoire, I'illocutoire, et le perlocutoire *. Nous voud'actes [103] drions rnaintenant formuler quelques commentaires d'ordre général sur ces trois classes, sans les définir encore avec précision. Nos trois premières remarques concerneront à nouveau l, << emploi du lan-
autres. termes
Acte (C.c)
coNFÉRnNcB
<<
Il
f
ll5
HUITIÈME COI.TÉRNNCT
QUAND DIRE, C'EST FÀIRB
nous ne saurions dire < Je vous convaincs que,.. D ou ( Je vous alarme que... )). De plus, nous pouvons pleinement tirer au clair la question de savoir si quelqu'un argumente ou non, sans aborder la question
de savoir s'il convainc ou non. 2) Allons plus avant et rendons-nous bien compte que les mots < emploi du langage D peuvent recouvrir bien d'autres choses encore que les actes illocutoires ou perlocutoires. Nous pouvons parler, par exemple, de l' < emploi du langage ,, en tue de quelque chose : mettons, de plaisanter. Il nous est également possible d'employer ( en D autrement que nous ne le faisons dans I'acte d'illocution ainsi dans < en disant'p', je plaisantais > ou < je jouais un rôle > ou < je composais un poème >. On peut encore faire état d'un < usage poétique du langage >, à distinguer de l' < emploi du langage en poésie >. Tous ces < emplois du langage >> n'ont rien à voir avec I'acte illocutoire. Si je dis < Va-t'en donc attraper une étoile filante s >, la signification et la valeur de l'énonciation peuvent apparaître très clairement, sans qu'on puisse aucunement savoir ce que je fais quant au reste. On trouve aussi des emplois parasitaires du langage pas < sérieux D, pas tout à fait < normaux >. Il se peut que I'habituel renvoi à la référence fasse momentanément défaut, ou qu'on n'essaie nullement de poser un acte perlocutoire type (: de faire faire à I'auditeur quelque chose) : Walt Whitman n'invite pas sérieu'sémertt
14]
I'aigle de la liberté à prendre son essor... 3) De plus, certaines des choses que nous < faisons > et qui sont liées à notre acte de dire, ne semblent pas entrer vraiment - au moins de prime abord dans I'une ou I'autre des classes sommairement définies; ou paraissent appartenir plus ou moins à I'une et sans que toutefois, au premier regard, elles se I'autre à la fois montrent aussi éloignées des trois classes d'actes que le sont la plaisanterie ou la poésie. L'insinualion, par exemple, - quand nous laissons entendre quelque chose dans une énonciation, ou grâce à elle )5] semble inclure une convention, tout comme l'acte illocutoire; mais nous ne pouvons pas dire < J'insinue... >; et le dirions-nous que cela renverrait à un effet astucieux plutôt qu'à un acte pur et simple. Un autre exemple : celui du cas où I'on se libère d'une émotion trop vive. Nous pouvons nous libérer de l'émotion dans ou par une énonciation :.en jurant, par exemple. Or, une fois encore, les formules performatives n'ont que faire ici; ni les autres expédients illocutoires.
u6
* Nous pourrions dire que nous employons les jurons polrr soulager pas, acte conven' est un notre cæur. L'acte illocutoite, ne I'oublions que convention. à une tant conlorme en tionnel : effectué 4) Nos trois classes nous obligent, puisqu'il s'agit d'actes, à tenir Çompte de ces malheurs auxquels tout âcte est exposé. ll nous faut être prêt, systématiquement, à distinguer entre < I'acte de faire x > c'est-à-dire d'accomplir -ï, et ( i'acte de tenter de faire x >; entre avertir, par exemple, et tenter d'avertir. Il faut s'attendre ici à des échecs.
Les trois questions qui suivent sont importantes parce que nos
actes sont bien des acles.
5) Nos actes étant des actes, nous devons toujours nous rappeler
la distinction entre effets intentionnels et
effets non intentionnels; remarquer aussi (r) que celui qui parle peut avoir i'intention de pro' duire un effet, sans que ce dernier se produise; et (u) que I'effet peut se produire sans qu'on I'ait voulu et mêrne lorsqu'on ne le veut pas. Pour venir à bout de la complication (l), nous distinguerons' comme il06l plus haut, entre tentative et réussite; pour (u), nous invoqtterons les expédients linguistiques habituels du désaveu (adl'erbes comme < involontairement ), etc'), expédients que nous tenons prêts pour notre usâge personnel, en toutes nos actions. 6) De plus, il faut évidemment reconnaître que nous ne faisons pas exactement certains actes, en ce sens que nous les exécutons, par éxemple, sous la contrainte. Nous avons vu plus haut (en 2) d'autres cas où I'action n'est pas complètement exécutée' 7) Reste cette objection à nos actes illocutoires et perlocutoires, selon laquelie la notion d'acte même n'est pas claire. Nous y répon' drons par une théorie générale de I'action. L'<< acie > est généraleme nt tenu pour un événement ph1'sique précis, effectué par nous, et distinct à la fois des conventions et des conséquences. lr'lais : a) L'acte illocutoire et même I'acte locutoire peuvent envelopper des conventions. Pensez à la révérence' C'est un hommage, mais uniquement parce que I'acte est conventionnel; et il est effectué uniquement parce qu'i1 est conventionnel. comparez ( tirer deux Lralles s? de fusil > et ( tirer deitx bcaux cctups )).
* << Jurer )) est ambig! : < Je jure par Notre-Dâme >>, c'esl jurer par Notre' 88 name : mais cr n'est plus jurer pàr Notre-Dame, que de dire << Dame ! >>
tt7
QUAND DIRE, C'EST
FATRE
à).L'acte perlocutoire peut inclure d'une certaine manière des conséquences ._ ainsi lorsque nous disons par < I,acte r,p fuiruiry r.
L'acte, en réarité' entraîne toujours des conséquenc.s lpius o, ,nJin, considérabres) et certaines d-'entre elres peuvent être imprévues [uninte.ntional]. Il n'y a pas de limire à l,acte physique
Que I'acte lui-même comporte
Neuvième conlërence
il08l
minimum.
la série indéfiniment iongu" a" ,.ï
< conséquences )), c'est là _ ou ce devrait __ ôtre _ un lieu commun t7] essentiel de la théorie du langage qui touctre i I' < action > en générar. Si on nous demande,-par exemple, < eu,a_t_il fait? >, nou, pîuuoiï répondre < II a tué l'âne >, ou.i II a tiÉ un coup de fusil >, ou < Il a appuyé sur la détente >, ou < Il à remué I'index ,. Èt tout.r.r, .epo^., peuvent être correctes. De mêmc _ pour abréger le conte a,àfu"i, où l'on voit une vieille s'efforcer de ràmener lelochon J,"_p, p"r. préparer le dîner de son vieux nous pouvons dire, en dernier - pu._â.rru, la que le chat poussa le cochon I.1?rt, haie, ou qu,il la lui fit franchir. Si, dans de tels .ur, nou, ,,* tionnons à la fois un acte B (iilocution) et un acte C (perlocution), nous dirons < par son acte de B -er, il C -a > plutôt qr. u ,, S -;nt... >. Voilà pourquoi nous appelons c un acte perlocutoire, et le distinguons de t'ilr,ccutoire. Nous reviendrons dans la prochaine conférence sur ra distinction entre les trois actes et sur les expressions < en > [faisant x] et < par mon acte x, je faisais y >. Nous pourrons ainsi un peu mieux délimiter les trois classes et reconnaître ce qui leur appartient en propre. Et nous verrons que si loc'toireexige poui êt." .o*pt.iqrà u.uucoup de choses soient 'acte faites à Ia fois, it .n va peut-être de même des actes illocutoires et perlocutoires.
Alors que nous tentions de dresser la liste des performatifs explicites, ngus nous sommes heurtés à une difficulté : comment décider qu'une énonciation est ou non performative, ou du moins, qu'elle est purement performative. Un retour aux fondements du langage nous a alors semblé opportun : il convenait de se demander en combien de sens dire quelque chose, c'est faire quclque chose, ou en combien de sens nous faisons quelque chose en disant quelque chose, voire
'
b faft de dire quelqr.re chose. Nous avons reconnu, en premier lieu, I'ensemble de ce que nous faisons en disant quelque chose, et nous I'avons nommé acte locu/olre. Nous entendons par là, sommairement, la production d'une phrase dotée d'un sens et d'une référence, ces deux éléments constituant à peu près la signilication - au sens traditionnel du terme. Nous avons avancé, en second lieu, que nous produisons aussi des actes illocutoires .' informer, commander, avertir, entieprendre, etc.,
par
c'est-à-dire des énonciations ayant une valeur conventionnelle. Enfin, actes que nous provoquons nous avons défini les actes perloculoires
par le fait de -dire une chose. Exemples : convaincre, persuader, empêcher, et même surprendre ou induire en erreur. Nous avons donc trois dimensious ou sens différents *- sinon plus -- pour 1' < emploi d'une phrase >r ou l'<< emploi du lan-
ou
accomplissons 38
it09] gage >. (I1 y en a d'autres, évidemment.) Iæs actions de ces trois classes que telles, bien str * assujetties aux difficultés et sont - cn tant restrictions propres aux actions, à savoir la nécessité de distinguer la tentative de la réussite, I'intentionnel du non-intentionnel, etc. Cela étant, il nous faut examiner plus en détail ces trois classes. Nous devons distinguer I'iliocutoire du perlocutoire, faire la différence entre < en disant cela, je I'avertissais > et << par le fait de dire cela, je le convainquis, le surpris, lc retins >>.
tts
u9
|rEx-ruÈt"G coNrÉRBNcE
DE LA NÉCESSITÉ DE DISTINGUER LES CONSÉQUENCES
I"a distinction entre illocutions et perlocutions paraît plus que toute autre susceptible de faire problème. C'est elle que nous allons aborder, toût en étudiant aussi ce qui sépare illocutions et locutions, mais en ant. Il est certain que Ie sens perlocutoire d' < effectuer une action > doit, de façon ou d'autre, être écarté comme n'ayant rien à voir avec le sens selon lequel une énonciation - pour peu que son émission soit la < production d'une action > est performative (par - s'y prêtent, en effet, opposition à constative). Si les circonstances un acte perlocutoire pett totrjours, ou presque, être suscité, avec ou sans préméditation, par n'importe quelle énonciation et, notamment, par une énonciation purenent et simplement constative (à supposer qu'un tel animal existe!). Vous pouvez par exemple me faire renoncer 110] (C.à *) à un acte, en me renseignant peut-être ingénument, mais néanmoins opportunément sur les -conséquences effectives de cet acte. Cela s'applique même à (C.a *), car vous pouvez me convaincre (C.a *) que cette femme est adultèrc en lui demandant si ce n'est pas son mouchoir qu'on a trouvé dans la chambre de X **, ou en affirmant
que c'est le sien. On doit donc séparer ûettement I'acte effectué (ici, une illocution) et ses conséquences. Au vrai, en général, s'il ne s'agit pas d'un acte de dire, mais d'une action ( physique D nor conventionnelle, I'affaire r.[On trouvera le
sens de ces références à la page [102].1 Que le fait de donner pur€ment et simplement àes ienseignements produise ppsque toujours des effets-ultérieurs sur I'action, cela n'est pas plus étonnant que que la production de n'importe queile âction (y compris à_-savoir llp"gry, -: l'ômissio-n d'un performatif) a constamment comÀe coniéq,rence de noius renàre, nous.et les autres, co-nscients de certains faits. Executer un acte de manière perceptible ou discernable, c'est nous donner I'occasion (à nous et aux autres aussi, ca général) À la fois de recorrnaîtr€ (c) que nous I'avons executé et (ô) de révélei bon nombre de faits déductbles de cet acte, qui ont trait à nos moiivations, à notre caractère, que rais-je encore? Si vous lanccz une tomate dans u:re réunion politique (oullurlez < Je proteste >>, lorsqubn la lance que c'est là effectuer - is une action), la conséquence sera probablement de faire connaître aux autres que vols.désapprouvez, et de les amener à penser que vous avez certaines convicdôns politiques. Mais cela ne rendra pas le geste ou le cri wais ou faux (bien qu'ils quissent induire en ereur, et cela de votre propos délibéré). Dans la même pedpectivo, on,pcut dire que Ia production d'efiets-ultérieurs plus ou moins o.i*Ui"* n'anpêcbera pas une énonciation conglativc d'Ctre woio ou fauss€.
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120
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€st fort compliquée. Comme on I'a vu, on peut (ou du moins se plaît-on à le croire) classer, étape après étape, une part toujours plus grande de ce qui est inclus (ou peut l'être) dans le mot qui désigne l' < acte > lui-même t, comme étant seulement, en réalité, des consëquences de cet acte, réduit à son prétendu sens physique minimum; et cela, même si ces conséquencas sont à peu près inséparables de I'acte et naturellement prévisibles. Notre action finit alors par se réduire à un ou plusieurs mouvements effectués par I'une ou l'autre partie de notre corps fuar exemple, plier le doigt, ce qui produit un déplacement de la gâchette, ce qui produit..., ce qui produit la mort de l'âne). Il y aurait évidemment beaucoup à débattre là-dessus, mais cela n'importe guère ici. Quelques remarques en revanche s'imposent à propos de I'acte de dire : l) Le vacabulaire fournit ici une aide qu'il nous refuse d'ordinaire lorsqu'il s'agit d'actions < physiques >. Il nous arrive presque toujours, en effet, de nommer spontanément les actions physiques non err termes d'acte physique minimum, mais en termes qui incluent un Eombre plus ou moins grand, toujours extensible, de ce qu'on peut appeler les conséquences naturelles de I'acte (ou qui, d'un autre point de vue, font état de I'intention dans laquelle I'acte a été effectué). Non seulement nous n'employons alors pas la notion d'acte physique minimum (notion d'ailleurs problématique), mais nous ne disposons, semble-t-il, d'aucune classe de mots pour distinguer les actes physiques de leurs conséquences. Tandis que, quant aux actes de dire quelque chose, le vocabulaire qui les désigne (B) paraît destiné à marquer une coupure, à un point donné, entre i'acte (de dire quelque chose) et ses çonséquences, ou bon nombre d'entre elles, en tout cas conséquences
ill2]
qui ne sont pas, d'ordinaire, de I'ordre du dire**.
2) De plus,
il
semble que nous recevions quelque secours de la
Je n'approfondis pas ici la question de savoir jusqu'où Ies conséquences On trouvera I'exposé des erreurs habituellement commises en c€tte matière dans les Princtpia Ethica de Moore, par exemple. ** Notez que si nous supposons que, lonque nous disons << J'ai remué Ie doigt >>, I'acte physique minimum est un mouvem€nt du corps, le fait que I'objet mt est une partie de mon corps introduit, en réalité, un nouveau sens de << remuer >>. Ainsi je puis remuer les oreilles comme fait I'ecolier, ou bien eo les s€mant entre le pouce et I'index; ou remuer le pied comme on fait d'habitude, ou bien en le massant avec la main, comme lorsque j'ai des fourmillements. C'est I'usage courant de remuer, da:rs ces exempler, qui est dernier : nous D'&vons pas à remonter, pâr excmple, jusqu'à ( tt€r rur mes murlec >, cic.
'
peuvent s'étendre.
tzt
QUÀND DTRE, C'EST FAIRE
NS.LNTh'G CONTÉRTNCB
nature particulière de I'acte de dire, par opposition à l'acte physique ordinaire. En effet, I'acte physique minimum que nous cherchons
(r) et bien que cela puisse importer d'uû certain entre eux. Toutefois, certains contextes, rien ne nous empêche de dans et vue a. l.,int
à isoler de ses conséquençes cet acte, dis-je,-parce qu'il est meuvement corporel, est lui-même in pari maleria * avec bon nombre de ses conséquences naturelles et immédiates, alors que les conséquences naturelles et immédiates d'un acte de dire (et peu importe ce qu'elles peuvent être) ne sont pas, au moins généralement, d'autres actes de dire de la part de celui qui parle ou môme d'autres personnes **. y Il a donc une espèce de coupure dans la chaîne, une coupure naturelle et normale qu'on ne trouve pas dans le cas de I'acte physique et qui est liée à la classe particulière des mots qui désignent les actes
illocutoires.
Mais,
131
de
mandera-t-on peut-être maintenant,
les
conséquences assignées selon le lexique aux perlocutions ne sont-elles pas, en réalité, des conséquences des actes (A), c'est-à-dire des conséquences des
locutions? Dans notre effort pour isoler < toutes )) les conséquences, ne devrions-nous pas revenir en arrière, par-delà I'illocutoire, jusqu'au locutoire - et plus précisément à I'acte (A.c), c'est-à-dire à la production de sons, c'est-à-dire à un mouvement physique ***? Il a déjà été is qu'en tout acte illocutoire, il y avait un acte locutoire; que féliciter, par exemple, c'est nécessairement pronorçer certains mots; et que prononcer certains mots, c'est nécessairement du moins - vocal pour une part eff€ctuer des mouvements de I'appareil fulus ou moins aisés-à décrire ****). Le divorce entre actes < physiques r> et actes de dire n'est donc pas total : un certain rapport demeure
] In pari materia, ici, pourrait tromper. Je ne veux pas dire (comme je I'ai -méta- remarquer fait dans la note précédente) que (< remuer nion doigt >r serait physiquement le moins du monde semblable au ( déplacement dàla détente > qui
est sa consequence ou au < déplacement de la détentè par mon doigt >. Mais < un déplacement du- doigt qui actionne la détente >> est in pari materia {væ, < un déplac€ment de la détente >. Nous pourrions examiner le problème d'un autre et très important point de rte, eû disaot que le scns selon lequel dire quelque chose produit ôes effeti sur d'autres pgrsgnn-F, ou c4lss un efet, est foncièrement différeût du sens de ca, lorsqu'il
s'agit d'une causalité physique, par pression, etc, La première causfulte àoit
opérer à travers les conventiorq du langage et relève de lTnfluence qu'€xerce une p€lsonn_e sut une autre : ce qui est sans doute le sens primitif de ( c:l )). [Voir plus bas.] En est-ce un rraiment? Nous I'avons déjà noté : la < production de sons >r est elle-même, en fait" une conséquence de I'acie physique minimum qui est conspar titué uD mouvement de I'appareil vocal. Pour nous en tenir toqiours, par eor:ci de simplicité, à l'éûonciationprlée.
.r 'tt
't.f
t22
iii.. un trait là où nous
le voulons et où cela nous alrange, c'est-à-dire
entre I'acnevement de I'acte illocutoire et toutes ses conséquences. plus important En outt., (rr) - et ceci est beaucoup - nousetdevons selon (bien que formulée) non plus haut suggérée iejeter I'idée locutoire; de 1'acte constlquence une serait illocutoire I'acte iaquett. ,t ,cln. I'idée que ce qui est impliqué par le lexique des illocutions
indique une référenÇe supplémentaire à quelques-uneJ des conséquences *; Que, par exemple, < il me pressa de"' > signifierait du locutoire qu'il a dit certains mots et, en outre, que les dire a eu (ou tendait à ,r,tl avoir) certaines conséquences (? un effet sur moi). Si nous voulions
"
'
''
(
revenir en arrière ,,, par-delà I'illocuioire, jusqu'à I'acte phonétique (A'a), nous n'atteindrions pas pour autant' i ti"u.tt la chaîne de ses conséquençes' un acte physique minimum à la façon dont on peut apparemment remonter de la mort du -lièvre jusqu'au mouvement du doigt sur la détente. La production de sons peut ëtre une conséquence physique des mouvements de I'appareil vocal, du souffie, etc'; mais la production d'un mot n'est conséquence de la production, physique ou autre' d'un son' pasla -La production de mots ayant une signification n'est pas davantage une conséquence de l'émission, physique ou autre, des mots' C'est pourquoi, même lcs actes phatiques (4.â) et rhétiques (A.c) ne soût pas ne parlons plus de conséquences physiques des conséquences (A.a). Par I'emploi du lexique de I'illocution, d'actes phonétiques nous faisons référence non aux conséquences (du moins au sens ordinaire) du locutoire, mais aux conventions des valeurs illocutoires lesquelles concernent les circonstances particulières de l'éno1-ciation. Nous reviendrons bientôt sur les sens où la réussite ou l'achèvement d'un acte illocutoire entraîne, de fait, des < conséquences D
po,,. certains motifs
ou des
't<
effets
**
>'
i $ faut cependant tr-Peutétre
tenir compte de ce qu'on dira plus loin.l sommes-nous encore tentés d'accorder une certaine < primauté >t au locutoire et de le préférer à I'illocutoire : parce que, si nous considérons u-n acte rhétique particulier (A.c), un doute peut subsister sur Ia manière de le decrire
Jrnr-t" f.'*iqu" de I'iilocution' Après toul, pourquoi donner l'étiquette
I
à I'un,
B à I'autre? Nous pouvons être d'accord sur les mcts prononcés effectivement,
;;il;
sur le sens'dans lequel on les a employés et suf les réalitas auxquellcs ils être en dæaccoid, en revarche, sur la qucstion de gavoir s'ils équiva'
i""uài"ot,
"t
123
QUÀND DIRE, C'EST FAIR!
l5l
J'ai démontré jusqu'ici que l'on pouvait espérer isoler I'illocutoire
du perlocutoire, dans la mesure où seul ce dernier produit des conséquences, et j'ai indiqué que I'illocutoire n'est pas lui-même une conséquence du locutoire 3s. Il me faut en revanche maintenant faire remarquer que cet acte illocutoire, distinct du perlocutoire, est lié en divers sens à la production d'effets : l) Un acte illocutoire n'aura pas été effectué avec bonheur, ou avec succès, si un certain effet n'a pas été produit. Cela ne signifie pas pour autant que l'acte illocutoire soit lui-même la production d'un certain effet. Simplement on ne peut dire que j'ai averti un auditoire s'il n'a pas entendu mes paroles ou ne les a pas prises en un certain sens. Un effet doit être produit sur l'auditoire pour qu'un 16] acte illocutoire puisse être tenu pour achevé. Comment expliquer cela au mieux? Et comment préciser ce qui se e? L'effet consiste, la plupart du temps, à provoquer la compréhension de la signification et de la valeur de la locution. L'exécution d'un acte illocutoire inclut donc I'assurance rJ'avoir été bien compris lthe securing of uptake aol.
2) Il ne faut pas confondre la façon dont I'acte illocutoire < prend effet > avec la production des conséquences (au sens d'entraîner normalement tel ou tel état de choses, c'est-à-dire un changement laient, en ces circonstances, à un commandement, ou à une menâce, ou simplement à un conseil ou à un avertissement. Mais il y a aussi ample matière à désaccord dans des cas particuliers oir il s'agit de savoir comment I'acte rhétique (A.c) pourrait être decrit dans le lexique de la locution. (Qu'a+-il voulu dire, en réalité? A quelle personne, à quel momenl, ou à quoi encore se référait-il, en fait?). Et nous pourrions souvent convenir que I'acte était, par exemple, assurément un ordre (illocutoire), sans que nous sachions encore, avec certitude, quel était cet ordre (locutoire). On peut waisemblablement supposer que I'acte est ( tenu ) de se laisser décrire comme un tlpe plus ou moîns détermîni d'illocution, au moins autant qu'il est ( tenu > de se laisser décrire comme un acte plus ou moins déterminé Ce locution (A). On peut s'attendre, pour c€ qui est du choix de la description correcte, à des difficultés touchant aux conventions et intentions, lorsqu'il s'agit de la locution aussi bien que de I'illocution. C'est ainsi qu'une ambigulté, déliberee ou non, quant à Ia signi-fication ou à la référence est peut+tre aussi fréquente qrre le fait qu'on manque à manifester < comdélibérément ou non - I'appament nos paroles doivent être prises >> (au sens-illocutoire). Au reste, tout reil des performatifs explicites (voir plus haut) sert à prévenir les desaccords dans la description des actes illocutoires. Il est plus difficile, en fait, de prévenir les désaccords qui surgissent dans la description des < actes locutoires >. Quoi qu'il en soit" les uns et les autres sont conventioûnels et peuvent avoir besoin de l' < interprétation > d'uo juge.
124
lm.IvrÈ-l'lB coNFfu'ENC8 des événements)' Aiosi' < Je baptise ce bateau dans le cours habituel ou de baptiser ntitobeth >> tseulemeût pour effet de nommer
lîrirc ;;;;;; ; ;'ifrrirt
le Généra' çertains actes ensuiie - comme de I'appeler avenus' non et nuls Staline seraient alors par ?\ Nous avoûs dit que nombre d'actes illocutoires suscitaient D ( unilatérale être .ép";te D ou unc suite qui peut part argumenter' d'une "";'d;;;;;;î >. C'est ainsi qu'on distingue
demander de"' etc'' et' d'autre "î.,-uilr,e."re commander, promettre' sugg;r€r, ( oui ou non D' si la << réponse > dem-ander si, ;;i, ;C;;;;Jmag9.r en ceuvre' il faut de la part de est donnée, ou sr la suite est mise c'est ou de quelqu'un d'autre'- un deuxième acte' Et
;il;;Ële de aes diuats sur les conséquences du langage file ;;;;;"";;tn de initial mouvement le dans inclus peut être acte ne second ;;;. I'action' iiii"eruf, pourtant' nous. pouvons igujgurs {tt,,* l:],î "T::: I'aition' De là que le second n..ï ;;;;"!tJ a;"t mot indiquant ,:--. -.. être' A+-^ ou aurai€nt pu ;;;. p;;;ttie attribué; et si dei paroles sont' Nous donç devons utilisées, l'acte en
;;,*t;;r - J'ai
qu"'iioo est perlocutoire' il a obéi > de < Je I'ai fait obéir >' Cette
ordonné et
;;;î-f"t.ule
implique que d'autres moyens' supplémenlaires'
rr,?r;;ï;e;;i:i!::a'l-i:::::::îiïff"::::"ff :i,:XiT'iiff 9,ÏÏt:::"; tr"t,;;;"*";; *cÀ. trtequemment) influence. personneile
Très souveot méme intervient un acte illocutoire ( le lui ai fait faire en affirdistinct du simple commandement : Je mant "'ii", x. )a""c trois m.anières dont les actes illocutoires sont liés à " : trols manleres distinctes de la production d'effets telle des effets ou'elle caractérise I'acte perlocutoire'
;;;;';;;;t"inte.
"ï;;?;;-airttoguerles actes qui ont un objectif perlocuroire des r.""""lr.rr. persuader),.rde ceux qui, simplement, entraînent dire < J'ai essavé de pouYons-ûous ni'i;i ::ïrï;i;;"i.i.*. perlo''avertir' qu'à l'tfiiaytt >' Ce qui constitue I'objectif ;;;;;étssi : perlocutoire autre d'un J'une illocution peui être la suite ;il quelqu'un) (alerter par exemple' il;ËJ !..to"utoit, d'avertir' d'effraver quelqu'un' Et Ëil;;; i^ t"i* de.l'acte perùcutoire suite d'une quelqu'un peut être la Ëoror", faire changer de propoi à < Ne le rais pas >' certains q-u. t'otje"tir uise iu'
;ii;;;;t*;i'iot ""i.t
"n p*f.l*toires ont tËujours dei suites plutôt que des objectifs 125
:
NEunh[E coxrÉnrNce
QUAI{D DIRq C'[sT F^IRE ce sont ceux qui ne disposeot pas d'une formule illocutoire
lt. Ainsi
je puis vous étonner, ou vous bouleverser ou vous humilier par
une
locution bien que les formules illocutoires << Je vous étonne en... > < Je vous bouleverse en... )), << Je vous humilie en.,. D, n'existeut pas.
l8l
Que la << réponse r> ou les suites puissent être, de surcroît ou entièrement, obtenues sans aucun recours locutoire, voilà qui est caractéristique des actes perlocutoires. Ainsi peut-on réussir à intimider quelqu'un en brandissant un bâton, ou en pointant un fusil. Même dans les cas où I'on convainc, persuade, fait obéir ou croire, on peut parvenir à ses ûns sans employer de paroles. Mais ce seul critère ne
suffit pas à distinguer les actes illocutoires, puisqu'il est possible, par exemple, d'avertir, de commander, d'effectuer une nomination, de donner, de s'exc, sans recourir à des paroles et que qes
-
actes sont tous illocutoires {2. On peut faire un pied de nez ou lancer une tomate en guise de protestation.
PIus importante est la question de savoir si les actes perlocutoires peuvent dans tous les cas obtenir leur << réponse D ou leur suite par des moyens non conventionnels. Nous pouvons çertes obtenir certaines suites d'actes perlocutoires par des moyetrs totalement non conventionnels (< pas très réguliers D comme on dit), par des actes qui n'ont rien de conventionuel, ou qui ne le sont pas en I'occurrence : ainsi puis-je réussir à persuader quelqu'un en balançant doucement un énorme bâton; ou en mentionnant, non moins doucement, que ses vieux parents vivent encore dans le Troisième Reich. A proprement parler, en revanche, il ne saurait y avoir d'acte illocutoire si les moyens employés ne sont pas conventionnels, et les moyens de réussite non assortis de paroles devront donc être conventionnels. Mais il est difficile de dire où commencent et finissent les conventions; c'est ainsi que je peux avertir quelqu'un en agitant un bâton ou lui donner une chose en la lui mettant tout simplement dans les mains;
or, si je I'avertis en agitant un bâton, agiter mon bâton est un avertissement et I'autre saura fort bien ce que je veux dire : mon sans méprise possible comme un geste de acte lui apparaîtra
-
-
menace. Des difrcultés analogues se présentent dans le cas du consen-
i9]
tement tacite à un accord, ou d'une prom€sse tacite, ou d'un vote à main levée. Il reste que nombre d'actes illocutoires ne peuvent être exécutés sans qu'on dise quelque chose. Cela est vrai lorsqu'on 126
pas montrer), argumente, apprécie, affirme, informe (informer n'est tenir pour f'e' juger); c'est.vrai de (au sens légal crrnnute- et tient et expositifs' par opposition verclictifs des tiande'majorité * 13' promissifs "iiiï"'f" de et d'exercitifs I Uon norntte
.lontrouveraladéfinitiondesverdictifs,expositifs,exercitifsetpromissifs
dans'la douzième conférence' J'O'U')'
Dixième conférence
lr20l
Iaissant de côté, pour ur temps, notre distinction initiale entre performatifs et constatifs, ainsi que notre projet d'une liste de mots et notamment de verbes performatifs explicites, nous avons -repris le problème à neuf et- étudié selon quels sens dire quelque chose consiste à faire quelque chose. C'est ainsi que nous avonS-f distingué I'acte locutoire (et les actes phonétique, phatique et rhé- f tique, qu'il inclut) qui possècle une signifcation; l.'acte illocutoire où le fait de dire a une certaine valeur; et I'acte perlocutoire, qui esti., I'obtention de certains efets par la parole. . - .f Au cours de notre dernièrc conférence,ïots avons défini en quels sens nous pouvions, dans ce contexte, parler de conséquences et d'effets, et relevé notamment trois sens selon lesquels les actes illocutoires eux-mêmes peuvent inclure des effets, à savoir : s'assurer d'avoir été bien compris fsecuring uptakel, prendre effet, et inviter à < répondre >. Pour I'acte perlocutoire, nous avons introduit une distinction assez vague entre atteindre un objectif et produire des suites. Les actes illocutôires sont .conventionnels; les actes perlocutoires ne le sont pas. Des actes des deux types oû, plus précisément, des actes désignés par le même mot (par -exemple des actes équivalant à l'acte illocutoire d'avertir, ou à I'acte perlocutoire de peuvent être exécutés sans qu'on use de paroles; mais convaincre) même alors, I'acte (l'avertissement, par exemple) doit être un acte [21] non verbal conventionnel pour mériter d'être appelé illocutoire; et, en revanche, les actes perlocutoires ne sont pas conventionnels, bien qu'on puisse les susciter par des actes qui le sont. Un juge deyrait pouvoir decider, en entendant ce qui a été dit, quels actes I
locutoires et illocutoires ont été exécutés; mais non quels a'ctes perlocutoires. Enfn, nous avons vu qu'il existe toute une série d'autres questions qui touchent à << la façon dont uous employons le laugage >, ou à 129
DxÈMB coNFÉRENcE
QUAND DINE, C,EST FAIRB
( ce que nous faisons en disart quelque chose ); et c€s questions, affirmions-nous, soût sans doute très différentes (ou du moins paraissent-elles l'être intuitivement) de celles que nous avons évoquées : il s'agit là de problèmes que nous n'avons pas I'intention d'aborder. On peut, par exemple, du langage poui insiuuer (ou pour tout autre usage nor littéml), pour plaisanter (ou pour tout autre usage considéré cÆmme non sérieux), pour jurer et se faire valoir (qui sont peut-être des usages expressifs du langage); et nous pouvors déclarer : << En disant x, je plaisantais > f insinuais, j'exprimais mes sentiments, etc.). Il aous reste à faire quelques remarques sur les formules suivantes : < Ez disant x, je faisais / >, ou < j'ai fait y >, << Par le fait de dire x, j'ai fait y >, ou << je faisais / >. C'est, en effet, parce que nous disposons de ces formules
-
qui
semblent particulièrement aptes, la première (enl à nous faire reconnaître les verbes qui désignent des actes illocutoires, et la seconde Qtar le fait de), les verbes qui désignent des actes perlocutoires
-, que nous avons choisi, en fait, les termes d'illoculoire et de perlocutoirc. Exemples
:
dhant que je tirerais sur lui, je le menaçais, >> << Par le fait de dire que je tirerais sur lui, je I'ai effrayé. <<
"21
>>
distinguer les actes illocutoires des actes perlocutoires? Non. Avant d'aborder ce sujet, permettez-moi une remarque générale, ou une confession. Nombre d'entre vous commencent sans doute (et légiti-
memen| dans une certaine mesure) à s'impatienter de me voir aborder les problèmes de cette façon. Vous pensez : << pourquoi ne pas couper court à ce bavardage? Pourquoi s'éterniser sur des
Iistes de mots ordinaires, qui désignent les choses que nous faisons en liaison avec le fait que nous les disons? pourquoi s'attarder sur des formules telles que ( en )r et < par le fait de >? pourquoi ne pas aller droit aux faits et les discuter purement et simplement, en termes
de linguistique et de psychologie? pourquoi tous ces détours? J'ets, bien str, qu'il faudra en arriver là après, et pas - mais avant d'avoir vu cc qus nous pouvons tirer du langage ordinaire, >>
même si ce qui en ressort pèse son poids de vérités indéniables. Fautc de quoi nous négligerions certaines données: nous irions trop vite.
En
r et ( par le fait dc > méritent en tout 130
cas notre attention; et
Ces
lorsqu'il s'agit de savoir comment sont liées entre elles les diverses descriptions qu'on peut
recherches importent évidemment beaucoup
donner de < ce que je fais ), comme nous I'avons nr à propos des < conséquences >. Reprenols donc les formules ( en D et < par le fait de >; nous reviendrons ensuite à notre distinction initiale entre performatifs et coostatifs - histoire de voir comment elle se porte dans cette nouvelle structure. Nous nous arrêterons d'abord à la formule : < En disant x, je faisais y > (ou <j'ai fait y >). t) L'emploi de cette formule n'est pas limité aux actes illocutoires; 'f1231elle s'appliquera (a) aux actes locutoires et (ô) à des actes qui semblent échapper complètement à notre classification. Si nous pouvons
dire << en disant x, vous y-iez D, Jr-er n'est pas nécessairement et pour autant un acte illocutoire. Tout au plus pourra-t-on affirmer que la formule (< en >>) ne convient pas au perlocutoire, taodis que << par le fait de >> ne convient pas à I'illocutoire. En particulier (a), nous employons la môme formule (< en >) lorsque {g-er D ne représente qu'une partie incidente de I'acte locutoire; par exemple :
-Ez
Ces formules linguistiques peuvent-elles nous fournir un test pour
<<
d'ailleurs < quand >, < pendant que D, etc., la méritent aussi.
<<
En
disant que je détestais les catholiques, je voulais dire seulement : de nos jours >r, ou << j'entendais, ou j'avais en \ne seulement, les catholiques roma.ins >. En pareil cas peut-être utiliserions-nous la formule << en parlhnt de >, plus répandue. Un autre exemple du même genre : < En prononçaû je pus, je produisais les sons le pue u. >> Il existe encore d'autres cas (ô) apparemment non classables, tels que ( En disant x, vous commettiez une erreur D, ou ( vous négligiez une distinction nécessaire D, ou ( vous alliez contre la loi >>, ou ( vous couriez un risque )) ou ( vous oubliiez >. Commettre une erreur ou courir un risque, ce n'est certainement pas un acte illocutoire, ni même un acte locutoire.
Nous pourrions tenter d'échapper à (a), c'est-à-dire_ au fait que I'emploi de << en ) n'est pas limité aux actes illocutoires, en faisant observer que << disant ) est un terme ambigu. là où son usage n'est pas illocutoire, << disant > pourrait être remplacé par << parlant de >, ou << employant I'expression )); ou encore, nous pourrions substituer à << en disant r )) : ( par le mot x D, ou << en employant le mot x >. [24] C'est là le sens où
> doit être suivi de guillemets; nous nous référons alors à I'acte phatique, et non au rhétique. 131
DrxrÈidn coNFÉRENcE QUAND DIRB, C'ESI FAIRB
Le cas (à) des actes qui écbappent à la classification est plus difficile. On peut suggérer le test suivant : lorsque nous pouvons faire er le verbe en y du temps continu à un temps non-continu (é ou présent), ou encore substituer ( par le fait de > à < en )) tout en conservant le temps continu, alors le verbe en y ne désigne pas une illocution. Ainsi pourrions-nous, sans changer le sens, remplacer << En disant cela,
il commettait une erreur > soit par < En disant cela, il commit une erreur D ou par < Par le fait de dire cela, il commettaituneerreur ); or, nous ne dirions pas ( En disant cela, je protestai >, ni << Par le fait de dire cela, je protestais >. 2) A tout prendre, nous pourrions affirmer que la formule << en >r
ne s'applique pas aux verbes perlocutoires (comme << convaincre >, < persuader >, << faire changer de propos >), Mais quelques précisions s'imposent. Premièrement, c'est I'usage incorrect du langage qui crée les exceptions. Ainsi les gens disent << Est-ce que vous m'intimidez en ce moment {5? >> au lieu de ( menacez >, et de là qu'ils peuvent dire < En disant x, il m'intimidait >. Deuxièmement, le même mot peut être légitimement employé aux sens illocutoire et perlocutoire. ( Tenter >, par exemple, peut facilement servir dans les deux cas. Nous ne disons pas << Je vous tente de.,. >>; il arrive pourtant qu'on dise < Laissez-moi vous tenter de... > Nous entendons aussi des répliques comme celles-ci : <( Prenez encore un peu de glace Est-ce que vous me tentez, en ce moment? >. Cette dernière quesi] tion serait absurde s'il s'agissait d'une perlocution, puisque c'est celui qui la pose, et lui seul, qui peut y répondre. Si je dis < Voyons, pourquoi pas? > il semble bien que je tente I'autre, mais il peut en réalité ne pas être tenté. Troisièmement, il y a l'usage proleptique de verbes comme < séduire >, ( pacifier D, par exemple : dans ces cas, il semble (pour rester dans I'illocutoire) que I'on puisse toujours ad
. Mais nous ne pouvons dire que le verbe illocutoire équivaut toujours à essayer de faire ce qu'exprimerait un verbe perlocutoire; < prouver D, par exemple, n'équivaut pas à < essayer de convaincre D, ni ( avertir D à << essayer d'effrayer >r ou à << alerter >>. D'une part, la distinction entre fairc et essayer de faire est présente dans le verbe illocutoire comme dans le verbe perlocutoire; nous distinguons prouver et essayer de prouver; tout comme convaincre et essayer de convaincre. En outre, beaucoup d'actes illocutoires ne sont pas des tentatives
pour produire un acte perlocutoire : promettre, par exemple, n'est pas essayer de faire quçlque chose.
Mais nous devons encore nous demander s'il n'est pas possible d'utiliser <( en D avec I'acte perlocutoire, On est tenté de le faire lorsque I'acte est produit sans intention. Seulement même ici nous aurions probablement tort et nous devrions employer < par le fait de >. De toute façon, dans < En disant x, je le convainquais )), je rends compte non de la manière dont je suis parvenu à dire x, mais de la manière dont je suis parvenu à le convaincre; c'est là un autre usage de
(
en disant
)),
différent de celui où nous expliquons ce que nous
voulons dire par le rcste de la phrase; et son sens (à savoir : ( pen(( [126] dant le déroulement de > ou au cours de D, et non pas comme pas celui du < en disant > des verbes illocutoires. << critère >) n'est Considérons maintenant la signification générale de la formule ( en ). < En faisant l, je faisais B > peut signiter ou bien que .,{ entraîne .B (,{ rend compte de B), ou bien que ,B entraîne A (B rend compte de l). On peut marquer cette distinction en opposant (a l) : . ( Au cours de mon action l, ou à mesure que je faisais l, je faisais .B > (en construisant une maison, je construisais un mur), et (a 2) : < En faisant A, j'étais en train ou en voie de faire B > (en construisant un mur, je construisais nne maison). Ou encore, comparez (cr 1) : < En produisant les sons N, je disais .S a8 > et (c 2) : < En disant ,S, je produisais les sons lf >; dans (a l), je rends compte de I (ici, la production de sons), et j'indique pourquoi je produis ces sons, alors qu'en (c 2), je rends compte de B (la production de sons) et j'indique par 1à I'effet de cette production. La formule est souvent utilisée pour rendre compte de ce que je fais, en réponse à la question : ( Comment se fait-il que vous fassiez telle ou telle chose? > Des deux aspects soulignés, le dictionnaire préfère le premier (a l), où nous reodons compte de 8; mais I'usage noté en (cr 2), où I'on rend compte de l, est tout aussi répandu. Si nous considérons maintenant l'exemple suivant : < En disant... j'oubliais >, nous découvrons que.B (oublier) explique comment nous en sommes venus à dire..., c'est-à-dire que.B rend compte de l. De même, < En bourdonnant je pensais que les papillons bourdonnaient
rend comptç de mon bourdonnement (,4). 133
t32
Il
l>
semble que nous retrou-
DrxIÈMB coNrÉnrNcs
iÏ
tÏ, Ï"rrff
1l vions ici l'usage ,",, esr emproyé avec les verbes locutoires; il rend compte du fait que j'ai dit ce que j'ai dit (mais non de la signification). Toutefois si nous étudions les exemples suivants
Dous voyons que c'est
dire ce que je faisais (bourdonner)
>>,
en inten-
tion ou en fait qui constitue I'acte de dire ceci ou cela-comme un - genre, acte d'un certain et qui peut être désigné d'un nom différent. L'exemple illocutoire : <<
En disant ceci ou cela, je I'avertissais
>>,
il n'a rien de commun avec (c I) ou (c 2), qui renvoient à un < au cours de... > et où I rend compte de B (ou inversement); et il diffère aussi des exemples locutoires, caq l'acte n'est pas essentiellement constitué par I'intention ou le fait, mais par la convention (qui est, bien str, un fait). Ce sont ccs caractéristiques qui nous aident le mieux à repérer les actes illoest proche de ce dernier exemple ;
cutoires *. Par ailleurs, lorsque la formule < en disant > est employée avec des verbes perlocutoires, elle a le sens de < à mesure que... > (a l);
]
mais elle rend compte de .8, alors qu'avec le verbe locutoire, elle rend compte de A. Le cas perlocutoire se distingue donc ici ct du locutoire et de l'illocutoire. Nous pouvons noter que la question < Comment se fait-il? > ne porte pas seulement sur les moyens et les fins. C'est ainsi que dans I'exemple : <<
En disant 1..., j'oubliais B >,
nous rendons compte de l, mais €n un sens nouveau de < rendre compte de u, ou d'< entraîner >, et qui n'a pas trait aux fins et aux moyens, Ou encore, dans <<
Ën disant..., je convainquais... ('humiliais...) >,
.
est, en effet, une conséquence, mais pas la conséquence d'un moyen.
De son côté, la formule < par le fait de >> n'est pas limitée aux ll y a un emploi locutoire (par le fait de dire..., je voulais dire...), un emploi illocutoire (par le fait de dire..., je I'avertissais...), et une série d'emplois divers(par le fait de dire...,je mesuis mis dans mon tort). [æs emplois de << par D sont dans I'ensemble souls perlocutoires.
:
(c 3) < En bourdonnant, je prétendais être une abeille >>. << En bourdonnant, je me conduisais coûlme un clown
où nous rendons compte de .8 Qe fait de convaincro ou humilier), .B
d'au moins deux sortes
:
a) Par le fait de frapper sur le clou, je I'enfonçai dans Ie mur, â) Par le fait de placer une prothèse,j'exerçais la profession de dentista
( par D indique le moyen, Ia manière, ou la grâee auxquels j'ai conduit I'action à bien; dans (à), il méthode, constitue un critère, I'aspect de mon action qui permet de la détnir comme pratique de I'art dentaire. La différence paraît très minime entre ces deux cas, sauf que I'emploi qui renvoie au critère semble plus extrinsèque" Ce deuxièrne sens de ( par D (cclui du critère) est très proche, semble-t-il, d'uo des seus de ( eû ll : << En disant cela, ll29l ' je violais la loi (i'ai violé la loi) >; ( par D peut certainement être employé dans ce dernier sens, avec les verbes illocutoires dans la formule << par le fait de dire... r>. Aiusi < Par le fait de dire..., je I'avertissais fie I'ai averti) >. Mais ( par D tr'est pas employé en ce sens, avec les verbes perlocutoires. Dans < Par le fait de dire..., je I'ai ætrvaincu (persuadé) >, ( par > aura le sens d'un moyen employé en vue d'une fin ou, du moins, définira la manière ou la méthode utilisée. La formule ( par > est-elle jamais employée en çe sens de moyen en vue d'une fin, avec un verbe illocutoire? Il semble qu'elle le soit au moins dans deux sortes de cas : a) Lorsque nous omployotrs un moyen verbal pour faire une chose, au lieu d'un moyen non verbal; lorsque nous parlons, au lieu d'employer un bâton. Ainsi dans I'exemple < Par le fait de dire Oni [ie prends cette femme], je me mariais avec elle >, le performatif << oui est un moyen dont le mariage est la fia. Ici le < fait de dire > est employé en un sens qui implique des guillemets et il utilise des mots ou du langage : il s'agit donc d'un acte phatique et non pas rhétique. Dans (a), le terme
>>
ô) Lorsqu'une énonciation performative est employée comme
Mais suppotons, qu'il s'agisse d'un charlatan. Nous pouvons dire : << El posant la prothèse, il exerçait la profession de dentiste. > fl y a convcntioo ici, tout comme dans le cas d'un avertissement. ce serâit alors à un juæ de tranchcr.
moyen indirect pour effectuer un autre acte. Ainsi, dans I'exemple << Par le fait de dire : Je denunde trois trèfes, je lui ai appris que je
r34
135
DDù,iE colrÉnnxcn
QUAND DN,E, C,ËST FAIRE
n'avais pas de carreau >, j'emploie Ie performatif < Je demande trois trèfles > comme moyen de renseigner mon partenaire indirectement (ce qui est aussi un acte illocutoire). En résumé : pour employer la formule < par Ie fait de dire D comme test de I'acte perlocutoire, il faut d'abord être str : l) que < par ) est employé en un sens instrumental et non comme critère; r0l 2) que < dire > est employé
a) au plein sens de I'acte locutoire; qu'il n,est utilisé ni au sens partiel d'un acte phatique, par exemple; à) ni dans une convention bilatérale, comme dans I'exemple du bridge. Il existe encore deux tests linguistiques subsidiaires qui permettent
de distinguer l'acte illocutoire de I'acte perlocutoire
l) Il semble
:
qu'avec les verbes illocutoires, nous puissions souv€nt déclarer < Dire x, c'était faire .y >. On ne peut déclarer : < Taper sur le clou avec un marteau, c'était enfoncer le clou > au lieu de < par le fait de taper sur le clou avec un marteau, il enfonça le clou >. Mais cette formule ne nous fournit pas un test décisif, car nous pouvons nous en servir en bien des occasions; ainsi nous pouvons déclarer < Dire cela, c'était le convaincre > (ernploi proleptique?), bien que convaincre soit un perlocutoire. 2) Les verbes que nous avons classés (de façon intuitive, mais qu'avons-nous fait d'autre jusqu'ici?) comme désignant des actes illocutoires, ressemblent ablement à des perforiwtifs explicites; nous pouvons, en effet, utiliser << Je vous avertis que... >> et < Je vous commande de... > comme performatifs explicites. Or avertir et com_ mander sont bien des actes illocutoires. Nous pouvons employer le perlormatif < Je vous avertis que... D, mais non pas < Je vàrrs convaincs que.,.
<<
Je vorrs
);le
performatif
<<
Je vous menace de.., >, mais non
intimide par.,. D : car convaincre et intimider sont des actes
perlocutoires.
La conclusion générale doit être que ces formules constituent
l]
au
mieux des tests très délicats à manier lorsqu'il s'agit de décider qu'une expression est illocutoire ou perlocutoiÀ, ou ni i'un ni I'autre.
Il n'en reste pas moins que ( par > et <( eo > méritent une étude minu_ tieuse, tout autant que le notoire ( comment >, par exemple, de plus en plus à la mode aujourd'hui. 136
Mais quel est donc le rapport entre les performatifs et les actes illocutoires? Il semble que lorsque nous avons un performatif explicite, nous ayons aussi un acte illocutoire. Il faut donc voir quelle relation existe entre : l) les distinctions que nous avons établies dans les premières conférences à propos des performatifs, et 2) les différentes catégories de l'acte que trous avons depuis distinguées.
Onzième conférence
En opposant, au départ, énonciation performative et énonciation constative, nous avons avancé ceci
'
:
1) l'énonciation performative doit effectuer quelque chose, et tron pas simplement dire quelque chose; 2) elle est heureuse ou malheureuse, au lieu de vraie ou fausse. Ces distinctions étaient-elles vraiment fondées? La discussion qui a suivi, sur le faire et le dire, paraît bien nous inviter à la conclusion suivante : chaque fois que je < dis > quelque chose (sauf peut-être s'it s'agit d'une simple exclamation cûmme ('( Sacrebleu ! > ou < Aîe ! >), j'effectue à la fois un acte locutoire et un acte illocutoire; et ces deux iypes distincts d'actes semblent être précisément ce sur quoi nous à travers le < faire cherchions à nous appuyer pour opposer constatifs. Mais si, en général, nous performatifs ct > < dire et le eflectuons les deux types d'actes à la fois, comment maintenir la >>
distinction? Revenons encore une fois sur I'opposition, du point de vue d'abord dcs énonciations constatives. En ce qui les concerne, rrous nous étions contentés d'étudier les < afrrmations r>, les tenant pour le cas typique, ou le paradigme. Lorsque, donc, nous formulons une affirmation, serait-il juste de considérer que 1) nous effectuoss (au même titre que nous disons simplement) quelquecbose,etquelque chose qui est, de cesimple dire,distinct, et 1331 2) notre énonciation est susceptible d'être heureuse ou malheureuse (au même titre, si vous voulez, qu'elle peut être vraie ou fausse)?
l)
do@er
un acte illocupas ellectuer aecurJ. ôe Ce n'est certes ou gl.glgplgrg-*3*{gtg:S.{' lie ou'avertir,;--empG, '-îiertorml"nacte physique -tg!t9-g$lg4$'!cJ que part I'exécution physlque particulier, particulier, mis à le fait acte erformlun lp implique, lorsque I'affirmation est verbale, certains mouvements Sans nul
n'esîËiôîâîêFffi*
de I'appareil vocal; mais il en va de même, nous I'avons 1'tt' pour avertir, protester, promettre, nommer. << Affirmer >> semble ainsi 139
QUAND DIRE, C,PST FAIRE
répondre à tous les critères dont nous disposions pour reconnaître
I'acte illocutoire. considérez une observâtion aussi inattaquable que celle-ci
:
En disant qu'il pleuvaiç ie ne pariais, ni ne démontrais, ni n,avertissais : j'affirmais simplement un fait.' < Affirmer > ici se situe absolument sur le même plan que prouver, parier et avertir. Ou encore :
En disant que ceta condu.isait au chômage, ie n'avertissais ni ne protestais : j'affirmais tout simplement un fâit.
Et pour utiliser un autre genre de test, déjà employé, il est évident
que
est exactement sur le même plan que Je démontre qu'il ne I'a pas fait, Je suggère qu'il ne I'a pas fait, Je parie qu'il ne I'a pas fait, etc.
Que si je m'en tiens à la forme primaire ou non expricite de l'énon-
ciation Il
il
fait >r : il ne s'agit pas là d'une affirmation autre au sujet de ce que < moi > .i'affirme (sauf dans des cas exceptionnels, tels que le présent historique, ou d' << habitude >, etc.). Il en va de même dans le cas suivant, connu de tous : si je me contente de dire < Je pense qu'il I'a fait >, il serait impoli de me répondre < Voilà une affirmation à propos de vous-même > : il est fort possible, en effet, qu'il s'agisse de moi; mais pas pour autant qu'il est question d'une affirmation {?, Il n'y a donc pas nécessairement conflit entre a) le fait que, en produisant l'énonciation, nous effectuions quelque pas
chose,
à) le fait que l'énonciation soit vraie ou
fausse.
sur I'exemple < Je vous avertis qu'il va >, foncer où il s'agit à la fois d'un avertissement et du fait ll35l - vrai Réfléchissez d'ailleurs
J'affirme qu'il ne I'a pas fait
341
oNzûMe coNrÉnsNcr
:
ne I'a pas
fait,
demeure ençore possible d'expliciter ce que nous faisions en décla-
rant cela, ou de spécifier la valeur illocutoire de l'énonciation, également par I'une ou l'autre des trois démarches (il y en a davantage)
mentionnées plus haut.
De plus, bien que l'énonciation << Il ne l,a pas fait > soit souvent prononcée comme une affrmation, et qu'elle soit alors sans allcun doute vraie ou fausse (si quelque chose de wai existe, c,est bien ceci !), il ne semble pas qu'on puisse dire qu'elle est différente, du moins à cet égard, de << J'affirme qu,il ne l,a pas fait >. Si quelqu'un dit
J'affirme qu'il ne l,a pas fait >>, nous examinons U veritg de son affirmation de la même façon que nous le ferions s'il avait dit simpli_ ,,i!u!-.n Il ne I'a pas fait >, et si nous tenions ses paroles, conune d'aiileurs nous le faisons Ie plus souvent, spontanément, pour une afirmation. En disant << J'affirme qu'il ne |a pas fait >, nous formulous donc exactement ra même afrrmation qu'en disant << Il ne fa <<
140
qu'il va foncer; on est ici conduit à juger de I'avertissement comme -on le ferait d'une affirmation, encore que ce ne soit pas ou faux
exâctement de Ia même manière. A première vue, il ne semble pas que < J'affirme qae > soit essentiel. lement différent de < Je soutiens que > (et en disant ceci, je soutiens gue), ( Je vous informe que >, ( J'atteste que D, etc. Un jour peut-être pourra-t-on établir des différences < essentielles )) entre ces verbes : mais aucune tentative n'a ercore été faite à ce sujet. 2) Il y a plus : si nous nous arrêtons à la seconde des oppositions présumées (à savoir : les performatifs sont heureux ou malheureux, et les affirmations, vraies ou fausses), nous remarquons à nouveau que, pour ce qui est des soi-disant constatifs (les affirmations, notamment), les affirmations sont sujettes à tous les types d'échecs qui peuvent'frapper les performatifs. Car jetons encore un regard eln arrière, et demaàdôns-nous si les affirmations ne sont pas exposées exact€ment aux mêmes accidents que, par exemple, les avertissements; accidents que nous avons appelés << échecs > et qui rendent une énonciation malheureuse, sans pourtant la rendre vraie ou fausse, Nous avons déjà relevé en quel sens particulier dire ou affirmer << Iæ chat est sur le paillasson > Iaisse entendre que je crois le chat sur le paillasson. C'est dans un sens parallèle .- dans le même sens, que < Je promets d'être 1à n laisse entendre que j'ai I'intenen fait - là et crois pouvoir y être. L'afrrmation est donc sujette au tion d'être type d'échecqu'on a appelél'insincérité;etmême à celui qu'on appelle 1136l l'infractror, cardire ou affirmerque le chat est surle paillasson m,oblige
t4l
QUÀND DIRE,
C'Er
oNzritl,G
FÀIR8
qui serait inconcevable n'Adressez-vous parfois non un ordre - ce demande pressante, ainsi une impoliment assez c€la et plutôt, mais ( vous aventrfez-vous à deviner D en ce moment, et cela, assez bizarpourriez, rement.,.). u s'agit dans cet exemple d'une chose gue vous qu'en est-il mais d'affirmer; en mesure être ,n d'auti"t circonstances, ou personnes, d'autres aux sentiments trait ayaot des affirmations comportement sur le prédiction une prévision même ou une au futur? d'autrui, par exemple, est-elle réellement une affirmation? Il importe d'envisager la situation de discours comme un tout' De même que, parfois, nous ne pouvons effectuer une nomination, mais seulement ratifier une nomination qui a déjà eu lieu, de même nous est-il parfois impossible d'affilmer, et pouvons-nous seulement confirmer une affirmation déjà formulée. Les affirmations putatives sont, également, sujettes aux échecs du type B : défectuosités et accrocs. Quelqu'un < dit uue chose qu'il ne u*t"lt pas dire en fait > (e mploie un mot e rroné) : il dit < le chat est
à dire ou à afrrmer < Le paillasson est sous le chat )), tout autaÂt que le performatif ( Je définis X comme I > (par unfot) me contraint d'employer ensuite ces termes d'une manière précise; et I'ou voit comment tout cela est en rapport avec des actes tels que la promesse. C'est dire que les afrrmations peuvent doaner lieu aux deux types d'échecs
I.
Qu'en est-il à présent des échecs de l'espèce A et B, qui rendent I'acte (avertir, eotreprendre, etc,) nul et non aveau? Une chose qui a I'air d'une affirmation peut-elle être nulle et non avenue, tout comme un contrat putatif? La réponse semble être : oui, et c'est important. Les premiers cas sont A.l et A.2 : ou bien il n'existe aucune convention (du moins reconnue), ou bien, les circonstances ne sont pas celles qui permettraient à celui qui parle d'invoquer la convention. Or beaucoup d'échecs de ce genre, précisément, atteignent les affirma-
tions. Nous avons déjà noté que I'affirmation putativeprésuppose (comme on dit) I'existence de ce à quoi elle se réfère : si ce référent n'existe
371
pas, I'affi.rmation n'a trait à rien. Or d'aucuns prétendent qu'en pareil cas quelqu'un affirme que I'actuel roi de - si, par exemple, << la question ne se pose pas de savoir s'il est est chauve -, chauve >. Mais mieux vaut dire que I'affirmation putative est nulle et non avenue, exactement comme lorsque je dis que je vous vends quelque chose alors que catte chose ne m'appartient pas, ou qu'ayant brûlé, elle n'existe plus. Iæs cortrats sont souvent nuls et non avenus parce que les objets sur lesquels ils portent n'existent pas. La référence alors disparaît et I'ambiguité est totale. Mais il est important de voir encore que les << affrmations D $ont que aussi sujettes à ce genre d'échec d'une autre manière - etc. Deconnaissent également les contrats, promesses, avertissements, même que Dous disons souvent par exemple, << Vous ne pouvez me donner des ordres D, au sens de << Vous n'avez pas le droit de me donner des ordres > (ce qui sieaifie que vous n'êtes pas en position de le faire), de même arrive-t-il fréquemment que vous ne puissiez affirmer certaines choses n'ayez pas le droit d'afrrmer que vous ne -, soyez pas en position de le faire. Vous nepoarez pas affi:mer, présentement, combien il y a de personnes dans !a chambre voisine; si vous dites < Il y a cinquante personnes dans la chambre voisine >, je puis seulement considérer que vous le devinez ou le supposez; (ainsi
t42
CONFÉRSNC8
'
n >r. D'autres bévues sur le pàiltasson > quand il voulait dire < le rat * encore qu'il sans doute de ce genre peuYent se produire, bénignes de tels énoncés discuter peut' en effet, on : ne faille pas trop s'y ûer
de sens et de - c'est-à-dire et finir ainsi par n'y plus voir clair, alors qu'il n'y réféience -, avait aucuûe di.fficulté, réellement, de compréhension". Dès qu'on a saisi que I'objet à étudier, ce z'est pas la phrase mais la production d'une énonciation dans la situation de discours, on ne p"ut plot guère manquer de remarquer ceci : affirmer, ç'est exécuter à ce que lperforml un acte. De plus, si nous comparons l'affirmation comme que' elle dit de I'acte illocutoire, il apparaît Pour ooul "uoot qu'elle << s'assurer de est essentiel il illocutoire, pour tout autre acte peut soulevé qui être gte doute : le >> uptakef comprise Ui.o à fsecuring touchant le fait que j'ai averti sotto voce ou protesté, si personne ae, peut tout n'a pris mon intervention pour une protestation, etc. j'ai quelque que affirmé fait uusri bi"o être soulevé touchant le ou compris. I'a entendu personne ne chose, si Et les affirmations << prennent effet >>n tout autant que la < nomination >; si, par exemple, j'ai affirmé quelque chose, je me trouve engagé j'énoncerai, à l'égard d'autres affirmations possibles : parmi celles que de pas; certaines seront ne !e d'autres pertinentes, ceria-ines seroat ou me contredire pourront désormais remarques ou vos affrmatioas
fll8l uniouement en termes de signification
' '
143
oxzÈt*ts coNFÉRENcB
QUAND DIPJ, C'EST TAIRE
non, me réfuter ou non, etc. S'il arrive qu'une affirmation n'appelle << réponse >, peu importe : les actes illocutoires, eux non plus, n'appellent pas expressémeDt une < réponse D. Et il est clair qu'en affirmant, nous produisons ou pourrions produire des actes perlocutoires de tout genre. Le maximum que nous puissions démontrer, avec quelque vraisemblance, c'est qu'il n'y a pas d'objectif perlocutoire qui soit proprement associé à l'affirmation, comme c'est le cas dans I'acte d'informer, de prouver, etc.; et cette pureté relative est peut-être I'une des raisons qui nous font accorder une place particulière aux << affirmations >. 9l Toutefois cela ne oous autorise pas à donner la même priorité aux < descriptions )), par exemple, lorsqu'elles sont employées correctement et il reste que cette- absence d'objectif perlocutoire vaut -; d'actes illocutoires m. pour nombre Tout cela dit, si nous considérons la question du point de vue des performatifs, nous sentirons peut-être qu'il leur manque quelque chose que possèdent les affirmations, même si, conlme nous I'avons montré, I'inverse n'est pas lrai. C'est un fait que les énonciations performatives disent quelque chose en même temps qu'elles font quelque chose; mais il apparaît bien qu'elles ne soût pas essentiellement vraies ou fausses, au même titre que les affirmations. Nous pressentons qu'il existe ici une < dimension >>, celle dans laquelle nous jugeons, évaluons ou apprécions l'énonciation constative (en ettant, au départ, qu'elle est heureuse), dimension qui n'intervient pas pour les énonciations non constatives ou performatives. ettons que tous les éléments de la situation out à se présenter correctement pour que je réussisse à affirmer quelque chose; reste qu'alors surgit /c question : ce que j'ai affirmé est-il vrai ou faux? Et nous le sentons, ceci équivaut pour parler en termes courants question de savoir si I'affir- à la r mation << correspond aux faits >. Quant à moi, je declare ceci : si I'on prétend dire que I'emploi de l'expression ( est vrai > équivaut à une sanction, ou quoi que ce soit de ce genre, on fait fausse route 61, Nous disposons donc d'une nouvelle dimension critique pour juger de pas de
I'affirmation achevée. Mais l) une telle appréciation objective de l'énonciation achevée ne se produit-elle pas propos - au moins dans bon nombre de cas - à d'autres énouciations qui semblent typiquement performatives? et
t44
2) cette façon de spéci6er n40l ' trop simplifié les choses?
les affirmations n'a-t-elle pas un peu
Tout d'abord il est évident qu'on glisse vers la vérité ou fausseté dans le cas, par exemple, des verdictifs (comme : estimer que, juger que, et déclarer que). Ainsi pouvoÂs-nous dire : estimer
juger dectafer
qu'il est deux heures et demie
à tort ou à raison correclement
qu'il est coupable
ou incorrectement cofrectement
que le batteur est éliminé
ou incolreclemenl
Nous n'ions pas de l'adverbe < véritablement > dans le cas des verdictifs; mais nous nous poserions certainementla même question, au fond. Au reste, des expressions adverbiales comme
>, << à tort ), ( correctement D et << incorrectement > sont aussi bien
'
employées avec des affirmations. n y a ensuite un parallélisme entre la déduction et la démonstration saines ou valides, d'une part, et l'affirmation vraie, d'autre part.
Il ne s'agit pas seulement de savoir si quelqu'un a démontré ou déduit: mais aussi de savoir s'il en avait le droir, et s'il y a réussi. Nous pouvons avertir et cohseiller correctement ou incorrectement, bien ou mal. [,es louanges, le blârne, et les félicitations, se prêtent à des considérations analogues. Ainsi le blâme est-il hors de propos si, par exemple, vous avez vous-même agi de manière identique à qui vous blâmez; et i'on peut toujours se demander si les louanges, le blâme, ou les félicitations étaient mérités ou non : il ne suffit pas de dire que vous avez blâmé, un point c'est tout : car encore un acte a-t-il été préféré à un autre, à bou droit. I:. question de savoir si les louanges et [141] le blâme sont mérités est tout à fait différente de celle de savoir s'ils sont opportuns; et la même distinction peut être faite à propos des conseils. Dire d'un conseil qu'il est bon ou mauvais n'est pas la même chose que de dire qu'il est opportun ou Don, etrcore que le moment choisi soit plus importaût, pour qu'un conseil soit bon, qu'il ne I'est pour qu'un reproche soit mérité. Sommes-nous assurés qu'une affi.rmatioq vraie relève d'une autre classe d'appréciation que la démonstration saine, le conseil judicieux, Ie jugement raisonnable lfairletle blâme justifié? Ces actes n'entretien145
QUAND DIRE, C'EST FÆRE
nent-ils pas des rapports compliqués avec les faits? Cela est wai également des.exe,gitifs tels que donner un nom, effectuer une nomi-
nation, léguer, et parier. Les faits y entrent en considération, tout autant que la connaissance ou I'opinion que nous avons d'eux. Il est vrai que I'on s'efforce à chaque instant d'établir une disr,inction. La solidité des arguments (s'il ne s'agit pas d'arguments déductifs, qui sont < valides >) et la légitimité d'un blâme, ne sont pas, à ce que I'on prétend, matière objective; on encore, dans le cas de I'avertissement, on noùs demande de distinguer entre l' < affirmation > que le taureau va foncer, et I'avertissement lui-même. Mais interrogez-vous un instant : la question de la vérité ou de la fausseté est-elle vraiment si objective? Nous demandons : ( Était-ce une affirmatio n raisonnable lfairl? >; et l'évidence, ou les bonnes raisons qu'on a d'affirmer et de dire, diffèrent-elles tellement de l'évidence et des bonnes raisons qui nous conduisent à effectuer des actes performatifs tels que démontrer, avertir, et juger? Le constatif, au demeurant, est-il toujours wai ou faux? Quand on confronte un constatif aux faits, on I'estime en ayant recours à une grande variété de termes qui recouvrent ceux qu'on i2] utilise dans I'appréciation des performatifs. Dans la vie courante, par opposition aux situations envisagées dans la théorie logique, il n'est pas toujours possible de donner une réponse simple à la question de savoir si un constatifest yrai ou faux^ Supposons que nous comparions la phrase << La est hexagonale D avec les faits (dans ce cas, apparemment, aveç la ). Peut-on dire qu'elle est lraie ou fausse? Eh bien, oui, si vous voulez, dans une certaine mesure. Je puis évidemment comprendre ce que vous voulez dire'en affirmant qu'elle est vraie à certains points de vire, dans une certaine intention. Cela suffit pour un général haut place, peut-être; mais pas pour un géographe. << C'est bien str pasiablement sommaire >, dirons-nous, < et able comme affirmation ablement sommaire >. Or, quelqu'un s'avise de répliquer : < Mais enfin, est-ce vrai ou faux? Peu m'importe que l'aftrmation soit sommaire ou non; bien str, elle I'est; mais elle doit être vraie ou fausse - car il s'agit d'une affirmation, n'est-ce pas? > Comment répondre à cette question : est-il vrai ou faux que Ia soit hexagonale? Il s'agit tout simplement d'une affirmation sommaire : voilà la bonne et définitive réponse à la question concernant le rapport entre ( La est hexagonale D et la elle-même. C'est t46
oNzIÈME coNFÉRENcE
une description sommaire ; mais non une description vraie ou une descriPtion fausse. Une fois encore, donc, dans le cas de I'affirmation waie ou fausse (tout comme dans celui du conseil bon ou mauvais), les visées et buts de I'énonciation, ainsi que son contexte, sont importants; ce qu'on estime wai dans un manuel scolaire peut ne pas être jugé tel dans un ouvrage de recherche historique. Prenez le constatif< Lord Raglan a gagné la bataille de I'Alna >, en vous rappelant que ce fut une bataille de simples soldats (si jamais il en fut !) et que les ordres de Lord Raglan ne furent jamais transmis à certains de ses subordonnés. Dans ces conditions, Lord Raglan a-t-il gagné la bataille de I'Alma, oui ou :141] non? Dans certains contextes assurément dans un manuel scolaire ' peut-être il est parfaitement légitime de-répondre par I'affirmative. -, (Encore qu'on exagère un peu ; et il ne saurait être question d'accorder
une médaille
'
à Raglan pour cela.) De même que < La
est
hexagonale >, c'est sommaire, de même < Lord Raglan a gagné la bataille de I'Alma D, c'est une exagération qui convient dans certains contextes, mais non dans d'autres; il serait vain d'insister sur sa vérité ou sa fausseté. Considérons, en troisième lieu, la question de savoir s'il est vrai que toutes les oies des neiges émigrent au Labrador, compte tenu du fait qu'une oie blessée, parfois, n'atteint pas le terme du voyage. Face à de tels problèmes, certainS ont prétendu, très raisonnablement, que les énonciations commençant par ( Tous... D étaient des déûnitions prescriptives ou une invite à adoptéi une règle. Mais quetle règle? Cette idée vient, pour une part, d'une mauvaise compréhension de la référence en de telles affirmations : c'est une référence qui se limite au connu_; oo ne saurait affirmer tout uniment que la vérité des affirmations dépend des faits même en tant qu'ils sont distincts de la connaissance
des faits. Supposons qu'avant
la découverte de l'Australie,
par
exemple, X dise : << Tous les cygnes sont blancs >>; si on découwe plus tard un cygne noir en Australie, X se trouve-t-il réfuté? son affirmation est-elle fausse à présent? Pas nécessairement : il se rétractera, mais il pourrait dire : < Je ne parlais pas de tous les cygtres absolument; je
n'affirmais rien, par exemple, des cygnes éventuels de
la
planète
moment
ou la fausseté des affirmations est affectée par ce qu'elles t47
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
excluent ou incluent, le fait qu'elles peuvent induire €n erreur, etc. 44] C'est ainsi que les descriptions, par exemple, qu'on dit vraies ou fausses, ou qui sont, si vous voulez, des < affirmations i>, se trouvcnt certainement exposées à des critiques comme celles-là, étant donné qu'elles sont choisies et effectuées dans un certain dessein. Il faut se rendre compte que ( vrai > et < faux >, tout comme < libre )) et (( non libre >> funfreel, ne recouvrent absolument pas des notions simples; mais seulement une dimension générale où ils représentent ce qu'il est juste et convenable de dire par opposition à ce qu'il serait mal
,
venu de dire * en ces çirconstances, à cet auditoire, dans ce dessein et cette intention. D'une manière générale nous pouvons affirmer ceci : dans les affirmations (et, par exemple, les descriptions) et aussi dans les avertissements, etc. que vous ayez averti, de fait, et à bon - à supposer droit; ayez affirmé, de fait; ou, de fait, conseillé _, la question peut surgir de savoir si vous aviez raison [rgÂl] d'affirmer, d'avertir, ou de conseiller; non pas dans le sens de savoir si cela était opportun ou avantageux, mais au sens de savoir si c'était bien ce qu'il convenait de dire étant donné les faits et votre connaisruo.. à., faits, ainsi que les -ûns selon lesquelles vous parliez. Cette conception diffère beaucoup, en nombre de points, des affir_ mations pragmatistes suivant lesquelles le wai est ce qui fonctionne, etc. La vérité ou fausseté d'une alfirmation ne dépend pas de la seule signification des mots, mais de I'acte précis .i d.s- circonstances il est effectué. Que reste-t-il, en définitive, de la distinction entre res énonciations
précises dans lesquelles
,"u
performatives et constatives? Nous pouvons .\ l' avions en we était ceci :
dire que ce que nous
\):,-..."a;EDans l'énonciation constative, nous négligeons les aspects illo=' _-
\utôires (sans compter les aspects perlôcutoires) de I'acte de discours,
î5] pour concentrer notre attention sur
ses aspects loçutoir_es. D'ailleurs
nous avons alors recours à une conceptiôi' rirprirte de ta corres-
pondance de l'énonciation avec les faits laquelle implique forcément I'aspect illocutoire. Nous tendons vers- un idéal où-nous dirions ce
qu'il
est juste [ngÉt] de dire en toutes circonstances,
quelle fin, atleint.
{.ô}Ouor
à n'importe à n'importe qui, etc. peut-être cet idéal est-il parfois l'énonciation performative, nous tenons compte, au 148
oNzrÈue colrrÉnrNcs lara.leur illocutoire de l'énonciation, et laissons de côté la dimensiôn cié la côiië$ôfïâiïôé'.âux faits. Peut-être aucune de ces abstractions n'est-elle vraiment opportune; peut-être, en fait, nc sommes-nous pas ici en présence de deux pôles, mais plutôt d'une évolution historique. En de certains cas peut-être - (comme dans les ligures mathématiques des ouvrages de physique exemple de constatifs), ou dans la formulation d,ordres à exécuter, ou dans la simple attribution de noms (comme exemples de performatifs) -, nous sommes tout près de rencontrer ces abstractions dans la vie réelle. Ce sont des phrases comme celles-ci : << Je m,excuse D, et < Le chat est sur le paillasson > (apparemment prononcées sans raison) surgir - cas extrêmes et marginaùx -, qui ontquifait I'idée de deux énonciations distinctes. Mais la conclusion s'impose vraiment est sans doute la suivante : il nous faut a) distinguer enile les actes locutoires et illocutoires, et plus spécialement ô) établir de façon critique, par rapport à chaque espèce d'acte illocutoire (avertissements, évaluations, verdicts, affirmations, et descriptions), '. de quelle manière spécifique (s'il en est une) les actes y ont tendu, j d'abord, à être ou non pertinents, et, ensuite, à être < justes > ou ( mal venus >; il convient enfin de voir quels sont les termes employés I 146] pour les approuver ou pour manifesteison désaccord, et queile est i' I tu signification de ces termes. Ir s'agit là d'un champ très vaste; le { parcourir ne nous permettra sûrement pas d'en arriver à une distinci tion simple entre << vrai > et < faux >, ni à distinguer les affirmations des autres énonciations. L'affirmation, en effet, n'est qu'un acte de discours, parmi ceux, en très grand nombre, qui appartiennent à la classe des iliocutions. _,q13*Iiry.11,g1l!e
De plus, I'acte locutoire n'est en général qu'une abstraction, comme I'acte illocutoire : tout acte de discours authentique comprend les deux éléments à la fois. (Cela nous rappelle les actes phatiques, rhétiques, etc., qui sont aussi de pures abstractions.) Mais si nous distinguons différents ( actes > abstraits, c'est évidemment à partir des accidents qui peuvent se produire < de la coupe aux lèvres > : c'est-à-dire, ici, à partir des différents types de non-sens qui peuvent surgir dans I'exécution de ces actes. On peut faire un rapprochement sur ce point avec ce que nous disions, dans la première conférence, de la classification des types de non-sens.
Douzième conférence
l47l
Plusieurs de nos analyses sont demeurées en suspens. Il ne nous faut pas moins, après un bref résumé, poursuirte notre route. Comment la distinction < constatiÊp-erformalif > nous est-elle.qp*p-arue'
fif
lumiëreîËËtre-àË;ièreihéorie?Dîne-mà-nièie-eénêral{-ët
pour toutes les énonciations considérées (sauf peut-être les jurons),
nous aYons mis au jour : 1) la dimension bonheur/malheur, l. a) une valeur illocutoire, 2) la dimension vérité/fausseté, 2. a) une signification (sens et référence) locutoire. La théorie qui institue une distinction entre performatifs et constatifs entretient avec la théorie qui institue, à lintérieur de I'acte de discours intégral, une distinction entre actes locutoires et illocutoires,
le rapport diune théorie particulière vis-à-vis d'une théorie géné' rale. Et le besoin de la théorie générale s'impose ici du simple fait que 1' << affirmation >> traditionnelle constitue une abstraction, un iàéal, et qu'il èn va de même pour sa traditionnelle vérité ou faussetéSur ce pôint je n'ai pu toutefois que faire partir quelques feux d'artifices prometteurs. Il y a sans doute plusieurs moralités à tirer de tout celaetjevoudrais plus particulièrement en signaler quelques-unes : A) L'acte de discours intégral, dans la situation intégrale de discours, est en fin de compte le seul phénomène que nous cherchons de fait à élucider.
,
I
i) Afrr.rr, décrire, etc. ze.sont que deux termes parmi beaucoup tes âétes iuoCuioiies; ils ne jouissent d'aucuae. d'a;iËtÏû?-effiAt [148] position Privilégiée.
C) Ils n'occupent en particulier aucuue position privilégiée quant à la relation aux f{ts - et qui seule permettrait de dire qu'il s'agit du vrai ou du faux. Vérité ou fausseté, en effet (sauf si nous
l5l
I
'
nouzrhc
QUÀND DIRq C'EST FÀIRB
doit être abandonnée au prolt de fanilles plus générales d'actcs de discours, [és entre eux et se recouwant les uns les autres. Cc sont précisément qu'il nous faut maintenant tcntsr de classcr. 'èèsSiactes nous employons (avec précaution) lc te-*:_très simple de la première personne du singulier dc I'indicatif présent, voix active, et si iious parcourons le dictionnaire (un < p,etit D dictionnairc dcwait suffire) dans un esprit très large, nous obtenons une liste de verbe;f de I'oidre de l0 puissance 3 *l J'ai dit-qiË'j'6ilË-Ë-A; pîÉiëilî.t d'abord une classilication générale, et que je formulerais quelques remarques sur les classes ainsi proposées. Eh bien, donc, allons-y!
avons recours à une abstraction artificielle, toujours possible et même
légitime à certaines fins), sont des mots qui désignent non pas des relations, des qualités (que sais-je encore?),.mais une dimension d'appreciation : à savoir comment, de quelle façon plus ou moins îâiiifaisante, les mots rendent compte des faits, événements, situations, etc., auxquels ils renvoient. D) Du même coup, il nous faut éliminer, au même titre que tant d'autres dichotomies, la distinction habituellement établie entre le < normatif ou l'appréciatif > et le factuel. E) Nous pouvons aisément prévoir què la théorie de la << signification >>, dans la mesure où elle recouws le < sens > et la < référence n, devra être épurée et reformulée, à partir de la distinction entre actes locutoires ei illocutoires (si cette distinction est fondée: elle n'a été qu'esquissée jusqu'ici). J'ets ne pas avoir suffisamment apporté sur ce point : je m'en suis tenu au bon vieux < sens et référence >,
tel qu'il a habituellemeut cours. Je voudrais faire remarque r aussi que j'ai omis de considérer explicitement la valeur illocutoire des < affirmations >.
Nous avons dit qu'il restait encore uoe autre tâche, et qui serait i de longue haleine. \ggsjrrqps avancé, il y a longtemps déjà, qu'il j nous fallait établir(uqc liste je << verbes performatifs explicites >;
-t
mais à la lumière dfr-îËffiie plus générale' trous voyons mainte- ' c'est une listè des valeurs îllocutoires de 'l- nant que c€ qu'il nous faut, l'énontiation. Toutefois I'ancienne disiinction entre performatifs -,i irima;Aes et expliciles se maintiendra malgré le age radical des fsea-changel de la distinction performatif/ constatif à la théorie actes de discours. Il nous est, en effet, apparu légitime de supposer que les types de tests suggérés pour les verbes performatifs explicites 3 Dire..., c'est... >>, etc.) nous permettraient aussi, et même mieux, de discerner parmi les verbes ceux qui e4llliçi!çal (comme nous dirons r t dorénavant) la valeur illocutoire -d'unË6ôiôiation, ou la nature produisons lperforml en formulant cette T illocutoire à" ,fâaè-q* nous I eoo*àti-on.-be qui,"Cn"fevânëËè, ne résistera pas av déplacement. f*rTËÉetre en tant que çrs limite et marginal - et ce n'est guèrè étonnant puisqu'il s'agit d'un point qui nous a donné du mal dès le début), c'est la notion de pureté des performatifs. Cette notion était essentiellement fondée sur notre croyancê en la dichotomie
performatif/constatif, dichotomie qui, nous le voyons
ts2
à
présent,
coNFÉRglrca
ll50l Je ne vous ferai faire qu'un tout rapide du sujet, ou plutôt je vous y ' ferai patauger un Peu... Je distingue cinq classes plus générales, mais je suis loin d'être aussi content des unes que des autres. Elles permettent cependant de mettre en pièces deux fétiches (que je suis assez enclin, je I'avoue, à maltraiter...), à savoir : l) le fétiche vérité-faussetê, et2) le fétiche valeur-fait lvalue-factl. Quand je voudrai parler de ces cinq classes établies en fonction de leur valeur illocutoire d'énonciations je leur donnerai- les noms suivants, plus ou moins rébarbatifs : -, l) Verdictifs 2) Exercitifs
3) Promissifs
4) Comportatifs (un drôle de numéro, celuiJà!) 5) Expositifs. Nous les étudierons dans cet ordre, mais je voudrais d'abord vous en donuer une idée succincte. La première classe, celle des vjI&Lifs, est caractérisée par le fait
qu'un-verdict est rendu (comme le nom I'indique) par un jury, un arbitre ou rin juge. tln'Cst+asa-ecegebigg_lggJglglg$s soientcêté- {;'1i".ê ils peuvent constituer, par exemple, une estimati,o-n -lme -æ$guqsJ ou une @Egn, lpPllFjdno. X s'agit essentiellement de se prononcer sur ce qu'on découvre à propos d'un fait ou d'une valeur, mais dont, pour différentes raisons, on peut diffcilement être str.
t
Pourquoi cctte formule au [eu de 1.000? D'abord parcc qu'elle a un petit air solennel et scientifique; ensuite, parce qu'elle couvre I'intcrvalle de 1,000 à 9.999 (une bonne marge)
alon que I'autre formule pourrait etr€ irterprétéc dens la
marce trop étroitc de < 1.000 cnviron >.
153
QUÂND DIRE, C'EST TÀIRB
il
la
deuxième classe, celle
a"q@;
renvoie à
oouaÈrrs I'exercice*d,e,_
39uJgirs,-d9-Cg.qi$' oll4iisfluç!ç-e.s, A titre d'exemple : effectuer une noiniiiiliôi, voter, c-o-tslqander, exhorter, conSèiller, avertir, etc. :; I-a troisième classe, celle des.ffiEs,r est caractérisée par le ;'fait que I'on promet, ou que l'ôl-piéDd en charge quelque chose. il] Ces énonciations nous engogen à une action, mais elles comportent aussi deg_@qlerQtiens ou manifestations d'intent!o,q__s, qui ne sont pas proprement des pioùesses, â-iiisi que'dér gttÏlusgg$qe.z vagues. qu'on pourrait appeler des << épousailles > (le felt d. se rangrr du côté de qg9tqq.l!n, par exe.mple). Il est clair que èife classe entretient des rppports avec celles des verdictifs et des exercitifs. h jIa quatrième classe, celle deslglqg]8.4$tonstitue un groupe irès disparate, qui a trait aux altjludes e! \11-çomplft9.ilillt ia_Ctg!. Exemples : les excuses, les félicitations, les recommandations, les
jurons, défis. -condoléances, Ia cinquième classe, celle 4
deslg4rittift est difficile à définir. Les verbes y ma.nifestent ayec clarté c.omment ils s'insèrent dans le déroulement dJ I'argumentation ou de la conversation, dans quel séns les mots sont employés : nous pouvons dire qu'en générai ils !gle*!€-qÉJ.çpp"qpé. Voici quelques exemples : < Je réponds >, \ ,< Je démontre >>, ( Je concède >, < J'illustre r>, << Je tiens pour acquis >, ll<< Je pose comme postulat >. I1 faut être bien conscient au départ que de nombreux cas, marginaux, ou embarrassants, ou se recouvrant les uns les autres, pourront toujours se présenter. Les deux dernières claqp-e-s qon!, à mo,q qenq, les php-9m!an$111!.9s; il se peut fort bien qu'elles ne soient pas claires ou qu;éfès iè recôù1xJilt, et qu'il faille même procéder à une classification tout à fait nouvelle. Je n'avance rien ici qui soit le moins du monde définitif. Iæs compp-r: -tatifs,gont agaçants parce qu'ils paraissent décidément trof riiifâiaiès; éç pg$llift, parce qu'ils sont extrêmement nombreux et importauts, qu'ili semblent tout à la fois inclus dans les autres classes et uniques -Ed que je n'ai pas encore réussi à m'expliquer en leur genre - ambiguité moi-même. On pourrait aussi bien dire que tous les aspects à la fois figurent dans chacune de mes classes...
'
coNrÉnnNcn
[152]
I. vERDlcrrs acquitter soutenir (en vertu de la
loi)
condaflrner
prononcer (comme un fait)
interpréter comme
comprendre
lire que
décréter que
calculer
supputer placer
estimer
fixer
évaluer
dater faire que
mesurer tenir que
classer
ranger
coter
établir
apprécier
caractériser
ùià-ôo.tique.
décrire analyser
On trouve encore des exemples dans les jtCçfnpqls ou ap1l-d-ç_ia: tions sur le caractère d'autrui; ainsi loÈqu6n dii : < Je pourrais le qualifièr de diligent.
Lp cielle
>
"ysl{igll|g rgg1",,É1*1*9S._c,g..qui .4,,ilp pro.nongÉ ou non), à partir d.gtéino,igliaC-e_C-su-d-c_*fais-ens,
Gar voie offiau sujet d'une
valeur ou d'un fait (pour autant qu'on puisse'vraiment distinguer valeur et fait). L'acte verdictif.e_s*tj3.{'Stg,fç, et par là distinct dell I'acte législatif ou de I'acte exécutif, qùi sont tous deux exèîCitifs. i:
Mu|,o".iu;os
a-gtg.9-judiciair,.eg,
pris dani un sens plus targe 1fii-aont,
paî'exemple, le fait de jùges plutôt que de jurys),
se
trouvent être
en réalité des exerçitifs. Les verdictifs entretiennent évidemment des iapports-âièc la vérité ou la fausseté, dans la mesure où ils peuvent être bien ou mal fondés, corrects ou incorrects. Que le contenu d'un verdict soit vrai ou faux, cela apparaît, par exemple, dans une dispute autour d'un arbitre qui annonce : < Éliminé! >, << Trois prises! >, ou <<
Quatre balles!
>>
62.
ll53l Comparaison avec les exercîtifs En tant qu'actes officiels, les décisions d'un juge font loi; celles d'un jùry font d'un simple accusé un criminel déclaré; celles d'un arbitre font que le batteur est éliminé, le lancer fautif, ou la balle
154
155
QUAND DIRB, C'EST FAIRE
nulle. Ces"Cécislgns sont fondées suf uae positiSq offiCielle :
NOUZÈfi
il
reste
néanmoins qu'elles peuvent être tenues pour correctei ou incorrectes, justes ou injustes, faites à tort ou à raison, selon le témoignage. Il ne s'agit pas d'une décision pour ou contre. L'acte judiciaire est exé-
cutif, si vous voulez; mais nous devons distinguer l'énonciation
exécutive < Cela vous reviendra > du verdict < Cela vous appartient >, comme nous devons distinguer entre l'évaluation des dommages et I'attribution des indemnités.
COT.TFÉruNCB
clarification de I'exposé. Il faut distinguer ( Je vous déclare éliminé > ïtipressiôn < J'appelle cela éliminé > : dans Ie premier cas, il s'agit d'un auquel on a donnë une expression verbare (ainsi 'erdict lorsqu'on dit : < Je décrirais cela comme une lâcheté >); dans Ie second cas, il s'agit d'un verdict quant à I'emploi des mots (< Je décrirais cela comme une lâcheté >).
---de
II.
EXËRCITTFS
Comparaison avec les promissifs
Les verdicts, de par la loi, entraînent un effet sur nous et sur les autres. Le fait de rendre un verdict ou d'effectuer une estimation nous engage à une cerlq_ine çon!_uige par la suite"\,comme n'importe quel acte de discoùîlJi p.ui-etiè mêàe plus quiuo uutr., u;;;;; quant aux exigences de la cohérence; après tout, nous savons sans doute à quoi nous serons tenus. C'est ainsi que le fait de rendre un verdict nous engagera (nous disons plutôt : nous engage) à attribuer une indemnité, Une interprétation des faits peut nous engager ellemême à formuler tel verdict ou teUe estimation. Rendre un verdict peut également équivaloir à prendre parti : nous pouvons être par là engagés à approuver quelqu'un, à le défendre, etc. Comparaison ovee les comportatifs
",{fl.içttqt quelqu'un peut impliquer'un verdict touchant la valeur ou le caractère de la personne. De même < blâmer D est un verdictif, si on I'entend au sens de < tenir pour responsable >; mais en un autre sens, c'est âdopter une attitude envers quelqu'un; et c,est donc un
comportatif.
Comparaison ovee les exposîtifs
Lorsque je dis < J'interprète >>, << J'analyse D, ( Je décris >>,
Il y a exercitif
lorsqu'ollq1g1!!_e-,ul jugement (favorable ou non) c9nluite, ou sur sa justi6cation. ii s'agit d'un jugemenilgi ce 1n9 WLg,*Igi être, plutôt qîô iur ôe qui est : on préconiseË quiïewâi être-plutôt qu'on n'apprécie une situation de fait. II s'agit d.un arbi_ plus que d'une appréciation; d'une sentence plus qu-Ëîtiin =*ta*g_g verdict. Arbitres et juges font usage des exerciîifs autant que des su1
verdictifs. Les exercitifs peuvent impliquer que d'autres sont < obligés >, < ont le droit > ou < n'ont pas le droit >> d'eflectuer certains actes. La classe des exercitifs est très vaste. En voici quelques exemples :
désigner
dég ader (casser)
renvoyer
excommunier commander donner une amende voter pour revendiquer
11551 .ordonner condamner saisû (les biens) choisir Iéguer
pardonner
avertir
consgrle1 )r'ii./'ti. :':,
P_Ilql
s9q,9i!9-{
exhorter proclamer
presser de
contremander promulguer dédier
l
,t
.'
annoncer rnnuJer
réduire
à un
accorder fai.re une nomination donner démissionner plaider supplier recommander casser
révoquer
surseoir déclarer clos
156 157
grade
inférieur noûlmer diriger
empêcher
déclarer ouvert
QUAND DIRE, C'EST FÀIRE
DOUZIh{B coNFÉ.RENcE
Comparaisan avec leô verdicti/s
ru.
que D, (
PROItrSSIFS
< Je soutiens J'interprète D, etc., peuvent être des actes exercitifs, s'ils sont officiels. De plus, <J'adjuge > et <J'absous D soût des exercitifs fondés sur des verdicts. Conparaison avec les promissifs
Il
est vrai qu'un grand nombre d'exercitifs tels que permeilre,
iautoriser, déléguer,
ofrir,
concéder, donner, sanctionner, nriser el \,\consentir, gngagent à une conduite. sije dis < Je déclare la guerre >, ou < Je désavoue >>, toute la visée de mon acte est de m'engager personnellement à une certaine conduite. Le rapport entre un exercitil et I'engagement de soi est aussi étroit que celui qui existe entre la, signification et I'implication. Il est évident qu'une dé5ignation [à une fonction], une nomination nous soumettent à une obligation; mais i nous préférons dire que ces actes nous confèrent des pouvoirs, des droits, des titres, etc., ou qu'ils les modifient ou les annulent.
I
Comparaîson avec les comportatifs
Certains exercitifs (< Je défie )), (( Je proteste >,
<<
J'approuve >)
sont très proches des comportatifs. Défier, protester, approuver, louer, et recommander, cela peut équivaloir à une attitude, comme à effectuer un acte. Comparaison avec les exposîtifs
Dans le contexte d'un débat ou d'une conversation, des exercitifs comme < Je retire >>, << Je surseois )), et (( Je m'oppose à > ont à peu près valeur d'expositifs. Voici quelques situations typiques de I'emploi des exercitifs : l) accepter ure charge ou une nomination, poser sa candidature ou déposer son vote, signifier une ission, uûe démission, un renvoi, une sollicitation, 2) conseiiler, exhorter, et faire une pétition, 3) habiliter, ordomer, prononcer une sentence, et annuler, 4) diriger une assemblée, et assurer la bonne marche des afaires, 5) traiter de droits, de réclamations, d'accusations, etc. 158
promettre entreprendre être decidé à se proposer de
convenir de
lier avoir I'intention se
contracter donner sa parole
declarer son intention
projeter se dire prêt à
prér'oir
envisager de
s'engager
jurer de
garantir faire væu
se vouer
parier
se dire d'accord
prendre fait et cause pour
consentir se ranger du côté de embrasser (une cause)
opposer
favoriser
[157] avoir le propos de
se
consacrer à
adopter épo la cause
se déclarer en faveur
avoir le dessein
Déclarer son intention n'est pas entreprendre, et I'on peut se demander si ces deux actes appartieDnent à la même classe. De même que nous faisons une distinction entre exhorter et ordonner, de même devons-nous distinguer entre avoir I'intention et promettre. Ces actes peuvent..çgr*egdant être exprimés tous deux par le { ;Jffi}, : ainsi usons-nous des tocutions I -qeliqrpllrJp-rjtl?[e--: < ferai probablement D,tcÈrâ'i- de mon mieux pour >, < ferai sans f doute > et ( promets de faire probablement >. On peut remarquer qu'il y a qqXi gl$e_qen:!_l:ç.rs les << descriptifs >. A la limite, je puis me contenter d'affirmer que j'ai une certaine intention; mais il se peut aussi que je déclare, explicite, ou annonce cette intention, ou détermination. Sans nul doute < Je déclare mon intention > m'engage vraiment; et dire < J'ai l'intention de... > équivaut presque toujours à une déclaration ou à une annonce a. Le même phénomène se produit pour les causes que l'on épouse : lorsqu'on dit, par exemple, << Je consacre ma vie à... >. Quant aux promissifs du type < être en faveur de >, << s'opposer à >, < adopter le point de rue de >, << choisir la façon de voir de >, et << embrasser uûe cause >, il faut noter qu'ea général vous ne pouvez affirmer que vous êtes en faveur de, r59
D0UZdME coNFÉRENc8
QUÀND DIR8, C'EST FAIRE
opposé à, etc., sans I'annoncer. Dire < Je me range du côté de -tr >, peut, suivant le contexte, être voter pour X, épo la cause de X,
[159]
w.
LEs coMPoRrArrFs
ou applaudir X. L€s comporta,tifs incluent I'idée d'une réaction à la conduite et Comparaison avec les verdictifs
Les verdictifs nous engagent à certains actes de deux manières : a) les actes nécessaires à la cobérence et au soutien de notre ver-
dict;
ô) les actes qui peuvent être une conséquence du vcrdict, ou s'y
trouver impliqués de quelque façon.
Comparaison avec les comportatifs
Dans des réactions telles quc < être offensé >, < applaudir >, et que << louer >>, il y a adoption d'un parti et engagement, au même titre g-g-it-9les le choix. Mais et dans le conseil 9!8--489-!i:.P*r -cgppgl-E!-t-[f implicatiqn, au regard d'une conduite semblable au comportement dont it est question, et non au regard de ce comportement lui-même' C'est ainsi que si je blâme quelqu'un, j'adopte une attitude vis-à-vis de sa conduite ée, mais puis seulement m'engager à éviter scm' blable conduite. Comparaison avec les exPositifs
Jurer, promettre, garantir qu'il en est ainsi, sont des actes qui fonctionnent comme des expositifs. Donner tel nom, définir, analyser, et tenir pour établi, d'une part; donner son appui, se dire d'accord, désapprouYç.f, maintenir, et d,é&ûdfg, d'autre part, forment deux fi6Ts a-tUocutions qui semblent à la fois expositifs et promissifs' 160
(< remercier
<<
s'exc
>>.
>>.
3. Pour la sympathie : < déplorer, >>, << compatir >>, << complimenter << présenter ses condoléances >, ( congratuler >>, << féliciter sympathiser
>>, >>,
>>.
4. Pour les attitudes : << se dire
offensé >>, <( ne pas attacher d'imporrendre hommage >>, << critiquer r>, ( grogner >, < se plaindre de >, << applaudir >>, < fcrmer les yeux sur >>, << louer >>, << désapprouver >' et les emplois non exercitifs de < blâmer >, <( approuver )), et < favoriser >>. 5. Pour les salutations : << souhaiter la bienvenue >>, << faire ses adieux >>. 6, Pour les souhaits : < bénir >>, << maudire >, <( porter un toast >, < boire à la santé de >>, et << souhaiter >> (au sens strictement perfortance >,
sifs.
". t'ilt(
Pour la présentation d'excuses, nous avons
<<
'
:
2, Pour les remerciements :
Les exercitifs oous engagent au regard des conséquences d'un acte : la nomination, par exemple. Quant au cas particulier des P9IP.i9:19"9-L nous pouvons hésiter à les classer coûlme exercitifs ou comme prornis-
!-\ \
Voici quelques exemples
l.
Comporaison avec les exercitifs
au lr
sorT-dEuiffi"f:lae. d'atritudes er de manilestations d'auitudes à f I'egaid de l:r conduite?otÈ.iit{re ou imminente cle quelqu'un. On relève un rappôif-évidèniêntËces verbes et, d'une fart,-l'affirmation ou la description de nos sentiments et, d'autre part, leuîEiflièil' siôî(âu sens où nous leulJonnons libre côurs), Uien qué tes compoi"aiifs soient des actes distincts des uns et des autres.
<<
matif).
7. Pour les défis : << braver )), < mettre au défi voquer >.
>>,
(
protester >,
<<
pro-
t,
lr Les comportatifs,. déjà sujets aux échecs habituels, peuvent être de surcroît marquls _d'insincérité. --:) 1160l Il est c6ffitd;;pp"î;iste encore avec les promissifs : louer ou approuver quelqu'un, en effet, c'est à la fois réagir à un comportement et s'engager à une certaine conduitc. Les comportatifs sont aussi âans un rapport étroid avec les exercitifs : approiiver peut équivaloir à exercer un pouvoir et à réagir deriant un comportement. Mentionnons enfin quelques cas marginaux, tels que << recommander )), <( fermer les yeux sur D, ( protester r>, << prier instamment D, et (( provoquer D.
161
t.'
r1
Ar '
')'/
/t|/.
QUAND
DIRq C'EST
nOuzrùrrn
FAIRE
Voici donc une liste d'expositifs* V.
l.
EXPOSITM
CONFÉRENCE :
affirmer lafrrnrl
surseolr s'opposer à adhérer à reconnaître répudier
nier
noter [state]
Les expositifs sont employés dans les actes d'exposition : explica-
decrire
tion d'une façon de voir, conduite d'une argumentation, clarification de I'emploi et de la référence des mots. Nous avons avancf plusieurs
ï
cla-lser
identi6er
pqj-st-de s a vo i É#_ggljglg_q n9 glpJ*p*S--égelement i'erdidiG, gt-e-r-çitifs, co.mportatifs ou promisI!q#e --dglLæ-dçfÂussi s'ils ne sont pas de simples des_çriptions- de nos sentimenTs,TE-nos habil-udes, etc., surtout quand nous ons à fo i s déj
à qu e
lorÈqury1|
3
r s
t
eJ_Si
lp,
répète que )>,
<<
mentionner ? interposer
Voici des verbes que nous pourrions fort bien ranger parmi
les 3
?
se
a. demander 7
a. interpréter distinguer
détailler définir 7 ô. illustrer
conjecturer ? douter ? savoir ? eroire
expliquer
formuler 7
c. signifier se référer
5. accepter
appeler comprendre considérer comme
concéder
.-.P1=.--:
tourner vers
conclure en
rapporter
tout aussi bien les considérer
insister
7. commencer par
jurer
[?î[[Ser
comme des comoortatils : < surseoir >. < hésiter devant > - verbes qui incluent I'adoptlon d'une attrtude ou I'exprcssion d'un sentiment. Je vais maintenant proposer quelques listes d'expositifs, afin de bien marquer l'étendue du domaine. Les exemples les plus signifr. ji_"' catifs sont des verbes comme <-affirmer D, (.gjçI >, < ilsi!-tgl ,t, ,,iUS:1r' JIg), ( *ggre >. Un très grand nombre de verbes tels que ( mettre . en question >>, << demander )), ( nier >, ètc., semblent se rapporter i.rfr.'tout ' natureilement à la conversation; mais il n'est pas absolument nécessaire qu'il en soit ainsi. Et tous les verbes, en fait, se rapportent de quelque façon, à la situation de communication.
négJiger
4. témoigner
quent I'exercice d'une influence ou d'u[ pouvoir. Il est encore certains verbes qu'il serait possible de classer comme plg-missifs ; < définir >, >, < témoi< se dire d'accord )), ( accepter >, < soutenif grer >, < jurer ll par lesquels on assume une obligation. Quant
ll
déduire argumenter
prévenir dire répondre répliquer
verbe verdictifs : < analyser >n < classer >, < interpréter )) - tous que nous qui impliquent I'exercice d'un jugement. En voici d'autres pourrions considérer tout aussi bien comme 4gq_%gg$fs : < concéder >, << presser de >>, << démontrer l>, ( insistéilËGîEËs qui impli-
aux verbes que voici, nous pourrions
[162] 6. postuler
3. renseigner
Je mentionne que >.
a. corriger reviser
2. remarquer
itàôtion en l'annonçant ou après I'avoir annoncé : < J'en viens 1- maintenant à... ), < Je cite r>, < Je rapporte >>, << Je résume >>, <( Je
I
5
retirer donner son accord
On.peut diï,_:o resumé, que le^verdictflfSldgl13-eorrer un juget..q4g$I!Jtf â à alfi-rmer a g1 m e r une u n e irnlluence nîilen;é6;;;ôîGiÂ,', ou un pouvoir, le_-p,rs le. promissif mis"r f la S9str. ry1t i r_lswitj une obligation ou à déclarer une intention,,luTmif lS_sumer ;
j
adopter une attitude, I ljclpositjf à manifesre r plu cfâTËËëiiî*s es râisons, ses arguments, breïâ?j-ùcider la communication. *-eômme d'habitude" je n'ai pas ménagé assez de temps pour pouvoir
à.*
-.t t9larespecté_ladispositionetleschiffresd'Austin.Lesensgénéraldecette
disposition est évident mais on n'en trouve aucune explication p*recise dans les papiers Iaisses par Austin. Les poi_rts d'interrogation roÂt de I'uut"ur. J.O,U,I
t62
t63
J
I
,1 |t'. :|"
r1..,1',t't'
QUAND DIRE C'EST FAIRS
vous dire I'intérêt de cc que je vous ai proposé. J'essaierai de vous le suggérer par un seul e4gnple. Il y a longlemps que les philosophes s'intéressent au mot ( bon >; ils ont tout récemment commencé à étudier la manière dô-ff-nous I'employons et quel est alors notre dessein. On a suggéré, par exemple, que nous I'employons pour exprimer notre appro_bati-93, l-oug_r, ou introduire des degr_és. Mais jamais nous n'aurons une notion vraiment claire de ce mot < bon > ni de l'emploi que nous en faisons, tant que nous ne posséderons pas, idéalement, une liste complète de ces actes d'illocution dont louer, introduire des degrés, etc. sont des spécimens isolés - tant que nous ne saurons pas combien il y a d'actes de ce genre et quels sont les rapports et correspoodances qu'ils entretiennent entre eux. Nous 3] avons ici un exemple d'une des applications possibles de ces théories générales que nous avons considérées au cours de ces conférences; nul doute qu'il n'y en ait beaucoup d'autres. C'est à dessein que je n'ai pas voulu embrouiller la théorie générale avec des problèmes philosophiques (quelques-uns sont si complexes qu'ils en viennent presque à mériter leur célébrité...); il ne faudrait pas penser pour
autaût que je n'en fais aucun cas. Des considérations comme les nôtres ne peuvent sans doute manquer d'être un peu fastidieuses, et les entendre, les assimiler est tâche assez austère, Mais, au vrai, les concevoir et les écrire est une tâche encore bien plus ingrate... Le vrai plaisir commence lorsque nous nous mettons à les appliquer à la philosophie. Dans ces conférences, donc, je me suis livré à deux activités, dont je ne puis dire que je sois fanatique : l) j'ai présenté un programme, c'est-à-dire que j'ai dit ce qui doit être fait, plutôt que je n'ai fait quelque chose; 2) j'ai donné des conférences. En ce qui concerae (1), cependant, j'aimerais fort pouvoir penser que plutôt que d'avoir lance uo manifeste personnel, j'ai mis un peu d'ordre dans des voies ofr - pour certains domaines de la philosophie les choses déjà ont avancé, et où elles progressent à un rythme qui va-croissant. Quant à (2), j'aimerais vraiment dire qu'il n'est pour moi aucun endroit au monde où il soit plus agréable de donner des conférences qu'à Harvard.
Annexes
Appendice de l'éditeur anglars
tt64l
L'usage princîpal que nous avonsfait des notes.des auditeurs, de Ia confêrcnce donnée à la B.B.c. sur les Performatifs et publiée dans les coilected Papers, de la communicatîon faite à Royaumont (intitulée << performatifconstatif>>), de la bande sonore sur laquelle fut enregistrëe la confërence donnée en octobre 1959 à Gothenberg,fut de contrôler, à partir de toutes ces sources' la reconstitation du texte que nous avions dëjà élaborée à partir des seuls documents d'Austîn, Ceile confrontation n'a pas ëté très utile en ce sens que les notes d'Austin étaienl presque toujours plus complètes qu,oucune de ces sources secondaires, de sorte qu'elles n,ont contribué que bien peu à
ewichir Ie texte original. Nous y avons pourtûnt puisé quelques exemples
el aussi cerlaines expressions typiques nous permeltant de complëter les ages où les notes d'Austin n,étaient pas présentées sous une forme littëraire. Mais les sources secondaires ont été Ie plus utîles en ce qu'elles nous ont permis de fixer l'ordre de la présenlation et de vérifier certaines inrerprétatîans, là où les notes étaient fragmentaires. Voici donc une liste des ages les plas importanls où rnus avons comcaractéristiques,
plété ou recorutruit le texîe d'Austin. notes
:
:
L'exemple concernant Georges n'est pas complet dans les le texte s'inspire principalement de la version de la B.B.C.
Page [28]
Page [32] : Les deux dernières lignes de Ia page 132) et la suîte (jusqu'à Ia fn du paragraphe, à la page 1331) constitucnt un dëveloppement à partîr
de notes très suôcinctes.
Page [35] : A
partir
du haut de Ia page jusqu,à la
fn
de Ia confërence
( excep-
tion faite du dernîer paragraphe), nous avons une version rcconstituée à partir de plusîeurs texles qu,Auslin a ëcrits sans Ies compléter, à des dates difërentes.
Iz dernier paragraphe est un développement des notes d,Àustin fondé principalement sur celles de M. Georges pitcher.
Page [52J :
[165] Page 164l : D'ici à la fn de la conférence, le texte fut enrichi de deux sëries de notes qu'Austin avait ëcriles avant l9SS, Les notes de lgSS ne comportent que des fragments, à cel endroit. 167
APPENDICB Nous pouvons maintenttn, poser>> jusqu'à lafn du paragraphe : constitue un développement plus ou moins sûr des notes d'Auslin où on lit ceci : << Nous employons maintenanl 'comment cela doit êlre compris' et'rendant manifeste' (el peutâlre même'afirme que') : mais Don p:rs vrai ou faux, non pas description ou reportage, >
Page [70] :
<
ce age
Notes du traducteur
:La septième conférence se termine ici, dans les notes d'Âustin. noles des audileurs d'Harvard now montrent que la première partie de la huitième conlërence fut donnee dans Ia septième, à ce! endroil-ci.
Page [93]
I*s
Page [05] : A la deuxième ligne, Ie age << cela renverrail t î<< like implying>>l est fondé sur'les notes de Pilcher. Auslin avait ëuit : < Ou 'renvoie, apparemmeil' l'imply'\, est-ce la même chose? >> Page [05] : Le paragraphe (5) a été développé à partir de notes d'auditeurs. Seules les deux lignes et demie du debut figurent dans les notes d'Austin. Page [07] : A partir de la deuxième ligne jusqu'à Ia fn du paragraphe, nous avons une reconstitution fondëe sur des sources secondaires. Ce age n'exisle pas dans les noles d'Auslin. Pages [115 et 116] : notes de Pitcher.
Page ëté
Page
[1
Les exemples de
(I)
l7l
pris
et de (2) ont été pris dans
: Le paragraphe commençant par dans les notes de Pilcher,
il2ll
<<
les
Il y a donc trois manières,,,r> a
:Lafnduparagraphe (<(Unjuge...t) provient
des notesde
Pitcher.
bien que notoire auprès des élèves d'Awtin, Page [123] : L'exemple << Je nefgure pas dans les notes. Beaucoup de sources secondaires le contiennent, pus>>,
Page U 241 a Les quatre premiè re s lignes n' existent pas dans les la phrase provient surlout de Pitcher. Page il291 : (a) et (b) sont des développements à cinctes, et fondês sur des sowces secondaîres.
Pages
[l42 et 143] i Le paragraphe
troisième lîeu,..>> a été élaborë à Page
[62]
; Le age
<<
parlir
no tes d' Àust
in,
partir de notes très suc'
commençant des notes de
par
<<
Considërons, en
MM. Pitcher et Demos.
Comme d'habitude, je n'ai pas mënagé,,,
>>
jusqu'à
la fn de Ia conférence constitue un dëveloppement du texte d'Austin, fondé en partie sur une brève tote qu'Austin avait ëcrite à part, et conftmé à partir de notes
d'audileurs
J. O. U.
l2l
,
l.
Cf, Inlroduclion, p. 12, note. Pour une bonne introduction, succincte et claire, à I'histoire de ces recherches philosophiques, on pourra consulter le petit livre du prolesseur G. J. Warnock, English Philosophy Since 1900,
London Oxford University Press, 1963. I2l 2, L'énoncialion lutterancel, comme nous le verrons de mieux en mieux, ' doit évoquer la simple production d'un acte linguistique, abstraction faite de son << contenu > et des modalités de son émission vocale' Elle n'est, en effet, ni la simple production de sons (comme le << mot > : va' que produirait un singe, par exemple); ni une phrase dont oD puisse dire qu'elle est vraiê ou fausse. C'est pourquoi une énonciation, bien qtJe pouvant être un énoncé (wai ou faux), n'en est pas nécessairement un. (Une proà moins qu'on tienne absolumesse, par exemple, n'est pas un énonce
meût à dire qu' ( en un sens >, on ( énonco >> une promesse -, mais plutôt produit.) que tient à distinguer dès le début Austin I'on une énonciation le statement (affirmation ou énoné) de l'énonciation dont il n'est qu'une instance.
Le tefine constatr've n'existe pas en anglais. Austin avait besoin d'un mot qui évoquât à I'avenir des énonciations qui ne seraient que
[3] 3.
vraies ou fausses, sans qu'elles << fassent >> quelque chose (comme les énon' ciations <( performatives >> auxquelles il les opposa d'abord, et dont il sera bientôt question). Si le terme français <( constater >> évoque (comme l'afrrrnation) une interventiotr ou une prise de position de Ia part dè celui qui (< constate >>, alors il faut résister à cette évocation, pour le moment. (Nous disons <( pour le moment >>, car Austin sera amené par ses analyses à reconnaître un certain ( faire >> dans l'énonciation constative, un << agir >> dont il ne parviendra pas, cependant, à préciser la nature exacte') Cf. la note 5 pour une ( justifcation >r des termes <( constatif >) et <( performa'
til>
en français'
l4l 4. En français daus lc texte. t6l 5. M. Émile Benveniste n'a pas hésité à employer ce terme (ainsi que le terme < constatif ))) en linguistique française; mais il a cru devoir en donner une certaine justification.
(
Une rema.rque de terminologie. Puisque per'
formance est déjà entré dans I'usage, il n'y aura pas de difficulté à intro'dure performary'au sens particulier qu'il a ici [dans l'æurrc {'A-Ltstinl. on né riit d'qilteurs quo nùmooer en français une famillo lexicale quo 169
NOTËS
NOTES
I'anglais a prise à I'ancien français z perform vient de I'ancien français parformer. Quant au lerme constatif, il est régulièrement fait sur collrrat .. un énoncé constatif est bien un énoncé de constat. Bien que constat soit étymologiquement le présent latin constat << il est constant >, le français le traite comme un substantif de même série que résuhat et le rattache ainsi à la famille de I'ancien verbe conster << être constant >>. Le, rapport conster : constat est ainsi parallèle à résulter : résultat. Êt de même que sur rësultat, prédicat, on a fait résultatif, prédicatif, il sera licite de tirer de constal Dn adjectif constatif. >> Problèmes de linguistique générale, N.R.F., CaUimard, Paris, 1966, p. 270, note 4.
Quoi qu'il en soit de cette justification,
il
s'agit surtout
d'essayer
d'inclure dans les termes d'Austin tout ce qu'il a voulu y insérer (maiscela scal), en se laissant guider par les nombreux exemples que le pbilosophe anglais a présentés.
ilJ 6. Il est important
de noter ici que l'énonciation, considérée en elle-même, n'est pas mensongère, bien qu'Austin attire discrètement notre attention sur le lait qu'elle pourrar'r peut-être << impliquer > un mensonge, si celui qui la produisait avait I'intention de tromper quelqu'un, en plus de I'intention de faire par ses paroles quelque chose (en plus de promettre, par exemple). Ne peut-on se demander, dans ce contexte, si I'affrmation fstatementl clle-ntênte n'aurait pas pour rôle de faire quelque chose (comme Ia promesse fait quelque chose), et non pas d'être << vraie ou fausse >> en soi, de sorte qu'il faudrait rechercher sa vérité ou sa fausseté ailleursdans lc sujet, par exemple?,.. (Dans ce cas, la vérité s'opposerait plutôt au rnensonge qu'à la fausseté, et celle-ci proviendrait d'un certain << désaccord >> avec les faits : l'énonciation serait alors fausse ou erronée au s e ns d' i nco*ecte ot, d' inadaptée,etc.) Nous .;;;l'"'àsi;; il;;;;;i; sur ce sujet à la note 14.
l2l 7. Austin attachera
l4l , i
beaucoup d'importance aux formules << en disant quelque chose >> et << par le fait de dire quelque chose >. Ce sont elles qui lui suggéreront la distinction entre les actes d'<< i/locution >> (<< in > : en) et de << perlocution > (<( per )) : par le fait de...) qu'il étudiera longuement (cf. la dixième conférence). 8. Le terme <
> n'est pas tout à fait juste, car il évoque I'opposé d'un saccàs, ce!ùia'est qu'ane espèce de ce-qu'Âustin appelie les iÂ.feticities.ll faudra donc voir dans l' << échec >> seulement ce que le chercheur anglais a voulu y mettre : tout ce qui, en gënéral, peut faire qu'uneénonciation performative ne se produise pas <( comme il faut >, abstraction faite, surtout, de ce que ce défaut provient, ou non, des intentions, ou de I'absence d'intentions (de I'agent ou du patient). Austin avertit son auditoire (anglais) de ne pas trop insister sur les significations habituelles des termes
161
qu'il propose (cf. p. [60.
9. Le terme
<(
purement >, dans I'expression
<<
purement verbal > fprofessed!,
ne.signifie pas que l'esscntiel de I'acte, en tant qu'acte, soit absent, et qu'il n'en existerait qu'un aspect verbal, accessorre et négligeable en soi. 170
Certes, un élément impoilant fait défaut, mais ce n'est pas parce qu'il est important que son absence peut faire que I'acte ne sbit pas produit, de fait. De mômc, I'acte (€reux ) lhollo*,1n'est pas yrde .. les images suggèrent assez bien, ici, ce qu'Austin veut dire. Les paroles ne sont pa, qiile << récipient > (en soi insignifiant) de significations, de sorte que si'elres étaicnt << vides >, ellcs ne serv.iraient plus à rien. Il'est dommage qu'elles soient parfois ( creuses >>; mais même alors, e//es << comptent >l 13ll 10. Austin_semble ici plaisanter en donnant I'exemple d'un chien à baptiser, et en ajourant à ce propos que la loi aurait à eiaminer des cas << difficiles > de ce genre... (et pour ne mentionner qu'un cas, à peine -Pourtant plus biz111s, bien qu'il puisse avoir des conséquences aiser importantes), les lég-istes _américains ont dt, étudier la quesiion, ces dernières années, de sàvôir si quelqu'un pouvait commettre un adirtère par insemi'natiàn artificielle... I l. L'auteur rcviendra longuement sur cette notion capitale de ta << valeur r> d'une énonciation. Quant à ra distinction entre << vaieur > et < signification >, cf. note 34. t341 12. on reconnaît ici une allusion à I'astuce imaginée par portia, dans le ll,larchand de Yenise. [37] 13. Austin n'étudiera pas cette importante question de savoir si les actes de discours peuvent être, en tant qu'actes dà véritable dîscours, des actes
[33]
unilatéraux >>. Il insistera énormément sur leur caractère coiventionnel (cf' note 43), mais sans s'arrêter à en faire une anaryse très poussée, on peut se demander si un acte authentiquement conventionnêl peut ê]..e << unilatéral )). cette question mériterait sans doute que la philosophie (ou du moins Ia philosophie du rangage) ra pose séÉeusemônt. Austin <<
lui-même se demandera mais sans encôre entier à fond dans la question I'on peut parler seul- (cf. note 49).
--si val u. L'énonciation qui serait < rraie > (au sens oir elle s'opposerait mensonge) est appelée par
au
Austin une &rrertron fassertionl, piutot qu'.rne simple afirmation fstatemenrl, L,assertion << implique > ioujoois unc crcyance lbeliefl, comme dans rexemple de I'acquitiement ciié ici. Cf. p. [41] :. Ie mensonge s'opFgs-e au simple dire lsaying! d'une chose qui est
en faît (seulement) fausse. (voir aussi page t+si : i<-l'assertion i-iiio"" une croyance >, et page [50] : < L'insincérité d'une assertion est la mênre que l'insincérité d'une promesse. >> Austin oppose ici une assertion plutôt qu'une simple affirmation à la promesse...) Notons enfin que I'assertion, bien qu'elle s'oppose, -comme T,agrmation, a.ox enonciatiôns performatives, se distingue de la simple affirmation en ce qu'elle oioduite en engageant la responsabilité de cerui qui parle. ceci apparaît "ri I la page F57l et à la page [96J, oir Austin parle du-discours iniiiect : celui qui parle_ne grgnd pas lui-même ta,responsabiliié-dè cè qu,il rappàrte. Austin a fait lui-même vûe asseftion â Ia pago [6] otr il apparaii ôi,ii; sait engagé en présentant une affirmatiorcomme indiscuiabte.- il'ne lui reste plus q'o'à espérer qu'on s'entende avcc lui. Mais Austin ne traite pas
t7r
NOTSS
NOTES
erlicitement de cette
distinction à I'intérieur des affirmatiors (< constatives >>, commc il aurait 9u a.vantage à le fairc, à notre a"is. li a po*t"ot rcmarqué (p. t80D qu'il n'était pas toujours facite de distinguer I'insincérité
I
de Ia fausseté. 15. Austin déûnira conférence.
5.1
,.,]
et étudiera cc type d'éoonciatiou dqos $a
dernièrc
]0. leqme_employé par. I'arbitre, au cricket, pour significr que celui qui lançait les batles a épuisé toutes les chances qucla règlidu pu iui accoroait. (Cf. note 28.) 17. On sait qu'en plus du mode et du temps, les verbes anglais possèdent
une forme qui exprime la durée de I'action. cette derniére é déroule parfois dans le temps (continuité) alors qu'en d'autres circonstances elle a lieu plus ou moins instantanément (nôn continuité). Austin qr'! I'usage des lormes continues ou non-continues ne saurait-on1ro" suffire à différencier les énonciations constatives des performatives. Il reste tue h forme-continue exprime le ptus souvent uniénonciation constativJtsurtont descriptive), bien que l'action dont on parle puisse contenir, au
sein de son déroulemeût, une activité performativ-e. I18. Austin reviendra sur Ia
<( correspondance avec les faits >>, comme caractéristique de l'énonciation << waiè >. Il est intéressant de néter qu'il parle pa.s ici de eorr.espondance, mais d'une << dépendance >, c'est_à_dire 19 d'un rapport qu'entretient l'énonciation avec les faits. La vgriigne ,"*ri" pag consister en un rapport avec les faits (ftt-il un rapport de << correspondance >); ce rapport seiait plutôt un" de I'acie << wai >r. nesærait alors à découwir en quoi consisterait la"onàition vérité elle-même d'une éno'ciatià.,
vraie, qu'elle soit constative oa performative. (Austin .a*"rqu"rr. l'énonciation performative aas-ri imprique une àimensron ae it.iie, tu" ïu moins au sens oir I'on a d'ordinaire entendu ce terrne de < vérité >>. cf. p. Iell.) J 19. C'est Ia thèse d'Austin. Elle lui permettra non seulernent de
I
<<
démy-
la- primauté accordée à fa.ffirmation crassiquf ."ii-oe dérer cette af[rmation dans un contexte plus vaste ei plus riche. "o"Jic-ette nouvelle << situation >> de I'affirmation nôus permettra, éventuellement, d'en saisir Ia nature véritable. 20..Faut-il prendre au sérieux cette dernière remarque? Nous aurions souhaité qu'Austin démontre cette aîfirmation. ou ou'il en fasse resi. sortir le bien-fondé (peu importe comment...). ' A_t_il une conceptionJe I'agir <( authentique r> analogue à celle d'un Bêrkeley, par exemile? On pourrait le penser, car il a déjà manifesté une syrnpatitià prus foiæ pour ce penseur-du é que pour d'autres (cf. À, p.3t3). (O; se souviendra que Berkeley surtout dals Ifre princîplii of HuÀan Knowledgi _
thologiser
>>
- un esprir, c'est-à-dire << ceia seul qui p."t penrei, et percevoir >, peut 4'rr. Mais lui non plus ne développc'pas .itt" "àïoir, mation capitale, et I'expose ainsi à être âocueiUie comloeï*C liô.Oa*). "mrconsidère que seul
t72
1621 21. Phrase
difficile à rendre en français, d'autant que des panneaux de ce genre n'existent piul en . Il sufht toutefois de remarquercomment cetle énonciatioo peut être comprise : soit comme un avertissement pur et simple, soit comme un avertissement accompagné du simple rappel (< afiirmatif >) que << plus tard, vous serez le seul responsable, si-vous n;en avez pas tenu compte ). [641 27, Allusion à certaines manifestations des sufrageues qui réclamaient pour la femme anglaise le droit de voter, [65J 2J. En français dans le texte. LTO| 24. Austin touche brièvement ici au caractère << immédiat >> de la parole (( gestuelle >> ou vocale). Il s'agit de son élément le plus direct et fôncier, atteignant I'interlocuteur noo pas par les paroles ou les gestes, mais en eux. C'est ainsi que si je-dis à quelqu'un : << Je te promets que... > et ajoute ensuite (croyant qu'il n'a pas compris l,importance, par exemple, du fait que je me sois ainsi e.ngagé envers lui) ces paroles : i< Je vieni de te promeltre qrJe.,. D, cette dernière énonciation est alors, en tln sens, une desiription de ma promesse initiale. Ce qu'il faut noter, cependant, c'est que cette description doit elle-même pouvoir ôtre compriJe comme une des_ cription, iouer le rôle que je lui destine, à savoir : faire saisir ma première énonciation en tant que prornesse. Mais il ne faudrait pas que j'aieèncore à << decrire > ma description elle-même par d'autres paroles ou gestes, indé_ Êniment;je dois réussir, à un moment donné, à < faire ei> dans certaines paroles, le sens [sanse] queT'e veux donner, actuelTement, à la srgniftcation lmeaning'l qu'elles auraient << en soi >> (c'est-à-dire, de par leur situation dans une langue déjà existante). Austin parle de spëcifcation lorsqu'il s'agit de s'assurer quela signification
(de ce peut être comprise, alors qu'il appelle eiplicitation -qui est dit) notre effort pour faire capter Ie sens (la << force >> ou la
) de l'événement par lequel nous adressons cette signification à un autre (cf. p. [73] et [99D. On peut discuter sur le choix des termes ( specifier r> et < expliôiter >>, ou ne pas en percevoir très clairement Ia différence : I'important est cependant de noter qu'il exjite une différence entre ce qui est âit (lasienincâiion
d'un mot ou d'une énonciation) et l,attitude qu'on voudrait a;tuellement manifester à un autre en faisant usage de paroles << significatives r>. Nous reviendrons sur ce sujet à la note 34. U81 25. En français dans le texte. [81] 26. Nous avons forgé, comme Austin, Ie terme << comportatif >>. Il s'agissait d'évoquer le comportement humain, selon la définition qu'Austin prôpose, au. moyen d'exemples, aux pages [l5l] et [159]. pour forger ie tèrme behabitive, Austin a méprisé plus que jamais le mode habituel àe formation des mots, et lui a préféré I'euphonie et la concision. Nous n,avons pas hésité à prendre les mêmes libertés en français, d'autant que ce terrne n'apparait surtout que dans la dernière conférence et n,a pâs beaucoup de chances, à notre avis, de er dans I'usage (ni en français, ni même en anglais).
173
NOTES
ll
27. Dire qu'oû est désolé n'est pas ètre désolé, mais n'est.pas nécessairement mentir, non plus. ll se peut que dire << Je suis désolé de ce que... )> soit en réalité la < description > d'un état d'âme qu'on éprouverait àe fait. Mais ce que << fait > cette description, alors, consiite d,oidinaire à présenter des excuse.s .(de sorte que la vérité ou Ia fausseté de Ia < description >> n'est pas ce qui importe le plus). L'énonciation est << conventionnelle ) en ce sens qu'elle est acceptée sans qu'on attache trop d'importance à la présence ou à I'absence de l'état d'âme qui, parce qu'oû le decrit apparemment, << devrait > être considéré comme présent, de fait, La << convention >>, ici, est basée sur le fait qu'on éprouve, d'ordinaire, les sentiments dont on parle; mais comme on itilise la présence de ces sentiments pour faire autre qu'en signaler la présence (et quelque chose de plus important que"&os, de renieigner lis autres au sujet de leur existence), on en est venu, pai << convention >, à ne plus faire grand cas de leur présence ou absence véritables. euelqu'uî pourrait << être désolé >), par exemplè, d'avoir écrasé (légèremÈnt) ia main d'un autre, par accident. Mais ilse peut qu'il regrette sa maladresse par simple (parce vanité qu'il fut maladroit). S'il prend conscience, cepéndant,'de ce que I'autre personne a été blessée, et s'il veut réparer au m-oins un peu le tort. qu'il lui a causé, il pourra dire < Je suis désolé >, et faire ainsi I'âcte de présenter ses excuses. Mais s'il croit que I'autre est beaucoup trop sensible et << ne dewait pas >> être affecté par I'incident (l'accident) éo**è il I'est de fait, il pourra peut4tre ne pas éprouver la < désolation > dont il parle. Il ne mentira pas, car ce qu'il veut faire, ce n'est pas dire une <<
vérité
qui lui
mais présenter ses excuscs sinceres; et c'est la convention sociale permettra de négliger ainsi la signifcation des paroles, pour n'insis>>,
ter que sut leur sens. Nous verrons plus loin (note 43) que Ia notion de convention gagnerait à être étudiee plus à fond. Quand Austin dit, présentement, que le èaractère purement conventionnel d'une expression ne suffit pas à en faire une énonciation performative, il semble réduire ce caractère conventionnel à n'être qu'an élément du performatif, parmi d'autres, et non pas le plus important, Il faudrait se demander de quelle conveniion il s'agit (ce'qui n'est pas clair en ce moment!), Cl 28. Enanglais, I'arbitre dit<
>.Nous avons traduitpar<
>, ce qui ne rend pas la tournure anglaise qui peut être intèrprétée à7a fois comme un perlormatif et comme une description de Ia situàtion. Le terme anglais exprime eû effet une decision de I'arbitre (à partir des règles du jeu), et la ûn d'une section du match que I'arbitre a ioti6Ae. pour coiserver en.français la possibilité de cette double interprétation, il faudrait pouvoir substantifier I'impératil << Changez! >> (pouvoir dire, par exemple, que nous voyons en ce moment uz << changez >). U 79. < Au jeu! D est une expression employée au Canada dans les jeux oir I'arbitre donne le signal du dëpart par la parole, et non pas, par eiemtr:le, par un coup de siffiet ou un coup de pistolet. Cette expressiôn rend bien le terme anglais << Play >>, employé par Austin. 174
NOTES
l92l 30. Norry avons traduit par << phémèmc >> le terme phememe employé par Austin. Iæ professeur J. O, Urmson nous disait que ce terme'n'ést pas très fréquent dans les ouvrages de linguistique anglais. On peut Ie trouver, par exemple, dans le livre de Leonard Bloomfield, Laiguage, George Allen and Unwin Ltd., London, 1965, p. 264. (l-a première edtion date de 1933.)
<<. proposition >r présente un vocabulaire normat, mais n'est pas grammaticale (syntaxique). Eu tout cas, il lui manque un verbe, La deuxième < proposition > (qu'Austin a tiree d,un conte de læwis Carroll) respecte la grammaire normale, mais contient plusieurs termes incomus de notre vocabulaire. L'acte phatique doit inclure les deux éléments à la fois : correction lexicale et grammaticalité.
[96] 31. L^a première
1991 32,
Nous avons traduit le terme
angJais
force par le mot valcur. Il
est un peu regrettable que r)ous ayo's pcrdu ainsi l'évocation de I'aspect << dynamique > de I'acte d'illocution, Le terme français possède par contre un avantage assez considérable : la << force >> dont il s'agit ne iéside pas îsrtout dais la constitution ( ontique >> de I'acte (encore moins dansies élérnents physiques, bien qu'ils y soient évidemment pour une part), mais davantage dans le fait que l'acte est ollert au di-sce7ns2ltr1 de queiqu'un. Eo ce sens, il est doté d'une certaine << valeur >,
> qtlj s'imposerait nécessairement à l'interlocuteur.
Il est intéressant
de noter qu'Austin parle de l'exercice de I'acte d'illocution comme d'une tentative povt protoquer fbring aboutl ce qu'on vise à travers lui, à savoir (la plupart du temps) une-compréhension de la signification et dela
<< force > elle-même tp. ltiO:1. Il s'agirait moins de çette- compréhension luptakel par une force pour ainsi dire brutale, que de faire que cette compréhension puisse apparaitre chez ce qui ressemble davantage à la proposition d'une livaleur >>.,, I'autre
faire apparaître
-
[99] 33. I-'acte.qui.est produit en disant quelque chose (i'acte d'illocution)
semble moins lié au caractère < physique I des paroles que ne le serait l,acte de due quelque chose (l'acte de locution). peut-être faudrait-il distinguer ici ies deux << agir >> qui sont à l'ceuvre, et rechercher le tenne visé*par I'acte d'illocution. Austin n'entrera pas dans cette problématique, bien qu'il cherche toujours à reconnaître lout ce que nous pourrioni viser à << faire >>, par nos paroles. U00l 34. Il est assez diflicile de reconnaître quelle conception Austin se faisait de la yaleur d'illocution. Il semble qu'ici, il la distingue de la simple
signification en tenant compte, tout simplement, de la situation ou du contexte oir elle s'exerce. cette << découverte >> de I'influence de la situation sur la signification des paroles n'est-elle pas assez banale aujourd'hui, même si certains philosophes ont pu négliger ce facteur dans le éi Il reste pourtant qu'Austin considère l'échange linguistîque comme iaisant partie du contexte, si essentiel. Bien qu'il n'exploite pas cet élément de la << situation totale >, il attire I'attention ne ftt-ce que par I'insuffisance
-
t75
NOTAS
NOTES
des justifcations qu'il essaye de donner pour mootrer I'importancc de cette <( valeur > d'illocution -_ sur I'importance éventuefie de l'échange lui-même, qu'il mentionne si souvent.
tll6l
40. une traduction plus lirtérale de secwing ol uptake serait la suivaDte : s'assurer de ce qu'un autre ( relève >> (cetà meme que j'ai < jete Oans >
35, Nous donnons ici la traduction littérale d'une expression angJaise dont l'équiva-lent français serait diffcile à trouver. Le sens (la << valeur >) de l'énonciation anglaise serait à peu près !e suivant : va faire ce que tu voudras (des choses ridicules ou impossibles, peu m'importe); tout ce que je désire, c'est que tu me débarasses de ta présence. I-e contexte indique, justement, qu'il serait dificile de percevoir tout ce qui entre en jeu dans I'expression d'une telle énonciation. I 36. Iæ juron angiais << Bloody! >> serait une construction, selon certains, de I'expression moins innocenle << By Our Lady !> (< Par Notre-Damel >). Austin ne semble pas se rallier à cette interprétation. Il est peu probable qu'il y ait des Français qui croient que I'expression << Dame! >> vient de << Par Notre-Dame! >. Mais nous I'avons supposé, pour les besoins de la traduction...
ill7l
41" cette distinctioû entre les < objectifs > et les << suites > est difficile à percevoir. Austin ne veut d'ailleurs qu'enregistrer, ici, certaines *oàaite, des inffuences de la parore. peut4tie pourrioor-noui dire que t;otieuil d'uo acte de discoun est une < conséquence > qui ne dépent pas oe cerui qui a parlé, mais qu'on pourrait néaomoins lui ittribuer'p-ce qu'il a*uit eu de fait I'intention ou l'espoir de le faire apparaître?bn puir.."ii p* contre des << suites >> de son acte, si l'< effet >i-qui est apparu o'uuuit'ete ' prér'u par
.l
( botter
I
37. La traduction littérâle de I'exemple d'Austin serait la suivante un ballon et botter un but >...
I
38. L'acte de perlocution est défini par opposition à I'acte d'illocution. Il est en un sens plus < détaché > de I'agent que ne le serait ce dernier. Ses efets ne dépendent à peu près pas d'un agir conscient de la personne (à laquelle on parle), et ressemblent beaucoup aux effets que I'on produit dans la nature (cf. p, [1 16, 2o]). Par rapport donc aux ( effets >> de I'acte d'illocution (p. [115, ll6]), ils sont plus impréws, (moins maîtrisés par la personne à qui I'on s'adresse). On comprend qu'il en soit ainsi, lorsqu'on se rappelle que I'acte d'iliocution est essentiellement conventionnel, alors que I'acte de perlocution ne I'est pas (cL p. [120, l2l]).
I
:
39. Si Austin a réussi à distinguer I'acte d'illocution de I'acte de perlocution (surtout en attirant I'attention sur le caractère conventionnel du premier), on peut se demander s'il I'a distingué de I'acte de locution. Ce dernier inclut en effet la sîgnifcation (en tant qu'acte << rhétique >); powquoi ne contiendrait-il pas aussi des éléments qui en feraient un acte d'illocution? Austin ne remarque-t-il pas que produire un acte de Iocution, c'est €.r rpso produire un acte d'illocution (p. t98D? Il est wai que le philosophe anglais considère ces différents << actes >> comme de simples abstrcctions tirees de I'acte du discours concrètement situé (p. il460. Il veut simplement souligner I'importance de l'élément illocution de ce discours. Ici, cependant, il note que I'acte d'illocution n'est pas une conséquence de I'acte de locution. eutétre l'acte de perlocution I'est-il, lui qui est défini à partir d'effets non conventionnels, souvent impréws, de la parole considérée pour ainsi dire comme dêjà détachée de sa source?...) Cette problématique nous invite à nous demander de quoî l'élément illocution de la parole serait la
(
source
>)
<<
conséquence
en question.
176
>>,
et quelle serait la nature de la
mes paroles).
ni
[18]
ni visé
lui. Nous reviendrons sur ce iujet a d note
$:
42. L.es actes d'illoculion peuvent être produits sans recours à la parole, c'est-à-dire à la parole vocale ou écrite (lexicare et syntaxique). Ë p.* blématique d'Austin ne lui permet pas d'entrer prui profànéé*Ài ;.i dans l'étude d.ela nature du langage. Notons seulement que si I'acte d;il.locution, d'après Austin, est nécessairement contentionLrei et s'il p"oi ètr" produit sans paroles- grammaticares, la << convention > dônt il s'âgit n;est pas toujours celle d'un < contrat social >> portant sur I'acceptatioî spontanée ou même réflexe d'une rangue (grammaticare) particùière (voir la note suivante),
[l19] 43- cette conlérence nous invite à examiner nous-mêmes, et de plus
le
près,
phénomène de la convention. celre
n'estTcr promettre, même si les circonstances sont ( âppropriees >> (à moins qu'on n'inclue parmi les << circonstances >> la /rôerté àes interlocuteurs!). Dire < Je promets D est etr efet promettre, mais seulement si je decide librement de promettre, et si mon interlocuteur decide libiement non pas seulement de comprendre mes paroles comme étant une promesse (plutôt qu'autre chose) ; d'accepter 9e qu'il doii faire, évidemment, iu;il i.." souvent malgré lui "t "" envers librement mon engagement lui -_mais comme existant < sérieusement >. ceci suppose que je ÀJcrofu (au moins) libre, et que I'autre me cror'l libre, actuerément. Noui conyenons'non seulement dans des compr.éhensions spontazées de nos intentions reciproques, mais surtout dans ia liberté de notre agir qui, en ce moment, < imptique > une promesse (ou s'exerce ( par > et < dans ,> une promessê;. si on ne considère pas l'élément.liberté d.e I'acte d'iilocution, alors on ne peut pius, semblet-il, le distinguer de I'acte de perlocution. Ll23J 44. L'exemple angiais joue sur les expressions suivantes : Iced ink (Encre g1_acé9)' et I stink (Je pue). Nous avonl dt changer ra première rnprèirio", atn de conserver I'assonance visee_en angJais. Cet exemple fait bien ressortir l'<< espace > qu'il y aurait entre I'agir du locuteur et l'<< efet >> subi par I'auditeur, lorsque l'-acte æt perlo"riloir".
ll24l 45.
t77
NOTES
Dans le cas d'un acte d'illocution, I'influence serait exercée plus diatement >>.
NOTES <<
immé-
46. Les lettres Net ,S ont été suggérées par les termes anglais noise lbruit] et say [dire]. 41 47. Austin aænrde ici un << faire > particr:lier à I'affirmation; il insiste sw le fait qu'elle est un acte d'illocution âutant que les performatifs, même si elle a surtout pour rôle d'être waie ou fausse. Celui qui produit une simple affirmation lstatementl ne s'engage pourtant pas dans son acte, de sorte qu'on n'a pas à remarquer que c'est une affirmation < à propos de lui-même >>. Iæ sujet << s'efface >>, pour ainsi dire, et présente à I'auditeur 61
une a.fÊrmation < objective >>. S'il a des intentions ou des buts en produisant son afrrmation, ils doivent demeurer secondaires par rapport à I'affirmation en tant que telle. Austin ne se demande pas pourquoi quelqu'un voudrait ainsi << s'effacer > devant la vérité < objective >, Il s'efforcera plutôt de montrer, plus loin, que la notion de vérité n'est pas simple, que I'affirmation de la vérité doit tenir compte de nombreuses circonstances pour être < correcte > ou << juste >.
/f
48. Nous avons écrit ( rat >, au lieu de chauve-souris fbatl, afin de çonserver I'assonance qui rendait plausible le lapsus.
ll
49. Puis-je affirmer seul? Faut-il prendre au sërieux ce doute émis par Austin? On pourrait répondre que si personne ne m'entend, alors je ne réussis pas à conduire mon affirmation à terme; mais j'aurais tout de même affirrré << de moa côté >>. Austin a bien dit que l' << auditoire > pouvait être celui qui parle lui-même (P, p. 88, note l). Mais le doute ne persiste-t-il pas? N'est-il pas accru, plutôt, par la considération de ce dernier cas? Nous faudrait-il simplement cot staler que nous nous comportons ainsi, laissant inexploré cc phénomène (du so/iloque), ou le considérant comme un fait pur et simple n'exigeant aucune (< justification >>?<< Il semble,au contraire, que croire aux autres, à I'autorité et au témoignage, soit un élément essentiel de I'acte de communication. Cet acte constitue une part irréductible de notre expérience, tout autant, disons, que le fait de promettre, de participer à des jeux, ou même de percevoir des surfaces colorées. Nous pouvons énumérer certains avantages qu'il y aurait à produire ces actes. [...] Mais nous De saurions nullement << justiter > le fait même que nous las produisions > (P, p. 83). Austin n'a-t-il pas abandonné la partie un peu trop vite? 50. Q.ran6 Austin reconnaît l'absence d'objectif de la perlocution spécifquement associée à I'afirmation, veut-il dire qu'elle o'en a pas concrètement seulement abstraitemcnt (c'est-àdire er ce sens qu'on pourrait - ou toujours lui en donner plusieurs, très différents, lorsqu'on la produit)? Nous croyons qu'Austin ne voit pas quel << objectif > I'affirmation pourrait viser. (On a un exemple de cette incertitude d'Austin, à la page [45], oir il parle de I'a$rmation << I-e chat est sur le pnill4sson > produite << apparcmrncnt sans raison>>...) Mais le fait qu'une affirmatioa n'ait pas d'objectif
'l
178
pe,rlocutoire sigrrifie-t-il qu'auÇun rerme ne soit visé par ellc? cc n'cst pas tellement la chose (visée par I'alûrmatioo de véritês) qu. oous
à découwir, mais plutôt re sera qu'aurait l'a.ffirnratiori oe verltes "*lôo, aao, no! vies, surtout si ces vies étaient consacrées à la rcchercbc ac È verite soi-disant << pour elle-même >>. ll39l 5l' sans doute une allusion à-la position du professcur p. F. strawson, qu'Austin a attaquée plusieurs fois dans scs artièbs (cf. p, p. l0O, t02-122): ll52l 52. Expressions employéas au jeu de basebal/. ces termes o'existent
pas
en . Au canada, où c€ sport est pratiqué, on a forgé les expressiôos (( Mort! >> lout!1, < prises >> lstrikesl er baUes >i ltatts). t1571 51 Nous avons ici un autre exemple de la distinction entrc la simple affirmation (affirmer- << seule.ment >) et I'assertion (cf. note r+1. ,c.usiin fait remarquer que la simple affirmation (qui coosistc e seut"Àeii-aira
i
que
j'ai unc certaine inteltion)
équivaut piesque toujoun Wrrir"ttyl I )r ou <( annonce > de I'intcniion, c'ét.àdire uo certain engagement, uûe certaioe prisc de poiitioo. r"r"it si ot une assertîon;
il y a < declaration
engagement est toujours exprimé sinon â quetqu'un, du moins devaat quelqu'un, on peut se demander si Ia simpre afÈrmition n'cst p.s on de I'acte qui serait toujours une assertion, c'est-à{.irc un ccituin ;s"s."rpect ment envers quelqu'un, un agir (une illocution) visaot quelqu'un, tiellement.
&in-
LEXIQUB
Exercirifs (exercitives) : énonciations consistant à donner une decision pour ou contre une certaine façon d'agir, à inciter les autres à se compor_ ter de telle ou teile façon. Ir s'agit d'ure decision a"'q.ri deyra ou devrait ètre, pJutôt que d'un jugement sur ce "on...nuo, qui est, préæn-
Lexique
tement.
Expositifs (expositives)
Àfirmation (statement) : les philosophes ont trop longlemps considéré I'afirmation cornme une énonciation dont la seule caractéristique serait de décrire une situation, ou de rapporter un fait, et d'êtrepar point, c'est tout. Austin en est venu conséquent waie ou fausse - un une énonciation produite dans un à considérer I'affirmation comûle contexte el faisant quelque chose, essentiellement, ne ftt-ce que <( décrire > une situation sans que celui qui << affirme > prenne position ou s'engage
de quelque façon. (Si un tel engagement a lieu, on parle d'assertion, plutôt que de simple affirmation.) Comportatifs (behabitives) : éoonciations qui expriment une réaction à la conduiie et au sort des autres, ainsi que des attitudes vis-à-vis du comportement antérieur, ou simplement prévu, d'autrui. Constatifs (constatives) : énonciations qui, par oppositioo aux performatifs (cf. ce mot), ne feraient que d&rire (ou affirmer sans decrire) un fait ou un ( état de choses )>, sans faire, vraiment, quelque chose. En ce sens, les constatifs ne < feraient >> que dire quelque chose. Échecs (infelicities) : tout ce qui, s'il se produit à I'occasion d'une énonciation destinée à/ar'ra quelque chose (parier, par exemple,. ou se marier, ou avertir, ou même << affirmer >>, etc,), a pour effet que l'énonciation ne soit pas aceomplie ayec << bonheur )>, c'est-à-dire n'atteigne pas du tout son but, ou I'atteigne nral. Énonciation (utterance) : la production (surtout orale) d'un acte de langage. (Le langage est ici considéré comme une activité consciente et spécifiquement humaine, excluant, par exemple, les interjections spontanées les jurons, etc. ou les sons que produirait un singe et qui évoqueraient uoe parole humaine.) Austin emploie le terme utterance à peu pres uniquement pour ua acte produit actuellement, une activité.
-
-,
C'est pourquoi nous avons préféré le rendre en français par le mot ênonciation >; < énoncé >> évoquant peutétre un peu trop le <( contenu )) de l'acte, et laissant de côté ce qui peut être << fait > en plus de Ia manifestation du < couteûu >.
<<
r80
:
énonciarions servant
à exposer une façon
de
voir les choses, à développer un argument, à clarifier l,usage que |,on fait des mots, ou cela même à quoi ils renvoient. *Illocution (illocution) : un acte qui, en prus de tout ce qu'il fait en tant qu'il est aussi une rocution (i.e. cn tant qu'ir dir querque chose), produit quelque chose EN disant (d'oir le préfixe rI). pour mieux comprendre
.
cette notion, ra comparer avec les notions de locution et de perlàution. Locution (locution) : un acte langage qui consiste simplement à produire des sons appartenant à-deun certain vocaburaire, organi*s seron res
prescriptions d'une certaine grammaire, et possédant une certaine signification (c'est-àdire des sons emproyés dc Ia façon déjà indiq;ée, mais auxquels on donne aussi un certain <( sens )) et une certaine << réfé_ rence >r)' L'acte de locutio-n n'est donc qu'an aspect de la parole, faisant abstraction de ceux qu'elle présenterait en tant qu,ilrocution ou perlocution : c'est tout simplement l,acte de dire quelque chose. - Performatîfs (performatives) : énonciations qui, abstraction faite de ce qu'elles sont vraies ou fausses, /or, querque chose (et ne se contentent pas de Ia dire). ce qui est ainsi produit est effectué en disant cette même chose (l'énonciation est alors une ilrocution), ou par le fait de la dire (l'énonciation, dans ce cas, est une perlocution), ou des ar* iæon. à la fois. -Perlocution (perlocution) : un acte qui, en plus de faire tout ce qu'il fait en tant qu'il est aussi une locutian (i.a. en tant qu'il drr quetque ctose), produit quelque chose << pAR le fait >> de Oire (d,oir t" pienu prrj'. ce qui est alors produit n'est pas nécessairement cera rnême que ce qu'on dit qu'on produit. (<< Je t'avertis >>, par exemple, est une -perlocution si celui à qui je parre est efrayé et non simplement averti
-
par tnes paroles.)
-
Promissifs (commissives) : .éno-nciations qui visent à obriger cerui qui parre à adopter une certaine façon d'agir, à s'engager ou à se compromettre. Ql est évident que ce terme ne doit pas évoquer seuremeit ra simple promesse.)
,sens (sense) : terme assez vague
qu'Austin emploie en rervoyaût à I'usage que les philosophes en feraient. sans doute s'agit-il du << contenu >> àe 181
LEXIQUE
ce qui est dit, des paroles elles-mêmes, ou des expressions, par opposition à ca doÀt oD parle, et à quoi on renvoie (i.e. au terme de << réfé-
Index'
rence >).
Signifcathn (meaning) : lerme qu'Austin ne définit pas très précisément, se contentant d'en appeler à l'emploi courant qu'on en ferait, savoir : I'ensemble constitué par le <( sens > (déûni plus haut) et la << référence r> (ou renvoi) que I'on rattache aux paroles qu'on emploie. Valeur (forcx,) : caractère donné à un acte d'illocution, en vertu duquel cet acte (qui comporte déjà une << significetion >) doit être compris en ce momenî de telle façon bien déterminée (comme un cozseil de partir, par exemple, au lieu d'un ardre de partir). On pourrait parler alors du seru d'une illocution (comme synonyme de valeur); mais il faudrait distinguer, selon Austin, entre le ( sens > de nos << locutions (il s'agit de partir, par exemple) et leur < valeur > en tant qu'acte d'illocution (il s'agit, par exemple, d'un conseil, plutôt que d'un ordre).
Abus (abuses), 16, 18.
Accrocs (hitches), 17, lB, 3G3g, 137.
Affirmation (sratenenr),1 (et par-
>>
l/erdictifs (verdictives) : énonciations qui consistent à exprimer ce que I'on a constaté (officiellement ou non), à partir de l'évidence ou des raisons concernant les faits ou leur caractère axiologique. Il s'agit d'actes judiciar'res, plutôt que législatifs ou exécutifs.
sim).
Appels indus (misinvocations), 17,
t8,2634.
Assertions ( assertions ),6, 40, 50, 96. Circonstances ( circunutances) , 8?1 13:16' 2t' 26-2e, 34, 39, 40, 92, tt4, t36, 139, 144,145. Comportatifs (behabirives), Bl, 93, 85, 86, 88, 150, 151-161. Constatifs (constatives), 3 (et im).
24,26, 28,31, 38, 80, 81, l0g, l16, l1g,
102: 120, 121, 127, 136.
(faws),17, 18, 137. (Wttcities), 1445, 51,84,
Défectuosités I
35-l
l5Gl6l.
lt9,
14I,
Explicites, performatifs (explicit performatives), 32, 33, SffiS, 68-90, 94, 108,
ll5,
130, 148:
150.
Ex,positifs 88,
( expositives)
ll9, t5Gl6l.
, 80, 95,
Illocutioo (illocution), 91, 98, gg13t, l4+150.
Insjncérité (insincerity),
Ig,
,14,50, 55, 80, 135-150, 159. Insuccès ( misfires) , 16, lB, 24,
laisser enten&e (imply),
3g-
48-54,
I 35.
Co-nvention (con'rention), 14, 19,
Êshers
Exercitifs (exercitives), 5,
6
1.
Emplois indus (misapplications),
17, lg, 29, 34.35, 42. Énonciation (utterance), Z (et pas.rin).
Entraine ( entails), 47-54. Exécutions ratexs (misexecutions), 17, Ig,35-39.
Locution (locution), 94,
99-109,
113-116, 120, 145-146, l4g.
Performatif (performative), im).
4
(et
Perlocution (perlocution), 99, IOI-
t3l,
138, 144.
Phatique, aste (phatic act), gZ, 95-99, ll4, 120, 124, 129-110, t46. Phème (pheme), 92, 97, 99. Pbonë (phone),92.
Phonétique, asle (phonetic act), 92,95,
ll4.
.. - I-{9q" avons rédigé cet index gn rr-ous inspirant de celui que M. Urmson a inséé à la fin de son édition an_glaise. I_es cbihrÊs;"r"iirla]même éditioa (chez nous entre
I l), G.L,
183
;;;;Ë;";
INDEX
Phrax (sentence),1,6.
Ruptures (breaches), 18' 135'
Présupposer (presuppose), 20, 4853, r36. Primaire, énonciation ( pr imary utte' rance ), 32, 5G65, 69, 7 l-84.
Sens (sersel, 93,94,99,
Promissifs
(
commissives), I
19'
15O'
t6l.
ll5'
116.
93,
94,
98, loo, 104, 108, 116, 148'
Yalew (force), 13, 76, 99, lM'
Du positivisnte logique à la philosophie du langage ordinaire: naissance de la pragmatique
108, l14, l16, l2o, 134,145,147I 50.
Rhème (rheme), 93, 97, 98.
Rhétique, aete (rhetic act), 93'97, I 14, t 15, 124, 129,
Signitication (meaning),
t30.
Verdictifs (verdictives), 88,
l&,
15Gl6l. Yêrité ( truth), 139-148.
Austin était un philosophe analyrique, et la philosophie analyrique, çomme chacun sait, attache une importance particulière au langage : Dumrnett déllnit même la philosophie analytique cn disant, que la philosophie du langage y joue le mêmc rôle de fondemenr que jouait la théorie de la connaissance dans la philosophic classique'. Je ne discuterai pas ici cette thèse de Dummert, et jc ne chercherai pas non plus à expliquer le privilège accordé aux problèmes du langage dans la philosophie andytique". Mon propos, beaucoup plus limité, consistrera seulement à sit.uer, par rapport. à la philosophie analytique antérieure, le principal apport. d'Austin à la philosophie du langage: la théorie des actes de parole, exposée dans Quand dire, c'est faire"'. L'intérôt de la philosophie analytique pour le langage a longremps été indissociable de son inrérêt pour la logique. La logique maùématique et la philosophie analyrique sonr, à I'origine, solidaires. Les mat.hématiciens-philosophes Frege er Russell, pionniers de la logique mathématique, sont aussi les fondateurs de la philosophie analytique, et la logique a tenu une place absolument essentielle dans ce que j'appel-
lerai la <première analyse>, c'est-à-dire la philosophie analytique
jusqu'à la Deuxième Guerre mondiale;
il n'est pour s'en convaincre que de regarder quelques articles dans les revues de l'époque, ou de
* Michaël Dummctt, Frege : Philosophy of Language, Duckworrh, 1971, p.666 sq. ** J'ai abordé ce sujet dans < Pour la philosophie analytique >, tn Critique ^ no 444, 1984. *** La présente.postface reprend,. avec des modifications, le texæ d'un rapport sur <.la pcruée d'Au_stin et son originalité piu rapporr à la philosophie analytiïue antérieure > présenté en janvier 1985 lors-d'un'iolloque ôrganisê par le éenire de philosophie dl' droit de_ I'universiré Paris-II. OnLout,Ëra le Ëxre original du rapport dans les_actes du colloque.: Théorie des actes de tangage, âËique et d,roit, volume publié sous la dirèction de paul Amselek, parii ËùR tSbO. 185
POS'I1;ACE
F3STFACE
feuilleter les æuvres de Camap, une dcs grandes figures de I'ancicnne dans la analyse. La logique joue encore, de nos jours, un rôle central contempophilosophie analytique, et bien des philosophes analytiques ,uin, purml les plus imporhnts sont aussi
, fut I'un dcs deux plus illustres repré,.nùnm (l'autie étant Wittgenstein). A cette époque, I'intérôt des
philos
.
'
"R't'époqut
de la prcmière analyse, on concevait un système logique _ par exemple le système dcductil semi-formel présenté dans les Principia Mathematica de Russell ct Whitehead - comme un langage' avec les son vocabulaire et ses règlcs syntaxiques de bonne formation pour
et exprcssions complexes ct les propositions. La structure transpalente
des langages artificiels de la logique en faisait un objct pour la philosophie du langage: les philosophes étudiaient tcl problème philosophique, par exemple celui de la structure en des propositions, à travers le sysæme des Principia Mathematica et ûaient des enseignements concernanl < le langage > en général' L'idée
"*pli.ir" d'étucle privilégié
de base était que tous les tangages existants, qu'il s'agisse des langues naturelles ou des langages artificiels fabriqués par les logiciens, sont des manifestations, des réalisations, voire des incamations d'une chose unique: <, le r> langage. C'est < le > langage que les philosophes étudient lcrrsqu'ils etuOient les langages artificiels de la logique' Ceux-ci foumissent un accès plus direct à celui-là que ne le feraient les langues natureltes, c'est-à-dire le langage de tous les jours, car le langage ordi-
naire est obscur et compliqué: ses apparences sont trompeuses' et sa structurc - fondamentalement la structure < du > langage, dont il est une incarnal.ion parmi d'autres - n'apparaît pas de façon lransparente' En bref, le langagc ordinaire ne se distingue des langages artificiels de la logique que Par ses défauts. Cette iOeà < du > Iangage unique par-delà ses divenes manifestations 186
n'a, à vrai dire, pas duré très longtemps'. L'idée d'une pluralité véritable des langages possiblcs s'est rapidement imposée aux logicicns confrontés à la diversité dcs systèmes logiques. Du coup, l'attitude négative vis-à-vis du langagc ordinaire perdait une partie de sa raison d'être. Mais cette attitude n'a disparu, ou du moins n'a été combattue, qu'avec la
<
philosophic du langagc or<Jinaire >.
Vis-à-vis des langues naturellcs, les < philosophes du langage ordinaire > adoptent une attitude positive : ils cherchent à décrire leur fonctionncment plutôt que de lcs critiquer Au nom des langagcs artiliciels érigés en modèle de tout langage. Ils parlent de la < logique propre > au langage ordinaire, qu'ils opposent à la logique des Principia Malhematlca. I-r-S revues philosophiques des années cinquantc sont pleincs des débas et polémiques enre partisans de la < logique >, qui adoptcnl une attitude réformatrice vis-à-vis du langage ordinaire, et les partisans dc celui-ci, qui veulent le décrire sans le réduire à un modèle a priori.Cette guerre, soit dit en ant, a fini par connaître un tcrrne. Ils formalistes, sous I'influence des philosophes du langage ordinaire, ont adopté à leur tour une attitude positive vis-à-vis des langues naturelles, et, s'inspiranl souvent des travaux dcscriptils des philosophes du langage ordinaire, ont entrepris de construire des langages logiques ressemblant de plus en plus aux langues naturelles. L'emploi de méthodes formelles issues de la logique mathématique a cessé d'aller de pair avec une attitude éformatrice vis-à-vis du langagc ordinairc, et la linguistique contemporaine a largement profité de ccs nréthodes, tout comme elle a prolité, très naturellement, des recherches des philosophes du langage ordinaire. C'est en pragmatique quc les travaux des philosophes du langage ordinaire ont eu le plus d'influence sur la linguistique contemporaine". La raison en est que les philosophes du langage ordinaire mettaient I'accent sur tout ce qui distingue les langues naturelles du < langage > des Principia Mathematica: or c'est I'importance de la dimension pragmar.ique dans le langage ordinaire qui constitue la principale dillérence entre les deux.
*Voir mon article .La langue
universelle et son "inconsistance">, in
Critique n" 387-8, l9?9.
** !a pragmatique est cette sous-discipline linguisrique qui s'occupe plus particulièrement de I'emploi du langage dans la communicadon. Voir mon article ,. La communication linguistique : du sociologique au cognitif ", n Encyclopédie de la Conununication, dirigée par L. Sfez, Paris, PUF, à paraîre. 187
POS'ITACE
Pour les philosophes dc I'ancienne analyse, les phrases représentent des états de choses et sont vraies ou lausses selon que ces états de choses sont réels ou ne le sont pas. A cela les philosophes du langage ordinaire objectent que, dans les langues naturelles, ce ne sont pas les phrases en tant qu'entités grammaticales qui représentent. des états de choses et sont vraies ou fausses: on se serl des phrases, dans un contexte donné, pour dire des choses vraies ou fausses. Il faut distinguer la phrase en tant qu'entité grammaticale et l'énoncé fait au moyen de cette phrase: c'est l'énoncé conlextuellement situé, non la phrase, qui représente un é|at de choses et est vrai ou faux. La référence des éléments indexicaux, qui joue un rôle dans la détermination de l'état de choses représenté, étant relative au contexte d'énonciation, la phrase elle-même ne représente aucun é!a! de choses in vacuo, mais seulement en contexte*, L'indexicalité est une des choses qui distinguent les langues naturelles du langage des Principia Mathemetica, et elle oblige à distinguer la phrase (sentence) et le swtement qui résulte de son emploi discursif '*. La dimension pragmatique est ainsi introduite: Ies phrases sont des ourils dont on se sert dans le discours pour représenter des états de choses et faire des affirmations vraies ou fausses. Parallèlement à cette théorisation de I'indexicalité, les philosophes du langage ordinaire ont mis I'accent sur la diversité des emplois discursifs des phrases. Dans le langage ordinaire, il y a des énoncés qui sont des affirmations, d'auues qui sont des ordres et d'aures qui sont des questions. Les différentes fonctions que peuvent prendre les énoncés sont formellement marquées dans les phrases du langage ordinaire: il y a des énoncés impératifs, déclaratifs, interrogatifs, etc. Rien de tel dans le
> des Principia Mathematica, où tous les énoncés (en laissant de côté les définitions) sont des affirmations. Or lorsqu'il n'y a qu'une fonction, lorsque toutes les phrases sont des affirmalions, on a tendance
*Les <
ceci >,
expressions indexicales sont des expressions comme (je)>, <
r, don! la référence varie avec le contexte. Là-dessus,
< maintenant >>, etc.,
voir le_chapiue vltl de mon livre intitulé LaTransparente et l'Enonciation,
à ne plus distinguer la phrase et son emploi pour faire une affrrmation: les deux paraissent se confondre irréductiblement. pas étonnant, donc, que I'ancienne analyse ait systématiquement négligé la distincrion phrase/affirmation. L'idée qu'il exisre une gamme d'actes de parole qu'on p€ut accomplir au moyen du langage n'est pas nouvclle: on la trouve chez Aristote par exemple. Elle a été longuernent dévcloppee, avant Austin et la philosophie du langage ordinaire, par des auteurs comme Bùhler en Allemagne et Gardincr en Angletcrre, tous deux très attentifs aux aspects pragmatiques du langage'. Mais c'cst dans la théorie des actes de parolc d'Austin, exposée dans Quand dlre, c'est fairc, que cette approche ( pragmatique > t-rouve son exprcssion classique. Austin ne semble avoir lu ni Btihler ni Gardiner, et la principale inlluence qui a poussé les philosophes du langage ordinaire dans le sens d'une mise en relief systématique des aspects pragmariques du langage est I'influence négative des anciens analystes qui, par leur désintérêt systémaûque vis-à-vis de ces aspects, ont entraîné une sorte de réaction dans I'autre sens. plus précisément, les philosophes de I'ancienne analyse onr pour ainsi dire délimité, par leurs rcjets mômes, ce qui allait devenir le terrain d'investigation des philosophes du langage ordinaire. Austin, en ce sens, est I'héritier (presque) direct des posirivistes logiques, auxquels il s'oppose. C'est ce que je vais essa)'er de montrer maintenant.
Pour lcs philosophes de I'ancienne analyse, c'est un < défaut > que, dans le langage ordinaire, toute phrase ne soit pas vraie ou lausse. Cette impossibilité d'identifier la phrase et I'aflirmation vraie ou fausse a pour
première source I'indexicalité: une phrase indexica_le, in vacuo, n'exprime pas une
complète, et elle n'est donc vraie ou
lausse que relativement à un contexte. Il ne fait guère de doute que, selon Frege par exemple, I'indexicalité est un défaut comparable à I'ambiguïté. Les phrases du langage ordinaire, du fait de ce défaut, ne
Paris. Ed. du Seuil, 1979. ** La disrincLioî sentence/staternen! esl exposée notarrunent dans P.,F. Strawson, << On Referring >, LIind vol.59, 1950 (trad. fr. dans Strawson, Etudes de logique et de linguistique,Paris, Ed. du Seuil, 1977), et dans J.L. Austin, .. Trutfi o, Proc.eedings of the Aristotelian So.ciety, suppl. vol. 24, 1950 (Ead. fr. dans Austin, Ecrits philosophiques, Patis, Ed. du Seuil, à paraître). Voir aussi Y. Bar-Hillel, < lndexical Expressions >>, Mind vol. 63, 1954.
Bùhler, Spracl'rheorie, Fischer, 1933; Alan Gardiner, Thc Theory of ^ K.*land Speech Language, Clarendon Press, 1932. Signalons la uaducrion frunet Acte çais.de cet inrportant ouvrage de Gardiner qui préllgure Austin: Iangage"tt de lang?ge - Aux .sources de Ia pragmatigue, rraduit et présenté par Catherine Douay, ftesses universitaires de Lille, I 989.
188
189
*
PtstrAcE
POSTFACE
sont pas de rraies phrases, au sens logique. Mais I'indexicalité n'est pas la seule chose qui, dans les langues naturelles, empêche d'identifier la phrase au sens gftrmmatical et la phrase au sens logique, c'est-à-dire I'affirmation vraie ou fausse : il y a aussi le fait que les langues naturelles tolèrent ce que les philosophes de I'ancienne analyse appellent le < non-sens ,r. Or, comme on va le voir, une vérirable légitimarion du < non-sens > va s'effectuer peu à peu dans la philosophie analytique, et la philosophie du langage ordinaire, avec son accent mis sur la dimension pragmatique du langage et sur la nécessaire distinction de la phrase et de l'énoncé, est en quelque sorte I'aboutissement de ce mouvement progressif de légitimation. Une phrase comme ?< Le nombre 3 est bleu > est syntaxiquement correcte, mais elle n'a pas de sens: elle ne représente donc aucun état de
choses déterminé et n'est ni vraie ni fausse. C'est un défaut de la grammaire des langues naturelles que de permettre ainsi d'engendrer du non-sens. Les énoncés < méuphysiques > de Hegel, Bradley ou Heidegger sont, aux yeux des néopositivistes, un exemple de non-sens rendu possible par le fait que la syntaxe des langues nalurelles n'est pas une ( synl.axe logique >. La langue idéale des logiciens, en revanche, << ferme la bouche aux ignorants >, suivant le mot de Leibniz: elle exclut de la grammaticalité les énoncés logiquement inacceptables.
On pourrait mettre en question, comme I'a fait J. J. Katz', I'analogie
entre les énoncés métaphysiques et les phrases sémantiquement déviantes du type de < [æ nombre 3 est bleu >. Quoi qu'il en soit de ce
point, il y a dans les langues natureiles d'autres phnases qui ne sont ni vraies ni fausses et que les positivistes logiques réputent en conséquence dénuées de signification, quand bien même elles ne le sont assurément pas au même titre que << Le nombre 3 est bleu >. Prenons une phrase comme : < L'énoncé qui figure p. 2 ligne 5 du Traité de Logique Cornulaire est faux. > Cette phrase n'est pas indexicale, et elle n'est pas dénuée de signification: on voit rès bien quel t1,pe d'a{Trmadon vraie ou fausse on pcut faire avec cette phrase. On arrive difÏicilement à imaginer dans quelles circonstances une phrase comme
pourrait être réputee vraie (ou fausse), mais en revanche on sait que la phrase citée plus haut est vraie si et seulement si un énoncé faux * J. J. Katz, La Philosophie du langage, Paris, Payot, 1971, p.43. 190
figure à la ligne 5 de la deuxième page du fameux Traité:on sait, en un moq comment < vérifier > cette phrase, pourtant, si cette phrase ap,paraît dans un certain contexte - en I'occurrence p.2 ligne s au rràiu a" Logique cornulaire - eile donne naissance au paradoxe du Menteur et n'est ni vraie ni fausse: elre ne penmer pas, cans un tel contexte, de faire une véritable affirmadon, eile n'exprime aucune pensée. cela pose un problème ici de dire que la phrase, en ranr que phrase, n,a pas à" ,"nr, puisque la même phrase peut être udtisée pour faire une affirmation vraie ou fausse; mieux vaut dire que dans'ce conrexte elle ne permet aucune alfirmation. La phrase, en [ant que phrase, possède une signilication, mais néanmoins cette phrase, énoncéÀ dans un certain contJxæ, ne permet. pas de faire une authentique affirmation vraie ou fausse. En d'autres termes: la phrase a une signi{'ication, mais l'énoncé de cetæ phrase dans ce contexte ne véhicule aucun < sens cognitif)>, aucun conrenu informationnel, le sens cognirif ou contenu infoÀationnel étant délini par le fait que seules les affirmations vraies ou fausses en ont un. Des phrases sémantiquemen! déviantes comme < Le nombre 3 est bleu > n'ont pas de sens cognitif, et il en va de même de l,énoné du Menteur bien que la phrase qui donne naissance au paradoxe ne soit pas, en tanr que phrase, sémantiquement dévianre. Il s,igir là de deux tylres de << non-sens > différenrs, I'un qui apparaît au niùau de la < ph;;_ llp. '' I'autre qui apparaît au niveau- de l'occurrence, au niveau de, l'énoncé'. Mais il y a un troisième type de phrases qui, dans les langues naturelles, ne sont ni vraies ni fausses et sont par conséquent denuée"s de sens cognitif : ir s'agit des phrases impérarives, optatives, interrogatives, etc' En ce qui les concerne, butefois, ir est diJliciie de continuer i parrei de << non-sens ), parce que cela impliquerait une sorte de défaut des phrases non déclaratives, analogue au àéfaut des phrases sémantiquement déviantes ou des énoncés logiquement paradoxagx. or les phrases non déclaratives ne présentent aucun défaut de ce genre. L absence de sens cognitif n'est pas un défaut dans leur cas, car, confrairement aux énoncés des métaphysiciens, les énoncés non déclaratifs ne prétendent pas avoir un sens cognitif. Les énoncés imSrarifs, par exemple, ont un sens << instrumental ) ou < pragmatique >, et ne prétendent à rien d,autre. Il ne s'agit plus de non-sens, mais d'un aut e t),pe de sens. -.--,S:.1 chap. lv.
la distinction rype/occurrence, voir /.a Transparence et l,Ércntiation, 191
POSTFACE
La catégorie négarive du non-sens, on le voit, fait place à une catégo-
rie positive, celle des aspects pragmatiques du langage opposés à ses aspects cognitifs. C'est dans le livre fameux de Ogden et Richards, The Meaning of Meaning (1923), que ce mouvement de légitimation s'accomplit de la façon la plus manifeste, car les auteurs s'intéressent authentiquement au discours poétique, lequel ne peut être évalué en utilisant les mêmes canons que le discours scientifique ou plus généralement cognitif. La fonction cles énoncés poétiques est, disent-ils, émotive: ces énoncés suscitent et expriment des sentiments, des attitudes'. tæur signification est, comme le dira plus tard Charles Morris, pragmatique et non sémantique. Ces énoncés ne représentent pas des états de choses déterminés, mais ils servent à exprimer des sentiments et à influencer ceux des autres. Quant aux énoncés métaphysiques, ce sont des énoncés poétiques déguisés: ils prétendent Lvoir un sens cognitif alors qu'en fait leur fonction est purement émotive, comme celle des énoncés poétiques.
Ogden et Richards, dans leur livre, utilisent également la distinction des deux fonctions du langage, cognitive et émotive, pour préciser le statut des énoncés éthiques", et la ( théorie émotive de l'éttrique > ainsi ébauchée aura par la suite un succès immense**". Cette théorie, qui assigne aux énoncés éthiques une fonct-ion émotive et non cognitive, permet de sortir de I'alternative naturalisme/intuitionnisme éthique, en adoptant une position tierce selon laquelle les termes éthiques comme << bien >> ne dénotent ni des propriétés < naturelles > ni des propriétés éthiques sui generis et inanalysables: selon cette position tierce, dire de quelque chose que c'est bien, ce n'est pas attribuer à ce quelque chose une propriété, quelle qu'elle soit, mais c'est exprimer une certaine attitude approbatrice à son égard. La théorie émotive en éthique a d'aures âvantages: elle permet de sauver la thèse néopositiviste selon laquelle
tout jugement synthétique est empiriquement vériliable du contreexemple apparent que constituent les énoncés éthiques, puisque çeux-ci cessent de constituer de véritables jugements, et prennent le même statut que de simples exclamations; elle a, en outre, ses lettres de noblesse, car
&
]C.K.
A. Richards, The Meaning of Meaning, Routledge 10'ed., 1949, p.149-150.
Ogden et I.
Kegan Paul,
** Ibid.,p.l25.
FOSTFACE
elle s'inscrit dans le droir fil de la vieille opposition de Hume entre fait
et valeur. Avec la théorie émotive de l'éthique, le domaine du non
cognitif retrouve toute la digniré qu'il avait perdue lorsqu'on se conæntait d'y voir un lieu de rebut pour les énoncés dénués de sens des métaphysiciens. on a là la transition entre les préoccupations du posirivisme logique et celles de la philosophie du langage ordinaire. C'est dans ce contexte, en effet, qu'il faut situer Ia théorie austinienne de la performativité. Les énoncés performatifs sont une auue catégorie d'énoncés non cognitifs légitimes; leur fonction, toutefois, n'.rlp* émotive (consistant à exprimer et à susciter des sentimenb et des attitudes psychologiques), mais sociale. Ces énoncés servent à accomplir des actes < institurionnels >, dans la terminologie de Searle., c'est_à_àke des actes qui n'existent que relativement à une institution humaine. Roquer aux échecs, marquei un but au football, se marier, condamner quelqu'un à trois ans de prison avec sursis, autant d'exemples d'actes institutionnels. on ne peut décrire de tels actes sans faire référence à une convention humaine, car ces actes sont fondamentalement conventionnels. Pour revenir aux énoncés performatifs, cer[aines formules verbales sont associées çonventionneùement à I'accomplissement de tels actes. Pour se marier, pour baptiser quelqu'un, il faut prononcer cer_ taines formules. ces formules étant conventionnelles et arbitraires, leur sens imporæ peu. lvtais il se trouve que bien souvent la formule conventionnelle qui sert à accomplir un cenain acte institutionnel signifie littéralement que I'acte en question est accompli. En même temps que la formule, conformément à Ia convention, pennet d'accomplir l;acte, elle rend expliciæ, en le nommant, I'acte qui est accompri. Ainsi on baprise en dis'ant << Je baptise >, etc. cette propriété étrange de réflexivité distingue les énoncés performatifs au sens strict d'auFes formules conventionnelles servant à accomplir des actes sociaux. Ainsi, on s'excuse conventionnellement en disant < Je suis désolé >, mais la formule ne désigne pas I'acæ qu'elle serr à accomplir; il ne s'agit donc pas d'un véritable performatif, contrafuement à l,énoncé .. Je miexcuse ,, qui non seulement est une formule conventionnelle servant à s'exc -même si les purisæs en réprouvent I'usage - mais qui, de prus, désigne expricitement I'acte qu'elle sert à accomprir. (par la suite, ainsi que nous le
*** 4.J. Ayer défend une version de la théorie émotive en éthique dans -le chapitre vI de son célèbre [anguage, Truth and, Logic, Gotlanca 1936.
*Cf.J. R..Searle., S-peech Acls, Camb,ridge Universiry press, 1969, p.50-53; uad. tt, Izs Actes dz langage, paris, Hermain, 197\ p.St_94. '
192
193
;
POETT'ACË
POSTTACE
verrons plus loin, Ausûn acceptera d'étendre I'appellation "p"tf91uûf> aux énoncés qui ne sont pas
et ne nomment pas I'acte
qu'ilsserventàaccomplir;ilrebaptiseraalors
lès énoncés réflexifs comme . Je m'excuse >.) ce qui intéressait Austin dans les énoncés performatifs, c'est indubivrais ublement le fait que ces énoncés, loin de decrire un fait et d'êrre ( >>' constituent conslatifs qu'il nomme énoncés ies ou faux, comme qui n'est I'accomplissement (la performance, en anglais) d'une action dans Pourquoi' quelque chose' pas similement I'action consistant à dire servent qui non seulement. les énoncés ces condirions, avoir privilégié qui, de conventionnellement à accomplir un acte institutionnel mais Po,urwli trè.s propriéÉ Ié.!çIJS,É? possèdenr ceue plus, 3g*ggJ*Pig
peràuoir,'au moins au dèbur de sa rËfrffiF|, inclus dans les énoncés raisons des Une <Je désolé>? suis formatifs oJe:dgI9qS>) mais non les énoncés < réflexifs > me semble avoir qu'avair Atffilégier > sert à accomplir un acte social convendésolé < suis Je é'té la suivante. je suis désolé) et donnel, mais cet énoncé decrit aussi un fait (le fait que pour ainsi dire' mixte, à ce tire il est vrai ou faux; il s'agit d'un énoncé performatif r-rn j< !mP,.g-ll' tut X mi-constatif et mi-pelfotmatlf -
l1
TÏ^
nologied'Ausdn.'Mais<Jem'excuse>'estd'uneautrenature:onne p.uipu, dire qu'il décrive le fait que je m'excuse et qu'il soit vrai je m'excuse. Selon Austin", ou iau*, car il constitue le fait même que
pourqu'onaitunedescriptionvraieoufausse,ilfautqu'onaitdeux
Mais.un èhor.r, l'état de choses représenté et l'énoncé qui le représente' ne. s'en parle' et il choses dont l'état de constitue performatif énoncé qu'une af!r1adistinguà donc pas. En d'autres terrnes, Austin croyait
tionvraieoufaussenesauraitêtreréflexive(cf.leparadoxeduMenréflexif æur), et il en tirait argument pour ref d'attribuer à un énoncé
que poscomme < Je m'excuse > le statut d'afÏirmation vraie ou fausse,
sèdeencorel'énoncé<Jesuisdésolé>>....Laréflexivité'auxyeux d'Austin, garantit la non constativité'
i J. L. Ausdrl llow to DoThings with]ç!ords' Clarendon Press' 2" ed., 1975; p.79 (ce volume p. 97 sc.). l. t-. a,istin. Ëh'ilosophical Papers, oxford University Press' 2c ed" (iiad. .fr. à paraître uux Éditiont du Seuil), p' 124, noæ 19?0 '- ;;; si-i';n ôulait purler de . vérité p à piopos des.performatift di-lt
"';iëi.
l'
tionnellement pour I'accomplissement de I'acte. Je ne puis pas, moi, vous baptiser ici et mainænant, même si je vous dis < Je vous baptise au nom du Père, etc, >>, Toutes sortes de conditions doivent être remplies, sans compter le fait que la procédure à suivre inclut plus que simplement l'énonciation de la formule.
Austin, comme on s.1it, ne s'est pas satistait de I'opposition performatif/constatif. J'ai déjà souligné que, dans sa théorie, certains énoncés, par exemple < Je suis désolé >, sonl mi-performatifs, mi-cons_qatib_ I-a_-__*découveile {y _fait que torc le9 é_ngnés sont p,lus ou moins perfonnuifs | _ .._.. _ ^l ,., Vâ ccjnTtiire Austin à abandonner I'opposition tranchée qui iui a servi de J a point de départ, et à élaborer une tHorie générale de li parolê
l)
li
conceotion austinicrure,'ii faudrait rccourir à une notion speciale (non constattve,l par btrenne de véiité, relle que la notion dc " vérité d'instauration > élaborée Souriau dans le domaine esthétique'
t94
læ point important est que les énorrés performatifs sont I'accomplissement d'un acte, d'où leur nom. En tant que æls, ils ne sont ni vrais ni faux - un æte a lieu ou n'a pas lieu, mais il n'est pas w'ai ou faux. Austin remplace l'évaluation en termes de vérité ou de fausseté par une évaluation en terrnes de succès (de < félicité >): cn tant qu'acte, un énoncé performatif est réussi ou raté, << heureux > ou < malheureux >. La réussite d'un performatif dépend d'un certain nombre de conditions, les < conditions de félicité >, qu'Austin s'atLache à énumérer'. N'importe qui ne. pcut pas accomplir un acta institutionnel dans n'importe quelles circons- 1 uuces, même en prononçant la formule performadve requise conven-
La dimension pragmatique des énoncés performatifs, c'est-à-dire le fait qu'ils soient des actes susceptibles de réussite ou de ratage, ne sufht pas à les caractériser par opposition aux énoncés constatifs, car les énoncés constatifs possèdent également une telle dimension
+
How to DoThings withWords, p. 1345 (ce volume, p.48-73). r95
POS'TFACE
TOSTFACE
façon informelle et dans la conversation de tous les jours. Au début de son invcstigation, Austin s'intéressait à I'intersection du langage ii et de I'insùtution sociale: il s'intéressait aux actes institutionnels ; accomplis au moyen d'une parole. Puis il s'aperçoit que le langage i lui-même est une sonc de vastc institution, ct que chacune de nos
pragmatique. Il y a infélicité si je dis << Je donne et lègue ma montre à mon frère > alors que je n'ai pas de montre. Mais de Ia même façon il y a infélicité si je dis < Le roi de est chauve )) alors que nous sommes en république. Tout comme le legs, mon affirmation est viciée par I'absence de référent. Affirmer est un acte qui p€ut réussir ou rater, tout comme léguer.
paroles scrt à accomplir un certain acte social - un acte illocu" toire> (illocutionary), dans sa terminologie * semblable par sa / nature aux acles institutionnels dont il est parti. ,---" I
ll y ucertes, une différence ent e lé iegs etJ'affirmation: le legs est un acte institutionnel cxtralinguîdlQï'e,-en i;occurrence un acte juridique, alors que I'affirmation est un simple acte de parole- Mais cette différence, pour importante qu'elle paraisse à première vue, s'estompe lorsqu'on la soumct à un examen plus approfondi, et la conclusion à laquelle on est conduit cstgu'il n'y a pas O" 9tlfsttg: de nature entre les actcs institutionnels d-iln-ôôÉ ët, dèT'autre, des acTes dô ptidlè-ao;;;-;onseiller, interrogèr, averûr, remèrcier, afhrmer, etc. Il est symptômatique, à cet égard, que de nombreuxl., actes aient à la fois une version formelle dans le cadre d'une institution exrralinguistique et une version informelle dans la vie quotidienner,Ordonncr est un acte institutionnel, avec des conditions de J félicité'définies (l'exisænce d'un lien hiérarchique entre le locuteur et I'auditeur, etc.), et l'énoncé << Je vous ordonne.'. >, qui permet d'accomplir cet acte, est un performatif au sens d'Austin' De même, la promesse et les excuscs sont des actes institutionnels, qui peuvent être accomplis suivant tout un protocole, et tant <( Je promets > que << Je vous présenæ mes excuses > sont des performatifs typiques. Mais tous ces actes peuvent aussi être accomp,lis informellement dans la convcrsation quotidienne: on se trouve alors sur un auEe plan, celui des actes de parole, Supposez que nous soyons cn Eain de bavarder en prenant le café, et que, dâns un geste maladrcit, je renverse quelques Souttes sur voEe habit; les gestes réparateurs dont ne manquera pas d'être suivi cet incident seront accompagnés d'un échange de paroles: par exemple, je m'excai vivement, vous me demanderez de vous attendre pendant que vous allez vous nettoyer, je vous promettrai de le faire, etc. Les actes consistant à s'exc, à requérir et à promettre sont ici accomplis informellement, à tire de simples acûes de parole. De la même façon, on peut remercier, interroger, conseiller, affirmer, etc., de façon solennelle et dans le cadre d'une institution précise, ou de
2)
3) Le môme ace qu'on peut accomplir par l'énonciation d'un performatif peut souvent être accompli par I'intermédiaire d'un énoncé <normal>. Ainsi le capitaine qui ordonne cn disant <Je vous ordonne de rentrer dans le rang > peut le faire aussi en disant simplement
. Au lieu dc <Je te promets de le faire>, on pcut dire plus simplement <Je le ferai>, et il peut être clair, quoique ce ne soit pas explicite, qu'il s'agit bien d'une promesse (ou d'un ordre). Ces énoncés, puisqu'ils servent à accomplir
,
196
j
les actes en question,.so!t l performatifs >> eux aussi bien qu'ils ne soient pas explicitement tels. Austin rebaptisc donc < performatifs
-explicitesrr,tes
pç.rlormalifs qui lui ont servi de point de départ, qui paçèdent Ia propriéÉfi"e-îffiëiivIiéJ et il-englobe dana b _c_gg1 catégorie des performatifs (au sbns large) les énoncés qui servent à accomplir le même acte que les performatifs expliciæs et sont paraphrasables par eux (< perforrnatifs primaires >). Dans cette nouvelle terminologie, l'énoncé <Je suis désolé >, dont nous avons vu plus haut qu'il permet d'accornplir le même acte illocutoire que le performatif explicite <<Je m'excuse>, est reclassé comme performatif primaire.
En vertu de la deuxième observatjon, Austin ajouæ à la liste des pcr-
formatifs (ou plus exactement des < performatifs explicites >, dans la nouvelle terminologie) des énoncés comme < Je te conseille... >, <
J'affirme...
>>,
<<
Je t'avertis.., >,
<
Je t'assure... >, etc,, étant donné que
pour lui ces actes de parole sont de même nature que les actes institutionnels du départ: il n'y a pas moyen de tracer quelque part une ligne de démarcation claire entre les actes de parole et les actes institution. nels, les mêmes actes pouvant être accômplis formellement dans le cadre d'une institution ou informellement à titre de simple acre de 197
POST}'ACE
POSTFACE
parole. [æ fait, au demeurant, que des acæs de parole comrr'e afftrmer' conseiller, avcrtir, assurer, etc. puissent être accomplis au moyen d'un énoncé réflexif signifiant leur accomplissement confirme la parenté de à ccs actcs avec les actes institutionnels qui ont servi de point de départ (<Je baprc Austin, et qui peuvent être accomplis de la même façon
parce que c'est la façon la plus < charirable > (comme disent les philosophes analytiques) d'expliquer le fait que la notion d'acte illocutoire qu'il utilise couvre aussi bien lcs actes institutionnels que les actes de parole. Une autre façon, moins charitable, d'expliquer ce fait consisterait à dire âvec beaucoup de commentateurs qu'Austin a fait une confusion, qu'il a mélangé par mégarde des choses qui n'ont rien à voir.
-
tise >, << le tegue >, << J'ordonne ), etc.). Comme, par ailleurs, Austin éænd la performativité aux énoncés qui remplissent la même fonction
que les performatifs cxplicites, tout énoncé constatif entre désormais dans la carégorie des éngncéq-<< pcrformatifs )) au s€ns targe' erl ggqt--=u.l o.m*-e lg-tui1-U"urfi'^'est pamphrasabte,nar' 91 sert à a::o^l;lonstarif "plir le même actcl-ué, iè periormatif explicite qI:[Lgg gu-'iJ fa-it du plus tenable' n'est ainsi, perforrnatif/constatif, . beaii.'f-'opposition moins si I'on prend < performatif > au scns large. \l ' *' I'autre de , Au licu qu'on ait d'un côté les énoncés constatifs et y compns l"t Ï,r*^, les '' ' \ énoncés qui servent à accomplir un acte, lous les énoncés, I ' I e, accomprir un acre. oa môme génàralisa- il{ l-rion u été effectuée, soit dit en ant, à propos de la foncûon émotive: on n'a plus les énoncés cognitifs et les énoncés qui expriment des sentiments, mais tout énoncé, en plus de son éventuelle valeur cognitive' a valcur expressive.. une assertion exprime la croyance de celui qui
*,''
ffi;rTi;ffi;;iu.nt
une parle.) Comme le dit encorc AustinJqgl-élqnc-é-jr une cgrtarqg-:1 {gne énoncé iou .. valcur >) illocutgirqr-bSCSJ.lç-,Slej.qUle âïon sens' Un lomrne < Vous allez rènùèi cncr vo's )) aura, selon le contexte, la force d'une prédiction ou d'une conjecture, ou encore celle d'un ordre' Un énoncé a telle ou telle < force > suivant qu'il sert à accomplir tel ou tel acte illocutoire.
Maisqu'est-ce,aujuste,qu'unacteillocutoire?lln'estpasfacilede
répondre à cettÊ question, car la ttréorie d'Austin à ce sujet n'est nulle
* Cf. C.
A. Mace, . Representation and 198
Expression
',,
Analysis, vol'
l'
1934'
La solution que I'on choisit dépcnd de ce que I'on pcnse soi-même ; peut-on justifier le rapprochement des actes institutionnels et des actes de parole ou ne le peut-on pas? Si I'on pense, comme moi, qu'une ælle justification peut êre fournie, il est naturcl de dire qu'Austin a voulu faire un tel rapprochement; mais si on trouve ce rapprochement injustiI'ié, on acca au conraire Austin d'avoir (involontairement, ceta va sans dire) confondu les deux ty,pcs d'actes. Austin, dans Quand dire, c'est faire, qs_dttt\it jamais_la norion.,. d.lacre jllqçutoire..Ce qu'il e-n dir est exrrôm"rn.n-, r"uô.in, r ii "p0"."11 I'acte illocutoire d'une part à I'acæ < locutoire )), c'est-à-dire à I'acte de Il quelque chose, et cl'autre part à I'acte < pcrlocutoire u. En énonçantf .îi6 < Maintenant, vous allez rentrer chez vous)), j'accomplis un acte locu-ll toire: je dis que vous a.llez rentrcr chez vous. Mais ce n'est pas ce ty?e d'acte qui intéresse Ausrin. Correspondant à cet acte locutoire, à ce dire, on peut avoir tout une série d'actes illocutoires différents: l'énoncé peut avoir la valeur d'un ordre, d'une affirmation, d'une
'
part c^posée de façon systématique. On dispose, pour I'essentiel',des conférences de Harvard, publiées sous le tilr:e Quand dire, c'est faire (llow to Do Things with words), et il faut tout un tfavail d'interprétation pour reconstituer, à partir de ces conférences' une ûéorie que I'on pourrait raisonnablement att-ribuer à Austin. Ainsi, par exemple' tout æ que j'ai dit plus haut sur la parenté qu'il y a entre les actes de parole et les acres igsritutionnels extralinguisilquei est Ie fruit d'une reionstitution. Austin ne dir rien de tel explicitement, mais je lui attribue cette position
-
1
conjecture, d'une permission, etc. L'acte illocutoire, donc, ne se réduit J!|.s=g,t'g_ç-dglir-ç._ll ne s'agit pas non plus, cependanr, d'un acre accompli àu-mo1'en drfïire, car un tel acte est ce qu'Austin appelle un acte ii pcrlocutoire ,. En disant < Maintenant, vous allez rentrer chez vous >, je puis vous soulager, vous convaincre ou vous irriter, vous faire partir ou au contraire piquer votre fierté et vous conduire à resteq etc,: mon énonciation, ainsi, peut avoir toutes sortes d'effes, parmi les-. quels certains que j'ai prévus ct que j'ai cherché à atteindre. L'acte.' , , I. ^i.1../ consistant à produire ccs effers au moyen de l'énonciation (i.e. t'actell' ,':J,,o_ consisûant à vous soulager, à vous convaincre, à vous irriter, à vous j c\L ^-faire partir ou à vous faire resreç tout cela au moyen d'une parole) e* /t / ce qu'Austin appellç-l'agtg pgl-o:q!95, et qui n'a rien à voir, dit-il, avec I'acre illocutoiiê. L%êtèltttiôtiijire n'esr pas fonction des effetsr_ des conSquences, de l'énonciation. !g r,4!gg1 iltocutoire d'une énon- / sr3!19!rse-l9n f p1, dépç1d non de scs .;"réq*".* r*îr O U" eryfbbjg_-i
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POSTÏA(3
telle chose (dans tcl contcxte) revient à accomplir tel acte illocutoire. Ceite thèse de la nature essentiellement conventionnelle des actes illo-
tion suivante : comment se fait-il qu'on puisse accomplir un acte, par exemple promettre, en disant qu'on I'accomplit (en énonçant < Je pro-
qu'il y a une convention telle que dire <Je
cutoires est la seule chose que nous puissions attribuer à coup sûr à Aus-
mets)))? Réponse: parce
tin, car il la formule à de multiples reprises et ne manque janrais d'y insister; mais elle est fort dilficile à accepter et jc voudrais, pour finir, présenter une critique dont elle a été I'objet de la part des philosophes du langage qui ont essayé de donner un contenu précis à la notion d'acte illocutoire.
promets >, Ç'est promcttre, Mais, à la suite des travaux de Grice sur la communication humaine', tout un courant de la philosophie du langage a abandonné cette approche convendonnaliste au profit d'une distinction nette entie, d'une part, les actes communicatifs (les actes de parole à propremcnt. parler).êt, d'autre part, les actes institutionnels, reposant sur des conventions**.,'Une particularité des actes communicatifs, dans cetæ optique, est qu'il suflit pour lcs accomplir de rendre manifeste I'inæn-
-i ('ufi1u-e qui $r_1h è s e -,c_o_1y e ll|g_! ry 1'99__aj g. i tn ss Altt q j g UIig "_ç n _c'9_ conceme_les actes iqq.!4+qa-oSçl5: il y a effectivement, dans bien des
cas, des conventions déterminant que prononcer telle formule (par exemple < Je contre > ou < Trois sans atouts ") dans telles circonstances revient à accomplir tel acte. Mais en ce qui concerne les actes de parole ordinaires, on ne voit pas ûès bien où sont les conventions qui associent au dire ælle ou telle valeur illocutoire. Ce qui fait qu'un énoncé donné est" par exemple, un avertissement n'est cerhinement pas une convention déterminant qu'énoncer telle formule dans telles circonstances revient à avertir. On avertit si on annonce à quelqu'un un danger poten-
tiel afin qu'il soit en mesure de l'éviter.
C*''çst^t. sens de.l'énoncé, le
contexte de son énonciation et les inæn1io;1s du locuteur qui font d'un +. érujnèë-un'âvèiiisdement, pas dés convention s L'aspect < conventionncl > sur Ièquel a tant insisté Austin semble être lié aux actes institutionil est parti et ne peut être généralisé aux actes de parole, quels " 19Js !on1 que soient par ailleurs leurs points communs avec les actes institutioncn qucstion. .nclsMême en ce qui concerne les performatils explicites il n'est pas clair qu'ils soient (sauf dans les cas clairement institutionnels) des < formules > conventionnelles comme << Amen > ou < Trois sans atouts ))**. La thèse austinienne de la < formule > performative, inspiree de la theoric humienne de la promesse, permet notamment de répondre à la ques* Cf.
P. F.
Strawson,
<
lntention and Conyention in Speech Acts", Philosophi-
cal Revîew, vol.73, 1964. Trad. fr. dans Erudes de logique et de linguistique, Paris, Ed. du Se9il, 1977. *+ Voir mes Erwncés Perforrnatifs, Paris, N{inuit, 1981, $24 et im.
200
tion qu'on a de les accomplir par le geste ou par l'énoncé qui révèle cette intention. Cela implique qu'il suilit éventuellement pour les accomplir de déclarer qu'on les accomplit. Ricn de tel en ce qui conceme les actes institutionnels, car pour les accomplir il faut, en plus, que lcs < conditions de félicité > soient. rernplies et", en particulier, que certâines convenûons soient rcspectécs, notammeni en ce qui conceme les paroles qui doivent être prononcées. Pamri les successeurs d'Austin, nombreux sont ceux qui défendent un point de vue non conventionnalisæ et qui lui reprochent d'avoir attribué aux açtes de parole les propriétés spécifiques des actes institutionnels, à cûmmencer par la convenûonalité'.'. Il y a là une sorte de paradoxe historique de la théorie des acæs de parole: Austin * au moins dans I'interprétation que j'ai proposée ne s'est intéressé aux act€s de parole que parce qu' i I s I ui sem bl aie n t i n d i sti n gua blc sj e s tu_ttgggglg,Cui 3gg-s sont au cæur de sa théorie du pçrformarif ; mÈsîn bôn nombre de ceux qui ôna héiit6 d'Ausrin*là iËêôiie des"âctes de parole et en onr fair ce
-
{l!
*L'article séminal de Paul Grice, >, Philosophical Review, vol.66, 1957, a donné naissance à route"Meaning une littérature. Voir ie chapitre r de D. Sperbe-r-et D. Wilson, In Pertinence : Communication et cognitiàn, Puis, Minuit, 1989, et mon article
** Sur ceue distinction, cf. en particulier K. Bach er R_ M. Hamish, Linguistb Comrnunication and Speech Acts, MIT Press, i979. *** Voir, outre I'article déjà cité de Srrawson ("Inænrion and Convention in Speech Acts>), les articles de deux anciens élèves d'Austin: G.J. Warnock, << Some Types of Performative Utterances >, in I. Berlin et al., Essays oa J.L. Austin, Clarendon Press, 1973, et J.O. Urmson,
, Midwest Studies in Philosophy, vol.2, 1977. 201
POST'FACE
qu'elle est aujourd'hui ont rejeté, avec I'approche conventionnaliste d'Austin, I'analogie entre les actes de parole et les actes institutionnels. En ce qui me conceme, je pense, comme Ausrin dans I'interprétation que j'ai donnée de sa pensée, qu'on ne peut pas opposer de taçon radicale d'un côté les actes institutionnels comme le baptême, I'ordre, la promesse, Ies actes définis pau les règles des jeux de société, etc., et de I'autre les actes de parole comme le conseil, I'avertissement, I'affirmation, etc., car les actes de parole sont de même nature que les actes institutionnels et peuvent, comme eux, être accomplis de façon formelle dans Ie cadre d'une institution ou d'un protocole. Je pense, toutefois, que les critiques d'Austin ont raison de souligner que les actes communicatifs ne sonl. pas essentiellement conventionnels, et qu'accomplir un tel acte c'est, avant. tout, rnanifester publiquement une certaine intention. Ma position, ainsi, semble quelque peu contmdictoire: j'ets et je refuse à la fois I'opposition tranchée des deux sortes d'acæs, les actes institutionnels et les actes communicatifs. Mais en fait, cette position n'es! pas contradictoire, car la notion d'acte de parole ou d'acte communicatif est ambiguë : elle renvoie soit à des actes comme I'affirmation, le conseil, I'avertissement, etc., qu'on ne peut, selon Austin et moi, opposer radicalement aux actes institut"ionnels, soit à un dspec, pour ainsi dire minimal des actes illocutoires, qu'il s'agisse des actes de parole au premier sens ou des actes institutionnels. Pour simplifier les choses et expliquer mieux l'ambiguïté dont je parle, j'emploierai désormais (< acte de parole > au premicr sens et .{ j-qtç co,Jnmunicatif> au second. Selon moi, accomplir r,6-Aç_tg rg--ul'-t-Càiîf c'est, et ce q'est qg_e, ,lè_p4ry9l,uJf9_llr!-e-!-!!_Sn .d:q1_ç99!n- type_; mais il peur êrre légitime, ou non, d'exprimer une cefl.aine intention, et I'acte communicatif ne sera légitimé, ou * sancdonné socialement >, que si certaines < conditions de félicité n sont remplies. CetLe distinction entre I'acte communicatif propremenl. dit et I'acte socialement. << sanctionné > s'applique aussi bien aux actes institutionnels qu'aux actes de parole comme I'affirmation ou le conseil. Le président de séance qui ouvre la discussion accomplit un acte institut"ionnel qu'il ne pourrait accomplir s'il n'était pas, en tant que président, investi d'un certain rôle social; mais cet acte institutionnel, qui a des conditions de félicité, inclut un acte communicatif qui lui n'en a pas. Pour ouvrir la discussion ou la séance, le président doitla déclarer ouverte; or cet acte - declarer la séance ouverte n'importe qui peut I'accomplir, même s'il n'est pas le président et si aucune des conditions 202
POSTIIACE
de félicité de I'ouverrurc dc. séance n,cst rcmplie. eu,on soit pompier dc service ou présidcnt, il suffit pour déclarcr la seance ouverte d,exprimer une certaine inænûon. eue cctte inrcntion
*, ,n" aure affaire, une affaire de conditions de félicité, dont il dépend que I'acte soit ou ne soit pas socialement sancdonné, De la même façon, Ie soit légitime ou non
locuteur accomplissanl un âcæ de parole comme l,affirmation exprime une intention l'intcntion de transmettre une information - et une teile intention, t'out comme I'intcntion d'ouvrir ra séance par sa seule énonciation, ne sera légirime quc clans un cerlain contexte. pas plus quc te de service ne peur ouvrir la séance, je ne puis, dir Ausrin, faire ryTpi.. Iégitimcmcnt une affinnation sur un sujet dont est noroire que j,ignore tout. Toutcfois, l'affirnration qui m'esi interdite dans de æiles circonstances est cn tant qu'acte sanctionné sociarement, r'affir-
-
'
'affirmation maùon < légitime > pour ainsi dire, ct non I,affirmaûon comme simple açte communicatif, que.tout le monde pcut accomplir puisqu,il sufiit, pour I'accomprir, cl'exprimcr par son énônciation une certaine intention. Dans cette pcrspecûve, j'inteqprète Aust.in comme disant que les actes _ de parole onl une dimension sociare et quasi institutionne'e en vertu de. laquelle on ne pcur. accomplir légitimement n;irnpor," quel acte de, parole dans n'irnporte qucl conl,exte; Ausrin, en un mot, dit exactement ce que Bourdieu lui rroche de ne pia dire,. Læs actes
,
c€rtâins d'entre eux) incorporent un acte de communication dont l'accomplissement. ne dépend d'aucune condirion de félicité et, a for_
tiori, d'aucune convention. [æs conventions, lorsqu,elles interviennent, interviennent au niveau de I'acte sanclionné. François Récanati CNRS, Paris
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.i'.t':i.d 1]n,'i"n-t ft":*-t
* Pierre Bonrdieu, Ce que parler veu! dire, paris, Fayard, 19g2, p. 105 sg.
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f'..'..
INTRODUCTION PRÉFAcE DE
7
L'Éprpun ANGL^IS
QUAND DIRE, C'EST FAIRE
35
Première conférençe. .
37,
Deuxième conférence .
47.
Troisième conférence
57
Quatrième conférence . Cinquième conférence.
69 79
Sixième confércnce Septième
89
l0l
conférence. .
Huitième conférence
109.
Neuvième conférence
il9
Dixième conférence
r29
Onzième conférence. .
139
Douzième conférence .
r51
l6t Appendice
167
Notes
169
.
Lexique Index .
180 183
POSTFACE
I 85
Du positivisme logique à Ia philosophie du langage ordinaire: naissance de la pragmatique par François Récanati :
r